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Autodafe A La Sorbonne


Messages recommandés

Misère !

En 1789 tous les libéraux étaient donc des fanatiques inconscients et exaltés.

Jusqu'à nouvel ordre les libéraux français (je parle de ceux du XIXe s.) se sont toujours réclamé de 1789. Le rejet de 1789 était le fait des réactionnaires, les ennemis de la liberté individuelle et de l'émancipation de l'individu.

Je n'aime ni la violence ni le sang versé (faut-il le préciser ?).

C'est peut-être très embêtant qu'il y ait une Révolution. La Révolution c'est mal mais bon c'est ainsi.

Le sang a coulé pour établir la liberté en Angleterre, aux États-Unis et en France.

On peut (et on doit !) regretter que les hommes se laissent entraîner par le vertige révolutionnaire, mais - comme l'écrit Dardanus - les révolutions sont parfois nécessaires, comme dernier recours.

N'oublions pas que Locke justifiait le droit de résistance à l'oppression, et qu'il fut l'un des inspirateurs de la Glorieuse Révolution (glorieuse, car pratiquement propre de toute effusion de sang).

Chaque fois que les législateurs tentent de saisir et de détruire les biens du peuple, ou de le réduire à l'esclavage d'un pouvoir arbitraire, ils entrent en guerre contre lui (…)

Enfin, concernant la Révolution française, peut-être n'aurait-elle pas débouché sur la Terreur totalitaire si Louis XVI n'avait pas fait le con.

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Dans quel sens ?

J'ai plutôt pitié de ce pauvre homme.

C'est l'impression qu'il donne en effet. Mais révéler les plans de guerre à l'Autriche (bon c'est vrai il y avait sa femme derrière…), il aurait pu éviter.

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Dans quel sens ?

J'ai plutôt pitié de ce pauvre homme.

Moi aussi - son exécution me révulse profondément, vu que je suis opposé à la peine de mort. Mais il n'empêche qu'il a commis des maladresses, sinon des fautes. C'est quand même lui qui prête serment de fidélité avant d'essayer de s'enfuir quelques mois plus tard. Puis, devenu "roi des Français", il escompte que la guerre avec l'Autriche en 1792 écrasera la France et le rétablira dans la plénitude de son ancien pouvoir royal après l'écrasement. Un peu beaucoup, non ?

Et, si l'on observe le bilan de son règne avant la Révolution, il avait déjà commis quelques boulettes. C'est lui qui - par frilosité politique - a révoqué Turgot pour nommer à sa place le conservateur Necker, je le rappelle à tout hasard.

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Bref, affirmer que 1789 a été une cause du retard de la France dans sa révolution industrielle est faux : si quelque chose a retardé cette industrialisation, c'est soit 1°/ les guerres postérieures et l'instabilité politique, mais qui n'ont pas tant à voir avec les idéaux de 89 ; 2°/ parce que cette révolution libérale est inachevée (Restauration, régime réactionnaire, Charte constitutionnelle violée par Charles X)

c'est ce que je sous-entendais, ce sont bien sûr les luttes post-1789 qui ont retardé le développement industriel français.

Quand aux idéaux de 1789 dont je me réclame fiérement, ils ont pu donner, après que le sang ait coulé, toute sa force aux siècles des lumières.

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Ta clarté m'a échappé : àmha 1789 est indissociable des années qui ont suivi, c'est le même drame avec des acteurs en moins au fur et à mesure qu'ils quittent la scène, volontairement ou pas. C'est comme dire : Robespierre a appuyé telle mesure émancipatrice, c'est à ce moment-là un brave homme - en omettant l'odieux tyran qu'il va devenir.

Je ne vois aucune raison de ne pouvoir dissocier 89 de 93.

Ceux que ça arrange voudront le faire l'amalgame.

93 n'est qu'une boucherie ou des brutes on tenté de prendre le pouvoir. en tirant bénéfice de l'instabilité politique.

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Moi aussi - son exécution me révulse profondément, vu que je suis opposé à la peine de mort. Mais il n'empêche qu'il a commis des maladresses, sinon des fautes. C'est quand même lui qui prête serment de fidélité avant d'essayer de s'enfuir quelques mois plus tard. Puis, devenu "roi des Français", il escompte que la guerre avec l'Autriche en 1792 écrasera la France et le rétablira dans la plénitude de son ancien pouvoir royal après l'écrasement. Un peu beaucoup, non ?

Et, si l'on observe le bilan de son règne avant la Révolution, il avait déjà commis quelques boulettes. C'est lui qui - par frilosité politique - a révoqué Turgot pour nommer à sa place le conservateur Necker, je le rappelle à tout hasard.

Certes, Louis XVI a commis des erreurs, mais de toute façon la situation était ingérable.

Sur le plan fiscal par exemple, la seule solution était d'élargir l'assiette de l'impôt, mais il aurait fallu renoncer à une société de privilèges et s'exposer à une nouvelle Fronde. Le risque était bien réel, puisque la révolution a commencé par une réaction nobiliaire (qui n'était pas étrangère aux propositions de Turgot…).

Bref, comment reprocher à Louis XVI de ne pas avoir eu le génie de choisir le petit peuple contre les privilégiés ? Le pari était tellement risqué…

Pour 1789 et 1793, on n'a affaire ni aux mêmes principes, ni aux mêmes hommes, me semble-t-il.

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Certes, Louis XVI a commis des erreurs, mais de toute façon la situation était ingérable.

Sur le plan fiscal par exemple, la seule solution était d'élargir l'assiette de l'impôt, mais il aurait fallu renoncer à une société de privilèges et s'exposer à une nouvelle Fronde. Le risque était bien réel, puisque la révolution a commencé par une réaction nobiliaire (qui n'était pas étrangère aux propositions de Turgot…).

Bref, comment reprocher à Louis XVI de ne pas avoir eu le génie de choisir le petit peuple contre les privilégiés ? Le pari était tellement risqué…

Pour 1789 et 1793, on n'a affaire ni aux mêmes principes, ni aux mêmes hommes, me semble-t-il.

Les hommes de 93, dont certains étaient bien sûr déjà là en 89 (Robespierre et Sieyès par exemple ont siégé à la Constituante et à la Convention), prétendent aller plus loin : la déclaration des droits de 1793 en offrent un bon exemple. C'est sans doute le point de départ des faux droits. Aussi cette Constitution (jamais appliquée pour cause de Terreur puis mise au grenier par les Thermidoriens) est-elle considérée comme un modèle démocratique.

D'où un discours délirant sur les gentils jacobins qui auraient sensibles au problème de l'éducation (droit à l'éducation) alors qu'ils jetaient en prison les prêtres qui assuraient jusqu'alors ladite éducation d'où disparition de tout établissement éducatif ou presque à cette époque.

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Moi je le ferais bien remonter à Noé ("dans mon Arche, à chacun selon ses besoins"), mais on m'accuserait en vrac d'anachronisme, antisémitisme, antimonothéisme, antioccidentalisme, antijudaïsme et antiviticulture. Donc, après moi le déluge.

La Prophétie des grenouilles, un dessin animé adulé par tous les pédagos bien-pendants met en scène, avec un nouveau déluge, une Arche communiste où tout le monde est au régime frites (je soupçonne un complot de qui vous savez) même les carnivores. Ce sont les cochons qui se régalent.

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!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Yahoo2 :

J'ai déjà du mal à comprendre/supporter l'usage de la force (blocage), la destruction c'est encore pire.

Enfin, ces étudiants n'ont peut-être jamais ouvert un livre…

Heinrich Heine, l'un des lus grands poetes allemands, a dit :

"Este brannten Bücher, dann brannten Menschen"

Il ne pouvait pas être plus prophétique. 100 ans après, ses livres étaient brûlés sur les ^places de Nuremberg et d'ailleurs par les nazis, car il était juif.

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Je ne sais plus qui a dit: "Dans un pays où l'on brûle les livres, on ne tarde pas à brûler les gens."

C'est Heinrich Heine, l'un des plus grands poetes allemands, qui a en effet dit vers 1830 : "Esrte brannten Bücher, dann brannten Menschen" ("Là où l'on brûle des livres, on finira par brûler des hommes")

Il ne pouvait être plus prophétique. 100 ans après, les nazis brulaient ses propres livres, car Heine était juif.

Ces gauchistes font la même chose. Comme quoi les extrêmes se rejoignent.

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Philosopher c'est redécouper la masse informe du réel, c'est selon l'image de Platon reprise par Bergson (dans quel livre je le cherche désespéremment…) trouver les bonnes rainures dans la viande, pour couper adéquatement les morceaux. La philosophie est création de concept… Les découpages historiques/notionelles/doctrinaux sont très sensibles à l'éclairage, met-y le prisme de l'Autre, je prendrai le calque du Même et nous aurons toi et moi, deux choses différentes. Mais si tu m'opposes un quelconque réalisme (la chose en soi des scientifiques qui est une hypothèse nécessaire) là où cela ne peut s'appliquer, si tu me réponds vérité historique ou unilatéralité de l'interprétation, je t'assomme à coup de Kant (la CRP doit faire bien mal) et je sors, en toute camaraderie, mon flingue.

En bon joueur je te renvoie la balle: ceux qui parlent d'humanistes au XVIème siècle n'ont rien compris, alors ? Quelles étaient ses Humanités que l'on redécouvre à la fin du Moyen-Age; faut-il entendre Humanité en deux sens différents: organise un duel et dis-moi lequel l'emporte.

La philosophie comme logomachie autosatisafaite (que ton post illustre très bien) ne résume quand même pas la philosophie tout entière, mais la philosophie continentale, et particulièrement franco-allemande.

J'espère un jour, avant ma mort, voir des manuels de philosophie où l'idéalisme allemand, la Lebensphilosophie et tout le charabia soixante-huitard et post-moderne seraient remplacés par l'analyse logique et conceptuelle. J'ai sans doute le temps de mourir plusieurs fois.

Cédric, victime de la philosophie universitaire française.

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Invité (=S=)
La philosophie comme logomachie autosatisafaite (que ton post illustre très bien - merci, flatté :icon_up: ) ne résume quand même pas la philosophie tout entière (qui a dit l'inverse ?), mais la philosophie continentale, et particulièrement franco-allemande.

J'espère un jour, avant ma mort, voir des manuels de philosophie où l'idéalisme allemand, la Lebensphilosophie et tout le charabia soixante-huitard et post-moderne seraient remplacés par l'analyse logique et conceptuelle. J'ai sans doute le temps de mourir plusieurs fois. (bonnes morts, alors)

Cédric, victime de la philosophie universitaire française.

D'un point de vue personnel peut-être que cela te soulage de déballer ici tes rancunes (souvent partagées, d'ailleurs, face à certains enseignements) mais à part identifier ma logorrhée aux penseurs que tu mentionnes je ne vois pas en quoi tu fais avancer le débat : tu as des références de bouquins de philosophie analytique qui permettraient d'aller plus loin ?, car ta réponse ne me satisafait pas beaucoup !

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D'un point de vue personnel peut-être que cela te soulage de déballer ici tes rancunes (souvent partagées, d'ailleurs, face à certains enseignements) mais à part identifier ma logorrhée aux penseurs que tu mentionnes je ne vois pas en quoi tu fais avancer le débat : tu as des références de bouquins de philosophie analytique qui permettraient d'aller plus loin ?, car ta réponse ne me satisafait pas beaucoup !

Petits déjeuners continentaux et goûters analytiques

Une bonne introduction informelle et humoristique (pour rester dans les rancoeurs personnelles, c'est le meilleur spécialiste en France, le meilleur professeur que j'ai connu et il se trouve avec 10 étudiants seulement à son cours de licence, les gens lui préférant notamment la philosophie indienne, ou la philosophie de l'art)

Un ouvrage plus général, mais inégal.

Un exemple de philosophie analytique sur un thème connu, la théorie de la connaissance. Difficile d'accès par rapport aux deux autres.

Le plus grand philosophe du XXe siècle

Enfin, deux ouvrages très avancés, si tu as déja une bonne connaissance des concepts philosophiques (je ne parle bien sûr pas de l'Autre, de la différance, ou de l'ek-sistence)

Edit : tous les liens ne fonctionnent pas mais il y en a assez

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Invité Aurel
l'an prochain tu auras certainement la meilleure école de France (je ne te fais pas un dessin pour te dire laquelle est ce …)

Tu veux dire… HEC ?

--> c'est bon, je sors

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Invité (=S=)
Tout.

Je ne connais pas Pascal Engel, sinon de nom. Mais remarque que je ne t'ai pas demandé des ouvrages introductifs sur la philo analytique (j'aurais su chercher) ni qui tapent sur la philo continentale (je le fais tout seul en mon for intérieur) mais qui permettent de départager le grand (=S=) et l'encore plus grand Eti-N (en tous cas, il a tout pour le devenir…, je ne suis plus ironique, là), quant à savoir s'il est permis oui ou non de dire (avec toutes les nuances qu'il faut) légitimement, comme le fait Popper par ex., que Platon (qui déjà parlait d'Autre, hein, ce n'est pas un mot des soixante-huitards) est un proto-communiste, ou s'il y a des aspects qu'on peut qualifier de "communistes" au sein de sa pensée, participe à la substance intemporelle du "communisme"; qui décide des découpages doctrinaux politiques et sur quelle base garder liberté d'interprétation, possibilité de repenser des idées (et nom des choses), de distinguer pratique et théorisation, sans tomber dans les sophismes, ni la philosophie officielle. Désolé encore si tu considères que ces questions sont du verbiage… (mais en effet, cela n'a rien à faire dans ce fil, à la longue) Metaphysics et le PC de Engel ont l'air très bien.

"les gens lui préférant notamment la philosophie indienne, ou la philosophie de l'art" : comme disait l'autre, c'est leur choix, non ?

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Invité Conservative French

Mon dieu…dans ces murs, on cite Pascal Engel et on souhaite la mort de philosophie allemande et le triomphe immortel des talibans de la philosophie analytique. Je vacille…je retiens mon souffle…et je détourne le regard de mon écran, qui vient se poser sur ma bibliothèque. Ni Searle, ni Carnap, ni Quine, ni même Russell mais bien présents tous ces boches -ou bochophiles- aux noms obscurs Strauss, Heidegger, Arendt, Dixaut, Rosen, Hegel…Je crains que le tournant linguistique ne soit pas tout à fait passé par moi. :icon_up:

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Ni Searle, ni Carnap, ni Quine, ni même Russell mais bien présents tous ces boches -ou bochophiles- aux noms obscurs Strauss, Heidegger, Arendt, Dixaut, Rosen, Hegel…

C'est fort dommage, vous manquez probablement quelque chose - sans compter d'ailleurs qu'il est assez ridicule de critiquer un courant de pensée particulier sans l'avoir étudier. Et puis, Heidegger ou Hegel, j'ai comme des doutes.

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tous ces boches -ou bochophiles- aux noms obscurs Strauss, Heidegger, Arendt, Dixaut, Rosen, Hegel…Je crains que le tournant linguistique ne soit pas tout à fait passé par moi. :icon_up:

Stirner, Nietzsche, Schopenhauer, kennen Sie sie ?

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Mon dieu…dans ces murs, on cite Pascal Engel et on souhaite la mort de philosophie allemande et le triomphe immortel des talibans de la philosophie analytique. Je vacille…je retiens mon souffle…et je détourne le regard de mon écran, qui vient se poser sur ma bibliothèque. Ni Searle, ni Carnap, ni Quine, ni même Russell mais bien présents tous ces boches -ou bochophiles- aux noms obscurs Strauss, Heidegger, Arendt, Dixaut, Rosen, Hegel…Je crains que le tournant linguistique ne soit pas tout à fait passé par moi. :icon_up:

Je ne ferai que deux remarques : il serait plus approprié de qualifier de "talibans" tous ces intellectuels qui refusent de regarder devant eux et préfèrent disséquer des cadavres (dixit Kurt Flasch, qui est on ne peut plus historiciste, constructionniste social …)

Le tournant linguistique ?Cher Monsieur, vous êtes en retard d'un demi-siècle, et vous auriez mieux fait de citer Jaegwon Kim, Fred Dretske ou Daniel Dennett. Il est toujours intéressant de noter que ceux-là mêmes qui prétendent démontrer la vacuité de la philosophie analytique s'attaquent aux philosophes dits du tournant linguistique (étant fermés par principe aux sciences cognitives) avec en outre, une ignorance des notions techniques élémentaires (combien de fois n'ai-je pas entendu qu'une proposition était formulée dans un langage).

Du boneur d'être réactionnaire …

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Un point de vue intéressant sur le soixante-huitardisme de la jeunesse française, paru il y a une dizaine de jours dans le Monde (et donc accessible seulement aux abonnés). L'auteur est un doctorant à l'université de Marne-la-Vallée.

Sous le CPE, la plage

Article paru dans l'édition du 15.03.06

Moi aussi, j'ai manifesté, j'ai protesté, j'ai occupé pour rejoindre la grande histoire des luttes

A de multiples reprises durant les années que j'ai passées au lycée ou à l'université, j'ai participé à des manifestations, envahi des amphithéâtres, me suis assis sur la chaussée devant des rectorats. Je pense même que s'il m'avait été « donné » alors d'occuper la Sorbonne, je n'aurais pas hésité, et ce quelle qu'en soit la raison. Car je sais aujourd'hui - je pense en fait l'avoir toujours su - que mes motivations étaient étrangères à mes revendications. Celles-ci, je le crois, étaient un prétexte, même si je tentais de me persuader du contraire et que j'étais capable de les mettre en scène avec une apparente conviction.

Quel but servait alors un tel prétexte ? Eh bien, je crois, celui de participer à l'histoire. Car j'ai grandi, comme beaucoup de mes contemporains, dans un contexte apparemment anhistorique. J'ai, en quelque sorte, cru être privé d'histoire. Parce que nos ancêtres ont acquis de haute lutte ce dont nous jouissons aujourd'hui sans même nous en rendre compte, nous voilà désoeuvrés. D'où cette tendance à s'inventer des causes et se trouver des ennemis. Quand je battais le pavé, je disposais de quelques revendications bien ficelées que j'étais prêt à exposer si l'on m'interrogeait. Je les avais simplifiées au maximum, car je voulais avoir l'esprit libre pour contempler cette foule qui m'accompagnait et surtout pour que rien n'entrave la sensation enivrante d'être emporté par une déferlante historique. J'étais tout juste contrarié par les couleurs trop criardes des manifestations, qui ne correspondaient en rien à l'habit noir et blanc de l'histoire dont avaient témoigné toutes les photographies des événements révolutionnaires passés.

Il ne fait aucun doute que les étudiants qui ont occupé la Sorbonne ces derniers jours sont prisonniers, comme je l'ai été, d'une sorte de présent historique. Une chose le prouve à elle seule : les images des sièges universitaires montrent que les slogans de 1968 refleurissent : « Sous les pavés, la plage » s'inscrit de nouveau sur les tableaux noirs. Ces réminiscences du passé dans des assemblées générales d'aujourd'hui démontrent que les grévistes, en partie sans doute encouragés par des « adultes » fiers de leurs exploits passés, sont mus par l'envie de vivre l'histoire, ici et maintenant. Parallèlement à cette envie, l'hameçon de la revendication n'attrape qu'un menu fretin, ce pauvre contrat première embauche (CPE) qui passait par là. Assurément, les grosses ficelles du passé semblent avoir plus d'allure que la prise insignifiante du jour.

Cette relation ambiguë, voire paradoxale à l'histoire, n'est malheureusement pas l'apanage de la jeunesse. De nos jours, il est frappant de voir à quelle vitesse les événements qu'il nous a été donné de vivre sont « historicisés », notamment par les « docu-fictions » télévisuels ou cinématographiques. Ainsi, à peine étions-nous sortis du traumatisme du 11-Septembre que le coup monté par Mohammed Atta était porté à l'écran.

Nous devrions rappeler sans cesse que l'histoire ne se vit pas, mais se raconte. La seule chose que l'on puisse vivre est la réalité du temps présent et, en dehors de celle-ci, toute mobilisation est vaine ou condamnée à errer dans un vide sidéral. Les réalités d'aujourd'hui, ce sont le changement climatique, la montée en puissance économique de la Chine et de l'Inde, le fondamentalisme islamique et, entre autres, en France, le problème du chômage. J'ignore si le CPE sera efficace sur ce dernier point. Je sais néanmoins qu'une idée simple a présidé à son élaboration : introduire de la souplesse dans le code du travail pour faciliter l'embauche. Et qu'oppose-t-on aujourd'hui à cette simplicité ? Des certitudes, des débats interminables, des grands mots, des défilés. On mime les scènes d'un autre âge alors que la seule question à se poser est celle de l'efficacité de la mesure et que la réponse viendra de sa mise en oeuvre effective - sur laquelle on peut à tout moment revenir.

J'invite mes contemporains à s'immerger à nouveau dans le temps présent, à revêtir l'habit de couleur de la réalité. Quelle importance de perdre la conscience de cette histoire que nous désirons vivre puisque c'est pour mieux l'« habiter » ?

BERTRAND ALLIOT

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Un point de vue intéressant sur le soixante-huitardisme de la jeunesse française, paru il y a une dizaine de jours dans le Monde (et donc accessible seulement aux abonnés). L'auteur est un doctorant à l'université de Marne-la-Vallée.

Ce texte rencontre totalement mes réflexions de ces derniers jours.

Les soixante-huitard disent, nous avions l'espoir d'une société plus généreuse! Leur générosité les distinguerai. C'est totalement faux: ils voulaient vivre une grande kermesse collective leur donnant le sentiment d'être généreux. La générosité est affaire d'individus, elle réclame un effort de volonté pour pas mal de gens.

Rien ne m'offusque plus que les soixante-huitards qui reconnaissent s'être trompés mais se complaisent dans les images que leur renvoient la jeunesse.

Il n'y a pas d'idées généreuses mais fausses qu'il faudrait encourager. Il faut leur préférer les idées généreuses et vraies. Et la jeunesse n'est pas une excuse à la fausseté d'une idée. Sinon, il faut vouloir aussi la catastrophe que les idées fausses apporteront.

Pratiquement personne n'est capable de tenir ce langage. Ce n'est pas jeune.

Qui oseras se dresser contre la jeunesse?

Ces remarques n'apportent pas grand chose par rapport au texte, mais à moi, elles me font plaisir, c'est leur seule justification! :icon_up:

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Très beau texte, Dardanus.

Les soixante-huitard disent, nous avions l'espoir d'une société plus généreuse! Leur générosité les distinguerai. C'est totalement faux: ils voulaient vivre une grande kermesse collective leur donnant le sentiment d'être généreux.
Très juste.
Ces remarques n'apportent pas grand chose par rapport au texte, mais à moi, elles me font plaisir, c'est leur seule justification! :icon_up:
Remarques généreuses, néanmoins… :doigt:
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« Il n’arrivait pas à comprendre cette déroute à l’issue de plusieurs années d’études. Il pouvait bien voir que personne autour de lui ne pensait à comparer tous ces échecs d’aujourd’hui avec les réussites d’hier. Que les aînés toisaient une jeunesse déboussolée qui avait du mal à s’en sortir, et se déculpabilisaient en les accusant d’être bien moins bons qu’eux. Il avait l’intime conviction aussi, que le chômage presque systématique était le désespoir des générations actuelles, et que la faute incombait en grande partie aux seniors – génération 68 – qui n’avaient pas pris la peine, après leur fausse révolution idéologique, de préparer le terrain économique pour les générations suivantes ; jouisseurs conformistes qui s’étaient très vite rattachés à la norme sociale, ils s’étaient arrogés tous les privilèges, tous les honneurs, sans rien laisser derrière eux… »

Caméra, Marc Alpozzo

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