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La Séparation Des Pouvoirs


melodius

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Tiens, puisque Copeau regrettait à juste titre le manque de visibilité des libéraux classiques sur ce forum, voici une exhumation de fil qui peut venir fort à propos. D'autant plus que de nouveaux libéraux classiques sont apparus sur lib.org depuis le dernier message !

Pour poser clairement les termes du débat, je renvoie au message initial de Melo :

Comme le savent ceux qui me fréquentent de longue date, mon principal reproche au libéralisme "classique", ainsi d'ailleurs qu'au minarchisme, concerne la séparation des pouvoirs qui, en démocratie, c-à-d dans un système de partis clientéliste, ne fonctionne pas.

Pour rappel, la séparation des pouvoirs est présumée mettre un frein aux pouvoirs de l'état et garantir, indirectement du moins, les libertés individuelles. Qui ne partage pas cette préoccupation ne peut légitimement prétendre être libéral.

Donc, jamais personne n'a voulu répondre à mes interrogations à ce sujet, ce qui me conforte dans l'opinion qu'il n'y a pas de réponse non-anarcap satisfaisante.

ENFIN un bon esprit, Pentium en l'occurrence, semble s'être aperçu que cette question est primordiale et doit être ré-examinée.

Quelles solutions PRATIQUES proposent les libéraux qui ne sont pas opposés à l'état afin de mettre en oeuvre cette séparation des pouvoirs, et de quelle séparation s'agit-il ?

Je trouve qu'on parle beaucoup d'anarcapie sur le forum et fort peu de ce que proposent les autres, ce qui biaise un peu le débat. Je me propose donc de lancer des fils sur d'autres topics glissants pour les libéraux non opposés à l'état, et notamment au sujet des sources du droit (en ce compris les droits de l'homme, conquête libérale), le droit de propriété, etc.

Les libéraux non anarcaps ne peuvent faire l'économie de ces questions, et de simples protestations de pragmatisme ou d'anti-dogmatisme ne sauraient les dispenser de se mouiller.

Je ne suis pas, n'en déplaise à certains, un fanatique arc-bouté sur ses certitudes et désire sincèrement engager un débat constructif à ce sujet. Franchement, si des idées un peu moins radicales sont susceptibles de répondre à mes questions, j'en serais enchanté, étant anti-révolutionnaire dans l'âme.

Merci par ailleurs d'utiliser des concepts existants dans leur sens existant, histoire de faciliter la communication.

Liebe Damen und Herren, à vous lire !

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Ah, la nécromancie, là encore. Je n'ai pas le temps de relire le fil, mais il me semble tout de même que les choses sont claires : si la question de la séparation des pouvoirs est importante, et même sympathique, la VRAIE question est celle de la limitation des pouvoirs, qui ne passe que marginalement par leur séparation.

J'aimerais au passage volontiers qu'on complète ceci

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Ah, la nécromancie, là encore. Je n'ai pas le temps de relire le fil, mais il me semble tout de même que les choses sont claires : si la question de la séparation des pouvoirs est importante, et même sympathique, la VRAIE question est celle de la limitation des pouvoirs, qui ne passe que marginalement par leur séparation.

C'est d'ailleurs à peu près l'opinion qu'en a Constant, si mes souvenirs sont exacts. Je vais vérifier…

Edit : Aaah voilà, c'est l'objet du Chapitre III du Livre II de ses Principes de Politique. Morceaux choisis :

Lorsque l'autorité sociale n'est pas limitée, l'organisation du gouvernement devient une chose très secondaire. La surveillance mutuelle des fractions diverses de l'autorité n'est utile que pour empêcher l'une d'entre elles de s'agrandir aux dépends des autres. Mais si la somme totale de leurs pouvoirs est illimitée, s'il est permis à ces autorités réunies de tout envahir, qui les empêchera de tout envahir, qui les empêchera de se coaliser pour opprimer à leur gré ?

Ce qui m'importe, ce n'est pas que mes droits personnels ne puissent être violés par tel pouvoir, sans l'approbation de tel autre ; mais que cette violation soit interdite à tous les pouvoirs. [NdRincevent : Cette phrase est sans aucun doute une des plus belles de tout son magnum opus, et je ne me lasse pas de la citer.] […]

Si l'autorité sociale n'est pas limitée, la division des pouvoirs, qui est d'ordinaire la garantie de la liberté, devient un danger et un fléau. […] [si l'Etat n'est pas limité,] mieux vaudrait mille fois alors que le pouvoir qui exécute les lois fût aussi chargé de les faire. Au moins apprécierait-il les difficultés et les douleurs de l'exécution.

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Contre l'absolutisme - qu'il se revendique de la monarchie ou de la démocratie - Constant estime que la fragmentation du pouvoir, théorisée par Montesquieu, n'offre pas de garanties suffisantes. Visant vraisemblablement ce dernier, il écrit :

Vous avez beau diviser le pouvoir: si la somme totale du pouvoir est illimitée, les pouvoirs divisés n'ont qu'à former une coalition, et le despotisme est sans remède. Ce qui nous importe, ce n'est pas que nos droits ne puissent être violés par tel pouvoir sans l'approbation de tel autre, mais que cette violation soit interdite à tous les pouvoirs.

Ce faisant, Constant montre que la question qui le préoccupe est moins de savoir "qui gouvernera" (i. e. les pouvoirs à l'intérieur de l'Etat) que "comment limiter le pouvoir politique" (i. e. les pouvoirs de l'Etat) pour reprendre la distinction qu'élaborera plus tard Lord Acton.

On le voit, nous sommes loin de la caricature de l' "inconstant Constant", propagée par divers détracteurs et qui relève de la pure polémique.

http://www.wikiberal.org/wiki/Constant#Dis…irs_de_l.27Etat

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Tout à fait d'accord. L'important, ce sont les verrous limitant le pouvoir et en empêchant l'extension. La séparation des pouvoir n'est que l'un des moyens trouvés dans ce but, que l'on prend trop souvent comme un but en soi.

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Sauf que pour ce qui concerne l'Etat français, les checks and balances m'ont l'air un petit peu moins efficace et efficient que pour ce qui concerne la démocratie américaine. En France, la justice n'est qu'une autorité, le conseil constitutionnel n'a jamais émis de décision qui casse la baraque, ça a toujours été au grand maximum du "oui mais", pas une véritable opposition à des bêtises des l'exécutif ou du législatif. (cf les histoires de tests ADN récentes).

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Si beaucoup se plaignent des violations de la Constitution des USA, c'est qu'elle a déjà été appliquée. On ne peut pas en dire autant de la Constitution de 1958. :icon_up:

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Quelques remarques que je n'ai pas vu (après lecture rapide du fil) :

1- Je pense qu'il n'y a pas de réponse théorique qui tienne sur la longueur. La spécificité des humains est de s'approprier les choses pour arriver à ses fins et la pulsion autoritaire me semble trop bien ancrée dans la nature humaine pour penser arriver à la brider par un système fixe. C'est comme en guerre : une défense active et mobile sera toujours supérieure à n'importe quelle forteresse aussi solide soit elle. Je pense que les réponses sont principalement dynamiques et se doivent d'être une adaptation aux dérives qui ne manqueront pas de se produire. Mais cela ne veut pas dire qu'il faille baisser les bras bien au contraire.

2- D'autre part je n'ai vu nulle part mention du pouvoir de lever des impôts : on parle du législatif, de l'exécutif et du judiciaire mais pas du pouvoir fiscal. Pourtant ça me semble être un mécanisme de coercition de base : ceux qui prélèvent ne doivent pas être ceux qui décident comment on utilise les rentrées fiscales. Pour l'instant dans les démocraties occidentales tout est mélangé et on appelle même ça "la loi de finance". Un truc ahurissant où une chambre décide qui on prélève, combien et comment et à qui on verse. C'est évidemment une incitation au clientelisme qui est irrésistible puisqu'on peut promettre de prendre aux uns pour donner aux autres (il suffit que les autres soient plus nombreux et en démocratie le tour est joué). Un moyen serait de fixer une fois pour toute le montant des prélèvements (dans la constitution) à charge après à l'assemblée d'arbitrer l'utilisation. Mais qu'en aucun cas elle puisse se voter de nouvelles rentrées pour financer ses lubies du moment.

3- Je pense que la proposition de Hayek dans "Droit, Législation et Liberté" est intéressante (mais concrètement difficile à mettre en oeuvre) on peut en trouver une critique et un résumé ici : http://www.mises.org/journals/jls/6_2/6_2_2.pdf

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2- D'autre part je n'ai vu nulle part mention du pouvoir de lever des impôts : on parle du législatif, de l'exécutif et du judiciaire mais pas du pouvoir fiscal. Pourtant ça me semble être un mécanisme de coercition de base : ceux qui prélèvent ne doivent pas être ceux qui décident comment on utilise les rentrées fiscales. Pour l'instant dans les démocraties occidentales tout est mélangé et on appelle même ça "la loi de finance". Un truc ahurissant où une chambre décide qui on prélève, combien et comment et à qui on verse. C'est évidemment une incitation au clientelisme qui est irrésistible puisqu'on peut promettre de prendre aux uns pour donner aux autres (il suffit que les autres soient plus nombreux et en démocratie le tour est joué). Un moyen serait de fixer une fois pour toute le montant des prélèvements (dans la constitution) à charge après à l'assemblée d'arbitrer l'utilisation. Mais qu'en aucun cas elle puisse se voter de nouvelles rentrées pour financer ses lubies du moment.

+1

C'est également une incitation à la hausse des dépenses. Si j'avais les moyens de choisir mon revenu, nul doute qu'il serait aussi élevé que mes dépenses et en y pensant je me rends compte que j'ai beaucoup de projets de dépenses! :icon_up:

Une ressource qui n'est pas limitée est nécessairement mal employée.

Le principe de prélèvements fixes me semble tout de même trop rigide. Je pense plutôt à deux assemblées: une pour voter uniquement les prélèvements et l'autre pour voter le reste sous une contrainte d'équilibre budgétaire.

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Le principe de prélèvements fixes me semble tout de même trop rigide. Je pense plutôt à deux assemblées: une pour voter uniquement les prélèvements et l'autre pour voter le reste sous une contrainte d'équilibre budgétaire.

Effectivement un prélèvement fixe (je pensais à un truc type flat tax) à tout jamais est en contradiction avec mon point 1. Et puis il faut pouvoir s'adapter (tremblement de terre, épidémie ou guerre que sais je encore) à des problèmes ponctuels.

Le souci reste de concrètement limiter les influences entre les deux chambres : en France on a bien des sénateurs qui en glandent pas une (en gros ils suivent l'autre assemblée aux remarques marginales près, c'est comme si on avait 1,5 chambres en fait). L'exclusion mutuelle entre les deux chambres peut être un mécanisme, la méthode de sélection (élections dans une tranche d'âge pour l'une et plus traditionelle pour l'autre, ou bien tirage au sort)… Mais je ne trouve rien de concluant: faut essayer pour voir (comme au poker : l'information coute de l'argent).

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Les référendums sont un instrument servant les intérêts de certains au détriment d'autres personnes.

Je ne suis pas tout à fait d'accord: en effet, comme on l'a vu en Californie, le recours au référendum via une initiative populaire (et non organisé par un décret gouvernemental de convocation des électeurs, comme c'est le cas sous la Ve République) peut permettre la limitation de la fiscalité.

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