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Guerre humanitaire


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Voila un livre "réaliste" qui va peut-être nous rendre l'air plus respirable, après deux décennies d'interventionnisme humanitaire et d'ingérence en vertu de grands principes moraux universalistes.

Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, Tuer ou laisser mourir

Les massacres du régime syrien ont relancé le débat sur l’urgence d’une intervention internationale pour mettre fin au bain de sang. La «guerre humanitaire» reste pourtant un oxymore, même si nous y sommes désormais habitués. Le droit - ou le devoir - d’ingérence, théorisé par le juriste français Mario Bettati, fut entériné par l’ONU en 1988 et trouva sa première application dès 1991, en Irak, avec la création d’une zone kurde au nord du pays sous protection internationale. Il y eu ensuite les interventions au Kosovo et au Timor oriental. L’Afghanistan, puis l’invasion de l’Irak en 2003 ont discrédité le concept, mais il est revenu en force avec la «responsabilité de protéger» votée en 2005 par l’assemblée générale des Nations unies qui trouva sa première application en Libye.

«S’il est un comportement par nature extrême, c’est bien celui qui consiste à répondre à ce qui se fait de pire sur le plan national - le massacre de masse, le génocide, le crime contre l’humanité - par ce qui se fait de pire sur le plan international - la guerre au nom de principes moraux», écrit Jean-Baptiste Jeangène Vilmer dans un ouvrage dense qui a le mérite d’exposer toute la complexité d’un débat au croisement de l’éthique, du droit et de la théorie des relations internationales. Et surtout ce juriste philosophe problématise avec acuité une approche trop souvent émotionnelle. Ce chercheur canadien qui avait publié l’an dernier Pas de paix sans justice ? (Presse de Sciences-Po) se revendique en effet de l’école des «réalistes», certains progressistes, d’autres plus libéraux et héritiers, notamment, de Raymond Aron. «Le réalisme sert au déniaisement ; il permet de soulever un voile qui recouvre les choses, non pas pour les rejeter toujours ou ne croire en rien, mais pour mieux les comprendre» souligne l’auteur, montrant, entre autre, que le débat sur l’ingérence ne naît pas seulement en 1945 sous le choc de la Deuxième Guerre mondiale, ni même en 1918, mais dès l’Antiquité.

Il explique avec érudition aussi bien les critères de la guerre juste théorisée par Saint-Augustin (cause juste, autorité légitime, bonne intention, ultime recours et proportionnalité) puis leur sécularisation à l’époque des Lumières, qu’il expose les enjeux du débat sémantique autour des mots tels que : droit, devoir, responsabilité, assistance, intervention, etc. «Il faut être précis si l’on ne veut pas que les concepts soient utilisés à tort et à travers pour légitimer tous les abus» explique le chercheur qui s’appuie, pour sa démonstration, sur de nombreux exemples depuis la Chine antique jusqu’à la guerre en Libye, pour tenter de répondre toujours à cette même question posée d’entrée de jeu dans la préface d’Hubert Védrine : «Qui a le droit de s’ingérer, chez qui, pour quelles raisons et surtout pour quoi faire ?»

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Vous avez mis le mot réaliste entre guillemets, je remarque.

Oui, c'est sans doute superflu. Je lais ai mis pour montrer qu'il ne s'agit pas du sens où BHL revendique une attitude réaliste quand il se fait conseiller du Prince pour intervenir au nom de la démocratie et de la morale, mais de la théorie réaliste des relations internationales qui s'inscrit dans la tradition Machiavel-Hobbes-Metternich-Aron. Apollon ajouterait sans doute Kissinger.

Au passage je signale un entretien hautement intéressant avec l'auteur :

http://www.publicsen…mer,gille/71893

Un point qui me paraît essentiel dans son analyse, c'est le dévoilement de l'imposture des buts de guerres humanitaires depuis l'intervention en Afghanistan : la propagande compassionnelle est utilisée en vertu de l'idéologie droitdelhommiste pour sensibiliser l'opinion sur la nécessité de protéger telle ou telle population en Libye, Côte d'Ivoire, Syrie, etc - ce qui pourrait se concevoir, à certaines conditions, dans le cadre du Jus ad bellum - alors que le but final est de changer le régime en place pour exporter la démocratie.

Dans cet entretien, Jeangène Vilmer explique que la guerre ne doit être adoptée que comme ultime recours pour réduire les conflits (par des interventions prudentes, fortes et courtes), il défend la diplomatie classique entre Etats-nations et privilégie les modes d'intervention discrets par des commandos d'assassins ou le soutien aux rebellions.

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Dire que tout est relatif, c'est énoncer une règle. C'est ce qui fait BHL et clique.

Vilmer me semble plus favorable à un monde avec une seule hyper puissance. Après le 11 septembre la guerre contre le terrorisme, considérée comme impossible car on ne lutte pas contre une idée, les éliminations d'assassins est rendue possible et en accord avec le jus bellum.

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