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[Sérieux] Immigration : questions et débats libéraux


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Le boulot de centralisation des révolutionnaires -l'ultime touche finale- est favorisé par l'usage de leurs grosses couilles par les rois de France depuis plusieurs siècles. Ni le Saint-Empire, ni les rois d'Angleterre au Royaume-Uni, ni en Espagne, les dirigeants n'avaient eu le courage et la volonté de réduire le pouvoir des nobles locaux et par là-même les libertés locales.

Quand les révolutionnaires arrivent, ils ont déjà les pouvoirs de prélever l'impôt localement, des relais politiques importants localement, une armée imposante et des institutions nationales imposantes. Ils n'ont plus qu'à soumettre les langues locales et 2-3 particularités régionales.

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Lire ou relire De Jouvenel et les articles d'Aurélien Biteau sur Contrepoints ;)

Je me permet de me re-quoter :

"De mémoire Oakeshott explique que l'Europe médiévale du XI/XIIème siècle est dominée par ce qu'il appelle la "morale des liens communautaires" : la valeur dominante durant cette période est la communauté et chacun est défini par la position qu'il y occupe. Sachant que cette position respecte un ordre naturel, il est extrêmement difficile pour une personne et pour ses descendants d'évoluer, de voir son statut changer. Cette morale a d'ailleurs une influence sur l'art de gouverner : c'est en effet une activité principalement locale dont le but (à tous les niveaux i.e. du seigneur du coin au roi) est le "maintien de [l']ordre [naturel susmentionné], sa préservation et la lutte contre tout ce qui menace de le déstabiliser".

A partir du XIIème siècle, la population marchande commence à s'enrichir et voit donc sa condition de vie s'améliorer. Les individus qui composent cette population souhaitent donc "échapper" à cette "morale des liens communautaires", à cette organisation corporatiste si rigide de la société et aimeraient avoir le choix de leurs activités, leurs opinions, qu'ils puissent s'associer librement avec qui ils veulent, etc. Bref, commence à émerger ce qu'Oakshott appelle la "morale de l'individualisme", morale qui deviendra une des valeurs dominante à partir du XVIème siècle. Parallèlement à cela, les intellectuels tentent d'expliquer, de justifier cette morale et d'y associer des formes de gouvernances adaptées à son épanouissement.

Autres phénomènes explicatifs : si je me souviens bien des premiers chapitre de Du Pouvoir, l'État au sens moderne se développe aussi avec l'apparition de la Réforme (une preuve supplémentaire que ces hérétiques protestants sont vraiment responsables de tous les malheurs du monde) et de la théorie de la Souveraineté populaire.

En effet, avant cela, le Roi médiéval voyait son pouvoir limité par deux facteurs principaux :

1) la théorie de la Souveraineté Divine, le fait qu'il soit à ce poste par la Volonté de Dieu. Son rôle se cantonne donc à être "l'administrateur diligent du monarque céleste dont il doit en tous points suivre les instructions", l'Eglise veillant à cela ;

2) la "morale des liens communautaires" susmentionnés : le roi est là pour maintenir et préserver l'ordre naturel de la société, ordre qu'il a lui-même à respecter, la Pairie veillant à cela.

Le roi est donc sous le double contrôle de la Loi divine, du Pouvoir temporelle (représentée par l'Eglise) et de la Coutume (représentée par la Pairie).

Or, la Réforme, en appelant à émanciper le Pouvoir temporel de la tutelle de Pape, fait un beau cadeau aux Princes et Rois d'Europe :

1) l'église n'a plus de contrôle sur les Princes et Rois qui se convertissent ;

2) l'église vit dans la menace de voir les Princes et Rois non réformés décider de se convertir et doit donc modérer son contrôle. Elle est aussi obligée de les solliciter pour lutter contre cette nouvelle hérésie.

De même, avec notamment des auteurs comme Hobbes ou Spinoza, se développe l'idée que la Souveraineté des Princes ne vient pas de Dieu mais du Peuple, ce dernier leur ayant transmis son pouvoir, l'ensemble des droits des individus le composant, et ce, par nécessité pratique.

Ces auteurs pensaient naïvement que cette idée permettrait de limiter le pouvoir des Princes, ceux-ci devant être redevables à l'égard du Peuple. Or c'est le phénomène contraire qui s'est produit : les Princes étant les représentants du Peuple, ils l'incarnent et possèdent donc un pouvoir collectif illimité. Un sujet lésé par son Prince doit d'ailleurs se considérer comme l'auteur même de l'acte injuste, le Prince n'étant que son représentant.

La notion de Souveraineté du Peuple permet donc aux Princes, incarnation de ce Peuple, de s'affranchir non seulement du contrôle de l'Eglise (une nouvelle fois) mais aussi de la Pairie et de la tradition qu'elle défend."

Pour résumer : 3 facteurs qui expliquent donc l'apparition progressif de l'Etat moderne centralisateur :

- Apparition de la "morale de l'individualisme" par opposition à la "morale des liens communautaires" qui modifie l'art, la façon de gouverner ;

- Apparition du protestantisme qui sape l'autorité de l'Eglise et le contre-pouvoir qu'elle représente ;

- Apparition de la notion de Souveraineté du Peuple qui sape l'autorité de la noblesse et le contre-pouvoir qu'elle représente.

Dans le cas de la France, on peut aussi ajouter la Fronde (et la défaite des nobles frondeurs face au Roi qui s'en suivit) comme événement permettant un raffermissement du pouvoir du Roi (exécution, exil ou emprisonnement d'une partie de la noblesse, construction du château de Versailles permettant à la fois un contrôle de la noblesse et l'enlisement de cette dernière dans une course sans fin pour plaire au Roi).

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La DDHC, tare socialiste ? :facepalm:

Oui. Pas le texte stricto sensu quoique:

Art1 "Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune."

"Art. 6. La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants"

"Art. 13. Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés."

Impôt progressif. Socialisme.utilitarisme, jacobinisme Etc... Tout un programme.

mais son aspiration universelle, au delà du texte... Si une société "primitive" vit sur des terres avec un mode de vie ancestral, ils font ce qu'ils veulent [ou non, j'en sais rien]. Not my business. Il est des produits a vendre ou a acheter.

Sinon ca devient une croisade du Kominteŕn

Evidemment centralisme monarchique =etatisme, toute chose gardée.

Ps: je crois que Johnnieboy n'a jamais écouté la musique et la litterature russe ou vu son cinéma. Ça vaut le détour.

Et subir 70 ans de marxisme léninisme n'aide pas non plus.

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Je suis d'accord avec tout le monde.

La centralisation monarchique a pu servir de point de départ. La Révolution a transformé cette centralisation en autre chose (Révolution elle-même grandement influencée par les Lumières, elles-mêmes influencées par les guerres de religion et ses conséquences sur la pensée d'alors, ainsi que par l'affirmation des bourgeois, cf Ultimex) de radicalement nouveau. Les structures monarchiques ont demeuré dans une certaine mesure ; l'esprit qui les gouvernait a radicalement changé. Cet idéal révolutionnaire (et ses conséquences explicitées par PABerryer) a perduré en France, notamment à Gauche de l'échiquier politique.

 

Cette tendance ancienne à la centralisation explique en partie l'originalité de la France par rapport à certains de ses voisins (Allemagne, Espagne) (cf Tremendo).

 

De là à dire que centralisme monarchique = étatisme, il y a un pas que je ne franchirai pas. Rien n'indiquait que la rationalisation administrative des Rois conduise à la Sécurité sociale et à notre bureaucratie moderne. Ce sont des choix répétés sur des siècles qui nous ont conduit là, pas un sens de l'histoire ou une tendance irrésistible à l'expansion du domaine étatique. Il convient également de nuancer le passé. La France n'est pas que le pays de la centralisation et de l'étatisme. On a une belle tradition libérale, qui a grandement influencé la France. D'où, je pense, la réaction de Rincevent.

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Je suis d'accord avec tout le monde.

La centralisation monarchique a pu servir de point de départ. La Révolution a transformé cette centralisation en autre chose (Révolution elle-même grandement influencée par les Lumières, elles-mêmes influencées par les guerres de religion et ses conséquences sur la pensée d'alors, ainsi que par l'affirmation des bourgeois, cf Ultimex) de radicalement nouveau. Les structures monarchiques ont demeuré dans une certaine mesure ; l'esprit qui les gouvernait a radicalement changé. Cet idéal révolutionnaire (et ses conséquences explicitées par PABerryer) a perduré en France, notamment à Gauche de l'échiquier politique.

 

Cette tendance ancienne à la centralisation explique en partie l'originalité de la France par rapport à certains de ses voisins (Allemagne, Espagne) (cf Tremendo).

 

De là à dire que centralisme monarchique = étatisme, il y a un pas que je ne franchirai pas. Rien n'indiquait que la rationalisation administrative des Rois conduise à la Sécurité sociale et à notre bureaucratie moderne. Ce sont des choix répétés sur des siècles qui nous ont conduit là, pas un sens de l'histoire ou une tendance irrésistible à l'expansion du domaine étatique. Il convient également de nuancer le passé. La France n'est pas que le pays de la centralisation et de l'étatisme. On a une belle tradition libérale, qui a grandement influencé la France. D'où, je pense, la réaction de Rincevent.

On est d'accord que l'Etat moderne et centralisateur français est le résultat de plusieurs strates et pas seulement la monarchie française (on peut ajouter d'autres évènements et courants idéologiques). Il n'empêche que la monarchie française comparé aux autres monarchies européennes de son époque était davantage centralisatrice et bouffeuse d'impôt, de même que la Vème république française l'est davantage que les autres démocraties européennes.

Il est vrai qu'il y a eu un intermède depuis la restauration jusqu'à la 3ème république (la 3ème république de 1914 à 1939 n'était plus libérale mais globalement plus libérale que ses voisines européennes).

 

Lire ou relire De Jouvenel et les articles d'Aurélien Biteau sur Contrepoints ;)

Je me permet de me re-quoter :

"De mémoire Oakeshott explique que l'Europe médiévale du XI/XIIème siècle est dominée par ce qu'il appelle la "morale des liens communautaires" : la valeur dominante durant cette période est la communauté et chacun est défini par la position qu'il y occupe. Sachant que cette position respecte un ordre naturel, il est extrêmement difficile pour une personne et pour ses descendants d'évoluer, de voir son statut changer. Cette morale a d'ailleurs une influence sur l'art de gouverner : c'est en effet une activité principalement locale dont le but (à tous les niveaux i.e. du seigneur du coin au roi) est le "maintien de [l']ordre [naturel susmentionné], sa préservation et la lutte contre tout ce qui menace de le déstabiliser".

A partir du XIIème siècle, la population marchande commence à s'enrichir et voit donc sa condition de vie s'améliorer. Les individus qui composent cette population souhaitent donc "échapper" à cette "morale des liens communautaires", à cette organisation corporatiste si rigide de la société et aimeraient avoir le choix de leurs activités, leurs opinions, qu'ils puissent s'associer librement avec qui ils veulent, etc. Bref, commence à émerger ce qu'Oakshott appelle la "morale de l'individualisme", morale qui deviendra une des valeurs dominante à partir du XVIème siècle. Parallèlement à cela, les intellectuels tentent d'expliquer, de justifier cette morale et d'y associer des formes de gouvernances adaptées à son épanouissement.

Autres phénomènes explicatifs : si je me souviens bien des premiers chapitre de Du Pouvoir, l'État au sens moderne se développe aussi avec l'apparition de la Réforme (une preuve supplémentaire que ces hérétiques protestants sont vraiment responsables de tous les malheurs du monde) et de la théorie de la Souveraineté populaire.

En effet, avant cela, le Roi médiéval voyait son pouvoir limité par deux facteurs principaux :

1) la théorie de la Souveraineté Divine, le fait qu'il soit à ce poste par la Volonté de Dieu. Son rôle se cantonne donc à être "l'administrateur diligent du monarque céleste dont il doit en tous points suivre les instructions", l'Eglise veillant à cela ;

2) la "morale des liens communautaires" susmentionnés : le roi est là pour maintenir et préserver l'ordre naturel de la société, ordre qu'il a lui-même à respecter, la Pairie veillant à cela.

Le roi est donc sous le double contrôle de la Loi divine, du Pouvoir temporelle (représentée par l'Eglise) et de la Coutume (représentée par la Pairie).

Or, la Réforme, en appelant à émanciper le Pouvoir temporel de la tutelle de Pape, fait un beau cadeau aux Princes et Rois d'Europe :

1) l'église n'a plus de contrôle sur les Princes et Rois qui se convertissent ;

2) l'église vit dans la menace de voir les Princes et Rois non réformés décider de se convertir et doit donc modérer son contrôle. Elle est aussi obligée de les solliciter pour lutter contre cette nouvelle hérésie.

De même, avec notamment des auteurs comme Hobbes ou Spinoza, se développe l'idée que la Souveraineté des Princes ne vient pas de Dieu mais du Peuple, ce dernier leur ayant transmis son pouvoir, l'ensemble des droits des individus le composant, et ce, par nécessité pratique.

Ces auteurs pensaient naïvement que cette idée permettrait de limiter le pouvoir des Princes, ceux-ci devant être redevables à l'égard du Peuple. Or c'est le phénomène contraire qui s'est produit : les Princes étant les représentants du Peuple, ils l'incarnent et possèdent donc un pouvoir collectif illimité. Un sujet lésé par son Prince doit d'ailleurs se considérer comme l'auteur même de l'acte injuste, le Prince n'étant que son représentant.

La notion de Souveraineté du Peuple permet donc aux Princes, incarnation de ce Peuple, de s'affranchir non seulement du contrôle de l'Eglise (une nouvelle fois) mais aussi de la Pairie et de la tradition qu'elle défend."

Pour résumer : 3 facteurs qui expliquent donc l'apparition progressif de l'Etat moderne centralisateur :

- Apparition de la "morale de l'individualisme" par opposition à la "morale des liens communautaires" qui modifie l'art, la façon de gouverner ;

- Apparition du protestantisme qui sape l'autorité de l'Eglise et le contre-pouvoir qu'elle représente ;

- Apparition de la notion de Souveraineté du Peuple qui sape l'autorité de la noblesse et le contre-pouvoir qu'elle représente.

Dans le cas de la France, on peut aussi ajouter la Fronde (et la défaite des nobles frondeurs face au Roi qui s'en suivit) comme événement permettant un raffermissement du pouvoir du Roi (exécution, exil ou emprisonnement d'une partie de la noblesse, construction du château de Versailles permettant à la fois un contrôle de la noblesse et l'enlisement cette dernière dans une course sans fin pour plaire au Roi).

Je ne souscris pas au romantisme sur la période féodale, très présent sur ce forum. Si l'Europe féodale était plus libérale que les Etats modernes ça se saurait.
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Je ne souscris pas au romantisme sur la période féodale, très présent sur ce forum. Si l'Europe féodale était plus libérale que les Etats modernes ça se saurait.

 

Toutafè.

Si on peut considérer qu'au niveau du pays, le pouvoir subissait une certaine décentralisation, déconcentration, avec concurrence entre divers pouvoirs (roi, grande noblesse, parlements, etc.), il ne faut pas oublier que pour la population, la féodalité, c'était être soumis à un seul maître sur son lieu de vie.

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Je ne souscris pas au romantisme sur la période féodale, très présent sur ce forum. Si l'Europe féodale était plus libérale que les Etats modernes ça se saurait.

Ça tombe bien, ça ne correspond pas à ce que j'ai dit. :)

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Toutafè.

Si on peut considérer qu'au niveau du pays, le pouvoir subissait une certaine décentralisation, déconcentration, avec concurrence entre divers pouvoirs (roi, grande noblesse, parlements, etc.), il ne faut pas oublier que pour la population, la féodalité, c'était être soumis à un seul maître sur son lieu de vie.

Et puis bon, ils étaient raffinés à cette époque:

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Concretement, tes biens les plus importants ne t'appartenaient pas, tu ne pouvais pas quitter la terre à laquelle tu étais attaché, la torture était incontournable, la liberté de religion quasi-inexistante, et toutes les joyeusetés habituelles, du complet contrôle des prix à la réglementation de la couleur des vêtements. Et les peines encourues n'avaient rien à voir. Pas le droit de divorcer non plus.

Ils ne prenaient pas plus d'impôts que les soviétiques, pas besoin quand tu es propriétaire des outils de production.

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Concretement, tes biens les plus importants ne t'appartenaient pas, tu ne pouvais pas quitter la terre à laquelle tu étais attaché, la torture était incontournable, la liberté de religion quasi-inexistante, et toutes les joyeusetés habituelles, du complet contrôle des prix à la réglementation de la couleur des vêtements. Et les peines encourues n'avaient rien à voir. Pas le droit de divorcer non plus.

Ils ne prenaient pas plus d'impôts que les soviétiques, pas besoin quand tu es propriétaire des outils de production.

Les impôts étaient bien plus bas que maintenant, mais ceci dit si le seigneur voulait financer une guerre il ne se gênait pas pour tout prendre, jusqu'à ta personne.

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En URSS aussi on payait moins d'impôts qu'en France. Pas besoin d'impôts quand l'Etat/les seigneurs sont propriétaire des outils de production : terres, four, moulin etc

L'impôt c'est l'arbre qui cache la forêt du servage.

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En URSS aussi on payait moins d'impôts qu'en France. Pas besoin d'impôts quand l'Etat/les seigneurs sont propriétaire des outils de production : terres, four, moulin etc

c'pas faux. Remarque si la France était communiste elle serait capable de posséder tes biens mais de te faire payer un impôt en plus dessus :D

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Les impôts étaient bien plus bas que maintenant, mais ceci dit si le seigneur voulait financer une guerre il ne se gênait pas pour tout prendre, jusqu'à ta personne.

Intéressant, sauf que c'est faux pendant plusieurs siècles :

 

Lorsque nous remontons à l'époque -XIème et XIIème siècles - où commencent de se former les premiers d'entre les Etats modernes, ce qui nous frappe d'abord, dans des temps représentés comme si belliqueux, c'est l'extrême politesse des armées et la brièveté des campagnes.

Le roi dispose des contingents que lui amènent ses vassaux - mais qui ne lui doivent le service que pendant quarante jours. Sur place, il trouve des milices locales - mais qui ne valent guère, et qui le suivent à peine à deux ou trois jours de marche.

Comment, avec cela, tenter de grandes opérations . Il lui faut des troupes disciplinées et qui le suivent plus longtemps, mais il doit alors les payer.

Avec quoi les paierait-il, n'ayant d'autres ressources que ses revenus de son domaine ? On n'admet absolument point qu'il puisse lever des impôts (cf. A .Caulleru : Histoire du Pouvoir Royal d'imposer depuis la Féodalité jusqu'à Charles V, Bruxelles, 1879), et sa grande ressource est d'obtenir, si l'Eglise approuve une expédition, qu'elle lui abandonne, quelques années durant, un décime de ses revenus. Même avec ce concours et encore à la fin du XIIIème siècle, la "croisade d'Aragon", pour avoir duré cent cinquante-trois jours, apparaîtra comme une entreprise monstrueuse et endettera durablement la monarchie.

La guerre alors est toute petite : parce que le Pouvoir est petit, qu'il ne dispose aucunement de ces deux leviers essentiels, l'obligation militaire et le droit d'imposer.

Mais le Pouvoir s'efforce de grandir ; les rois tâchent d'obtenir que le clergé d'une part, les seigneurs et les communes de l'autre, lui donnent des aides financières de plus en plus fréquentes. Sous les règnes anglais d'Edouard Ier et Édouard III, français de Philippe le Bel à Philippe de Valois, cette tendance va se développant. On a des estimations des conseillers de Charles IV pour une campagne en Gascogne qui demanderait cinq mille cavaliers et vingt mille fantassins, tous soldés, tous "soldats" pendant cinq mois. Une autre, d'une douzaine d'années postérieure, prévoit pour une campagne de quatre mois en Flandre dix mille cavaliers et quarante mille gens de pied.

Mais il faut, pour en réunir les moyens, que le roi se rende successivement dans tous les principaux centres du royaume, et, assemblant le peuple "grand, moyen et menu", lui expose ses besoins et requière son aide.

De telles démarches, de telles demandes, seront continuellement répétées au cours de la guerre de Cent Ans, qu'on doit se représenter comme une succession de brèves campagnes qu'il faut successivement financer. Même processus dans l'autre camps, où le roi, qui a relativement plus de pouvoir, tire des ressources plus grandes et plus régulières d'un pays combien moins riche et moins peuplé.

Des contributions, comme celles nécessitées pour la rançon du roi Jean, devront être continuées plusieurs années, mais on ne se résoudra point à les regarder comme permanentes, et le peuple se révoltera contre elles presque simultanément en France et en Angleterre.

C'est au terme de la guerre seulement que l'accoutumance au sacrifice permettra d'établir un impôt permanent - la taille - soutenant une armée permanente - les compagnies d'ordonnance.

Voilà un pas prodigieux accompli par le pouvoir : au lieu de mendier un concours dans des circonstances exceptionnelles, il a désormais une dotation permanente. Il va mettre toute son application à l'accroître.

https://www.catallaxia.org/images/5/53/Www.liberaux.org_-_ebook_-_Bertrand_de_Jouvenel_-_Du_Pouvoir.pdf

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Concretement, tes biens les plus importants ne t'appartenaient pas, tu ne pouvais pas quitter la terre à laquelle tu étais attaché, la torture était incontournable, la liberté de religion quasi-inexistante, et toutes les joyeusetés habituelles, du complet contrôle des prix à la réglementation de la couleur des vêtements. Et les peines encourues n'avaient rien à voir. Pas le droit de divorcer non plus.

Ils ne prenaient pas plus d'impôts que les soviétiques, pas besoin quand tu es propriétaire des outils de production.

 

 

On dirait la légende noire du XIX :D

 

Plus sérieusement, entre les époques et les lieux la situation des personnes étaient extrêmement variable entre le serf, le vilain, le citadin. La liberté de religion elle-même n'a été reconnu qu'au XIX et encore, il est impensable qu'un catholique soit PM en Angleterre de nos jours. Etc...

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99,99999% des britanniques ne seront pas premier ministre de toute façon.

Y a pas de hasard si il y a eu des siècles de stagnation économique. C'est que l'accumulation de capital n'était pas possible pour la majorité. Le capital etait détruit par les guerres et par l'impossibilité d'hériter.

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Moui. Il y a beau avoir eu des siècles de stagnation économique, mieux vaut vivre au XIIIème qu'au VIIIème.

 

On peut parfaitement observer le, ou plutôt les, Moyen-Âge(s) en regardant ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas. Tout comme on peut dire que les Pères Fondateurs défendaient des valeurs sympas, même si ils avaient quantité d'esclave à côté.

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Ce n'est pas du roi dont je parlais mais des seigneurs locaux, et on parle là d'une époque bien antérieure à l'ancien régime où le rapport de force entre la monarchie et les nobles locaux change du tout au tout.

Quant à cette phrase:

 

ce qui nous frappe d'abord, dans des temps représentés comme si belliqueux, c'est l'extrême politesse des armées et la brièveté des campagnes.

 

On dirait du PABerryer.

Blague à part, extrême politesse, WTF!

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Concretement, tes biens les plus importants ne t'appartenaient pas, tu ne pouvais pas quitter la terre à laquelle tu étais attaché, la torture était incontournable, la liberté de religion quasi-inexistante, et toutes les joyeusetés habituelles, du complet contrôle des prix à la réglementation de la couleur des vêtements. Et les peines encourues n'avaient rien à voir. Pas le droit de divorcer non plus.

Ils ne prenaient pas plus d'impôts que les soviétiques, pas besoin quand tu es propriétaire des outils de production.

Tient je voyais pas ça comme ça, je voyais plutôt des artisans libres avec des apprentis etc. et des impôts très limités.

A la fois mes seules lectures sur le moyen age c'est de l'heroic fantasy.

Par contre les soviétiques ils te prenaient pas loin de 100% de tes revenus non ? Difficile de faire plus que ça.

Et je vois pas ce que le fait d’être propriétaire des moyens de production vient faire la dedans, la capitalisme n'est pas incompatible avec le libéralisme.

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https://fr.wikipedia.org/wiki/Ancien_R%C3%A9gime

 


L'Ancien Régime est le nom donné au régime politique de l'histoire de France désignant les deux siècles antérieurs à la Révolution française (1789 ou 1792 si on considère la proclamation de la Première République).Alexis de Tocqueville contribue à fixer le terme dans son ouvrage L'Ancien Régime et la Révolution (1856). La plupart des historiens du xixe siècle font aussi débuter cette période aux règnes de la Maison de Bourbon avec l'accession au trône de France d'Henri IV en 15891.

La notion d'ancien fait opposition au nouveau régime mis en place à la Révolution; elle fait donc référence aurégime politique de la monarchie absolue précédant celle-ci, régime qui atteindra son apogée lors du règne deLouis XIV entre 1661 et 1715. Cependant, le terme de « monarchie absolue » n'englobe pas la totalité de l'histoire de la monarchie française.

Cette période couvre aussi en grande partie celle dite « époque moderne » (ou « temps modernes ») que les historiens français font débuter à la fin du Moyen Âge dont la date est généralement placée en 1453 (chute de Constantinople) ou en 1492 (découverte des Amériques par Christophe Colomb).

 

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Ce n'est pas du roi dont je parlais mais des seigneurs locaux, et on parle là d'une époque bien antérieure à l'ancien régime.

Mmmh... Il me semblait que l'on était parti sur le Moyen-Âge depuis un moment mais bon... D'autant que seigneur fait plus référence au Moyen-Âge qu'à l'Ancien Régime.

Concernant les seigneurs locaux du Moyen-Âge, il semblerait qu'ils étaient aussi limités que le roi pour lever une armée, sinon il n'aurait pas été nécessaire que ce dernier de "se rende successivement dans tous les principaux centres du royaume, et, assemblant le peuple "grand, moyen et menu", lui expose ses besoins et requière son aide", il se serait contenté d'aller voir ses différents vassaux pour les convaincre.

Si on parle des seigneurs de l'Ancien Régime (les nobles donc), je ne suis pas sûr qu'ils avaient à lever une armée...

D'ailleurs, si j'en crois wikipedia :

 

La Renaissance française marquée par le règne de François Ier, voit dans un premier temps la nation accroître son unité sous le monarque. La puissance des nobles a diminué, et le rôle militaire de ceux-ci a décliné au profit de la constitution d'une armée nationale sous l'autorité du souverain.

Quant à cette phrase:

On dirait du PABerryer

Sur la politesse, on peut en douter en effet.

Par contre De Jouvenel a raison de souligner que les campagnes militaires étaient brèves.

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Mmmh... Il me semblait que l'on était parti sur le Moyen-Âge depuis un moment mais bon... D'autant que seigneur fait plus référence au Moyen-Âge qu'à l'Ancien Régime.

Concernant les seigneurs locaux du Moyen-Âge, il semblerait qu'ils étaient aussi limités que le roi pour lever une armée, sinon il n'aurait pas été nécessaire que ce dernier de "se rende successivement dans tous les principaux centres du royaume, et, assemblant le peuple "grand, moyen et menu", lui expose ses besoins et requière son aide", il se serait contenté d'aller voir ses différents vassaux pour les convaincre.

Si on parle des seigneurs de l'Ancien Régime (les nobles donc), je ne suis pas sûr qu'ils avaient à lever une armée...

D'ailleurs, si j'en crois wikipedia :

Ce que je voulais dire c'est que le Moyen-Âge n'était pas plus libéral que les Etats modernes. Je sais bien que ce n'est pas ce que tu penses, mais j'ai vu des conservateurs l'affirmer sur ce forum il y a quelques années, alors que c'est complètement anachronique.

Tramp a décrit dans quelles conditions vivaient les vassaux et leurs relations vis-à-vis des seigneurs locaux et de l'Eglise, c'était pas jojo.

Alors c'est vrai qu'en gros les rois et les empereurs n'arrivaient pas à prélever d'impôts ni lever de soldats sans passer par les seigneurs locaux et l'Eglise qui étaient tout puissants. Les rois et empereurs guerroyaient relativement peu et ne le faisaient jamais sans la noblesse locale. Par contre les nobles localement guerroyaient souvent pour des lopins de terre.

Sauf que cette situation a changé petit à petit et la période qui a suivi -l'Ancien régime qui fait référence à la Monarchie absolue- va voir les différents royaumes se centraliser, la France en particulier. Les libertés locales vont s'estomper petit à petit -et ce bien avant la Révolution- et les nobles locaux s'effacer. A ce moment-là le roi peut prélever des impôts directement (dans une quantité bien plus réduite qu'actuellement ceci dit), a une armée importante, mais laissait financièrement parlant le royaume exsangue beaucoup plus souvent que maintenant. Les campagnes militaires se firent à plus grande échelle, de plus en plus loin et sur de longues années. La royauté à cette époque jette les bases qui permettront aux révolutionnaires assez facilement de centraliser sans problème le pays -le gros est fait-.

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Ce que je voulais dire c'est que le Moyen-Âge n'était pas plus libéral que les Etats modernes. Je sais bien que ce n'est pas ce que tu penses, mais j'ai vu des conservateurs l'affirmer sur ce forum il y a quelques années, alors que c'est complètement anachronique.

Tramp a décrit dans quelles conditions vivaient les vassaux et leurs relations vis-à-vis des seigneurs locaux et de l'Eglise, c'était pas jojo.

Alors c'est vrai qu'en gros les rois et les empereurs n'arrivaient pas à prélever d'impôts ni lever de soldats sans passer par les seigneurs locaux et l'Eglise qui étaient tout puissants. Les rois et empereurs guerroyaient relativement peu et ne le faisaient jamais sans la noblesse locale. Par contre les nobles localement guerroyaient souvent pour des lopins de terre.

Sauf que cette situation a changé petit à petit et la période qui a suivi -l'Ancien régime qui fait référence à la Monarchie absolue- va voir les différents royaumes se centraliser, la France en particulier. Les libertés locales vont s'estomper petit à petit -et ce bien avant la Révolution- et les nobles locaux s'effacer. A ce moment-là le roi peut prélever des impôts directement (dans une quantité bien plus réduite qu'actuellement ceci dit), a une armée importante, mais laissait financièrement parlant le royaume exsangue beaucoup plus souvent que maintenant. Les campagnes militaires se firent à plus grande échelle, de plus en plus loin et sur de longues années. La royauté à cette époque jette les bases qui permettront aux révolutionnaires assez facilement de centraliser sans problème le pays -le gros est fait-.

Je ne suis pas certain du point surligné en gras, il me semble que les nobles devaient avoir l'autorisation du Roi pour pouvoir guerroyer entre eux (mais je me trompe peut-être, à vérifier donc).

Pour le reste, je suis d'accord, ça correspond d'ailleurs au résumé fait par Flashy à partir de nos différentes interventions (ici).

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Je ne suis pas certain du point surligné en gras, il me semble que les nobles devaient avoir l'autorisation du Roi pour pouvoir guerroyer entre eux (mais je me trompe peut-être, à vérifier donc).

Pour le reste, je suis d'accord, ça correspond d'ailleurs au résumé fait par Flashy à partir de nos différentes interventions (ici).

C'était plus des escarmouches et des embuscades que de vraies guerres, mais c'était constant.

Ceci dit les guerres ne manquaient pas (guerre de cent ans, croisades etc...)

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