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Sur La Privatisation Des Chemins De Fer


Moon Man

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Un de mes contradicteurs sur un forum du Nouvel Obs m'a posté ceci.

J'aimerais savoir quels sont les arguments les plus intelligents en faveur de la privatisation des chemins de fer.

Sinon, vous aurez surement un site qui dit que la privatisation des chemins de fer est une bonne chose, comme ca, je pourrai leur dire quelque chose du genre "moi aussi je sais faire des copier-coller, etc."

Le problème en France vient du fait qu'on ne paye jamais directement le vrai prix d'un service : une partie est payée au guichet de la SNCF dans le prix du ticket, l'autre est payée par le contribuable"

Intéressons-nous donc aux chemins de fer anglais, chantres de la dénationalisation des services publics. L'objectif principal de la réforme était la réduction des contributions publiques.

L'ampleur du désastre

Pourtant, les subventions accordées aux compagnies privées ont pratiquement doublé pendant la période 1994-1997 par rapport à l’avant privatisation.

Le "Transport Ten Year Plan 2000" présenté en juillet 2000, peu avant l'accident d'Hatfield, avait consacré l’échec de la réforme en allouant 102 Milliards d'Euros de 2001 à 2011, dont 50 de fonds publics, aux compagnies de chemin de fer privées. Ce "Transport Ten Year Plan 2000" est un document officiel et public du gouvernement britannique qui peut être consulté librement en recherchant dans google sur le titre complet.

Le Chapitre 6 "investment", paragraphe 6.14 indique que le "Total Government funding over the period of the Plan will be £ 29 billion", soit 45 Milliards d'Euros au cours d'aujourd'hui.

Les pouvoirs publics anglais ont de plus été contraints à une subvention supplémentaire de 2,5 Milliards d'Euros pour remédier aux désordres les plus graves révélés par les accidents de Paddington et Harfield (Cette subvention est postérieure à ce document et n'y figure donc pas).

Soit très exactement 50 Milliards d'Euros à la parité GBP/Euro de 2001. L’état Britannique s’engageait ainsi à injecter chaque année près 5 milliards d'Euros dans les chemins de fer, soit 3 fois plus qu’avant la privatisation.

La réforme initiale posait pourtant pour principe que "les subventions à l’infrastructure devaient disparaître pour toujours" après la privatisation de Railtrack.

Comparaison avec le système Français

Ce chiffre de 5 Milliards d'Euros par an est à rapprocher de la charge que représentent la SNCF+RFF, évaluée de manière exhaustive par le sénat à 8 Milliard d'Euros, et incluant notamment 2 Milliards dotations en capital (dont l'état reste propriétaire) et 1 Milliard pour la charge de la dette. Ce document peut tout aussi librement être consulté sur le site du sénat.

Si on tient compte du fait que la SNCF assure 70 milliards de km-voyageurs, alors que l'ensemble des compagnies anglaises en assurent 39, vous obtenez un coût pour le contribuable de 13 centimes d'Euros par km-voyageur en Angleterre, et de seulement 11 pour la SNCF+RFF.

Et, cerise sur le gâteau, il convient de rappeler que les tarifs britanniques sont les plus élevés d’Europe : ils représentent environ le double des tarifs français qui se situent eux-mêmes dans la moyenne du continent.

Un exemple concret:

Un trajet Londres-Paddington Reading, 63 km, est proposé sur le site de la National Rail 13 GBP (Soit 19,66 Euros au cours d'aujourd'hui). Pour comparaison, un trajet Lyon-Saint-Étienne, 63 km également, est proposé sur le site de la Sncf à 8,80 Euros.

Dans les deux cas il s'agit du tarif de base standard et sans réduction. Ils sont donc tout à fait comparables en termes de qualité.

La "National Railway" (se targue d'une progression exceptionnelle (36 %) de son trafic voyageur depuis 1994, se plaçant elle-même à la première place devant, entre autres, la France. Il faut savoir que cette période de référence suit la période calamiteuse 1988-1994 pendant laquelle le trafic voyageur anglais avait chuté de 16 %. Vraiment pas de quoi pavoiser: C'est toujours plus facile de progresser quand on part de très bas.

En réalité, l'augmentation de trafic sur la période 1988-2003 se limite de fait à 14 %, et seulement 29 % sur les trente dernières années.

En France, sur la même période, le trafic voyageur a augmenté de 71 %. Le TGV n'y est pas pour rien.

La France a construit plus de mille kilomètres de voies nouvelles TGV en 20 ans. L'Angleterre peine à construire les quelques dizaines de kilomètres nécessaires pour relier le tunnel à Londres, se montrant ainsi la risée des pays européens…

Triste bilan

Voici donc bien les performance du chemin de fer privatisé Britannique, et ce à contrario de ce que l'idéologie néo-libérale dominante voudrait cacher:

- Plus cher pour le contribuable, d'environ 20 %.

- Plus cher pour l'usager, d'environ 100 % (Le double !)

- Southall, le 19 septembre 1997 : 7 morts et 150 blessés.

- Paddington, le 5 octobre 1999 : 31 morts et 250 blessés.

- Hatfield, le 17 octobre 2000 : 4 morts et 34 blessés.

- Une diminution de la ponctualité par rapport à avant la privatisation.

- La surcharge systématique des trains aux heures de pointe.

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Il me semble que de toutes façons, les chemins de fer ont toujours été merdique en Angleterre, donc la différence de qualité entre les CDF français et anglais est plus culturelle.

Sinon il faut voir aussi dans quelles conditions les CDF britaniques ont été privatisés, je crois qu'ils étaient dans un état déplorable et que le secteur n'a pas été vraiment libéralisé (réglementation à la noix …).

Bon sinon désolé, pas de références précises.

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J'ai du mal à considérer comme privée une société qui reçoit plus de subventions que quand elle était publique…

Sinon c'est toujours la même chose, des raisonnements du genre "tout le monde sait bien que l'etat de la Russie à l'heure actuelle est uniquement du à l'immonde capitalisme sauvage néolibéral" !

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Clairement, les chemins de fers privatisés au UK sont merdique.

Ils sont privatisés, pas libéralisés (comme me l'avait fait remarqué Aurel). Il n'y a pas de jeux de concurrence si ce n'est lors de l'attribution du contrat. Deux compagnies de chemin de fer ne peuvent pas toutes deux relier Brighton à Londres. Une compagnie par ligne. Autrement dit on est dans une situation qui favorise peu l'émulation.

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Clairement, les chemins de fers privatisés au UK sont merdique.

Ils sont privatisés, pas libéralisés (comme me l'avait fait remarqué Aurel). Il n'y a pas de jeux de concurrence si ce n'est lors de l'attribution du contrat. Deux compagnies de chemin de fer ne peuvent pas toutes deux relier Brighton à Londres. Une compagnie par ligne. Autrement dit on est dans une situation qui favorise peu l'émulation.

C'est justement pour cela qu'il faut aller beaucouup plus loin.

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Un de mes contradicteurs sur un forum du Nouvel Obs m'a posté ceci.

Tiens ils ont un forum maintenant ? J'irais voir :icon_up:

Aller beaucoup plus loin, de toute façon, si les trains britanniques étaient déjà merdiques avant leur privatisation, ils ne pourront pas l'être d'autant plus après leur libéralisation.

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Invité Albert Li

Ce fil est intéressant mais je ne comprends pas ce qu'il fait ici dans "Action". Il serait mieux dans économie non ?

Sinon c'est vrai que c'est très dommage de perdre les articles, liens, etc…

Et c'est pour ça que je pense qu'une base de données d'articles communes serait la bienvenue.

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Qui peut rédiger un document qui résume tout cela?

Allez, un volontaire, comme ça ce ne sera pas perdu. Sinon, dans trois mois, on refera exactement le même fil et on sera tout aussi content de redécouvrir les mêmes documents!

Tiens, pourquoi pas Moon Man, vu que c'est toi qui propose le fil. De plus, pour répondre à ton contradicteur, il te faudra sûrement rédiger quelquechose, non? Tu pourrais le poster aussi là?

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Ce fil est intéressant mais je ne comprends pas ce qu'il fait ici dans "Action". Il serait mieux dans économie non ?

ça ne me choque pas de trouver dans "action" de la demande de doc pour faire une réponse à un contradicteur. C'est bien de l'action, non ?

Sinon, sur le fond de la question du train :

La première question à se poser, c'est le sens du mot "nationalisation". Ce mot n'a aucun sens, et toutes les prétendues "nationalisations" sont des transferts au profit de fonctionnaires, des personnes privés qui gèrent la chose selon leur intérêt (qu'ils le baptisent alors "intérêt général" ne change rien au fait que c'est bien leur intérêt à eux et à personne d'autre). Ce qui se voit très bien tant pendant la nationalisation (les profs, les cheminots font ce qu'ils veulent dans l'ed nat ou à la SNCF, au mépris de la nation) qu'au moment des prétendues "privatisations", puisqu'on dédommage les fonctionnaires (ou les oligarques, selon le niveau de concentration du pouvoir et donc le nombre des actionnaires "nationaux") en compensation du fait qu'on leur retire leur propriété. Si l'entreprise vaut encore quelque chose, il faut payer. Il n'y a que si l'entreprise ne vaut plus rien qu'on peut "privatiser" sans payer le personnel, mais il faut alors payer pour attirer l'investisseur, ou le forcer…

Le régime "public" n'est qu'un régime privé spécial, pourvu de droits supérieurs sur le contribuable, le fournisseur, et le client en échange de … rien du tout ! Et donc, forcément, plus mauvais.

Plus spécifiquement, pour le train, la seconde question à se poser est de savoir s'il doit exister ou non.

Poser la question c'est déjà provoquer un scandale. Or, une question tabou est une question dont la réponse qu'il ne faut pas poser justement parce que la réponse, dérangeante, est bien évidente pour tout le monde.

La réponse politique est "oui". Le simple fait que ce soit une réponse politique plutôt qu'ue réponse économique montre bien qu'en réalité la réponse est "non". Autrement dit : si le train n'existait pas, aujourd'hui on ne l'inventerait pas !

Le train de voyageur aurait du disparaitre, aurait disparu, sans l'intervention massive de l'état. A la satisfaction générale.

Et le train de fret se serait mis dans les marchés de niches où il peut rendre des service.

Autrement dit : cette question a autant de pertinence et d'intérêt que celle de savoir à qui (public ? privé ?) il faut confier la gestion des relais de poste à cheval, ou la fourniture de préservatifs aux anges.

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Qui peut rédiger un document qui résume tout cela?

Allez, un volontaire, comme ça ce ne sera pas perdu. Sinon, dans trois mois, on refera exactement le même fil et on sera tout aussi content de redécouvrir les mêmes documents!

Tiens, pourquoi pas Moon Man, vu que c'est toi qui propose le fil. De plus, pour répondre à ton contradicteur, il te faudra sûrement rédiger quelquechose, non? Tu pourrais le poster aussi là?

Mon contradicteur il s'embete pas beaucoup. Il m'a posté un copier-coller d'un article qu'il a vu chez ATTAC ou j'sais pas où. C'est pour ca que je comptais riposter par un copier-coller aussi. Mais bon leur modérateur il a pas l'air de vouloir faire passer le lien de Sylvain (il censure tous les liens) ni l'article alors…

Bon je veux bien écrire un truc là-dessus pour ce week-end. Ca me fera potasser sur le sujet.

Sinon c'est pas mal l'idée de la base de données avec toutes les réponses aux objections de nos adversaires. Une fois qu'on aurait ca on serait imparables pour argumenter sur les forums.

On pourrait commencer par lister toutes les objections les plus fréquentes ?

… ben voila Albert Li, c'est pour ca qu'il est dans action.

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Sinon c'est pas mal l'idée de la base de données avec toutes les réponses aux objections de nos adversaires. Une fois qu'on aurait ca on serait imparables pour argumenter sur les forums.

Je participe à un projet de "question answering system": on peut même imaginer que les visiteurs (nos "adversaires") peuvent poser les questions au système et que celui-ci leur répond de facon argumentée :-)

http://www.spiegel.de/img/0' date='1020,141662,00.jpg[/img']

- What are you seeing HAL?

- Something beautiful Dave.

- …

- The dawn of liberalism…

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Mon compte rendu sur les chemins de fer britanniques :

Quand les défenseurs du service public veulent démontrer les méfaits du libéralisme, ils pointent aussitôt du doigt la privatisation des chemins de fer britanniques, preuve selon eux qu'un libéralisation excessive conduit au désastre. Nous allons voir qu'ils se trompent.

Tout d'abord, il convient de relativiser le portrait catastrophique qu'ils se font du réseau ferroviaire du Royaume-Uni. D'après l'agence Health and Safety Executive, le train y est tout de meme 6.5 fois plus sur que la voiture, et 100 fois plus sur que la marche à pied. On évalue la dangerosité des trains britanniques à 0.36 morts par milliard de kilomètre, contre 0.27 en France. Ces chiffres sont très proches et classent l'Angleterre en 11è position en Europe pour la sécurité de leurs trains. En réalité, depuis la privatisation, le nombre de collisions et de déraillements a considérablement diminué, ainsi que la quantité de rails nécessitant réparation, tandis que le nombre de passagers a augmenté de 30% et la quantité de fret de 13%.

Ensuite, il serait malvenu d'attribuer les défauts bien réels des trains anglais (retards, annulations, mauvais services…) à une authentique dérèglementation, dérèglementation qui n'a jamais eu lieu.

Toute l'infrastructure ferroviaire (rails, gares, magasins…) a été remise aux mains d'un seul groupe privé, Railtrack, qui s'est ainsi retrouvé en position de monopole. Ensuite, le pays a été divisé en 25 secteurs, chaque secteur étant pris en charge par un seul opérateur. Contrairement à ce qui était initialement prévu, ces opérateurs ne se retrouvent donc pas en concurrence entre eux. Enfin, ce sont les régulateurs étatiques qui ont gardé le pouvoir.

Une erreur de ces régulateurs a été d'imposer un système de tarification forfaitaire. Ainsi Railtrack gagne à peu près la même somme, quel que soit le nombre de trains. Il n'est donc pas motivé à développer son réseau.

Comme on le voit, on est encore très loin d'une véritable concurrence entre entreprises privées chère aux libéraux. D'ailleurs, on ne peut pas parler d'une vraie privatisation puisque même les subventions de l'Etat ont largement augmenté. Quand ils n'appartenaient qu'à l'Etat, les trains anglais ont en effet été privés de moyens pendant un bon quart de siècle, et c'est probablement cette mauvaise gestion de l'Etat qui est responsable du mauvais état de ses trains.

Pour ne pas commettre la meme erreur que l'Angleterre, la France doit s'affranchir de toute réglementation étatique et privilégier une véritable liberté des contrats.

Sources :

La vérité sur les chemins de fer britanniques

The reform of UK railways - Privatization and its results

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J4avais vu les chiffres suivants: nombre de deces pour cause d'accident ferroviaire entre 1950 et 2000, en France et en GB.

Les resultats etaient quelquechose comme 450 morts coté GB, et 80 coté francais.

Conclusion: les ingénieurs anglais sont des nazes, c'est ca le probleme.

Il ne faut surtout pas rentrer dans le débat qui consiste à dire que le privé est "mieux que" le public, à moins d'etre capable de le prouver, et d'expliquer en quoi l'identité de l'actionnaire d'une entreprise influe sur ses résultats opérationnels.

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Disons que la sécurité s'est beaucoup améliorée depuis la privatisation

En fait elle s'améliore de décennie en décennie (334 morts dans les années 1940, 46 dans les années 90)

donc en fait c'est pas le caractère public/privé qui est la cause des accidents

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Disons que la sécurité s'est beaucoup améliorée depuis la privatisation

En fait elle s'améliore de décennie en décennie (334 morts dans les années 1940, 46 dans les années 90)

donc en fait c'est pas le caractère public/privé qui est la cause des accidents

C'est tout à fait ça et c'est un peu ça qui doit être le slogan clé de ton texte: analyser la sécurité, le coût, la ponctualité, la dette, etc… dans les cas publics et privés. Et à la ligne "sécurité", tu as "rien à voir avec le statut public ou privé".

Le chemin de fer japonais est privatisé, et le Shikansen semble avoir une moyenne de 10 secondes de retard sur l'année, ce qui implique bien sur qu'il y a très très peu d'accidents, et que ça marche mieux que bien.

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Les chemins de fer en Suède sont totalement privés, et aucun social-démocrate n'en parle jamais. Il faut dire qu'ils sont efficaces.

Sinon, la question principale est celle-ci : est-ce qu'actuellement, les chemins de fer sont encore économiquement viables sans subsides ? Le marché est-il suffisamment important pour être privé (étant donnés les coûts intrinsèques de l'activité) ? Par rapport au 19è, je suis persuadé que le nombre de voyageurs a diminué. Il convient donc de voir si le transport par voie de chemin de fer est encore viable (et sur quelles lignes) car sinon, on aura beau privatiser, il n'en ressortira que des échecs.

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