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il y a 15 minutes, frigo a dit :

La tournure " être dans" est très commune pourtant.

 

Et en général abusive pour tout ce qui a trait à des états d'esprits. Ex: lorsque que M. le ministre Gerald Darmanin nous explique "ne pas être dans l'idéologie" (alors qu'il faudrait dire, par ex., : "je ne suis pas un idéologue").

 

La plupart des emplois exacts sont des expressions toutes faites avec un référentiel physique en dépit du sens figuré lorsqu'il y en a un (ex: être dans de sales draps ; être dans le pétrin ; Ne pas être dans son assiette ; être dans les clous ; Être dans l'œil du cyclone ; être dans la lune ; être dans une impasse).

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Je commence une thèse d'histoire des idées très intéressante sur les idées socialistes dans la France du 18ème siècle:

 

"Dans ce livre, on se tiendra strictement au sens économique et social du mot socialisme ; c'est d'ailleurs la raison d'être de la doctrine. On appellera socialistes les écrivains du XVIIIe siècle qui, au nom du pouvoir de l'Etat, et dans un sens égalitaire ou communiste, ont entrepris de critiquer, de modifier ou de renverser l'organisation traditionnelle de la propriété et de la richesse, par conséquent de la société ; car cela est l'essence du socialisme." (p.I-II)

"Il arrive fréquemment, de nos jours, que ces idées soient associées à d'autres: je mentionne, par exemple, celle de l'égalité des deux sexes, la croyance au progrès, le désir de la paix perpétuelle, la foi en une morale naturelle et irréligieuse. Beaucoup de socialistes les regardent comme inséparables de leurs doctrines économiques. Lorsque de telles théories se rencontreront chez des écrivains présentant les caractères du socialisme, tel que je l'ai défini, j'en tiendrai compte. Mais on peut être socialiste sans les avoir, et les avoir sans être socialiste. C'est pourquoi, par exemple, je parlerai longuement de Rétif de la Bretonne, qui a été très catholique, et ne m'arrêterai pas aux idées de l'abbé Dinouart sur l'égalité des deux sexes, à celles de Turgot sur le progrès, à celles de l'abbé de Saint-Pierre sur la paix perpétuelle, aux prêches de Voltaire ou de d'Holbach sur la morale naturelle et la libre pensée. Je les regarde comme tout à fait en dehors de mon sujet, tel que je l'ai circonscrit. On ne sera donc point étonné de ne pas trouver dans cette étude un grand nombre d'écrivains que beaucoup d'historiens du socialisme ont mentionnés avec éloge et revendiqués pour leurs. Ils ont avec les socialistes des idées communes, parfois ont pu contribuer indirectement et inconsciemment à l'avancement de leurs théories ; mais ils leur sont totalement étrangers d'inspiration et de tendances." (p.II)

"Avant tout -le fait est trop constant pour qu'on y insiste- le XVIIIe siècle est une réaction contre l'époque de Louis XIV, contre l'absolutisme religieux et politique du grand roi. Avant sa mort déjà, les esprits tendent à s'émanciper ; sitôt qu'il a disparu, nous avons la Régence et ses débauches de toute espèce. Les idées qui ont prévalu en Angleterre en 1688 excitent la faveur et l'enthousiasme et c'est sous leur influence que se fait sentir, dès la première moitié du XVIIIe siècle, un double mouvement de réaction. Le nom de Voltaire en matière de religion, celui de Montesquieu dans le domaine de la politique, sont ceux en qui s'affirmèrent le plus brillamment ces tendances. L'un aboutit au déisme, ou au delà ; l'autre a une préférence marquée pour la monarchie constitutionnelle et admire la démocratie. Après 1750, se produit la seconde phase, comme la seconde vague du libre examen. L'athéisme de d'Holbach est au déisme de Voltaire ce que la politique de Rousseau est à celle de Montesquieu. Ces écrivains de la deuxième génération ne font, d'ailleurs, en général, que développer et exprimer sous une forme plus précise les idées qui étaient en germe chez les premiers.
Tous les grands noms du XVIIIe siècle se groupent autour de ces deux questions de la religion et du gouvernement. Ce sont elles qui, sans contredit, tiennent le premier plan. La lutte de la morale naturelle contre le catholicisme et celle des droits de la liberté contre le despotisme remplissent presque toute l'histoire intellectuelle du XVIIIe siècle. Si donc, dans notre étude, nous avons à parler de bien des écrivains illustres, nous pouvons être assurés, dès maintenant, que les idées que nous aurons à relever ne tiennent chez eux qu'une place restreinte, et dépendent de celles qu'ils émettent sur les questions pour eux importantes et à l'ordre du jour.
Étant données ces tendances dominantes du XVIIIe siècle, comment du socialisme put-il s'y produire ? Pour le concevoir, il est nécessaire de se rappeler quelle forme prit la réaction politique et religieuse
." (p.2)

"Par réaction contre l'artificiel, le convenu, la gêne des villes et des sociétés policées, le goût de la nature fut à la mode dans la littérature. On louait la campagne, la tranquillité des champs, la solitude des forêts, la vie simple et innocente. La ville et le voisinage de la société disposent au mal, la nature est bonne et la vertu s'est réfugiée dans les déserts. Ce sentiment s'ajoutant aux regrets de l'état de nature, l'idée du bon sauvage naquit. On en trouva les germes dans les écrits de quelques voyageurs enthousiastes. Les relations de ceux qui suivirent, imbues de ces dispositions nouvelles, furent pleines d'éloges attendris du sauvage et le représentèrent volontiers comme un être exceptionnellement innocent, bon et heureux: bref comme l'homme de la nature. Alors on acheva tout à fait d'oublier que l'état de nature n'était qu'une abstraction logique, on en fit un modèle de société et on en montra avec enthousiasme la supériorité sur celui où la propriété et les lois ont tout corrompu." (p.6)

"Il parut que la République de Platon, au lieu d'un traité de morale, était le modèle du plus parfait des gouvernements, et on jugea que le gouvernement de Sparte et celui des Lois étaient peut-être les meilleurs qui pussent exister." (p.7)

"Depuis Richelieu et Louis XIV, la centralisation est établie et chacun a l'habitude de recourir en toute occurrence à l'Etat. Rien n'est plus opposé aux tendances des gens du XVIIIe siècle que l'initiative individuelle. Continuellement, on voit invoquer l'appui du pouvoir central. Les habitudes sont si bien prises, que les philosophes eux-mêmes n'ont confiance que dans les rois pour établir le bonheur des peuples. Diderot est en adoration devant Catherine II, les économistes n'ont pas d'autre idéal de gouvernement que le despotisme légal. L'idée d'un pouvoir central, fort et tout-puissant, intervenant et dirigeant en toutes circonstances, est profondément gravée dans les esprits. Au point de vue socialiste, la forme qu'on prête à ce pouvoir n'importe guère. Rousseau transportera au peuple tous les droits dont jouissait la royauté absolue. Mais avant lui existait déjà l'idée du rôle prépondérant de l'Etat et, en grande partie, l'idée de sa toute-puissance dans les questions relatives à la propriété.
Les idées courants sur les rapports du souverain et de la propriété sont, en effet, éminemment favorables au socialisme.
La doctrine du droit romain de l'époque classique, celle qui déduit la propriété du travail et de la liberté personnelle, et fait ainsi d'elle et de ses conséquences un droit antérieur à toute société, sacré et imprescriptible, n'est guère en vogue, quoiqu'elle ait quelques adhérents.
A la fin du XVIIe siècle, elle avait été reprise avec énergie, en Angleterre, par Locke."
." (p.8-9)

"Deux doctrines surtout se partagent les esprits: d'abord, celle qui dérive du droit féodal. Le roi est seigneur et propriétaire de toute terre. Il a la directe de tous les domaines de son royaume. Nul ne possède que de son consentement et tant qu'il consent. Cette théorie, d'origine ancienne, n'a fait que se fortifier au dernier siècle. Le Vayer de Boutigny établit, dans son Traité de l'autorité des rois touchant l'administration de l'Eglise, que le roi a "la seigneurie directe et souveraine de toutes les terres du royaume". Le principe avait été posé dans le code Marillac en 1629 et Louis XIV le formula plus énergiquement dans l'édit d’août 1692. Ce n'étaient pas des idées purement théoriques. Voici comment Louis XIV les commentait dans ses instructions au dauphin: "Tout ce qui se trouve dans l'étendue de mes Etats, de quelque nature qu'il soit, nous appartient au même titre et nous doit être également cher... Vous devez être bien persuadé que les rois sont siegneurs absolus et ont naturellement la disposition pleine et entière de tous les biens qui sont possédés, aussi bien par les gens d’Église que par les séculiers, pour en user en tout comme de sages économes."
Le
Testament politique du marquis de Louvois proclame avec énergie le droit absolu du souverain et, d'après Saint-Simon, une consultation des docteurs de Sorbonne, que le père le Tellier rapporta au roi, "décidait nettement que tous les biens de ses sujets étaient à lui en propre et que, quand il les prenait, il ne prenait que ce qui lui appartenait".
D'après cette théorie, la propriété est complètement dans les mains du souverain, ou plutôt, à vrai dire, l'Etat seul est propriétaire, puisque personne ne possède que par une concession révocable. En pratique, la théorie était appliquée: le roi confisquait les biens des protestants et empiétait continuellement sur les droits des particuliers. Les mesures fiscales de tout genre respectaient peu la propriété ; les lois arbitraires sur le commerce des grains y portèrent des atteintes fréquentes. Cette doctrine ne cessa pas d'avoir cours au XVIIIe siècle où, d'ailleurs, elle rencontra d'ardents adversaires. Il n'est pas besoin de faire remarquer qu'elle est la pure théorie socialiste et que la doctrine de la directe du roi absolu n'est autre chose que celle de l'Etat propriétaire
." (p.10-11)

"La deuxième doctrine sur la propriété, qui fut en vogue au XVIIIe siècle et qui s'y épanouit librement, est celle que nous trouvons déjà indiquée dans Grotius et dans Puffendorf. Les hommes vivaient primitivement dans une complète communauté de tous les biens de la terre. Ils s'en sont écartés volontairement, en créant l'état de société et la propriété particulière. Il est de toute évidence que celle-ci n'a pris sa naissance que par les lois civiles et que, par conséquent, ces dernières ont tout pouvoir pour la réglementer et la modifier. Donc, celui qui fait la loi, le souverain, qu'il soit le peuple lui-même ou qu'un monarque le représente, a droit de légiférer sur elle et d'en transformer les conditions. Les déclarations de nos auteurs sont catégoriques, encore qu'ils ne dégagent pas toutes les conséquences que l'on peut en tirer." (p.11-12)

"Cette cette théorie qui eut le plus de succès au XVIIIe siècle ; et elle fut adoptée d'une manière presque général. Depuis Montesquieu jusqu'à Mirabeau, nombreux sont les écrivains qui admettent que la loi civile a pu régler à son gré l'organisation de la propriété et ne doit consulter que l'intérêt général. Ils déclarent, pour la plupart, que l'intérêt général est de conserver intactes les propriétés ; mais le jour où la volonté générale, étant souveraine, juge que le remaniement des propriétés serait désirable, rien dans cette théorie n'est opposé à la constitution d'une société nouvelle avec un nouveau régime de la propriété. Nous avons, là encore, un puissant germe de socialisme.
Si le socialisme trouvait quelque appui dans les anciennes doctrines sur la propriété, il faut aussi mentionner, parmi les causes qui parfois l'ont favorisé, la persistance, consciente ou non, de l'esprit chrétien. Le souvenir des premières communautés est vivace, de même celui des violentes maximes des pères contre la propriété particulière
." (p.13)

"La grande raison de l'infériorité du socialisme du XVIIIe siècle est que, pour légitimer ses critiques, il ne s'appuie pas sur l'observation de la réalité et sur l'examen attentif sur sort de la classe inférieure.
Une introduction naturelle et indispensable de l'histoire du socialisme au XIXe siècle est l'étude de la condition des travailleurs. Celui-ci sert, à la fois de raison d'être aux théories socialistes et d'argument à leurs revendications. Le
Capital de Marx est une étude de l'histoire ouvrière en Angleterre, en même temps que la Bible du socialisme. La théorie s'inspire continuellement de la réalité.
Au XVIIIe siècle, il n'en est pas ainsi.
" (p.18)

"Quant à la seconde catégorie des travailleurs des champs, unie à celle-là par des gradations insensibles, elle comprend ce qu'on appelait à proprement parler les manouvriers, les travailleurs libres ; c'est-à-dire ceux qui, n'étant pas attachés à un sol et à un genre de travail particulier, n'avaient, pour soutenir leur vie, que le salaire chanceux qu'ils trouvaient en louant leur bras à l'époque de la moisson ou des travaux des champs. Ceux-là étaient exposés à toutes les rigueurs de la concurrence, à toutes les vicissitudes des prix et des saisons et ils se trouvaient véritablement dans une situation analogue à celle de nos ouvriers modernes. C'étaient eux qui alimentaient les armées, les dépôts de mendicité, les hôpitaux et les prisons et c'est à eux que pensaient ceux qui, au XVIIIe siècle, se sont apitoyés sur la condition du travailleur. C'est à eux que songeaient les écrivains qui, au lieu de demander avec les économistes dans l'intérêt général de l'agriculture le partage des biens communaux mal administrés, réclamaient au contraire qu'on les conservât, puisqu'ils formaient la dernière ressource de ces misérables. C'est la vue de leur sort qui inspira à Linguet et à Necker, à tous les adversaires des physiocrates en général, leurs amers sarcasmes sur la libre concurrence et le libre contrat, conclu entre le propriétaire et le travailleur." (p.23)
-André Lichtenberger (agrégé d'histoire), Le Socialisme au XVIIIe siècle. Essai sur les idées socialistes dans les écrivains français du XVIIIe siècle, avant la Révolution, Thèse de doctorat présentée à la faculté des lettres de Paris, Biblio Verlag - Osnabrûck, 1970 (1895 pour la première édition), 471 pages.


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Il y a 2 heures, Johnathan R. Razorback a dit :

(p.23)

 

Il y a 2 heures, Johnathan R. Razorback a dit :

471 pages.

Tu es en train de nous dire que tu comptes nous faire subir vingt fois de suite le même genre de message où tu recopies 30 % du chapitre que tu viens de lire ? On ne veut pas d'emmerdes avec les ayants-droit ! :lol:

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J'ai commencé Politique et impolitique de Julien Freund, qui restera, on peut le souhaiter, comme la plus grande figure de la philosophie politique française.

 

Il est intéressant de noter que, contrairement à ses habitudes, il se livre à des allusions à l'actualité, et même à plusieurs attaques explicites contre la gauche.

 



« Si l’on voulait présenter des exemples d’impolitique, le gouvernement socialiste en a fourni abondamment de 1981 à 1986. Venus au pouvoir avec des idées vieillotes en matières économiques, les socialistes ont été contraints de les renier, après deux ans, pour se régler sur les économies environnantes. Sur la presque totalité des grands problèmes politiques Mitterand a été obligé de faire machine arrière, que ce soit à propos de la Nouvelle Calédonie, de l’école privée, de la presse, de l’affaire Greenpeace ou des otages au Liban. Il n’a réussi que dans les domaines politiquement mineurs, par exemple la loi électorale, où il pouvait faire preuve de son habileté politicienne en matière d’astuce, de rouerie et d’intrigue. Je me contenterai de commenter un seul exemple, celui de l’équipée militaire au Liban. Lorsqu’on est menacé et surtout lorsqu’on est attaqué, il n’y a que deux et rien que deux solutions possibles : la risposte ou la capitulation. Le gouvernement a échafaudé intellectuellement une troisième voie, appelée force d’interposition. Lorsque l’attentat contre le contingent français eut fait des dizaines de morts et qu’on eut renoncé à la riposte, il ne resta plus que la capitulation, puisque le gouvernement français a retiré ses troupes quelques jours plus tard. Du moment que l’on refusait d’avance de riposter, il ne fallait pas aller au Liban. Autrement dit, il était impolitique d’y envoyer des troupes dans des conditions aussi contraire à la fonction militaire. » -Julien Freund, Politique et impolitique, Paris, Éditions Sirey, 1987, 426 pages, p.3.



 

On lui doit notamment une bonne description de la mentalité que J. P. Le Goff qualifiera plus tard de "gauchisme culturel" (cf: http://oratio-obscura.blogspot.com/2016/09/le-gauchisme-culturel-des-origines-au.html ):
« L’intellectualisation consiste en somme dans le processus de diffusion de l’abstraction intellectuelle dans le comportement d’être qui ne sont pas des intellectuels, mais qui y sont devenus réceptifs par la vulgarisation de la pensée idéologique. Cette abstraction renonce au raisonnement, au contact des actions concrètes, pour envisager les choses essentiellement sous l’angle des intentions vagues, des velléités et des fins indéterminées, en entretenant une sourde révolte contre un monde considéré comme débile, en tout cas insensible à la gravité des idées abstraites. Il en résulte une insatisfaction contestataire, souvent ensevelies dans des âmes dépitées face à l’incompréhension prétendue des autres, sous prétexte qu’ils seraient insensibles aux immenses malheurs d’un monde à sauver. L’imagination se dépouille de toute ironie pour devenir sérieuse et compassée, comme s’il fallait par exemple être à tout instant à l’écoute du Tiers Monde, à l’affût des conversations pour débusquer les ombres du racisme, prêt à manifester en faveur de la paix ou disposé à libérer le genre humain chaque fois d’une autre aliénation. L’événement le plus insignifiant est interprété comme déterminant pour le destin du monde. Tout se passe comme si on voulait nous condamner à une existence chagrine, dépourvue de tout humour et de toute gaîté. En fin de compte tout sentiment s’épuise dans un sentimentalisme militant et toute émotion dans une dramatisation sentencieuse. L’insatisfaction se traduit le plus souvent par un ténébreux mécontentement pour la profession qu’on occupe. En effet on se plaît à rêver d’une profession seconde, sous la forme par exemple d’une velléité de s’engager aux côtés des médecins sans frontières, sans aucune qualification dans le domaine de la santé, rien que pour jouer avec son désir indistinct de dévouement dans toutes sortes d’associations humanitaires, fraternelles ou soi-disant culturellement libératrices (féminisme, écologisme, etc.). La priorité écologique par exemple n’est pas donnée à une réflexion sur les conditions de la sauvegarde de la nature, mais à la manifestation rhétorique* préconisant cette sauvegarde. » (p.11)

 

Freund n'était pas libéral mais Politique et impolitique contient un ou deux passages appréciables en défense du capitalisme: « Le capitalisme demeure un proscrit. Il est vrai certains échecs du socialisme sont en train de « détabouiser » les notions de profit ou d’entreprise, mais il ne faut pas se réjouir trop tôt, car il ne s’agit sans doute que d’une trêve momentanée. » (p.7)

 

* Dernier exemple en date de cette rhétorique de culpabilisation, geignarde et improductive: https://www.lemonde.fr/climat/video/2018/12/15/nous-sommes-a-court-d-excuses-le-puissant-discours-d-une-jeune-ecologiste-suedoise-a-la-cop24_5398255_1652612.html

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Le 19/01/2019 à 18:59, Johnathan R. Razorback a dit :

 

TREEEEEMBLEZZZZ :D

 

 

Ah bah je vois que tu est un cinéphile averti. :lol: (Ce film n'empêche.. Tiens faudrait que je le revoie).

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il y a 25 minutes, Alchimi a dit :

Ah bah je vois que tu est un cinéphile averti. :lol: (Ce film n'empêche.. Tiens faudrait que je le revoie).

 

Ah non, pas du tout, je regarde assez peu de films, et celui-là je ne l'ai pas vu. C'est quelqu'un qui me posait la question un jour, rapport à mon pseudo. Que j'avais choisi pour quelque chose de bien plus cool.

 

 

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Je vois que quelqu'un ici jouait la faction la plus noobesque de 40k*BLAM*  les glorieux SPESS MEHREENS!

 

Sinon, Razorback, le film en question, est quand même devenu un film culte dans son genre (film de monstre/horreur). Un espèce de Jaws à l'australienne. Il peut valoir le détour pour le fun.

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Des fois je me dis que c'est inutile de noircir des pages et des pages contre les théories de Marx, que plus personne n'est marxiste, ou n'attaque le capitalisme en s'appuyant sur Das Kapital, de nos jours. Et puis je lis mes contemporains:

 

"Benjamin Constant prône la fort intéressante idée de l'horizon de paix offert aux modernes par la substitution du commerce à la guerre, mais l'idée marxienne de la plus-value limite l'optimiste [sic] de Constant."

-Sarah Vajda, Maurice Barrès, Flammarion, coll. Grandes Biographies, 2000, 434 pages, note 4 p.384.

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L'ouvrage d'Audier reste instructif jusqu'au bout:

 



"[Kirk] n'appréciait [...] pas du tout le libéralisme extrême de Mises, avec lequel il polémiqua: à ses yeux, l'économiste autrichien -qui séduisait alors tant d'anti-étatistes et de "libertariens" radicaux, notamment Rothbard -n'était qu'un libéral dogmatique, éloigné des idées conservatrices et fondamentalement incapable de comprendre le concept clé de "communauté". A travers sa réfutation du maître du libéralisme autrichien pointe la conviction centrale de Kirk, à savoir que l'individualisme libéral et l'apologie du laisser-faire ont des effets catastrophiques: ils ruinent les conditions mêmes d'une vie sociale et économique décente en dissolvant les liens communautaires traditionnels. C'est la raison pour laquelle, au-delà de cette école autrichienne, Kirk était très hostile à l'individualisme pur des "libertariens": pour lui, leur conception atomistique du sujet ne pouvait que conduire à pulvériser les institutions intermédiaires comme la famille, les associations locales, les Églises, etc. En ce sens, les libertariens, à ses yeux, étaient les complices involontaires du renforcement de l'Etat central.
Cette hostilité confirme pourquoi Kirk devait finalement refuser de collaborer à l'organe majeur du conservatisme qu'était la
National Review de Buckley: il jugeait que trop de partisans de l'individualisme américain y participaient, comme Chodorov -l'un des pères intellectuels, on l'a vu, de la mouvance libertarienne et isolationniste, notamment celle incarnée par Rothbard- et Franck S. Meyer. Même Buckley, souvent catalogué comme un authentique conservateur, présentait des traits idéologiques complexes qui l'inscrivaient aussi dans la nébuleuse de l'individualisme libéral. Ce pilier du renouveau conservateur américain s'était fait connaître assez jeune par un pamphlet contre le "collectivisme" selon lui dominant dans les campus américains, et sa bataille relevait aussi d'une logique libérale et ultra-libéral. Mais il sera également proche des plus extrémistes parmi les conservateurs, et ce de manière durable- encore en 1978, il situera Kirk parmi les références majeures qu'il admirait, avec Burnham, Nisbet et le straussien Jaffa, plus encore que Meyer. En tout cas, cette ligne de partage entre les "vrais" conservateurs, d'un côté, les ultra-libéraux et les libertariens, de l'autre, était capitale aux yeux de Kirk, qui devait poursuivre ce combat toute sa vie: jusque dans les années 1980, il pestera contre les "libertariens" à la Rothbard, cette "secte gazouillante" ultra-libérale qu'il accusait d'entretenir un optimiste démesuré sur l'être humain, de dissoudre les liens relevant de la tradition, de la communauté et de la communauté et de la coopération, en liquidant toute forme d'Etat, d'ordre et de transcendance religieuse. Ce pourquoi il ne pouvait y avoir, selon lui, d'alliance solide entre une tendance conservatrice et une tendance libertarienne." (p.528-529)

"La critique du capitalisme par [le socialiste Karl] Polanyi [...] se trouve [...] recyclée par Kirk dans son apologie des liens communautaires traditionnels." (p.530)
-Serge Audier, Néo-libéralisme(s). Une archéologie intellectuelle, Paris, Éditions Grasset et Fasquelle, 2012, 631 pages.

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Rothbard remonte dans mon estime:

 

"Rothbard déplore la passion de Hayek pour la rule of law [...] Cette valorisation du règne impersonnel des lois comme tel -selon un formalisme qui, pour Rothbard, n'est que le corrélat de l'oubli de la tradition, plus substantielle, du droit naturel- conduirait l'Autrichien à perdre de vue les enjeux les plus importants que recouvre le concept de liberté. En effet, à suivre le critère trop abstrait de Hayek, objecte Rothbard, si à chacun était interdit de boire ou de blasphémer Allah, ou si chacun était emprisonné, de manière prévue par la loi impersonnelle, une fois toutes les trois années, alors on pourrait dire que la liberté est garantie ! La source de cette absurdité palpable tiendrait bien, selon Rothbard, au dédain désastreux que manifeste Hayek pour l'idée d'un droit naturel -notamment dans la version de Locke- consistant d'abord en la propriété de soi, et en la propriété tout court. Faute d'avoir abordé la question du contenu ou de la substance du droit naturel, Hayek se serait enfermé dans une logique le conduisant à privilégier l'aspect formel des choses, en accordant un rôle clé à l'égalité devant la loi -qui peut devenir une égalité dans la servitude- et non à la propriété de soi.
Indissociable de ce refus du droit naturel serait l'attaque hayekienne contre la raison -sans nul équivalent chez son maître Mises- au point que l'on peut dire que celle-ci est sa "bête noire". Ce faisant, Hayek commet la faute impardonnable, pour Rothbard de rejeter tout le rationalisme occidental, pourtant au cœur de la théorie du droit naturel et moderne. En effet, pour ce courant théorique, la raison seule peut découvrir la loi naturelle et assimiler les droits naturels et inaliénables de liberté. Faute de prendre au sérieux cette doctrine, Hayek est contraint, en outre, de s'enfermer dans une fausse alternative: ou bien le suivi aveugle des normes et des traditions, ou bien la force coercitive des organes gouvernementaux. Évidemment, ses préférences vont à la position traditionaliste et évolutionniste, au point qu'il rejette dans l'enfer du "constructivisme" rationaliste français -au demeurant, selon Rothbard, de façon caricaturale, en oubliant les précurseurs, en France, du libéralisme classique et du libertarisme- tout le rationalisme occidental. La confusion, se lament-t-il, est ici totale, tant du point de vue conceptuel que de celui de l'histoire des idées.
Ainsi, contrairement à Mises -dont il serait décidément, selon Rothbard, bien plus éloigné qu'il n'y paraît- Hayek ne serait au plan philosophique qu'un "néo-conservateur", en ceci qu'il plaide pour le suivi aveugle des traditions. Si Rothbard concède que Hayek se distingue d'un conservateur extrémiste comme Kirk, il ajoute aussitôt que c'est pour de très mauvaises raisons: l'Autrichien commettrait l'erreur inverse de celle du "nouveau conservateur" américain -l'erreur consistant à croire que la cause de la liberté repose sur le fait que nous ne savons rien ou presque, en sorte que nous devrions laisser ouverte la voie à de nouvelles et libres expérimentations. Au moins le réactionnaire Kirk juge-t-il que la tradition est pourvoyeuse de connaissances et de vérité: à juste titre, il n'est ni relativiste ni sceptique. Au contraire, Hayek plaide pour une conception faillibiliste radicale, encore plus dangereuse que le conservatisme dogmatique. Au fond, l'ancien disciple de Mises, cumulant les erreurs, récupère le pire du conservatisme et du pluralisme relativiste libéral: il rejoint parfois, déplore Rothbard, "la vénération kirkienne du Passé", mais aussi le faillibilisme de John Stuart Mill, qui ont en commun, par-delà leur incompatibilité, "l'attaque contre la raison humaine" [cf M. Rothbard, "Confidential Memo on F. A. Hayek's
Constitution of Liberty, Memorandum pour le Volfer Fund, 21 janvier 1958, in R. A. Modugno (éd.), Murray Rothbard vs The Philosophers. Unpublished Writings on Hayek, Mises, Strauss e Polanyi, p.67]."



-Serge Audier, Néo-libéralisme(s). Une archéologie intellectuelle, Paris, Éditions Grasset et Fasquelle, 2012, 631 pages, p.550-551.

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Il y a 5 heures, Johnathan R. Razorback a dit :

Hayek est contraint, en outre, de s'enfermer dans une fausse alternative: ou bien le suivi aveugle des normes et des traditions, ou bien la force coercitive des organes gouvernementaux.

Rothbard n'a pas lu Hayek attentivement : le processus d'évolution culturelle ne dit pas que telle règle qui émerge est bonne ou mauvaise. Dans The Fatal Conceit, Hayek explique clairement qu'on n'intègre pas de nouvelles règles parce qu'elles mènent vers l'expansion ou sont plus efficientes, mais parce qu'elles permettent aux groupes qui les mette en œuvre de procréer avec succès et d'intégrer des outsiders (p. 16 de l'édition originale). L'existence de l'institution est justifiée par sa fonction remplie auprès du groupe qui l'adopte (exemples avec l'émergence de la monnaie, expliquée de façon évolutionniste par Menger). Donc en plus, on parle d'institutions, pas d'interdire de boire du whisky. L'évolution culturelle témoigne d'une évolution de règles prescriptives à des règles abstraites. C'est pas n'importe quoi. Mais ça me donne des idées pour mon thread sur les praxéologistes face à l'évolution culturelle, merci ;) Et il y a ça aussi :

 

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Il y a 23 heures, Johnathan R. Razorback a dit :

Il parle aussi de "libertarisme" (p.546) pour désigner à la fois les anarcaps et les minarchistes / libéraux classiques...

 

Libertarisme ne veut pas dire libertaire, j'ai déjà vu le terme utilisé plein de fois par des commentateurs, c'est juste qu'ils ne connaissent pas le terme de libertarianisme.

 

Mais bon, on a déjà piqué le terme libertarian aux USA, on aurait pu leur laisser " libertarisme "

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Autant libertarien sonne assez bien, autant "libertarianisme" est un peu rude et à rallonge.

 

Et puis l'extension du terme est gênante. Cela dit, libéral était déjà utilisé pour désigner de simples parties du libéralisme (partisan de la liberté religieuse, du constitutionnalisme, etc.), et on ne reviendra sans doute jamais en deçà de l'OPA des liberals sur le terme.

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Apres La carte et le territoire que j'ai bcp aimé, j'ai entamé puis abandonné Les particules élémentaires, aucun intérêt. J'ai enchaîné sur Extension qui est assez pauvre d'un point de vue littéraire mais plus intéressant.

 

En parallèle je commence Notre jeunesse de Péguy. Will report back.

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