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Alternatives économiques


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Friedman

Je ne prendrai évidemment pas le ton de Bossuet prononçant l'éloge funèbre d'Henriette d'Angleterre pour dire ce que m'inspire la mort de Milton Friedman, le 16 novembre dernier. Pas seulement parce que l'emphase littéraire - Milton se meurt, Milton est mort… - et la pompe ecclésiastique ne sont pas ma tasse de thé, et que l'espace qui m'est imparti ne me le permettrait pas. Mais, surtout, parce que je me sens à des années-lumière de celui qui inventa le monétarisme et en fut le pape incontesté. Même si, sur ses vieux jours, des petits jeunes aux dents qui rayaient les parquets de l'Université de Chicago le doublèrent en matière d'ultralibéralisme et en profitèrent pour dégommer l'un des piliers du monétarisme, sans doute dans l'espoir de décrocher, eux aussi, le pompon (1). Ce qui advint. Cette distance ne doit cependant pas m'empêcher de reconnaître que Friedman fut un grand économiste.

Il est, avec Hayek, à l'origine de la réhabilitation du libéralisme économique que Keynes et la crise de 1930 avaient expédié aux oubliettes. Tous deux voient dans le marché et le mécanisme des prix le meilleur régulateur économique qui soit. Tous deux récusent toute intervention publique dans le domaine économique parce qu'elles produisent, selon eux, plus de dégâts que d'avantages: "La main invisible [du marché]a plus fait pour le progrès que la main visible [de l'Etat] pour le retour en arrière", écrit par exemple Friedman dans Capitalisme et liberté.

Mais les divergences entre eux étaient nombreuses, notamment du point de vue méthodologique. Friedman était un "positiviste": une théorie peut être considérée comme vraie ou fausse non par les hypothèses sur lesquelles elle repose, mais par sa capacité à expliquer les faits. Lesquels doivent donc être regardés et analysés de près: ils sont le seul juge de paix. Au contraire, pour Hayek (et l'ensemble de ce qu'on a appelé "l'école autrichienne"), la réflexion économique doit partir d'hypothèses réalistes sur ce qu'est un individu, sur ce qui le motive et l'amène à agir. Et il convient d'en déduire rationnellement ce que doit être la bonne société, celle dans laquelle l'homme déploiera librement l'ensemble de ses potentialités. Les faits sont seconds, car nul ne peut prétendre les connaître tous.

Si je devais, dans quelque enfer libéral, choisir entre ces deux démarches, celle de Friedman me semblerait plus acceptable. Il l'a mise en application, notamment dans le domaine monétaire, et y a puisé ses convictions monétaristes : l'émission de monnaie peut donner transitoirement l'illusion qu'elle permet de réduire le chômage, mais, au bout du compte, c'est l'inflation qui triomphe toujours, engendrant plus de désordres que l'émission de monnaie n'a (provisoirement) suscité de relance. Bien sûr, il s'est souvent trompé (2) et a toujours refusé d'admettre que le marché pouvait ne pas être la meilleure solution. Mais, à la fin des fins, ce que je conteste le plus, c'est l'affirmation suivante (qui ouvre quasiment Capitalisme et liberté): "Aux yeux de l'homme libre, son pays n'est que la collection des individus qui le composent." Autrement dit: l'échec ou la réussite de chacun ne doit qu'à lui, à ses mérites ou à ses erreurs, ou à ceux de ses proches. Que chacun se débrouille, le marché fera le reste et Dieu reconnaîtra les siens.

C'est à l'opposé de cette vision égotiste que se développe aujourd'hui l'économie solidaire. Une économie qui se sert du marché non pour creuser l'écart entre les gagnants et les autres, mais pour le réduire. Une économie qui met en avant une finalité sociale et non le gain maximal: commerce équitable, épargne solidaire, structures d'insertion par l'activité économique… autant de tentatives pour changer la société en redonnant à chacun de la dignité et une place dans l'économie. Non pas pour que l'économie fonctionne mieux, mais pour que l'ensemble des hommes vive un peu mieux, à commencer par les plus fragiles ou les plus faibles.

Hasard du calendrier, un manifeste de l'économie solidaire (3), signé par plusieurs milliers de personnes, vient d'être publié et sera présenté à la Mutualité, à Paris, le 7 décembre à 18 h 30. Nous serons nombreux à y être. Ne serait-ce que pour dire à l'ultralibéralisme, façon Friedman ou façon Hayek, qu'un peu d'humanité dans les relations économiques ne nuit pas.

Denis Clerc

(1) En l'occurrence le prix de sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel, créé et doté par la Banque de Suède et appelé fréquemment "prix Nobel d'économie". En réalité le prix de sciences économiques etc. est au prix Nobel ce que le crémant est au champagne: une création marketing pour profiter de la notoriété de l'original.

(2) Ainsi, en 1992, dans la préface d'une traduction française de La monnaie et ses pièges (éd. Dunod), il écrivait: "Il y a une chose dont je suis sûr: une monnaie unique, un écu, remplaçant toutes les autres monnaies européennes, n'existera pas encore à la fin du XXe siècle."

(3) A l'initiative de Claude Alphandéry et d'Edmond Maire. Voir le texte et la liste des signataires (qui demeure ouverte) sur le site www.sinvestir.org

lien article

Voilà donc ce que des milliers d'enfants sont forcés de lire, le pire dans tout ça c'est que ce n'est pas neutre du tout et que c'est obligatoire d'être en accord sinon tu es l'enfoiré de la classe… pitoyable…

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Bien sûr, il s'est souvent trompé (2)

(2) Ainsi, en 1992, dans la préface d'une traduction française de La monnaie et ses pièges (éd. Dunod), il écrivait: "Il y a une chose dont je suis sûr: une monnaie unique, un écu, remplaçant toutes les autres monnaies européennes, n'existera pas encore à la fin du XXe siècle."

Quelle honte ! On devrait lui retirer son prix nobel !

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En fait il sont obligé de lire, j'imagine qu'on leur demande des analyses ou qu'on leur fait lire en classe pour illustrer des thèmes du programme, bref ils sont obligé d'en lire une partie, j'en suis sur!

Absolument, on leur demande fréquemment de rendre des devoirs comme des synthèses portant sur des articles d'Alternative économiques. De plus, si les profs encouragent avec tant d’ardeur leurs élèves à s’abonner à ce magazine, c’est parce qu’au bout de tant d’abonnements parrainés, ils gagnent un abonnement gratuit pour eux! Alternatives économiques fournit aussi aux profs des petites fiches et d’autres supports pour leurs cours-propagandes.

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(2) Ainsi, en 1992, dans la préface d'une traduction française de La monnaie et ses pièges (éd. Dunod), il écrivait: "Il y a une chose dont je suis sûr: une monnaie unique, un écu, remplaçant toutes les autres monnaies européennes, n'existera pas encore à la fin du XXe siècle."
Je rappelle à Denis Clerc que l'euro fut institué en tant que monnaie unique le 1er janvier 2002, c'est à dire bien après la fin du XXème siècle. :icon_up:
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http://www.demonoid.com/files/details/330360/93722/

Merci pour ces 26ans d'archives sublimes.

J'adore le Monde diplomatique qui reste avec le canard enchaïné, et marianne les quelques derniers vestiges du journalisme d'investigation et de critiques, qui ont été remplacé par le journalisme sensationnel, le journalisme propagande, le journalisme de l'auto-consécration, le journalisme qui nous dit quoi penser en lieu et place du journalisme qui aide à penser.

D'ailleurs ces médias sont voués à s'auto détruire, laissant place aux groupement indépendant de journaliste souhaitant vraiment informer le publique, mais également au journalisme citoyen qui pour un grand nombre d'entres eux ont une grande qualité d'écriture, et une pertinence d'esprit.

Espérons que les vestiges du vrai journalisme ne seront ne disparaîtront pas avec le néo libéralisme, mais également avec l'ére de l'information libre gratuite, et sans limite.

Merci beaucoup pour ces précieux documents.

J'aimerais aussi avoir les archives du Monde si tu peux les mettre en ligne. Même si pour moi ce journal à rejoint les journaux de propagandes et de mensonges des puissants, une rétrospection dans le passé permettra de justement d'immortaliser l'information, de ne plus jamais oublier, et ainsi de lutter contre la manipulation des esprits.

Internet est le média qui permet aujourd'hui de faire une révolution des esprits, et avec lui la monté de l'éducation, permettra d'augmenter la conscience globale, et d'arriver à une révolution silencieuse par les esprits, qui amènera un meilleur monde, après l'apocalypse provoquer par les marchands qui dirigent le monde.

Merci.

:icon_up:

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Ceci dit quel magazine pourrait-on faire lire aux lycéens en remplacement ? L'expansion ?Ahem ! Pour dégoûter des ados plein de bons sentiments de l'économie, il n'y aurait pas pire. Car je crois que c'est là la force d'Alter éco : jouer sur le peu de morale chrétienne qu'il reste dans l'éducation des enfants et qu'ils n'ont pas encore rejeté à l'adolescence.

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effectivement en terminal éco, nous étions forcé de nous abonner, de lire certains articles car interrogation en classe.

de plus, les DST avaient pour support des documents d'alternatives éco…

j'ai fait sciences éco de la seconde à la terminale et AE est la référence pour les profs d'éco du lycée où j'étais.

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Il est rare qu'un texte cumule la médiocrité intellectuelle avec la médiocrité culturelle et avec la médiocrité historique. Denis Clerc l'a fait.

On apprécie l'objectivité de "enfer libéral", au cas ou la pompeuse introduction aurait laissé un doute.

Du point de vue historique, l'auteur ne connait pas la chronologie du débat qui opposa Keynes à Hayek. Peut-être faudrait-il lui rappeler pourquoi Hayek reçu la prix Nobel d'économie dans les années 70…

Du point de vue philosophique, on voit une définition du positivisme très suspecte. De quoi soupçonner très fortement l'auteur de n'avoir rien compris à cette pensée, ni surtout à ses nuances avec l'approche scientifique où on écarte les théories contredites par les faits.

Ensuite l'auteur oppose positivisme et école autrichienne. Arrêtez moi si je me trompe, mais l'école autrichienne préfère définir le plus précisément comment l'homme agit économiquement dans sa vie quotidienne plutôt que d'établir des grandes lois ou grandes théories économiques. L'école autrichienne n'est donc pas le courant économique le moins positiviste.

Ah mais au fait, l'auteur semble comprendre aussi bien ce qu'est l'école autrichienne que ce qu'est le positivisme!

On apprécie aussi toute la finesse d'argumentation du "il s'est souvent trompé" avec pour seul et unique argument une citation que l'Europe n'aurait pas de monnaie unique avant la fin du XXème sicècle (quel rapport avec ses travaux?). Et puis 2002 est effectivement au XX ème siècle…

On passe sur un "autrement dit" qui ne dit pas autrement, mais qui donne une interprétation très personnelle de l'auteur.

Il faudra ensuite m'expliquer comment opposer libéralisme et économie solidaire puisque c'est le premier qui permet au second d'exister.

0/20 Monsieur Denis Clerc.

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Le rédacteur en chef ne fait pas son boulot apparemment. Laisser écrire autant d'inepties, de déformations historiques, d'arguments fallacieux jusqu'à l'erreur la plus stupide mériterait un premier avertissement, voire par la suite une procédure de licenciement. :icon_up:

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Attention ! L'euro en 2002, ce n'est que la version papier de quelque chose qui existait avant.

Quelques années avant le passage au papier monnaie, les monnaies nationales avaient cessé d'exister officiellement et n'étaient plus que des subdivision complexe de la monnaie unique, l'Euro.

C'est un point de détail, mais on vous le ressortira.

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Attention ! L'euro en 2002, ce n'est que la version papier de quelque chose qui existait avant.

Quelques années avant le passage au papier monnaie, les monnaies nationales avaient cessé d'exister officiellement et n'étaient plus que des subdivision complexe de la monnaie unique, l'Euro.

C'est un point de détail, mais on vous le ressortira.

De toute façon c'est de l'ad hominem doublé d'hypercritique (à quelques années près en plus).

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