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Ron Paul, Rand Paul, Frédéric Bastiat


p.a

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Pas seulement brodé, mais bien détourné. À la fin de l’article de l'Immonde, le putois journalistique fait dire à Bastiat : "Je suis un homme sans cœur et sans entrailles, un philosophe sec, un individualiste, un bourgeois, et, pour tout dire en un mot, un économiste de l'école anglaise ou américaine." Alors que la citation complète est : "Me voilà discrédité à tout jamais; et il est maintenant reçu que je suis un homme sans cœur et sans entrailles, un philosophe sec, un individualiste, un bourgeois, et, pour tout dire en un mot, un économiste de l'école anglaise ou américaine." (L'État)

Bref, un vrai article de merde pondu par un fumier.

En effet. J'ai envoyé un e-mail à qui de droit qui se lit comme suit:

Madame Maurus,

Je tiens à vous faire remarquer que Nicolas Bourcier se livre à des manipulations théoriquement étrangères à un journaliste digne de ce nom dans son article du 5 janvier.

Il se trouve que même si comme il l'indique, Frédéric Bastiat est largement inconnu en France, il ne l'est pas complètement. Ayant lu en partie son œuvre, j'ai tout de suite tiqué lorsque l'auteur a écrit à la fin de son article (je surligne le passage problématique):

"Pour expliquer ce retour actuel aux thèses de Frédéric Bastiat, Michal Behrent avance qu'il s'agit d'"un contrecoup à l'intervention de l'Etat". Un retour rendu possible parce que les écrits du Français étaient aussi en circulation et déjà régulièrement utilisés par les libertariens et les libre-échangistes qui ne ratent jamais une occasion de citer une de ses phrases clés écrite en 1848: "L'Etat, c'est la grande fiction à travers de laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde".

Peu avant, dans le même texte, La Loi, Frédéric Bastiat brosse son autoportrait en ces termes: "Je suis un homme sans cœur et sans entrailles, un philosophe sec, un individualiste, un bourgeois, et, pour tout dire en un mot un économiste de l'école anglaise et américaine". Il ne saurait si bien dire."

Alors je suis allé vérifier et je voudrais d'abord rétablir deux choses qui relèvent strictement du factuel. Premièrement, M. Bourcier fait une erreur. Les citations qu'il utilise viennent non de "La loi", mais de "L'Etat". Bien plus important cependant, la deuxième citation n'est en effet pas l'autoportrait que Bastiat brosse de lui-même mais sa description de ce que ses détracteurs dénoncent chez lui, ce dont justement il se défend. Il suffit de lire le début de l'article en question pour s'en rendre compte en pleine connaissance du contexte. En fait, la seule lecture de la phrase entière dont la citation n'est qu'un extrait suggère immédiatement que Bastiat ne dresse pas là son autoportrait mais ironise sur ce qu'on dit de lui: "Me voilà discrédité à tout jamais; et il est maintenant reçu que je suis un homme sans cœur et sans entrailles, un philosophe sec, un individualiste, un bourgeois, et, pour tout dire en un mot, un économiste de l'école anglaise ou américaine".

Mon appréciation de tout cela est que la ficelle de M. Bourcier est un peu grosse. Il y a deux choses. D'abord, je pense qu'il y a tentative de tromper les lecteurs dans le but de jeter le discrédit sur Bastiat. Il ne faut pas aller chercher plus loin que la lecture de la phrase en entier et des quelques phrases qui précèdent pour se rendre à l'évidence de ce que Bastiat fait là réellement. Cela peut donc être difficilement une erreur. Supposons qu'une personnalité accuse M. Bourcier d'être en fait un nazi. Il s'en défend, introduisant son propos en disant "on me dit que je suis un nazi". Maintenant, j'ignore son intervention pour en retenir un extrait qu'il aura effectivement prononcé ou écrit, "je suis un nazi". Ne me reste plus qu'à ajouter quelque chose du genre "Il ne saurait si bien dire" et le tour est joué, j'ai montré que M. Bourcier est un nazi. Ridicule, non? Mais remplacez "nazi" par "sans coeur et sans entrailles" et cette manœuvre devient impossible à distinguer de ce à quoi se livre M. Bourcier dans son article.

Ensuite, si M. Bourcier n'apprécie guère les vues "libertariennes", qu'il qualifie aussi confusément d'"ultraconservatrices", il serait mieux inspiré, plutôt que s'attaquer à des hommes de paille, de critiquer les idées en question. M. Bourcier s'attaque à un homme de paille quand il nous fait le bon vieux coup des libéraux qui n'ont pas de cœur. L'hostilité à l'impôt des Bastiat, des Ron Paul et autres libertariens que M. Bourcier évoque n'est pas basée sur une critique de la charité, du don ou de la solidarité. Le simple fait est que pour eux, l'impôt ne relève pas de la charité ou de la solidarité. Le contribuable n'est pas un mécène puisque ces contributions sont obligatoires et sanctionnées par la menace d'emprisonnement. L'impôt tel que généralement pratiqué relève ainsi pour eux de la tyrannie, du pillage légalisé. Autrement dit, il est injuste. De plus, ils expliquent que l'impôt à pour conséquence, non de réduire des maux que ses promoteurs prétendent combattre, mais à participer de leur création ou de leur aggravation. Si M. Bourcier veut entrer honnêtement dans le débat, ce sont ces propositions qu'il doit critiquer. Je comprends bien qu'il est plus facile de nous raconter des fables à la place.

Je crois que M. Bourcier utilise ce vieux truc rhétorique consistant pour aiguiller le lecteur vers ses conclusions préférées à refaire les termes du débat de manière adaptée. Il y a les gentils altruistes pro-impôts et les méchants égoïstes anti-impôts, comme Bastiat. Ayant ainsi planté un faux décor, la conclusion s'impose, être anti-impôts, c'est être méchant et égoïste. C'est du niveau du scénario de dessins animés pour enfants de 9 ans. On espèrerait trouver mieux dans Le Monde. De plus, je pense que M. Bourcier profite du peu de familiarité que la plupart de ses lecteurs auront avec ces idées -il en a bien conscience, comme le titre de son article le suggère- pour se livrer à cette manipulation, ce qui rend la manœuvre d'autant plus méprisable.

Cordialement,

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Je trouve ta lettre trop vindicative pour être prise au sérieuse, en particulier le passage sur le nazisme et celui sur l'impôt où l'on dirait que tu essayes de convaincre ton interlocuteur du bien-fondé des vues libertariennes alors que ton but est simplement de montrer qu'il les décrit de façon erronnée. Mais sinon j'aime beaucoup le début de ta lettre.

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Très bien, mais la référence au nazisme est lassante à force, ne faisons pas les mêmes erreurs et stupidités que nos adversaires.

Si je faisais ce à quoi tu fais allusion, ça voudrait dire que j'accuse Bourcier de nazi. J'espère qu'il ne t'aura pas échappé que je fais tout autre chose.

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Il ne faut jamais expliquer par la méchanceté ce qui s'explique par l'incompétence etc. Journaliste français, Bastiat etc.

Je ne vois pas spécialement de signe d'incompétence. Tu suggères que l'auteur a juste fait une erreur? Comment fait-on quand on va chercher des citations dans le texte -comme il le suggère lui-même en disant que la seconde est "plus haut" dans l'essai- pour manquer le début de la phrase montrant que Bastiat ne dresse pas son autoportrait?

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Je trouve ta lettre trop vindicative pour être prise au sérieuse, en particulier le passage sur le nazisme et celui sur l'impôt où l'on dirait que tu essayes de convaincre ton interlocuteur du bien-fondé des vues libertariennes alors que ton but est simplement de montrer qu'il les décrit de façon erronée. Mais sinon j'aime beaucoup le début de ta lettre.

J'ai hésité. Relever le purement factuel ou ajouter des accusations explicites de distorsions volontaires et les spéculations sur ses raisons. Etant donné les éléments, je suis persuadé qu'on est dans la distorsion volontaire. Et finalement, je suis allé au bout en incluant ces considérations et le côté vindicatif. Après tout, quand on se fout de la gueule de ses lecteurs, il n'est pas anormal de s'en plaindre de manière très explicite plutôt que de le noter de manière neutre comme si on décrivait n'importe quel événement ne soulevant pas notre indignation. Ça ne peut surement pas aller bien loin de toute façon, mais si on veut montrer non seulement que l'auteur écrit n'importe quoi mais en plus que sa démarche est malhonnête à vomir, un ton vindicatif me semble adapté.

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Je pense aussi qu'on est dans la distorsion volontaire, mais la lettre aurait à mon avis gagné en jouant plus sur la fibre du "oh, comment un journal de votre trempe peut laisser passer ça" et ne pas s'étendre sur la comparaison "nazi" (si tu tiens vraiment à faire une analogie, choisis un autre domaine - et pédophile est aussi dangereux :icon_up: )

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Le type nous fait le coup du libéral méchant égoïste sans cœur. C'est complètement grotesque. Ségolène Royal aurait pu le faire. Il aurait pu ajouter mangeur d'enfant aussi. C'est du même tonneau que l'usage du qualificatif "nazi" ou "facho" à tort et à travers. Pour que l'analogie tienne, il faut justement que ce soit gros. "nazi" ou "pédophile", c'est le top justement.

Après, je ne suis pas là pour obtenir quelque chose mais pour leur mettre leur caca sous leur nez, pour montrer que tout le monde n'est pas dupe de ce genre de manip. Je n'ai pas de raison d'être diplomate sur la forme.

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En tout cas, je suis curieux de voir la réponse qu'il vont vous adresser :icon_up:

S'ils prennent la peine de répondre…

Ça me rappelle quand mon paternel s'était plaint au Point de la chronique de Bernard-Henri Lévy. On lui avait répondu comme quoi beaucoup de lecteurs se plaignaient déjà, mais que BHL est un proche d'un ponte du magazine, il est donc intouchable….

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"Dans La Loi il brosse son autoportrait en ces termes : Je suis un homme sans coeur et sans entrailles, un philosophe sec, un individualiste, un bourgeois, et pour tout dire en un mot un économiste de l'école anglaise ou américaine. Il ne saurait si bien dire"

Du grand art (dans l’art du détournement) :icon_up:. Qui a dit que nos journalistes étaient médiocres en tout ?

Edit: AMHA, vous surréagissez pour une blagounette de journaliste qui s’ennuie ferme et essaie de finir par une note amusante pour passer le temps.

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Je ne vois pas spécialement de signe d'incompétence. Tu suggères que l'auteur a juste fait une erreur? Comment fait-on quand on va chercher des citations dans le texte -comme il le suggère lui-même en disant que la seconde est "plus haut" dans l'essai- pour manquer le début de la phrase montrant que Bastiat ne dresse pas son autoportrait?

Je pense que l'auteur s'est senti obligé de finir son article sur une touche de faux esprit critique, vrai gage de conformisme.

J'ai hésité. Relever le purement factuel ou ajouter des accusations explicites de distorsions volontaires et les spéculations sur ses raisons. Etant donné les éléments, je suis persuadé qu'on est dans la distorsion volontaire. Et finalement, je suis allé au bout en incluant ces considérations et le côté vindicatif. Après tout, quand on se fout de la gueule de ses lecteurs, il n'est pas anormal de s'en plaindre de manière très explicite plutôt que de le noter de manière neutre comme si on décrivait n'importe quel événement ne soulevant pas notre indignation. Ça ne peut surement pas aller bien loin de toute façon, mais si on veut montrer non seulement que l'auteur écrit n'importe quoi mais en plus que sa démarche est malhonnête à vomir, un ton vindicatif me semble adapté.

J'ai pensé la même chose que Pierre : la lettre est vindicative. Et elle dresse un procès d'intention. Son effet vraisemblable sera de conforter et pas d'ébranler.

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