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Le sort de la religiosité


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Les religions effacées, ou presque, reste la relgiosité, qui nous donne, aujourd'hui, par exemple, l'eglise de Keynésiologie, un public convaincu que leurs maitres peuvent créer quelque chose à partir de rien, ou encore l'église de climatologie et autres sectes vertes.

Quel est l'avenir de la religosité ?

Ca me semble une question clé pour la crédibilité d'un projet libéral puisque, après effacement des religion (souhaité à corps et à cris par les libéraux) les maîtres ont capturé la religiosité.

D'un point de vue d'Etat minimum, la situation est pire maintenant.

(Rien là de nouveau mais j'espère l'avoir exprimé de la façon la plus claire et brêve possible).

PS: la réponse "faisons disparaitre la religiosité" me semble 100% irréaliste, du pur Homme Nouveau.

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PS: la réponse "faisons disparaitre la religiosité" me semble 100% irréaliste, du pur Homme Nouveau.

Intéressant le cas de l'utopie colléctiviste qui en propose un idéal sans héros, tombe dans le matérialisme le plus abject! Je me demande si en rejettant les parties les plus (hautement) humaines les marxistes ne sont pas condamnés au moche dans le sens de Levinas et Nemo!

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Il faudrait d'abord qu'on s'entende sur le constat que tu formules : l'effacement de la religion, sur ce que souhaitent les libéraux, et la place de la religiosité à l'ère de la "sortie de la religion", comme dirait l'autre. Je ne suis pas sûr qu'il faille généraliser la "fin de la religion" à l'ensemble de la planète. Elle reste assez vigoureuse un peu partout en dehors de l'Occident, et même en son sein. Je ne pense pas que les libéraux veulent son extinction. Il me semble même que la plupart s'en accommodent assez bien. Plutôt que de "religiosité", qui lie trop étroitement une façon de penser bien particulière ("suivre aveuglément une règle ou un maître") et la religion (qui ne suppose pas forcément la "religiosité ainsi définie), je parlerais plutôt du grand retour à la pensée magique. On est capable à la fois d'utiliser les technologies les plus avancées et de croire aux déclarations les plus rudimentaires, d'avoir un Ipod et d'apporter du crédit à l'astrologie, aux déclarations d'autorité des joueurs de foot et des fonctions de son téléphone mobile.

Je pense qu'il y a un élément d'explication à chercher du côté du père Hayek : la société est plus complexe que nos pauvres cerveaux, qui lui a besoin de repères plutôt simples pour que nous puissions agir dans le monde. Du coup, la façon de choisir et de suivre les règles qui nous guident dans nos actions les plus quotidiennes demande l'assentiment sans réflexion (pour économiser du temps). Malheureusement, plus la société se complexifie, plus ces règles simples deviennent difficiles à repérer dans le flot de celles qu'on nous proposent. D'où problème. Enfin bon, je balance ça à chaud, hein…

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Plutôt que de "religiosité", qui lie trop étroitement une façon de penser bien particulière ("suivre aveuglément une règle ou un maître") et la religion (qui ne suppose pas forcément la "religiosité ainsi définie), je parlerais plutôt du grand retour à la pensée magique. On est capable à la fois d'utiliser les technologies les plus avancées et de croire aux déclarations les plus rudimentaires, d'avoir un Ipod et d'apporter du crédit à l'astrologie, aux déclarations d'autorité des joueurs de foot et des fonctions de son téléphone mobile.

En fait, à propos de l'exemple que je souligne ci-dessus, je ne crois pas qu'avoir un iPod correspond à un comportement humain distinct de ceux liés à la religiosité, au contraire c'est la même chose :

Buyology by Martin Lindstrom is a compulsively readable (at least for marketers) account of a research project that spanned three years and cost $7 million. Lindstrom’s team used both fMRI and EEG technologies to study what was really going on in the brains of consumers as they watched commercials, thought about brands, and much more. This body of research is surely the biggest compilation of neuromarketing data ever, and the results are always fascinating and sometimes surprising. Here are just a few examples of what the Buyology researchers found:

[..]

Strong Brands are like Religion. When the research team compared consumers’ brain activity while viewing images involving brands, religion, and sports figures, the activity evoked by strong brands was much like that caused by religious images.

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Chitah : la comparaison entre Ipod et astrologie est mal choisie, j'admets. Je voulais simplement souligner le décalage entre les évolutions scientifiques dans tous les domaines de notre existence et la persistance d'une mentalité quasi primitive chez beaucoup de nos contemporains (encore une fois : Idiocracy !).

Nick : quand tu dis c'est plus compliqué que ça, tu veux dire que tu penses que Gore et Trichet croient à la camelote qu'ils nous refilent ? C'est ça ?

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Entre veuve et divorcée, je préfère veuve devil.gifdevil.gifdevil.gif

(…et à la séparation de l'église et de l'état, donc, la mort de l'état !)

Un de mes co-religionnaires me disait l'autre jour:

La révolution, c'est personnel: comme une brosse à dents, ça ne se prête pas…

et mon maître du XIIIème siècle, qui en pleine période féodale, a bien failli finir décapité:

Puisque je suis né sur le domaine de mon souverain, je dois lui obéir dans mes gestes.Mais je n'ai pas a lui assujettir les croyances de mon coeur…

Nichiren

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Ca me semble une question clé pour la crédibilité d'un projet libéral puisque, après effacement des religion (souhaité à corps et à cris par les libéraux) les maîtres ont capturé la religiosité.

Captain Nick, peut-être n'es-tu pas venu depuis longtemps dans notre galaxie, la Voie Lactée, ou du moins pas à quelques parsecs de notre système solaire car je peux te garantir qu'il y a bon nombre de libéraux qui sont cul et chemise avec les religions.

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Je ne crois pas aux histoires à la Idiocracy. Dire que l'espèce humaine s'appauvrit est tout aussi irréaliste que dire qu'elle s'améliore.

Les humains restent globalement les mêmes, avec en gros les mêmes capacités cognitives limitées. Ça m'évoque un passage de La science du Disque-Monde :

Il y a aussi de la magie dans notre monde, mais c'est une magie différente, moins évidente. Elle se produit autour de nous, en permanence, dans tous ces petits liens de causalité que nous acceptons sans les comprendre. Quand nous actionnons l'interrupteur et que l'ampoule s'allume. Quand nous montons en voiture et que le moteur démarre. Quand nous nous livrons à toutes ces activités ridicules et improbables qui, par lien de causalité biologique, donnent des bébés. Beaucoup comprennent assurément, souvent avec force détails, les rouages de certains domaines mais, tôt ou tard, nous atteignons tous un trou noir magique. La loi de Clarke stipule que toute technologie suffisamment avancée ressemble à la magie. On interprète souvent le mot "avancée" comme "apportée par des extra-terrestres ou des gens venus du futur", comme si l'on installait l'homme de Neandertal devant la télévision. Mais il faut avoir conscience que, pour la majorité des usagers d'aujourd'hui, la télévision est déjà magique - qu'ils se trouvent derrière la caméra ou sur le canapé à regarder les images qui bougent dans la jolie boite.

[…]

Si vous démontez une machine pour en examiner le fonctionnement, vous appréhendez nettement les contraintes dont elle doit s'accommoder. En ce cas, vous ne risquez pas de confondre science et magie. Le système de démarrage des première automobiles nécessitait qu'on mette la main à la pâte - on enfonçait une grosse manivelle dans le moteur et, littéralement, on le "faisait tourner". Quoi qu'il se produise au sein de la mécanique, on savait que ce n'était pas magique. Mais quand la technologie se perfectionne, il est rare qu'elle reste transparente pour l'utilisateur. À mesure que l'emploi de l'automobile s'est généralisé, des symboles ont remplacé cette mécanique évidente. Vous pressez des boutons étiquetés pour actionner les commandes. C'est notre conception d'un sortilège : vous tirez le petit levier appelé starter et le moteur fait tout ce qu'il faut pour démarrer à froid. Quand grand-maman a envie de conduire, il lui suffit quasiment de presser l'accélérateur qui signifie "avance". De petits démons font le reste, par magie.

Ce cheminement se trouve au cœur de la relation entre science et magie dans notre monde. L'univers où nous sommes nés, où notre espèce a évolué, obéit à des règles, et la science est la méthode par laquelle nous nous efforçons de les comprendre. Mais, pour tous ceux qui n'appartiennent pas à une équipe d'ingénieurs, et peut-être même pour eux, l'univers que nous nous construisons opère par magie.

Il y a une limite à ce que toute personne peut appréhender. Au delà de cette limite, il y a le domaine du merveilleux. Quand on cherche à s'en débarrasser, il revient toujours par la fenêtre (et comme ce n'est pas sa place, ça peut faire des dégâts).

La religion est intéressante et souhaitable en tant que réflexion sur le merveilleux.

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Bien sûr que, globalement, on naît tous avec les même capacités. Notre façon de les utiliser, notre environnement, notre expérience ou notre éducation peuvent cependant faire grossir le fossé entre les performances intellectuelles de tout un chacun.

Pour en revenir au projet des libéraux, je pense qu'il ne fût pas simplement d'effacer les religions, mais de toutes les canaliser dans ce que l'on appelle l'argent.

Le fait d'exercer une activité régulière et régulée pour en acquérir et de le réutiliser est pour moi la preuve que nous mettons tous une forme de foi dans cette forme d'organisation de la société. Tout cela pour atteindre un idéal de progrès et de bien-être au sein de la société. Sans parler du nombre croissant de théories économico-scientifiques qui cherchent désespérément à en expliquer le fonctionnement (oserai-je faire le parallèle entre le nouveau testament et la nouvelle école libérale ? Hum… non.)

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Bien sûr que, globalement, on naît tous avec les même capacités. Notre façon de les utiliser, notre environnement, notre expérience ou notre éducation peuvent cependant faire grossir le fossé entre les performances intellectuelles de tout un chacun.

Mph. Nous sommes tous limités, ça n'implique pas que nous ayons tous les mêmes limites ou qu'elles soient fixes. Par contre, au delà d'une certaine limite, il n'y a plus personne.

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Pour ma part je pense également que souhaiter la disparition de la religiosité est irréaliste du fait que cet instinct de chercher réconfort/espoir/émerveillement/mot-du-même-champ-lexical est inhérent à la "nature humaine". Que cela prenne la forme de chamanisme, d'une religion organisée, de scientisme, d'une idéologie politique, etc. revient au même.

D'ailleurs toutes que je connais les cultures au travers du temps et de l'espace ont développé un système de croyance de ce type, ça me semble révélateur d'une religiosité plus innée que culturelle.

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Il y a une limite à ce que toute personne peut appréhender. Au delà de cette limite, il y a le domaine du merveilleux. Quand on cherche à s'en débarrasser, il revient toujours par la fenêtre (et comme ce n'est pas sa place, ça peut faire des dégâts).

Exactement. Mais j'utiliserais le mot "spiritualité" plutôt que "merveilleux". La spiritualité (que je définirais au sens large comme un questionnement sur une entité supérieure, une transcendance) faisant partie intégrante de la nature humaine, si l'on étouffe un de ses moyens d'expression, elle s'exprimera autrement. Comme l'a dit F.mas la religion est encore vivace, même en Occident (je pense notamment à l'Espagne et au Portugal), néanmoins il est vrai qu'elle est en déclin en France. Parallèlement à ce déclin on voit se populariser les spiritualités orientales, le New Age, le bouddhisme, etc. Ce n'est évidemment pas un hasard. Personnellement cela ne me plait guère, car ces ersatz de religion ont tendance à dériver vers un mysticisme qui ressemble plus à de la superstition ou à un délire magique qu'à autre chose, contrairement aux grandes religions monothéistes. Le christianisme par exemple, où la théologie tient un rôle primordial, et qui insiste sur la compatibilité entre foi et raison, adopte une démarche complètement inverse à ces nouvelles spiritualités.

Quoiqu'il en soit, on peut effectivement considérer une partie des environnementalistes (et une partie seulement) comme des propagateurs de ces nouvelles formes de spiritualité, notamment les adeptes des "théories Gaïa".

Par contre je ne pense pas que les libéraux aient jamais souhaité effacer les religions. Si on regarde la tradition libérale en France (car c'est en France que l'anticléricalisme fut le plus virulent), beaucoup de libéraux, de Bastiat à Tocqueville, étaient très croyants. Les seuls qu'on pourraient suspecter d'anticléricalisme sont les libéraux des Lumières d'une part (mais y avait-il vraiment des libéraux parmi les Lumières françaises ? parmi les Lumières britanniques ou allemandes oui, mais parmi les Lumières françaises on peut en douter), et les libéraux de la Troisième république d'autre part, très imprégnés de l'idéologie républicaine de l'époque, ennemie de l'Église vue comme un obstacle à l'avènement de l'homme nouveau . Parmi eux, on pourrait sans doute citer Yves Guyot, mais j'aurais du mal à trouver beaucoup d'autres exemples.

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Mph. Nous sommes tous limités, ça n'implique pas que nous ayons tous les mêmes limites ou qu'elles soient fixes. Par contre, au delà d'une certaine limite, il n'y a plus personne.

Quelle limite ?

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Mph. Nous sommes tous limités, ça n'implique pas que nous ayons tous les mêmes limites ou qu'elles soient fixes. Par contre, au delà d'une certaine limite, il n'y a plus personne.

Si. Il y a Chuck Norris.

Si on regarde la tradition libérale en France (car c'est en France que l'anticléricalisme fut le plus virulent), beaucoup de libéraux, de Bastiat à Tocqueville, étaient très croyants.

Et Constant, qui naviguait entre protestantisme et déisme.

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Il y a aussi de la magie dans notre monde, mais c'est une magie différente, moins évidente. Elle se produit autour de nous, en permanence, dans tous ces petits liens de causalité que nous acceptons sans les comprendre. Quand nous actionnons l'interrupteur et que l'ampoule s'allume. Quand nous montons en voiture et que le moteur démarre. Quand nous nous livrons à toutes ces activités ridicules et improbables qui, par lien de causalité biologique, donnent des bébés. Beaucoup comprennent assurément, souvent avec force détails, les rouages de certains domaines mais, tôt ou tard, nous atteignons tous un trou noir magique. La loi de Clarke stipule que toute technologie suffisamment avancée ressemble à la magie. On interprète souvent le mot "avancée" comme "apportée par des extra-terrestres ou des gens venus du futur", comme si l'on installait l'homme de Neandertal devant la télévision. Mais il faut avoir conscience que, pour la majorité des usagers d'aujourd'hui, la télévision est déjà magique - qu'ils se trouvent derrière la caméra ou sur le canapé à regarder les images qui bougent dans la jolie boite.

[…]

Si vous démontez une machine pour en examiner le fonctionnement, vous appréhendez nettement les contraintes dont elle doit s'accommoder. En ce cas, vous ne risquez pas de confondre science et magie. Le système de démarrage des première automobiles nécessitait qu'on mette la main à la pâte - on enfonçait une grosse manivelle dans le moteur et, littéralement, on le "faisait tourner". Quoi qu'il se produise au sein de la mécanique, on savait que ce n'était pas magique. Mais quand la technologie se perfectionne, il est rare qu'elle reste transparente pour l'utilisateur. À mesure que l'emploi de l'automobile s'est généralisé, des symboles ont remplacé cette mécanique évidente. Vous pressez des boutons étiquetés pour actionner les commandes. C'est notre conception d'un sortilège : vous tirez le petit levier appelé starter et le moteur fait tout ce qu'il faut pour démarrer à froid. Quand grand-maman a envie de conduire, il lui suffit quasiment de presser l'accélérateur qui signifie "avance". De petits démons font le reste, par magie.

Ce cheminement se trouve au cœur de la relation entre science et magie dans notre monde. L'univers où nous sommes nés, où notre espèce a évolué, obéit à des règles, et la science est la méthode par laquelle nous nous efforçons de les comprendre. Mais, pour tous ceux qui n'appartiennent pas à une équipe d'ingénieurs, et peut-être même pour eux, l'univers que nous nous construisons opère par magie.

Dans mes bras !

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Je ne crois pas aux histoires à la Idiocracy. Dire que l'espèce humaine s'appauvrit est tout aussi irréaliste que dire qu'elle s'améliore.

Les humains restent globalement les mêmes, avec en gros les mêmes capacités cognitives limitées. (…)

Il y a une limite à ce que toute personne peut appréhender. Au delà de cette limite, il y a le domaine du merveilleux. Quand on cherche à s'en débarrasser, il revient toujours par la fenêtre (et comme ce n'est pas sa place, ça peut faire des dégâts).

La religion est intéressante et souhaitable en tant que réflexion sur le merveilleux.

Est-il plus réaliste de poser la stabilité des capacités humaines dans un environnement qui a changé radicalement sur des millénaires ? Je ne sais pas si l'homme du Moyen âge est en tout point semblable à celui du début du XXIe siècle, même si je suis prêt à lui reconnaître des facultés et des qualités communes, mais, disons, exploitées différemment pour répondre à des enjeux différents. Nos capacités cognitives sont effectivement limitées, et nous n'avons cessé d'inventer des artifices pour y pallier. C'est même le sens de la civilisation occidentale, de nos croyances, de nos habitudes, etc. L'homme fabrique des outils parce qu'il n'a pas de griffes, des vêtements parce qu'il n'a pas de fourrure (sauf Chitah), capitalise les informations qui lui sont utiles pour lui éviter cette gêne originelle qui le met à la merci de la nature, jusqu'au jour où il s'est tellement rendu maître de la nature que le sens de sa dépendance évolue : Une fois le monde complètement arraisonné (pour parler comme un philosophe allemand qui se serait reconnu s'il n'était pas mort), l'homme devient dépendant des techniques qui lui facilitent la vie, lui permettent d'économiser son temps pour se consacrer à d'autres choses que sa survie. Et force est de constater qu'une fois libéré des contraintes liées à sa survie, average joe dépense plus son pognon en écran plat et en cd de Rihanna qu'à lire Chaucer ('tention, je suis conscient d'appartenir à la catégorie des buveurs de bière devant la télé). Selon l'heureuse expression d'Arendt, il remplace le loisir par les loisirs.

Ceci dit, la question qui reste en suspens est de savoir si la transformation de l'homme qui suit celle de la technique le change irrémédiablement (comme le pensent par exemple des gens beaucoup plus intelligents que moi : Hegel, Kojève, A. Bloom, R. Rorty, Fukuyama, Derrida…et Philippe Muray) ou pas (Leo Strauss par exemple, pour ne citer que lui). Je penche plutôt pour la deuxième hypothèse, et je me dis que les qualités et les vertus qui ne sont plus exploitées ou vivifiées par notre culture contemporaine sont simplement retournées du statut d'actualité à celui de potentialité (pour parler la langue d'Aristote).

Quand je parle d'Idiocracy, je fais référence à l'une des dynamiques de notre civilisation, qui, à la fin du Moyen âge, en privilégiant l'amélioration matérielle des hommes plutôt que leur édification morale (pour le meilleur et pour le pire), a abouti au moment de la révolution industrielle à la révolution de l'égalité et l'entrée dans l'ère des masses. L'"homme masse" selon Ortéga y Gasset n'est nouveau non pas par ses aspirations (comme tu le dis, il est hautement probable que le pékin moyen du 13 eme siècle ne soit pas beaucoup plus finaud que n'importe quel vendeur de téléphone portable d'aujourd'hui), mais plutôt par sa nouvelle visibilité. Les masses, c'est beaucoup de monde avec des aspirations vulgaires (au sens étroit du terme), relativement uniformes et un degré d'éducation lowcost. Et qui en font profiter tout le monde (la culture de masse, la religion de l'égalité, et, il faut bien le dire, la démocratie), même ceux qui n'en veulent pas, ou qui cherchent à s'en préserver un peu (là, c'est moi).

Sur la religion, pas sûr qu'on puisse la ramener au merveilleux. Par contre sur ce que je disais à propos de la pensée ou de la mentalité magique, c'est exactement le sens de ce que tu dis dans le post cité par WBell.

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Les humains restent globalement les mêmes, avec en gros les mêmes capacités cognitives limitées.

Sur ce sujet, j'ai entendu il y a quelques semaines une interview d'une nana qui avait écrit un bouquin sur le rétrécissement des mâchoires des enfants, constaté partout dans le monde, et qui affirmait que c'était déjà arrivé plusieurs fois dans l'évolution, pour atteindre à chaque fois un nouveau palier de l'évolution.

J'ai trouvé un extrait du bouquin : http://www.pithe-karateka.com/Extrait-du-chapitre-8.html . (EDIT: Ha, l'auteur est un mec, alors je ne sais pas qui était la nana interviewée, je crois quand même que c'était une nana. EDIT2: c'était sûrement l'interview du mec.)

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L'homme fabrique des outils parce qu'il n'a pas de griffes, des vêtements parce qu'il n'a pas de fourrure (sauf Chitah), capitalise les informations qui lui sont utiles pour lui éviter cette gêne originelle qui le met à la merci de la nature, jusqu'au jour où il s'est tellement rendu maître de la nature que le sens de sa dépendance évolue : Une fois le monde complètement arraisonné (pour parler comme un philosophe allemand qui se serait reconnu s'il n'était pas mort), l'homme devient dépendant des techniques qui lui facilitent la vie, lui permettent d'économiser son temps pour se consacrer à d'autres choses que sa survie. Et force est de constater qu'une fois libéré des contraintes liées à sa survie, average joe dépense plus son pognon en écran plat et en cd de Rihanna qu'à lire Chaucer ('tention, je suis conscient d'appartenir à la catégorie des buveurs de bière devant la télé). Selon l'heureuse expression d'Arendt, il remplace le loisir par les loisirs.

Je crois qu'à ce stade, pour qu'on se comprenne, il faut établir une franche différenciation entre la dynamique propre à l'homme en tant qu'espèce et celles des êtres humains en tant qu'individus.

Ce que je postule, c'est qu'il n'y a pas de différence fondamentale dans la manière dont nous (en tant qu'individus) appréhendons d'une part le monde naturel et d'autre part le monde institutionnel et technologique (que l'homme en tant qu'espèce, il est vrai, a construit en grande partie pour faire face à la nature).

Dans tous les cas, nous ne faisons que chercher à survivre et prospérer en nous adaptant à un environnement donné qui ne dépend largement pas de nous. Bien entendu la civilisation est un environnement objectivement beaucoup moins risqué, d'où le fait qu'elle soit sécrétée, en quelque sorte, par notre espèce, mais je ne crois pas qu'on puisse dire qu'il est plus ou moins complexe ou confortable du point de vue de l'individu.

L'être humain est hautement adaptable. Si il est important d'apprendre quels insectes sont comestibles ou comment résoudre une équation du second degré, il le fera et en sera d'autant plus heureux qu'il n'aura jamais rien connu d'autre. Si la meilleure manière de s'intégrer est de porter un étui pénien ou d'être fan de foot, qu'à cela ne tienne.

Devenir un très bon tailleur de pierre, est-ce que ça demande plus ou moins de travail que devenir un très bon ingénieur, ou est-ce que ça n'est pas comparable ? Dans tous les cas, les esprits libres et les génies restent une infime minorité (mais il faut reconnaitre qu'ils ont plus de matière à creuser dans le monde moderne).

Quand je parle d'Idiocracy, je fais référence à l'une des dynamiques de notre civilisation, qui, à la fin du Moyen âge, en privilégiant l'amélioration matérielle des hommes plutôt que leur édification morale (pour le meilleur et pour le pire), a abouti au moment de la révolution industrielle à la révolution de l'égalité et l'entrée dans l'ère des masses. L'"homme masse" selon Ortéga y Gasset est nouveau non pas par ses aspirations (comme tu le dis, il est hautement probable que le pékin moyen du 13ème siècle ne soit pas beaucoup plus finaud que n'importe quel vendeur de téléphone portable d'aujourd'hui), mais plutôt par sa nouvelle visibilité. Les masses, c'est beaucoup de monde avec des aspirations vulgaires (au sens étroit du terme), relativement uniformes et un degré d'éducation lowcost. Et qui en font profiter tout le monde (la culture de masse, la religion de l'égalité, et, il faut bien le dire, la démocratie), même ceux qui n'en veulent pas, ou qui cherchent à s'en préserver un peu (là, c'est moi).

Je ne sais pas. Peut être, effectivement, qu'à cause de l'explosion démographique, de l'apparition des médias de masse, de l'idéologie démocratique… il y a une sorte d'effet mécanique qui renforce la pression de la foule et nivelle par le bas. Je n'en suis pas convaincu.

De toute manière, y a-t-il déjà eu en pratique une civilisation qui privilégiait l'édification morale au dessus du confort ?

Sur ce sujet, j'ai entendu il y a quelques semaines une interview d'une nana qui avait écrit un bouquin sur le rétrécissement des mâchoires des enfants, constaté partout dans le monde, et qui affirmait que c'était déjà arrivé plusieurs fois dans l'évolution, pour atteindre à chaque fois un nouveau palier de l'évolution.

Sur l'évolution, je me pose la question suivante : Quels sont les caractères qui nous différencient, nous, d'un homo sapiens d'il y a, disons, 10 000 ans ?

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Il y a cette famille libérale ou nous rencontrons à chaque pas le christianisme: – liste non exhaustive – saint Thomas d’Aquin et la tradition thomiste jusqu’à l’École de Salamanque, Grotius, Milton, Locke, Bayle, Kant, Wilhelm von Humboldt, Benjamin Constant, Montalembert, Frédéric Bastiat, Lord Acton, et de nombreux Italiens, de Taparelli d’Azeglio à Antonio Rosmini, Luigi Einaudi ou Don Sturzo.

Voire l'excellent: http://www.contrepointphilosophique.ch/Philosophie/Pages/PhilippeNemo/LiberalismeEtChristianisme.pdf

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[quote name='Lancelot' timestamp='1312996362' post='746714'

Sur l'évolution, je me pose la question suivante : Quels sont les caractères qui nous différencient, nous, d'un homo sapiens d'il y a, disons, 10 000 ans ?

A part des trucs ultra mineurs comme savoir bien digérer le lactose, rien. Et absolument rien au niveau intellectuel.

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Il faut lire "la 25è heure" avec les développements sur les esclaves techniques, qui finissent par nous asservir.

De toute manière, y a-t-il déjà eu en pratique une civilisation qui privilégiait l'édification morale au dessus du confort ?

Je pense que la question ne se pose pas dans ces termes. Peut-être n'y a-t-il pas une hiérarchie aussi franche entre morale et confort, mais plutôt des balances variables selon les divers moyens pour parvenir à ses fins.

Et peut-être ne s'agit-il pas tant d'une hiérarchie que d'une compatibilité entre valeurs morales et recherche du confort.

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Je crois qu'à ce stade, pour qu'on se comprenne, il faut établir une franche différenciation entre la dynamique propre à l'homme en tant qu'espèce et celles des êtres humains en tant qu'individus.

Ce que je postule, c'est qu'il n'y a pas de différence fondamentale dans la manière dont nous (en tant qu'individus) appréhendons d'une part le monde naturel et d'autre part le monde institutionnel et technologique (que l'homme en tant qu'espèce, il est vrai, a construit en grande partie pour faire face à la nature).

Dans tous les cas, nous ne faisons que chercher à survivre et prospérer en nous adaptant à un environnement donné qui ne dépend largement pas de nous. Bien entendu la civilisation est un environnement objectivement beaucoup moins risqué, d'où le fait qu'elle soit sécrétée, en quelque sorte, par notre espèce, mais je ne crois pas qu'on puisse dire qu'il est plus ou moins complexe ou confortable du point de vue de l'individu.

L'être humain est hautement adaptable. Si il est important d'apprendre quels insectes sont comestibles ou comment résoudre une équation du second degré, il le fera et en sera d'autant plus heureux qu'il n'aura jamais rien connu d'autre. Si la meilleure manière de s'intégrer est de porter un étui pénien ou d'être fan de foot, qu'à cela ne tienne.

Devenir un très bon tailleur de pierre, est-ce que ça demande plus ou moins de travail que devenir un très bon ingénieur, ou est-ce que ça n'est pas comparable ? Dans tous les cas, les esprits libres et les génies restent une infime minorité (mais il faut reconnaitre qu'ils ont plus de matière à creuser dans le monde moderne).

Je ne sais pas. Peut être, effectivement, qu'à cause de l'explosion démographique, de l'apparition des médias de masse, de l'idéologie démocratique… il y a une sorte d'effet mécanique qui renforce la pression de la foule et nivelle par le bas. Je n'en suis pas convaincu.

De toute manière, y a-t-il déjà eu en pratique une civilisation qui privilégiait l'édification morale au dessus du confort ?

Sur l'évolution, je me pose la question suivante : Quels sont les caractères qui nous différencient, nous, d'un homo sapiens d'il y a, disons, 10 000 ans ?

A chaque civilisation, chaque stade d'évolution de la culture et de la civilisation correspond des qualités humaines encouragées ou dépréciées. Le courage ou la force physique comptaient sans doute plus quand en lieu et place des machines l'organisation sociale n'avait à disposition que des esclaves, comme sous l'Antiquité. Un exemple parlant, plus lié à la vie de l'esprit : aujourd'hui, la mémoire n'a qu'une importance secondaire parmi les facultés humaines pour une raison aisément compréhensible, à savoir l'existence de substituts techniques. On ne compte plus de tête parce qu'on a des calculatrices, plus besoin de connaître par coeur des pans de notre histoire ou de notre expérience, parce que tout peut se compiler sur livre ou ordinateur. Cela a un effet très concret sur nos contemporains (c'est-à-dire nouzotre). On a une mémoire de poule si on se compare à nos prédécesseurs médiévaux, qui eux faisaient de la mémoire la faculté reine.

Certains historiens rapportent par exemple que St Thomas a exactement rapporté les récits des pères de l'Eglise au pape Urbain IV de tête. C'est explicable bien sûr à une époque où l'imprimerie n'existe pas, et que la transmission des connaissances se fait par la copie et le discours. Dire que la mémoire est une faculté plus appréciée au moyen âge qu'aujourd'hui n'est pas rapporté pour critiquer l'époque présente, qui valorise d'autres facultés (en particulier la raison technique), mais juste pour montrer la grande plasticité de l'être humain (comme tu le dis d'ailleurs).

Quant à la similarité entre nature et artifice comme environnement humain : là on est pas d'accord. Si nous nous comportions au sein du monde naturel (ce qui nous est donné) de la même manière qu'au sein du monde civilisé, pourquoi aurions-nous quitté le premier pour le second ? Pourquoi fabriquer des outils si nous étions parfaitement adaptable ? Quand je parle de technique(s), je ne veux pas forcément dire Ipod ou la nasa, mais aussi tout simplement un arc, des flèches, une pierre polie.

Maintenant, le problème que je pose, c'est que si la civilisation moderne est une sorte de processus de rationalisation de l'existence visant à maximiser le confort de ses membres et d'éliminer la gêne originelle qui est le moteur de ses activités, alors son stade terminal sera atteint le jour où toutes les facultés et ses qualités personnelles seront remplacées par des arrangements techniques lui permettant de ne plus en faire usage (le rêve de Michel Houellebecq dry.gif).

Sur l'édification morale et le confort : l'expression que j'ai employé est mauvaise. J'aurais du parler d'édification spirituelle. Les civilisations pré-modernes n'assignent pas au confort la première place sur le podium, et surtout n'en font pas un moyen pour améliorer la condition humaine en général. Qu'on pense à l'Antiquité ou au moyen âge qui sont ce que J Baechler appelle des "hiérocraties", des régimes fondés sur l'autorité, lui-même dépendant d'un principe transcendant comme source unique de pouvoir. Le régime de l'époque médiévale se pense comme un ordre fixe qui met au bas de sa hiérarchie la classe productive (laboratores), donc les contingences matérielles et tout en haut les oratores, ceux qui retirés dans les monastères prient pour le salut du monde.

Baechler remarque aussi que l'une des spécificités du moyen âge, c'est l'absence de système de production (ce qui d'ailleurs entraîne sa très grande instabilité : une organisation sociale sans soubassement économique ne marche pas bien). Pour que les hommes commencent un peu à penser à leur confort, il faudra à la fois que naissent les conditions sociales permettant l'éclosion d'une nouvelle classe sociale en dehors du triptyque soldat-paysan-prêtre, à savoir la bourgeoisie au Xeme siècle, et l'affaiblissement de l'idéologie anti-capitaliste qui depuis Aristote (et véhiculée par le mainstream de l'Eglise) condamne la chrématistique.

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Il y a cette famille libérale ou nous rencontrons à chaque pas le christianisme: – liste non exhaustive – saint Thomas d’Aquin et la tradition thomiste jusqu’à l’École de Salamanque, Grotius, Milton, Locke, Bayle, Kant, Wilhelm von Humboldt, Benjamin Constant, Montalembert, Frédéric Bastiat, Lord Acton, et de nombreux Italiens, de Taparelli d’Azeglio à Antonio Rosmini, Luigi Einaudi ou Don Sturzo.

Voire l'excellent: http://www.contrepoi…ristianisme.pdf

+ 10

Il me semble que je n'ai pas compris ce fil. Je suis libéral et chrétien. Je fais la différence entre la foi et la raison. De plus, Indiquer une perte de la religiosité me parait un non sens vu qu'on ne peut faire un cas général de croyances personelles.

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A chaque civilisation, chaque stade d'évolution de la culture et de la civilisation correspond des qualités humaines encouragées ou dépréciées. Le courage ou la force physique comptaient sans doute plus quand en lieu et place des machines l'organisation sociale n'avait à disposition que des esclaves, comme sous l'Antiquité. Un exemple parlant, plus lié à la vie de l'esprit : aujourd'hui, la mémoire n'a qu'une importance secondaire parmi les facultés humaines pour une raison aisément compréhensible, à savoir l'existence de substituts techniques. On ne compte plus de tête parce qu'on a des calculatrices, plus besoin de connaître par coeur des pans de notre histoire ou de notre expérience, parce que tout peut se compiler sur livre ou ordinateur. Cela a un effet très concret sur nos contemporains (c'est-à-dire nouzotre). On a une mémoire de poule si on se compare à nos prédécesseurs médiévaux, qui eux faisaient de la mémoire la faculté reine.

Certains historiens rapportent par exemple que St Thomas a exactement rapporté les récits des pères de l'Eglise au pape Urbain IV de tête. C'est explicable bien sûr à une époque où l'imprimerie n'existe pas, et que la transmission des connaissances se fait par la copie et le discours. Dire que la mémoire est une faculté plus appréciée au moyen âge qu'aujourd'hui n'est pas rapporté pour critiquer l'époque présente, qui valorise d'autres facultés (en particulier la raison technique), mais juste pour montrer la grande plasticité de l'être humain (comme tu le dis d'ailleurs).

Il me semble que nous somme d'accord là dessus même si j'insiste plus sur le mécanisme de l'adaptation (par opposition aux contraintes du milieu et aux contenus auxquels on aboutit), qui lui reste stable.

On pourrait dire avec un vocabulaire piagétien (et des pincettes aussi longues que possible) que la variable "culture" fait varier les éléments à assimiler mais n'a qu'un pouvoir très limité d'accomodation sur le fonctionnement humain de base (ce qui explique entre autres qu'on ne peut pas créer d'homme nouveau ou de société utopique).

Quant à la similarité entre nature et artifice comme environnement humain : là on est pas d'accord. Si nous nous comportions au sein du monde naturel (ce qui nous est donné) de la même manière qu'au sein du monde civilisé, pourquoi aurions-nous quitté le premier pour le second ? Pourquoi fabriquer des outils si nous étions parfaitement adaptable ? Quand je parle de technique(s), je ne veux pas forcément dire Ipod ou la nasa, mais aussi tout simplement un arc, des flèches, une pierre polie.

La civilisation se développe parce qu'elle favorise la survie et la prospérité humaine en général, par le mécanisme impersonnel de la loi naturelle. Ça ne résulte pas d'un choix individuel ou collectif.

À un moment donné, par hasard ou en cherchant délibérément, un type fait une découverte (la viande est meilleure cuite, les flèches taillées de telle manière sont plus efficaces…). Si ses camarades trouvent que c'est une bonne idée, ça se propage. Au bout d'un moment l'empilement de bonnes idées donne une civilisation, mais ce n'était pas du tout le but recherché par les protagonistes.

Du moins pas avant un degré très avancé de raffinement, et on sait que les tentatives de ce genre ont tendance à mal tourner.

Maintenant, le problème que je pose, c'est que si la civilisation moderne est une sorte de processus de rationalisation de l'existence visant à maximiser le confort de ses membres et d'éliminer la gêne originelle qui est le moteur de ses activités, alors son stade terminal sera atteint le jour où toutes les facultés et ses qualités personnelles seront remplacées par des arrangements techniques lui permettant de ne plus en faire usage (le rêve de Michel Houellebecq).

Schopenhauer dirait que les deux moteurs omniprésents de l'être humain que sont le désir et l'ennui rendent cette perspective tout à fait impossible.

Les civilisations pré-modernes n'assignent pas au confort la première place sur le podium, et surtout n'en font pas un moyen pour améliorer la condition humaine en général. Qu'on pense à l'Antiquité ou au moyen âge qui sont ce que J Baechler appelle des "hiérocraties", des régimes fondés sur l'autorité, lui-même dépendant d'un principe transcendant comme source unique de pouvoir. Le régime de l'époque médiévale se pense comme un ordre fixe qui met au bas de sa hiérarchie la classe productive (laboratores), donc les contingences matérielles et tout en haut les oratores, ceux qui retirés dans les monastères prient pour le salut du monde.

Baechler remarque aussi que l'une des spécificités du moyen âge, c'est l'absence de système de production (ce qui d'ailleurs entraîne sa très grande instabilité : une organisation sociale sans soubassement économique ne marche pas bien). Pour que les hommes commencent un peu à penser à leur confort, il faudra à la fois que naissent les conditions sociales permettant l'éclosion d'une nouvelle classe sociale en dehors du triptyque soldat-paysan-prêtre, à savoir la bourgeoisie au Xeme siècle, et l'affaiblissement de l'idéologie anti-capitaliste qui depuis Aristote (et véhiculée par le mainstream de l'Eglise) condamne la chrématistique.

Un marxiste dirait que rien n'a changé, qu'il y a toujours des élites intellectuelles (ou qui s'en réclament) dégagées des contingences et des masses laborieuses :mrgreen:

Même sur ce forum, je me rappelle d'une discussion récente sur "l'hyperclasse" et ce qui s'ensuit.

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Au bout d'un moment l'empilement de bonnes idées donne une civilisation, mais ce n'était pas du tout le but recherché par les protagonistes.

Non.

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(…)

Un marxiste dirait que rien n'a changé, qu'il y a toujours des élites intellectuelles (ou qui s'en réclament) dégagées des contingences et des masses laborieuses :mrgreen:

Même sur ce forum, je me rappelle d'une discussion récente sur "l'hyperclasse" et ce qui s'ensuit.

Oooh un marxiste aurait tort parce qu'en ramenant l'ordre politique ou social uniquement à son soubassement économique ("Au moulin à eau correspond la société féodale, et au moulin à vapeur correspond la société bourgeoise" dixit le père barbu) il aurait bien eu du mal à décrypter les sociétés pré-modernes (et à faire la genèse de l'essor du capitalisme, soit dit en passant).

La formation des intérêts de classes; des idéologies, puis la dénationalisation des mêmes intérêts toussa, toussa sont des histoires qui se situent au sein du monde moderne, avec la fin des solidarités communales, l'émergence de l'individu et de l'état (et même si on peut trouver des similitudes entre histoire moderne et histoire romaine : après tout, il y a une filiation qui a été faite entre Machiavel lecteur de Tite Live et Marx théoricien de l'antagonisme de classes. Pour le florentin, la république a été vigoureuse et libre à cause de ses querelles intestines entre plébéiens et patriciens, riches et pauvres. La cité est traversée d'"humeurs" aux intérêts inconciliables qu'il s'agit de maîtriser pour le plus grand bien de tous. Ou du Prince. En règle général, Marx est un excellent lecteur des textes classiques -d'Aristote aussi).

Maintenant, la division entre gouvernants et gouvernés, et le long cycle de sa mise en place, de son fonctionnement effectif et de son déclin sont des expériences sans doute plus universelle (et onc plus stable dans l'histoire de l'humanité) mais aux contours moins étroits que l'économisme marxiste.

Bravo, tu as réussi à dénicher un texte optimiste de Schopenhauer. :) Bon là, j'exagère. Le désir

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