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Nick de Cusa

Messages recommandés

 

3 raisons pour lesquelles l'armée américaine ne devrait pas combattre Ebola

 

Obama envoie des milliers de troupes soldats américains en Afrique de l'Ouest pour combattre Ebola. Leur mission : construire des centres de traitement et dispenser une formation médicale aux professionnels de la santé au sien des communautés locales. Mais est-ce une bonne idée d'apporter ce type d'aide ?
Voici trois raisons pour lesquelles la militarisation de l'aide humanitaire est une très mauvaise idée :
 
L'aide humanitaire militarisée détruit les principes humanitaires
L'aide humanitaire doit être neutre, et ne pas dépendre d'objectifs politiques ou militaires. Utiliser l'armée dans une crise humanitaire empêche cela et encourage l'agitation ultérieure. Le nombre d'attaques contre les travailleurs humanitaires a augmenté au cours de la dernière décennie, précisément à cause d'une transgression de la limite entre les objectifs humanitaires, politiques et militaires.
Et l'historique de la présence américaine en Afrique prouve que ce scepticisme a sa raison d'être. Ces six dernières années, l'armée américaine a étendu sa présence en Afrique par le biais de missions humanitaires spécifiquement créées pour établir des points d'entrée pour des missions militaires futures. 
Les communautés locales doivent faire face à un véritable chantage : si elles n'acceptent pas la présence de l'armée, elles courent le risque de se priver d'une aide humanitaire dont elles ont besoin. Ceci gâche la confiance nécessaire pour établir une bonne relation entre les communautés et les porteurs d'aide.
 
L'aide militaire est inefficace sur le long terme
L'aide militarisée est généralement financée par des montants énormes qu'on doit dépenser rapidement. Par exemple, le Department of Defense Département de la Défense a déjà alloué 1 milliard de dollars au combat contre Ebola. Le besoin de dépenser des montants gargantuesques s'explique par la volonté d'atteindre des objectifs politiques sur le court terme. Ceci se transforme donc en une dépense inefficace : on manque de suivi sur le long-terme ou d'évaluation post-intervention, ce qui signifie que les mêmes erreurs seront répétées à l'infini.
 
L'aide militaire diminue le potentiel de l'aide civile
Bien des politiques qui supportent soutiennent l'aide militaire affirment que seule l'armée peut gérer une crise humanitaire efficacement. Si c'est vrai - et c'est trop souvent vrai - alors cela met en exergue lumière le manque d'attention dont souffrent les programmes civils, qui ont pourtant plus de chances de réussir sur le long terme. En nous appuyant constamment sur l'armée pour nos efforts humanitaires, on étouffe les efforts faits pour créer des organisations civiles qui pourraient, elles, gérer les projets complexes nécessaires pour régler des crises humanitaires à grande échelle.

 

 

Quelques propositions de correction.

 

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3 raisons pour lesquelles l'armée américaine ne devrait pas combattre Ebola

 

Obama envoie des milliers de troupes soldats américains en Afrique de l'Ouest pour combattre Ebola. Leur mission : construire des centres de traitement et dispenser une formation médicale aux professionnels de la santé au sien sein des communautés locales. Mais est-ce une bonne idée d'apporter ce type d'aide ?

Voici trois raisons pour lesquelles la militarisation de l'aide humanitaire est une très mauvaise idée :

 

Complément.

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Besoin d'un coup de main pour la traduction, est-ce que quelqu'un qui a lu le bouquin de Piketty peut m'aider avec cette citation ? 

 

Piketty’s favorite solution is a progressive annual tax on capital, rather than income. He argues that this kind of tax “will make it possible to avoid an endless inegalitarian spiral while preserving competition and incentives for new instances of primitive accumulation.”
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"La solution que privilégie Piketty est un impôt progressif sur le capital plutôt que sur le revenu. Il avance qu'un impôt de cette sorte <<rendra impossible d'éviter une spirale inégalitaire tout en préservant la concurrence et les incitations à recommencer une accumulation primitive du capital".

Enfin à mon avis. J'imagine que, comme moi, tu butes sur ce que vient faire "competition" là-dedans.

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C'était la "primitive accumulation" qui me gênait, en fait. Je ne savais pas si c'était vraiment "une accumulation primitive", ce qui a assez peu de sens imo, ou un terme plus spécifique qu'il mentionnait dans son livre. Merci :D

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Des avis ?
 
De l'importance des inégalités
 
Un traité de 700 pages sur l'économie, traduit du français à l'anglais, n'est pas une lecture de plage particulièrement reposante, même pour quelqu'un de notoirement geek. Mais en juillet, je me suis senti obligé de lire Le Capital au XXIème siècle de Thomas Piketty, après avoir lu plusieurs avis sur l'ouvrage et entendu des amis en discuter.
 
Je suis content de l'avoir fait. Je vous encourage à le lire aussi, ou au moins un bon résumé comme celui-ci de The Economist. Piketty a eu la gentillesse de discuter de son travail avec moi sur Skype le mois dernier. Comme je lui ai dit, je suis d'accord avec ses conclusions les plus importantes, et j'espère que son travail poussera plus de personnes intelligentes à étudier la richesse et les inégalités de revenu, parce que plus on en sait sur leurs causes et leurs remèdes, mieux on s'en sortira. J'ai aussi dit que certains éléments de son analyse me gênaient, comme j'en parlerai ci-dessous.
 
Je suis entièrement d'accord avec Piketty sur les points suivants :
  • Des inégalités importantes sont un problème : elles gâchent les incentives économiques, poussent les démocraties à favoriser l'intérêt des puissances financières, et elles ne respectent pas l'idée que tous les hommes naissent égaux.
  • Le capitalisme ne tend pas de lui-même vers plus d'égalité - c'est-à-dire que les concentrations de richesse peuvent avoir un effet exponentiel si on ne les contrôle pas.
  • Les gouvernements peuvent jouer un rôle constructif dans l'évitement de ces amassements de richesses, si et quand elles décident d'agir.
Je préciserai dans un souci de clarté que quand je dis que les inégalités sont un problème, je ne sous-entends pas que le monde empire. Au contraire, grâce à l'émergence des classes moyennes dans des pays comme la Chine, le Mexique, la Colombie, le Brésil et la Thaïlande, le monde en général devient plus égalitaire, et cette tendance mondiale positive devrait continuer.
 
Mais les écarts extrêmes ne devraient pas être ignorés, ou pire encore, pris pour un signe que nous avons une économie performante et une société épanouie. Oui, des inégalités découlent nécessairement du capitalisme. Comme le dit Piketty, elles sont inhérentes au système. La question est plutôt de se demander quel niveau d'inégalité est acceptable, et quand l'inégalité commence à faire plus de mal que de bien. Voici ce dont nous devrions discuter, et je suis enchanté que Piketty ait participé au débat avec autant de bonne volonté.
 
Cependant, le livre de Piketty a des lacunes importantes, que j'espère voir traitées par lui-même et d'autres économistes dans les années à venir.
 
Malgré toutes ses données sur les tendances historiques, il ne donne pas une vue globale de la création et de la dépréciation des richesses. Au centre de son livre, une équation simple : r > g, avec r le retour sur les capitaux investis et g le taux de croissance de l'économie. L'idée globale est que quand les retours sur les capitaux dépassent les retours sur la main-d'oeuvre, l'écart des richesses augmentera entre les gens qui ont beaucoup de capital et ceux qui dépendent de leur travail. L'équation est si fondamentale pour Piketty qu'il la qualifie de "force fondamentale de la divergence" qui "résume la logique générale de [ses] conclusions".
 
D'autres économistes ont assemblé des bases de données historiques immenses, qui font douter de la valeur de r > g dans la compréhension de l'évolution des inégalités. Je ne suis pas un expert. Ce que je sais, par contre, c'est que le r > g de Piketty ne différencie pas les différents types de capitaux et d'utilités sociales de façon adéquate.
 
Imaginez trois personnes riches. Un homme investit son capital dans le développement de son entreprise. Ensuite, une femme donne la plupart de son capital à des associations humanitaires. Une troisième personne consomme surtout, dépensant beaucoup d'argent dans un yacht ou un avion. La richesse de ces trois personnes contribue à augmenter les inégalités, mais j'aurais tendance à penser que les deux premiers apportent plus à la société que le troisième. J'aurais aimé que Piketty fasse cette distinction, qui a des implications importantes dont je parlerai un peu plus loin.
 
Plus important encore, j'estime que l'analyse de Piketty ne prend pas en compte des forces puissantes qui empêchent l'accumulation des richesses d'une génération à une autre. Je supporte entièrement l'idée que nous ne voulons pas d'une société aristocrate dans laquelle les familles déjà aisées s'enrichissent simplement en se reposant sur leurs lauriers et en récupérant ce que Piketty appelle leur rente, c'est-à-dire, ce qu'ils gagnent en laissant d'autres personnes utiliser leur argent, leurs terres et leurs autres biens. Je ne pense cependant pas que l'Amérique suive ce modèle.
 
Jetez un coup d'oeil à la liste Forbes des 400 Américains les plus riches. La moitié environ des personnes sur cette liste sont des entrepreneurs dont les entreprises ont très bien performé, grâce à beaucoup de travail et de chance. Contrairement à l'hypothèse rentière de Piketty, je ne vois personne dont les ancêtres ont acheté une grande étendue de terres en 1780 puis accumulé les rentes. Aux États-Unis, ce vieil argent a disparu depuis longtemps en raison de l'instabilité financière, de l'inflation, des taxes, de la philanthropie et de la consommation.
 
On peut voir une dynamique de déplétion des richesses dans l'histoire des industries populaires. Dans la première partie du vingtième siècle, Henry Ford et quelques autres entrepreneurs s'en sortaient très bien dans l'industrie automobile. Ils étaient propriétaires d'une grande part des actions des entreprises automobiles qui arrivaient à capitaliser sur les économies d'échelle et une rentabilité très élevée. Ces entrepreneurs qui réussissaient sont l'exception. Bien plus de personnes, incluant bien des rentiers qui avaient investi leurs richesses dans l'industrie auto, ont vu leurs investissements disparaître entre 1910 et 1940, quand l'industrie américaine est passée de 224 à 21 constructeurs. Plutôt qu'un transfert de richesses vers les rentiers et d'autres investisseurs passifs, on voit donc souvent le contraire. J'ai remarqué le même phénomène au travail, que ce soit dans la technologie ou d'autres domaines.
 
Piketty a raison en affirmant qu'il y a des forces qui peuvent mener vers une croissance exponentielle des richesses, incluant le fait que les enfants des personnes les plus riches ont souvent accès à des réseaux qui les aideront à trouver des stages, des emplois, etc. Cependant, d'autres forces mènent à la déplétion de ces richesses, et le Capital ne leur donne pas assez de poids.
 
Je suis également déçu que Piketty se soit clairement conentré sur les revenus et la richesse en négligeant complètement la consommation. Les données de consommation représentent les biens et services achetés, incluant la nourriture, l'habillement, le logement, l'éducation ou la santé, et peuvent ajouter beaucoup à notre compréhension du mode de vie de chacun. En particulier dans les sociétés riches, le point de vue du revenu ne donne pas assez d'informations sur ce qu'il faut améliorer.
 
Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les données de revenu, en particulier, peuvent prêter à l'erreur. Par exemple, un étudiant en médecine sans revenus et avec un important prêt pour financer ses études serait dans une situation très difficile selon les statistiques, alors que son salaire sera peut-être très élevé quelques années plus tard. Un exemple plus extrême : quelques personnes extrêmement riches apparaîtront comme pauvres si elles ne reçoivent plus de dividendes ou de revenus.
 
Je ne dis pas que nous devrions ignorer la richesse et le revenu. Mais les données de consommation pourraient être bien plus importantes pour comprendre le bien-être humain. Elles montrent une situation différente - et généralement plus positive - de ce que Piketty décrit. Dans l'idéal, j'aimerais voir des études qui s'appuient à la fois sur la richesse, le revenu et la consommation.
 
Même si on ne peut pas avoir un paysage parfait aujourd'hui, on en sait déjà bien assez sur les défis qu'il faut relever.
 
La solution favorite de Piketty est une taxe annuelle progressive sur le capital plutôt que sur le revenu. Il affirme que ce genre de taxe "rendra impossible d'éviter une spirale inégalitaire tout en préservant la concurrence et les incitations à recommencer une accumulation primitive du capital".
 
Je suis d'accord avec le fait que l'imposition ne devrait pas se faire sur le travail accompli. Il est complètement illogique que le travail soit autant taxé aux États-Unis, surtout comparé au capital. Cette situation sera encore plus absurde dans les années à venir, alors que les robots et d'autres mécanismes automatiques pourront effectuer de plus en plus de tâches que les employés humains font aujourd'hui.
 
Mais plutôt que de déplacer les impôts vers le capital, comme Piketty aimerait, j'aimerais que ce soit la consommation qui soit soumise à une taxe progressive. Prenons l'exemple des trois personnes dont j'ai parlé plus tôt : une qui investit dans des entreprises, une qui donne à des causes humanitaires, une qui vit très confortablement. Il n'y a rien de mal à être la troisième personne, mais j'estime qu'elle devrait payer plus d'impôts que les deux autres. Comme le soulignait Piketty lorsque nous discutions, il est difficile de mesurer la consommation : par exemple, les donations politiques devraient-elles compter ? D'un autre côté, presque tous les systèmes d'impôts, incluant l'impôt sur le capital, rencontre des difficultés similaires.
 
Tout comme Piketty, je mets également beaucoup d'espoir dans la taxe de succession. Laisser les héritiers consommer ou redistribuer du capital de façon disproportionnée seulement parce qu'ils sont nés dans la bonne famille est une façon d'allouer les ressources qui n'est ni intelligente, ni juste. Comme se plaît à le répéter Warren Buffett, c'est comme "choisir l'équipe olympique de natation pour 2020 en prenant les fils aînés des médaillés de 2000". J'estime qu'on devrait maintenir les impôts de succession et investir les recettes dans l'éducation et la recherche, le meilleur moyen de renforcer notre pays dans le futur.
 
La philanthropie peut aussi être une solution privilégiée. Il est dommage que Piketty lui accorde aussi peu de place. Il y a un peu plus d'un siècle, Andrew Carnegie était le seul à encourager ses proches aisés à donner d'importantes parts de leur fortune. Aujourd'hui, un nombre croissant de très riches choisit de le faire. La philanthropie bien fait ne crée pas seulement directement des bénéfices concrets pour la société, elle réduit de plus la richesse familiale. Melinda et moi sommes convaincus que la richesse "de dynastie" est mauvaise pour la société comme pour les enfants. Nous voulons que nos enfants se créent eux-même une place dans le monde. Ils auront toutes sortes d'avantages, mais ce sera à eux de construire leur vie et leur carrière.
 
Le débat au sujet de la richesse et des inégalités a déchaîné les passions de tous les côtés. Je n'ai pas de solution magique à proposer. Je sais par contre que, même avec ses défauts, le travail de Piketty apporte une nouvelle réflexion. Et maintenant, je suis impatient de découvrir de la recherche qui étudiera mieux encore ce sujet important.

 

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De l'importance des inégalités
 
Un traité de 700 pages sur l'économie, traduit du français à l'anglais, n'est pas une lecture de plage particulièrement reposante, même pour quelqu'un de notoirement geek. Mais en juillet, je me suis senti obligé de lire Le Capital au XXIème siècle de Thomas Piketty, après avoir lu plusieurs avis sur l'ouvrage et entendu des amis en discuter.
 
Je suis content de l'avoir fait. Je vous encourage à le lire aussi, ou au moins un bon résumé comme celui-ci de The Economist. Piketty a eu la gentillesse de discuter de son travail avec moi sur Skype le mois dernier. Comme je lui ai dit, je suis d'accord avec ses conclusions les plus importantes, et j'espère que son travail poussera plus de personnes intelligentes à étudier la richesse et les inégalités de revenu, parce que plus on en sait saura sur leurs causes et leurs remèdes, mieux on s'en sortira. J'ai aussi dit que certains éléments de son analyse me gênaient, comme j'en parlerai je le développerai ci-dessous.
 
Je suis entièrement d'accord avec Piketty sur les points suivants :
  • Des inégalités importantes sont un problème : elles gâchent les incentives économiques, poussent les démocraties à favoriser l'intérêt des puissances financières, et elles ne respectent pas l'idée que tous les hommes naissent égaux.
  • Le capitalisme ne tend pas de lui-même vers plus d'égalité - c'est-à-dire que les concentrations de richesse peuvent avoir un effet exponentiel si on ne les contrôle pas.
  • Les gouvernements peuvent jouer un rôle constructif dans l'évitement de ces amassements pour éviter ces accumulations de richesses, si et quand elles décident d'agir.
Je préciserai dans un souci de clarté que quand je dis que les inégalités sont un problème, je ne sous-entends pas que le monde empire. Au contraire, grâce à l'émergence des classes moyennes dans des pays comme la Chine, le Mexique, la Colombie, le Brésil et la Thaïlande, le monde en général devient plus égalitaire, et cette tendance mondiale positive devrait continuer.
 
Mais les écarts extrêmes ne devraient pas être ignorés, ou pire encore, pris pour un signe que nous avons une économie performante et une société épanouie. Oui, des inégalités découlent nécessairement du capitalisme. Comme le dit Piketty, elles sont inhérentes au système. La question est plutôt de se demander quel niveau d'inégalité est acceptable, et quand l'inégalité commence à faire plus de mal que de bien. Voici ce dont nous devrions discuter, et je suis enchanté que Piketty ait participé au débat avec autant de bonne volonté.
 
Cependant, le livre de Piketty a des lacunes importantes, que j'espère voir traitées par lui-même et d'autres économistes dans les années à venir.
 
Malgré toutes ses données sur les tendances historiques, il ne donne pas une vue globale de la création et de la dépréciation des richesses. Au centre de son livre, une équation simple : r > g, avec r le retour sur les capitaux investis et g le taux de croissance de l'économie. L'idée globale est que quand les retours sur les capitaux dépassent les retours sur la main-d'oeuvre, l'écart des richesses augmentera entre les gens qui ont beaucoup de capital et ceux qui dépendent de leur travail. L'équation est si fondamentale pour Piketty qu'il la qualifie de "force fondamentale de la divergence" qui "résume la logique générale de [ses] conclusions".
 
D'autres économistes ont assemblé des bases de données historiques immenses, qui font douter de la valeur de r > g dans la compréhension de l'évolution des inégalités. Je ne suis pas un expert. Ce que je sais, par contre, c'est que le r > g de Piketty ne différencie pas les différents types de capitaux et d'utilités sociales de façon adéquate.
 
Imaginez trois personnes riches. Un homme investit son capital dans le développement de son entreprise. Ensuite, une femme donne la plupart de son capital à des associations humanitaires. Une troisième personne consomme surtout, dépensant beaucoup d'argent dans un yacht ou un avion. La richesse de ces trois personnes contribue à augmenter les inégalités, mais j'aurais tendance à penser que les deux premiers apportent plus à la société que le troisième. J'aurais aimé que Piketty fasse cette distinction, qui a des implications importantes dont je parlerai un peu plus loin.
 
Plus important encore, j'estime que l'analyse de Piketty ne prend pas en compte des forces puissantes qui empêchent l'accumulation des richesses d'une génération à une autre. Je supporte J'approuve entièrement l'idée que nous ne voulons pas d'une société aristocratique dans laquelle les familles déjà aisées s'enrichissent simplement en se reposant sur leurs lauriers et en récupérant ce que Piketty appelle leur rente, c'est-à-dire, ce qu'ils gagnent en laissant d'autres personnes utiliser leur argent, leurs terres et leurs autres biens. Je ne crois pas pourtant que l'Amérique suive ce modèle.
 
Jetez un coup d'oeil à la liste Forbes des 400 Américains les plus riches. La moitié environ des personnes sur cette liste sont des entrepreneurs dont les entreprises ont très bien performés réussis, grâce à beaucoup de travail et de chance. Contrairement à l'hypothèse rentière de Piketty, je ne vois personne dont les ancêtres ont acheté une grande étendue de terres en 1780 puis accumulé les rentes. Aux États-Unis, ce vieil argent a disparu depuis longtemps en raison de l'instabilité financière, de l'inflation, des taxes, de la philanthropie et de la consommation.
 
On peut voir une dynamique de déplétion diminution des richesses dans l'histoire des industries populaires. Dans la première partie du vingtième siècle, Henry Ford et quelques autres entrepreneurs s'en sortaient très bien dans l'industrie automobile. Ils étaient propriétaires d'une grande partie des actions des entreprises automobiles qui arrivaient à capitaliser sur les économies d'échelle et une rentabilité très élevée. Ces entrepreneurs qui réussissaient sont l'exception. Bien plus Un plus grand nombre de personnes, incluant bien des rentiers qui avaient investi leurs richesses capitaux dans l'industrie auto la construction automobile, ont vu leurs investissements disparaître entre 1910 et 1940, quand le nombre de constructeurs américains est passé de 224 à 21. Plutôt qu'un transfert de richesses vers les rentiers et d'autres investisseurs passifs, on voit donc souvent le contraire. J'ai remarqué le même phénomène au travail, que ce soit dans la technologie ou d'autres domaines.
 
Piketty a raison en affirmant qu'il y a des forces qui peuvent mener vers une croissance exponentielle des richesses, incluant le fait que les enfants des personnes les plus riches ont souvent accès à des réseaux qui les aideront à trouver des stages, des emplois, etc. Cependant, d'autres forces mènent à la déplétion diminution de ces richesses, et le Capital ne leur donne pas assez de poids.
 
Je suis également déçu que Piketty se soit clairement concentré sur les revenus et la richesse en négligeant complètement la consommation. Les données de consommation représentent les biens et services achetés, incluant la nourriture, l'habillement, le logement, l'éducation ou la santé, et peuvent ajouter beaucoup à notre compréhension du mode de vie de chacun. En particulier dans les sociétés riches développées, l'approche par le revenu ne donne pas assez d'informations sur ce qu'il faut améliorer.
 
Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les données de revenu, en particulier, peuvent prêter à l'erreur. Par exemple, un étudiant en médecine sans revenus et avec un important prêt pour financer ses études serait dans une situation très difficile selon les statistiques, alors que son salaire sera peut-être très élevé quelques années plus tard. Un exemple plus extrême : quelques personnes extrêmement riches apparaîtront comme pauvres si elles ne reçoivent plus de dividendes ou de revenus.
 
Je ne dis pas que nous devrions ignorer la richesse et le revenu. Mais les données de consommation pourraient être bien plus importantes pour comprendre le bien-être humain. Elles montrent une situation différente - et généralement plus positive - de ce que Piketty décrit. Dans l'idéal, j'aimerais voir des études qui s'appuient à la fois sur la richesse, le revenu et la consommation.
 
Même si on ne peut pas avoir un paysage parfait aujourd'hui, on en sait déjà bien assez sur les défis qu'il faut relever.
 
La solution favorite de Piketty est une taxe annuelle progressive sur le capital plutôt que sur le revenu. Il affirme que ce genre de taxe "rendra impossible d'éviter une spirale inégalitaire tout en préservant la concurrence et les incitations à recommencer une accumulation primitive du capital".
 
Je suis d'accord avec le fait que l'imposition ne devrait pas se faire sur le travail accompli. Il est complètement illogique que le travail soit autant taxé aux États-Unis, surtout comparé au capital. Cette situation sera encore plus absurde dans les années à venir, alors que les robots et d'autres mécanismes automatiques pourront effectuer de plus en plus de tâches que les employés humains font aujourd'hui.
 
Mais plutôt que de déplacer les impôts vers le capital, comme le souhaite Piketty aimerait, j'aimerais que ce soit la consommation qui soit soumise à une taxe progressive. Prenons l'exemple des trois personnes dont j'ai parlé plus tôt : une qui investit dans des entreprises, une qui donne à des causes humanitaires, une qui vit très confortablement. Il n'y a rien de mal à être la troisième personne, mais j'estime qu'elle devrait payer plus d'impôts que les deux autres. Comme le soulignait Piketty lorsque nous discutions, il est difficile de mesurer la consommation : par exemple, les donations politiques devraient-elles compter ? D'un autre côté, presque tous les systèmes d'impôts, incluant l'impôt sur le capital, rencontre des difficultés similaires.
 
Tout comme Piketty, je mets également beaucoup d'espoir dans la taxe de succession. Laisser les héritiers consommer ou redistribuer du capital de façon disproportionnée seulement parce qu'ils sont nés dans la bonne famille est une façon d'allouer les ressources qui n'est ni intelligente, ni juste. Comme se plaît à le répéter Warren Buffett, c'est comme "choisir l'équipe olympique de natation pour 2020 en prenant les fils aînés des médaillés de 2000". J'estime qu'on devrait maintenir les impôts de succession et investir les recettes dans l'éducation et la recherche, le meilleur moyen de renforcer notre pays dans le futur.
 
La philanthropie peut aussi être une solution privilégiée. Il est dommage que Piketty lui accorde aussi peu de place. Il y a un peu plus d'un siècle, Andrew Carnegie était le seul à encourager ses proches aisés à donner d'importantes parts de leur fortune. Aujourd'hui, un nombre croissant de très riches choisit de le faire. La philanthropie bien faite ne crée pas seulement directement des bénéfices concrets pour la société, elle réduit de plus la richesse familiale. Melinda et moi sommes convaincus que la richesse "de dynastie" est mauvaise pour la société comme pour les enfants. Nous voulons que nos enfants se créent eux-même une place dans le monde. Ils auront toutes sortes d'avantages, mais ce sera à eux de construire leur vie et leur carrière.
 
Le débat au sujet de la richesse et des inégalités a déchaîné les passions de tous les côtés. Je n'ai pas de solution magique à proposer. Je sais par contre que, même avec ses défauts, le travail de Piketty apporte une nouvelle réflexion. Et maintenant, je suis impatient de découvrir de la recherche d'autre travaux qui étudieraient mieux encore ce sujet important.

 

 

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Besoin d'un coup de main pour la traduction, est-ce que quelqu'un qui a lu le bouquin de Piketty peut m'aider avec cette citation ? 

He argues that this kind of tax “will make it possible to avoid an endless inegalitarian spiral while preserving competition and incentives for new instances of primitive accumulation.”

 

 

"La solution que privilégie Piketty est un impôt progressif sur le capital plutôt que sur le revenu. Il avance qu'un impôt de cette sorte <<rendra impossible d'éviter une spirale inégalitaire tout en préservant la concurrence et les incitations à recommencer une accumulation primitive du capital".

Enfin à mon avis. J'imagine que, comme moi, tu butes sur ce que vient faire "competition" là-dedans.

 

C'est pas plutôt "rendra possible d'éviter..." ?

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Ma traduction pour vérification

 

Un message pour le 21èm siècle par Isaiah Berlin




Vingt et un ans plus tôt, le 25 novembre 1994, Isaiah Berlin acceptait le titre honorifique de Docteur en Droit de l’Université de Toronto. Il prépara le petit credo qui suit (ainsi qu’il le dénomma dans une lettre à un ami) pour la cérémonie tel qu’il fut lu en son nom.



« C’était la meilleur des époques, c’était la pire des époques ». C’est avec ces mots que Dickens commence sa fameuse nouvelle A Tale of Two Cities. Mais cela ne peut, hélas, être dit à propos de notre propre terrible siècle. Depuis des millénaires les hommes se sont détruits les uns des autres, mais les actes d'Attila le Hun, Genghis Khan, Napoléon (qui a introduit les massacres en temps de guerre), même les massacres arméniens, sont insignifiants avant la révolution russe et de ses conséquences: l'oppression, la torture, le meurtre qui peuvent être posés sur les portes de Lénine, Staline, Hitler, Mao, Pol Pot, et la falsification systématique de l'information qui a empêché la connaissance de ces horreurs pendant des années. Ils sont sans précédent. Ils ne sont pas des catastrophes naturelles, mais des crimes humains évitables, et quoique peuvent penser ceux qui croient au déterminisme historique, ils auraient pu être évités.

Je parle avec une émotion particulière, moi qui suis un homme très vieux, et qui ai vécu presque tout un siècle. Ma vie a été pacifique et sûr, et je me sens presque honteux au regard de ce qui est arrivé à tant d'autres êtres humains. Je ne suis pas un historien, et je ne peux pas parler avec autorité sur les causes de ces horreurs. Mais peut-être que je peux essayer.

Ils n’étaient pas, à mon avis, causée par les sentiments négatifs des activités humaines ordinaires, comme Spinoza les appelé (peur, cupidité, haines tribales, jalousie, l'amour du pouvoir) même si bien sûr ceux-ci ont joué leur rôle maudit. Ils ont été causés, à notre époque, par les idées; ou plutôt, par une idée particulière. Il est paradoxal que Karl Marx, qui a minimisé l'importance des idées par rapport aux forces sociales et économiques impersonnelles, devait, par ses écrits, provoquer la transformation du XXe siècle, à la fois dans le sens de ce qu'il voulait et, par réaction, contre elle. Le poète allemand Heine, dans un de ses écrits célèbres, nous dit de ne pas sous-estimer le philosophe calme assis dans son étude; si Kant n’avait pas défait théologie, a-t-il déclaré, Robespierre aurait pu ne pas couper la tête du Roi de France.

Il a prédit que les disciples armés des philosophes allemands (Fichte, Schelling, et les autres pères du nationalisme allemand) détruiraient un jour les grands monuments de l'Europe de l'Ouest dans une vague de destruction fanatique devant laquelle la Révolution française semblera alors un jeu d'enfant. Cela peut avoir été injuste pour les métaphysiciens allemands, mais l'idée centrale de Heine me semble valable: dans une forme dégradée, l'idéologie nazie a fait avoir des racines dans la pensée anti-Lumières allemandes. Il y a des hommes qui tuent et mutilent avec une conscience tranquille sous l'influence des mots et des écrits de certains de ceux qui sont certains qu'ils savent que la perfection peut être atteinte.

Permettez-moi de vous expliquer. Si vous êtes vraiment convaincu qu'il existe une solution à tous les problèmes humains, que l'on peut concevoir une société idéale que les hommes peuvent mettre en place si seulement ils font ce qui est nécessaire pour l'atteindre, alors vous et vos partisans devez croire que le prix ne peut être trop élevé à payer pour ouvrir les portes d'un tel paradis. Seul le stupide et malveillante vont résister une fois que certaines vérités simples leurs sont présentées. Ceux qui résistent doivent être convaincu; si ils ne peuvent pas être convaincus, les lois doivent être adoptées afin de les retenir; si cela ne fonctionne pas, alors la contrainte, le cas échéant violence, devra inévitablement être utilisé (si nécessaire, la terreur, le meurtre). Lénine croyait après avoir lu Das Kapital, et toujours enseigné que si une société juste, pacifique, heureuse et vertueuse ne pouvait être créée par les moyens qu'il préconisait, alors la fin justifiait tous les moyens qui devaient être utilisés, littéralement tous.

La conviction première qui sous-tend ce qui est des questions centrales de la vie humaine, individuelle ou sociale, est une vraie réponse qui peut être découvert. Elle peut et doit être mis en œuvre, et ceux qui ont trouvé ce sont les dirigeants dont la parole est loi. L'idée que à toutes les véritables questions il ne peut y avoir qu'une seule vraie réponse est une très vieille notion philosophique. Les grands philosophes athéniens, les juifs et les chrétiens, les penseurs de la Renaissance et du Paris de Louis XIV, les réformateurs radicaux français du XVIIIe siècle, les révolutionnaires du XIXe quand bien même ils diffèrent sur ce que la réponse était ou comment la découvrir (et des guerres sanglantes ont été livrées à ce sujet), étaient tous convaincus qu'ils connaissaient la réponse, et que seul vice humain et la bêtise pourraient entraver sa réalisation.

Telle est l'idée dont je parlais, et ce que je veux vous dire est qu'elle est fausse. Non seulement parce que les solutions proposées par les différentes écoles de pensée sociale diffèrent les unes des autres, et aucune ne peut être démontrée par des méthodes rationnelles (mais pour une raison encore plus profonde). Les valeurs centrales de la plupart des hommes qui ont vécu, dans un grand nombre de terres à un grand nombre de fois, ces valeurs, presque sinon totalement universelles, ne sont pas toujours en harmonie avec les unes avec les autres. Certaines le sont, d'autres non. Les hommes ont toujours désiré ardemment la liberté, la sécurité, l'égalité, le bonheur, la justice, la connaissance, et ainsi de suite. Mais la liberté complète n’est pas compatible avec l'égalité complète, si les hommes étaient totalement libres, les loups seraient libres de manger les moutons. L’égalité parfaite signifie que les libertés humaines doivent être retenus afin que le plus habile et le plus doué ne soit pas autorisé à avancer au-delà de ceux qui perdraient inévitablement s’il y avait de la concurrence. La sécurité, et les libertés, ne peuvent pas être conservés si la liberté de les subvertir est autorisée. En effet, tout le monde ne cherche la sécurité ou la paix, sinon certains n’auraient pas cherché la gloire au combat ou dans des sports dangereux.

La Justice a toujours été un idéal humain, mais il n’est pas compatible avec la miséricorde. L'imagination créatrice et la spontanéité, magnifique en eux-mêmes, ne peuvent pas être pleinement réconciliés avec la nécessité d'une planification, d’une organisation, et des calculs responsables. La connaissances, la recherche de la vérité, le plus noble des buts, peuvent ne pas être complètement réconciliées avec le bonheur ou la liberté que les hommes désirent, car même si je sais que je souffre d’une maladie incurable cela ne me rendrait pas plus heureux ou plus libre. Je dois toujours choisir: entre la paix et l'excitation, ou la connaissance et l'ignorance béate. Et ainsi de suite.

Alors qu'est-ce qui doit être fait pour empêcher les champions, parfois très fanatiques, d'un ou l'autre de ces valeurs, dont chacun tend à fouler aux pieds le reste, comme les grands tyrans du XXe siècle ont piétiné la vie, la liberté, et droits de l'Homme de millions d’autres parce que leurs yeux étaient fixés sur un avenir doré ultime?

Je crains que je n’ai pas de réponse spectaculaire à offrir: seulement que si ces valeurs humaines ultimes par lesquelles nous vivons sont poursuivis, alors des compromis, des arrangements doivent être faits si le pire n’est pas à même de se produire. Tant de liberté pour autant l'égalité, tant l'expression individuelle pour autant la sécurité, tant la justice pour tant de compassion. Mon point est que certaines valeurs s’opposent: les objectifs poursuivis par les êtres humains sont tous générés par notre nature commune, mais leur poursuite doit être contrôlée dans une certaine mesure, la liberté et la poursuite du bonheur, je le répète, ne peut pas être entièrement compatibles avec chaque autre, ni la liberté, l'égalité et la fraternité.

Nous devons donc peser et mesurer, négocier, faire des compromis et éviter l'écrasement d'une forme de vie par ses rivaux. Je ne sais que trop bien que ce ne est pas un drapeau sous lequel les jeunes hommes et femmes idéalistes et enthousiastes peuvent souhaiter marcher, il semble trop fade, trop raisonnable, trop bourgeois, il ne participe pas aux généreuses émotions. Mais vous devez me croire, on ne peut pas avoir tout ce qu'on veut, non seulement dans la pratique, mais même en théorie. Le déni de ceci, la recherche d'un seul idéal primordial car il est le seul et unique vrai pour l'Humanité, conduit invariablement à la coercition. Et puis à la destruction, au sang versé, les œufs sont cassés, mais l'omelette est pas en vue, il n'y a qu'un nombre fini d'œufs, de vies humaines, prêt pour la rupture. Et à la fin les idéalistes passionnés oublient l'omelette, et cassent juste des œufs.

Je suis heureux de noter que vers la fin de ma longue vie une certaine prise de conscience de ceci commence à émerger. La rationalité, la tolérance, assez rare dans l'histoire humaine, ne sont pas méprisés. La démocratie libérale, malgré tout, malgré le plus grand fléau moderne du fanatisme, du nationalisme fondamentaliste, se répand. Les grandes tyrannies sont en ruines, ou le seront-même en Chine, le journée est proche. Je suis heureux que vous à qui je parle verra le XXIe siècle, qui je suis sûr ne peut être qu’une meilleure époque pour l'humanité que celle de mon terrible siècle. Je vous félicite pour votre bonne fortune; je regrette de ne pas pouvoir voire cet avenir, que je suis convaincu est à venir. Avec toute la tristesse que j’ai répandue, je suis heureux de terminer sur une note optimiste. Il y a vraiment de bonnes raisons de penser que cela est justifié.






































































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Hum…c'est une traduction automatique ? C'est un sacré galimatias…je n'ai pas tout compris et j'ai corrigé ce que j'ai pu

 

 

Vingt et un ans plus tôt Il y a vingt ans, le 25 novembre 1994, Isaiah Berlin acceptait recevait le titre honorifique de Docteur en Droit de l’Université de Toronto. Il prépara le petit credo qui suit (ainsi qu’il le dénomma dans une lettre à un ami) pour la cérémonie tel qu’il fut lu en son nom.



« C’était la meilleur des époques, c’était la pire des époques ». « C'était le meilleur et le pire des temps ». C’est avec ces mots que Dickens commence sa fameuse nouvelle son fameux roman A Tale of Two Cities. Un conte de deux villes.  Mais cela ne peut, hélas, être dit à propos de notre propre terrible siècle. Depuis des millénaires les hommes se sont détruits les uns des autres, mais les actes d'Attila le Hun, Genghis Khan, Napoléon (qui a introduit les massacres en temps de guerre), même les massacres arméniens le massacre des Arméniens sont insignifiants avant la révolution russe et de ses conséquences en comparaison de la révolution russe et de ses conséquences : l'oppression, la torture, le meurtre qui peuvent être posés sur les portes (qu'est ce que cela peut bien vouloir dire ???) de Lénine, Staline, Hitler, Mao, Pol Pot, et la falsification systématique de l'information qui a empêché la connaissance de ces horreurs pendant des années. Ils sont sans précédent. Ils ne sont pas des catastrophes naturelles, mais des crimes humains évitables, et quoi que peuvent penser ceux qui croient au déterminisme historique, ils auraient pu être évités.

Je parle avec une émotion particulière, moi qui suis un homme très vieux, et qui ai vécu presque tout un siècle. Ma vie a été pacifique et sûre, et je me sens presque honteux au regard de ce qui est arrivé à tant d'autres êtres humains. Je ne suis pas un historien, et je ne peux pas parler avec autorité sur les causes de ces horreurs. Mais peut-être que je peux essayer.

Ils n’étaient pas, à mon avis, causée par les sentiments négatifs des activités humaines ordinaires, comme Spinoza les a appelé (peur, cupidité, haines tribales, jalousie, l'amour du pouvoir) même si bien sûr ceux-ci ont joué leur rôle maudit. Ils ont été causés, à notre époque, par les idées; ou plutôt, par une idée particulière. Il est paradoxal que Karl Marx, qui a minimisé l'importance des idées par rapport aux forces sociales et économiques impersonnelles, devait, par ses écrits, provoquer la transformation du XXe siècle, à la fois dans le sens de ce qu'il voulait et, par réaction, contre elle. Le poète allemand Heine, dans un de ses écrits célèbres, nous dit de ne pas sous-estimer le philosophe calme assis dans son étude; si Kant n’avait pas défait la théologie, a-t-il déclaré, Robespierre aurait pu ne pas couper la tête du Roi de France.

Il a prédit que les disciples armés des philosophes allemands (Fichte, Schelling, et les autres pères du nationalisme allemand) détruiraient un jour les grands monuments de l'Europe de l'Ouest dans une vague de destruction fanatique devant laquelle la Révolution française semblerait alors un jeu d'enfant. Cela peut avoir été semblé injuste pour les métaphysiciens allemands, mais l'idée centrale de Heine me semble valable: dans une forme dégradée, l'idéologie nazie a fait avoir puise ses racines dans la pensée anti-Lumières allemandes. Il y a des hommes qui tuent et mutilent avec une conscience tranquille sous l'influence des mots et des écrits de certains de ceux qui sont certains qu'ils savent que la perfection peut être atteinte de savoir comment atteindre la perfection.

Permettez-moi de vous expliquer. Si vous êtes vraiment convaincu qu'il existe une solution à tous les problèmes humains, que l'on peut concevoir une société idéale que les hommes peuvent mettre en place si seulement ils font ce qui est nécessaire pour l'atteindre, alors vous et vos partisans devez croire que le prix ne peut être trop élevé à payer pour ouvrir les portes d'un tel paradis. Seul les personnes stupides et malveillantes vont résister une fois que certaines ces vérités simples leurs sont seront présentées. Ceux qui résistent doivent être convaincu convertis; si ils ne peuvent pas être convaincus convertis, les lois doivent être adoptées afin de les retenir; si cela ne fonctionne pas, alors la contrainte, le cas échéant la violence, devra inévitablement être utilisé (si nécessaire, la terreur, le meurtre). Lénine croyait après avoir lu Das Kapital Le Capital et a toujours enseigné que si une société juste, pacifique, heureuse et vertueuse ne pouvait être créée par les moyens qu'il préconisait, alors la fin justifiait tous les moyens, tous qui devaient être utilisés, littéralement tous.

La conviction première qui sous-tend ce type de raisonnement est qu'une vraie réponse peut être apportée aux questions centrales de la vie humaine, individuelle ou sociale ce qui est des questions centrales de la vie humaine, individuelle ou sociale, est une vraie réponse qui peut être découvert. Elle peut et doit être mise en œuvre par ceux qui l'ont trouvé, les dirigeants dont la parole devient la loi et ceux qui ont trouvé ce sont les dirigeants dont la parole est loi. L'idée que à qu'à toutes les véritables questions il ne peut y avoir qu'une seule vraie réponse est une très vieille notion philosophique. Les grands philosophes athéniens, les juifs et les chrétiens, les penseurs de la Renaissance et du Paris de Louis XIV, les réformateurs radicaux français du XVIIIe siècle, les révolutionnaires du XIXe, quand bien même ils diffèrent différaient sur le contenu de la réponse ou sur la façon d'y parvenir sur ce que la réponse était ou comment la découvrir (et des guerres sanglantes ont été livrées à ce sujet), étaient tous convaincus qu'ils connaissaient la réponse, et que seul le vice humain et la bêtise pourraient entraver sa réalisation.

Telle est l'idée dont je parlais que j'évoquais, et je suis convaincu de sa fausseté ce que je veux vous dire est qu'elle est fausse. Non seulement parce que les solutions proposées par les différentes écoles de pensée sociale diffèrent les unes des autres, et qu'aucune ne peut être démontrée par des méthodes rationnelles mais pour une raison encore plus profonde. Les valeurs centrales fondamentales de la plupart des hommes qui ont vécu, dans un grand nombre de terres pays à un grand nombre de fois des époques très diverses, ces valeurs, presque sinon totalement quasiment universelles, ne sont pas toujours en harmonie avec les unes avec les autres. Certaines le sont, d'autres non. Les hommes ont toujours désiré ardemment la liberté, la sécurité, l'égalité, le bonheur, la justice, la connaissance, et ainsi de suite. Mais la liberté complète n’est pas compatible avec l'égalité complète, si les hommes étaient totalement libres, les loups seraient libres de manger les moutons. L’égalité parfaite signifie que les libertés humaines doivent être retenus limitées afin que le plus habile et le plus doué ne soit pas autorisé à avancer au-delà progresser aux dépens de ceux qui perdraient inévitablement s’il y avait de la dans une situation de concurrence. La sécurité, et les libertés, ne peuvent pas être conservés si la liberté de les subvertir est autorisée. En effet, tout le monde ne cherche pas la sécurité ou la paix, sinon certains n’auraient pas cherché ne chercheraient pas la gloire au combat ou dans des sports dangereux.

La Justice a toujours été un idéal humain, mais il n’est pas compatible avec la miséricorde. L'imagination créatrice et la spontanéité, magnifique en eux-mêmes, ne peuvent pas être pleinement réconciliés avec la nécessité d'une planification, d’une organisation, et des calculs responsables. La connaissances, la recherche de la vérité, le plus noble des buts, peuvent ne pas être complètement réconciliées avec le bonheur ou la liberté que les hommes désirent, car même si je sais que je souffre d’une maladie incurable cela ne me rendrait pas plus heureux ou plus libre. Je dois toujours choisir: entre la paix et l'excitation, ou la connaissance et l'ignorance béate. Et ainsi de suite.

Alors qu'est-ce qui doit être fait que faire pour empêcher les champions, parfois très fanatiques, d'une ou l'autre de ces valeurs, dont chacun tend à de fouler aux pieds le reste, comme les à l'image des grands tyrans du XXe siècle qui ont piétiné la vie, la liberté, et droits de l'Homme de millions d’autres parce que leurs yeux étaient fixés sur un avenir doré ultime?

Je crains que je n’ai de n'avoir pas de réponse spectaculaire à offrir: seulement que si  celle-ci. Dans la poursuite de ces valeurs humaines supérieures, il faut faire des compromis, des arrangements pour éviter que le pire soit à même de se produire  ces valeurs humaines ultimes par lesquelles nous vivons sont poursuivis, alors des compromis, des arrangements doivent être faits si le pire n’est pas à même de se produire. Tant de liberté pour tant d'égalité  autant l'égalité, tant d'expression individuelle pour tant de sécurité l'expression individuelle pour autant la sécurité, tant la de justice pour tant de compassion. Mon point est que De mon point de vue, certaines valeurs s’opposent sont en opposition : les objectifs poursuivis par les êtres humains sont tous générés par notre nature commune, mais leur poursuite doit être contrôlée dans une certaine mesure, la liberté et la poursuite du bonheur, je le répète, ne peut pas être entièrement compatibles avec chaque autre, ni d'autres comme la liberté, l'égalité et la fraternité.

Nous devons donc peser et mesurer, négocier, faire des compromis et éviter l'écrasement d'une forme de vie par ses rivaux rivales. Je ne sais que trop bien que ce ne est n'est pas un drapeau sous lequel les jeunes hommes et femmes gens  idéalistes et enthousiastes peuvent souhaiter marcher. Il semble trop fade, trop raisonnable, trop bourgeois, il ne relève pas d'une généreuse émotion participe pas aux généreuses émotions. Mais vous devez me croire, on ne peut pas avoir tout ce qu'on veut, non seulement dans la pratique, mais même en théorie. Le déni de ceci, la recherche d'un seul idéal primordial car il est vu comme le seul et unique vrai pour l'Humanité, conduit invariablement à la coercition. Et puis à la destruction, au sang versé, les œufs sont cassés, mais l'omelette est pas en vue. Il n'y a qu'un nombre fini d'œufs, de vies humaines, prêt pour la rupture. Et à la fin les idéalistes passionnés oublient l'omelette, et cassent juste des œufs.

Je suis heureux de noter que vers la fin de ma longue vie une certaine prise de conscience de ceci commence à émerger. La rationalité, la tolérance, assez rare dans l'histoire humaine, ne sont pas méprisés. La démocratie libérale, malgré tout, malgré le plus grand fléau moderne du fanatisme, du nationalisme fondamentaliste, se répand. Les grandes tyrannies sont en ruines, ou le seront-même en Chine, le journée est proche le jour en est proche. Je suis heureux que vous à qui je parle verra puissiez connaitre le XXIe siècle, qui je j'en suis sûr ne pourra être qu’une meilleure époque pour l'humanité que celle de mon terrible siècle. Je vous félicite pour votre bonne fortune; je regrette de ne pas pouvoir voire cet avenir, que je qui j'en suis convaincu est à venir. Avec toute la tristesse que j’ai répandue Après avoir évoqué toute cette tristesse, je suis heureux de terminer sur une note optimiste. Il y a vraiment de bonnes raisons de penser que cela est justifié.

 

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