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Contrat social : contrat explicite , quasi-contrat ou rien de tout cela ?


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Je m'interroge sur la notion de "contrat social" en termes juridiques.

Selon vous peut-on parler de contrat explicite pour évoquer le contrat social c'est à dire un ensemble de règles correspondant aux normes de contrat? Je pense pour ma part que cette notion est invalide car elle ne correspond pas à ce que l'on pourrait attendre d'un contrat entre des parties respectant le droit privé : absence d'erreur , de dol et de violence , détermination de l'objet du contrat et respect des obligations entre les parties.

Sinon peut-on parler de quasi-contrat à l'instar de la responsabilité civile délitctuelle ! Rappelons qu'un quasi contrat est un lien juridique qui caractérise un lien d'obligation entre deux personnes sans recourir à l'aspect formelle et explicite du contrat.

Ou rien de toute cela parce que d'après vous le contrat social c'est bullshit , une aimable fable écrite par des constructivistes en mal de reconnaissance ?

Merci d'avance pour vos réponses.

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Les théoriciens contractualistes contemporains font de grands efforts pour rendre leurs positions plausibles (Rawls, Buchanan, Gauthier, Narveson, etc.), notamment en donnant au contrat un statut hypothétique (pour comprendre correctement comment fonctionne la morale et la politique démocratique actuelle, il faut se placer dans une situation purement conceptuelle et abstraite). Je crois qu'il s'agit là d'un artifice idéologique pour justifier a posteriori les différentes théories de choix social ou collectif, qu'elles soient libérales ou pas, ce qui fait qu'elles regroupent des théories plus ou moins tautologiques.

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Les théoriciens contractualistes contemporains font de grands efforts pour rendre leurs positions plausibles (Rawls, Buchanan, Gauthier, Narveson, etc.), notamment en donnant au contrat un statut hypothétique (pour comprendre correctement comment fonctionne la morale et la politique démocratique actuelle, il faut se placer dans une situation purement conceptuelle et abstraite). Je crois qu'il s'agit là d'un artifice idéologique pour justifier a posteriori les différentes théories de choix social ou collectif, qu'elles soient libérales ou pas, ce qui fait qu'elles regroupent des théories plus ou moins tautologiques.

Mais peut-on imaginer qu'il y a un quasi lien juridique non déterminé en termes d'objet entre des individus : la responsabilité civile délictuelle ne date pas d'hier. Elle est basé sur une règle simple : "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer."

Peut-on imaginer ainsi qu'il y ait des quasi contrats semblables déterminant des règles communes pour des individus vivant sur un espace en commun ?

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Je ne pense pas qu'il puisse y avoir de contrats sans objets (sinon pourquoi faire des contrats ? L'idée du contrat social, c'est justement de déterminer les biens publics qui méritent d'être protéger au profit de tous les acteurs audit contrat, que ce bien public soit la sécurité, la justice ou je ne sais quoi encore).

Si je pense que le contrat social n'est qu'un outil idéologique créé de toute pièce pour justifier plus ou moins explicitement les arrangements politiques généraux du moment, il existe des contrats implicites : ce sont les coutumes, qui constituent des accords répétés concernant certaines règles sur une longue période historique. Si on en croit l'école du choix rationnel, cette sous espèce de contrat émerge pour "normaliser" et fixer les termes d'une suite répétée d'accords librement négociés, histoire d'éliminer les problèmes liés à la négociation.

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Voilà, cette version aurait eu mon vote si t'avais ajouté un sondage à ce fil.

I'm with Azor pour le coup.

Le contrat social, c'est de la merde. Pour que cette notion ait vaguement l'air de vouloir dire quelque chose, il faut tellement la martyriser qu'elle devient vide de toute substance.

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Si le processus de "ratification" du contract social ne correspond à aucune vérité historique que je connaisse, l'idée qu'une personne ou une entité a tout intérêt à se départir d'une partie de ses options au profit d'un arbitre (comprenons bien que je parle strictement d'un Etat régalien ici) pour empêcher la bellum omnium contra omnes (guerre de tous contre tous) hobbésienne est largement attestée dans les faits : entre individus, entre groupes et entre Etats.

Assez incroyablement, il me semble que "contrat social" soit plutôt une conséquence inattendue de l'élimination d'une bande de brigands par une autre bande de brigands (celle qui est appelée à devenir l'Etat, ou la mafia régnant sur le secteur dans certains cas) plutôt que le processus conscient d'individus libres.

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Je ne pense pas qu'il puisse y avoir de contrats sans objets (sinon pourquoi faire des contrats ? L'idée du contrat social, c'est justement de déterminer les biens publics qui méritent d'être protéger au profit de tous les acteurs audit contrat, que ce bien public soit la sécurité, la justice ou je ne sais quoi encore).

Si je pense que le contrat social n'est qu'un outil idéologique créé de toute pièce pour justifier plus ou moins explicitement les arrangements politiques généraux du moment, il existe des contrats implicites : ce sont les coutumes, qui constituent des accords répétés concernant certaines règles sur une longue période historique. Si on en croit l'école du choix rationnel, cette sous espèce de contrat émerge pour "normaliser" et fixer les termes d'une suite répétée d'accords librement négociés, histoire d'éliminer les problèmes liés à la négociation.

Tu pense qu'en fait la vie en société a été un ensemble de coutumes et pratiques bonnes ou mauvaises qui ont été institutionnalisé par la common law anglo-saxonne ou le positvisme juridique d'europe continentale.

Si le processus de "ratification" du contract social ne correspond à aucune vérité historique que je connaisse, l'idée qu'une personne ou une entité a tout intérêt à se départir d'une partie de ses options au profit d'un arbitre (comprenons bien que je parle strictement d'un Etat régalien ici) pour empêcher la bellum omnium contra omnes (guerre de tous contre tous) hobbésienne est largement attestée dans les faits : entre individus, entre groupes et entre Etats.

Assez incroyablement, il me semble que "contrat social" soit plutôt une conséquence inattendue de l'élimination d'une bande de brigands par une autre bande de brigands (celle qui est appelée à devenir l'Etat, ou la mafia régnant sur le secteur dans certains cas) plutôt que le processus conscient d'individus libres.

La guerre de tous contre tous est elle le fait de l'état justement et des médiations imparfaites entre les groupes d'individus dont les règles juridiques de droit privés ne sont pas abouti ? Je m'interroge vraiment sur cette notion. La théorie Hobbésienne n'incarnerait elle pas un passé et un présent imparfait et le "choice your community" l'avenir. Après en tant que libéral par idéal et conservateur par disposition (comme dirait oakeshott) , je ne crois pas particulièrement au sens de l'histoire mais cela n'empeche de mener la réflexion dans le sens le plus général du terme.

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Tu pense qu'en fait la vie en société a été un ensemble de coutumes et pratiques bonnes ou mauvaises qui ont été institutionnalisé par la common law anglo-saxonne ou le positvisme juridique d'europe continentale.

Je pense que le droit, les moeurs, les règles de la conduite humaine sont largement normés par des règles implicites, des habitudes qui n'ont été et qui ne peuvent qu'être en partie formulés verbalement (l'exemple du droit est intéressant : l'Etat moderne n'a fait que codifier et formaliser des règles de droit qui existaient déjà depuis longtemps comme par exemple le code civil. Les innovations que ce dernier contient sont à l'origine très marginales par rapport à ce qu'il reprend du droit antérieur).

Sur Hobbes : le problème du contrat social hobbésien est avant tout un problème logique (et ensuite un problème de monopolisation par l'Etat de l'exécution du contrat).

Le contrat est instauré entre ses participants pour échapper à l'état de nature, dans lequel toute vie normale est impossible, entendue comme celle visant à sa propre conservation et celle de sa propriété. Seulement, pour que le passage de l'état de nature au gouvernement civil puisse se faire, il faut déjà que les parties au contrat soient dans une situation où ils puissent signer un contrat. Or, quel est l'objet du contrat social, sinon remédier à une situation où toute possibilité de contracter (de conserver et d'échanger sa propriété) est impossible ? Dans ce cas, si les agents peuvent contracter sans problème dans l'état de nature, le contrat social est inutile, et s'ils ne peuvent le faire à cause de la nature même de l'état de nature, alors le contrat social ne peut être signé.

Hobbes s'en tire en "découvrant" une loi de nature qui oblige les individus en état de nature à coopérer, ce qui affaiblit pas mal sa position (et explique peut-être que ladite loi, qu'il présente dans "Le citoyen", disparaît il me semble dans le "Léviathan". Je dis ça de tête, et je n'ai pas les deux ouvrages sous la main, donc ça se vérifie).

Maintenant, si on admet que pour améliorer la situation de tous, on créé une agence monopolisant la violence légitime (il faudrait dire légale), et cela afin de faire respecter les termes du contrat. Est-ce vraiment la démarche la plus logique, la plus rationnelle et la plus raisonnable ? Confier à une agence le monopole de la coercition et de l'interprétation du pacte originel sans possibilité de renégocier le contrat de la part des cocontractants, c'est un peu lui donner toute latitude pour en faire ce qu'il veut. C'est pour ça aussi que je pense que le contrat est un outil taillé à l'origine pour justifier idéologiquement l'existence de l'Etat.

Maintenant, Hobbes est un auteur passionnant, et si son affirmation centrale concernant l'émergence de l'Etat comme seul outil d'arbitrage pour tempérer la lutte pour la richesse, le prestige et les places est fausse, il n'est pas interdit de se demander si le marché ne peut pas jouer un tel rôle avec plus de rigueur.

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Je pense que le droit, les moeurs, les règles de la conduite humaine sont largement normés par des règles implicites, des habitudes qui n'ont été et qui ne peuvent qu'être en partie formulés verbalement (l'exemple du droit est intéressant : l'Etat moderne n'a fait que codifier et formaliser des règles de droit qui existaient déjà depuis longtemps comme par exemple le code civil. Les innovations que ce dernier contient sont à l'origine très marginales par rapport à ce qu'il reprend du droit antérieur).

Sur Hobbes : le problème du contrat social hobbésien est avant tout un problème logique (et ensuite un problème de monopolisation par l'Etat de l'exécution du contrat).

Le contrat est instauré entre ses participants pour échapper à l'état de nature, dans lequel toute vie normale est impossible, entendue comme celle visant à sa propre conservation et celle de sa propriété. Seulement, pour que le passage de l'état de nature au gouvernement civil puisse se faire, il faut déjà que les parties au contrat soient dans une situation où ils puissent signer un contrat. Or, quel est l'objet du contrat social, sinon remédier à une situation où toute possibilité de contracter (de conserver et d'échanger sa propriété) est impossible ? Dans ce cas, si les agents peuvent contracter sans problème dans l'état de nature, le contrat social est inutile, et s'ils ne peuvent le faire à cause de la nature même de l'état de nature, alors le contrat social ne peut être signé.

Hobbes s'en tire en "découvrant" une loi de nature qui oblige les individus en état de nature à coopérer, ce qui affaiblit pas mal sa position (et explique peut-être que ladite loi, qu'il présente dans "Le citoyen", disparaît il me semble dans le "Léviathan". Je dis ça de tête, et je n'ai pas les deux ouvrages sous la main, donc ça se vérifie).

Maintenant, si on admet que pour améliorer la situation de tous, on créé une agence monopolisant la violence légitime (il faudrait dire légale), et cela afin de faire respecter les termes du contrat. Est-ce vraiment la démarche la plus logique, la plus rationnelle et la plus raisonnable ? Confier à une agence le monopole de la coercition et de l'interprétation du pacte originel sans possibilité de renégocier le contrat de la part des cocontractants, c'est un peu lui donner toute latitude pour en faire ce qu'il veut. C'est pour ça aussi que je pense que le contrat est un outil taillé à l'origine pour justifier idéologiquement l'existence de l'Etat.

Maintenant, Hobbes est un auteur passionnant, et si son affirmation centrale concernant l'émergence de l'Etat comme seul outil d'arbitrage pour tempérer la lutte pour la richesse, le prestige et les places est fausse, il n'est pas interdit de se demander si le marché ne peut pas jouer un tel rôle avec plus de rigueur.

Certaines mauvaises langues t'objecteront qu'une concurrence des entreprises privés n'est pas un gage de stabilité et de respect des libertés individuelles dans la pratique. Que certains pourraient déroger au principe de private law pour tenter d'imposer une situation de monopole de fait .

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Certaines mauvaises langues t'objecteront qu'une concurrence des entreprises privés n'est pas un gage de stabilité et de respect des libertés individuelles dans la pratique. Que certains pourrait déroger au principe de private law pour tenter d'imposer une situation de monopole de fait .

L'idée de Hobbes, c'est que l'état de nature est la situation dans laquelle les individus exercent leur liberté sans contrainte. La liberté d'échanger, de produire, mais surtout de tout faire pour survivre, y compris voler, tuer, piller, etc. Cette égale liberté naturelle entre individus aboutit à la pire des situations possibles. Pour y remédier, et donc pour chasser la violence en dehors de la société constituée, les individus troquent leurs libertés contre la loi, égale pour tous, produite et exécutée par le souverain qui du coup créé aussi en même temps le peuple (et on pourrait dire la société civile, même s'il n'y a pas de société chez Hobbes). La régulation par le droit canalise les passions et empêche l'incrémentation dans la violence de la compétition entre individus.

Si la pratique se contente de donner aux entreprises privées une place indue sans règles de justice, alors on ne peut pas parler de libéralisme.

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L'idée de Hobbes, c'est que l'état de nature est la situation dans laquelle les individus exercent leur liberté sans contrainte. La liberté d'échanger, de produire, mais surtout de tout faire pour survivre, y compris voler, tuer, piller, etc. Cette égale liberté naturelle entre individus aboutit à la pire des situations possibles. Pour y remédier, et donc pour chasser la violence en dehors de la société constituée, les individus troquent leurs libertés contre la loi, égale pour tous, produite et exécutée par le souverain qui du coup créé aussi en même temps le peuple (et on pourrait dire la société civile, même s'il n'y a pas de société chez Hobbes). La régulation par le droit canalise les passions et empêche l'incrémentation dans la violence de la compétition entre individus.

Si la pratique se contente de donner aux entreprises privées une place indue sans règles de justice, alors on ne peut pas parler de libéralisme.

Je doute de la mise en pratique réelle d'un service d'entreprises de sécurités privées à une échelle internationale ne causant pas de problèmes en termes de respect des libertés individuelles. Les théories "private law society" indiquent qu'un mécanisme de concurrence/réputation/assurance serait le garant de la protection des individus en un mot le marché accepté comme traditionnellement pour d'autre activités. Ma réflexion sur ce point est ce que le marché de la sécurité est un marché comme un autre qui se soumettra inévitablement aux règles de droit ? Rien n'est moins sûr en pratique dans un système généralisé.

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Sympa !

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Le contrat est instauré entre ses participants pour échapper à l'état de nature, dans lequel toute vie normale est impossible, entendue comme celle visant à sa propre conservation et celle de sa propriété. Seulement, pour que le passage de l'état de nature au gouvernement civil puisse se faire, il faut déjà que les parties au contrat soient dans une situation où ils puissent signer un contrat. Or, quel est l'objet du contrat social, sinon remédier à une situation où toute possibilité de contracter (de conserver et d'échanger sa propriété) est impossible ? Dans ce cas, si les agents peuvent contracter sans problème dans l'état de nature, le contrat social est inutile, et s'ils ne peuvent le faire à cause de la nature même de l'état de nature, alors le contrat social ne peut être signé.

Je n'ai pas lu Hobbes et ça a l'air intéressant, seulement le raisonnement me paraît faux car il correspond à une logique binaire que j'ai déjà dénoncée dans un autre fil.

Déjà, on peut s'étonner qu'on puisse considérer que l'état de nature soit incompatible avec une vie normale. C'est très paradoxal, car la nature ça sert à ça justement.

L'erreur dans le raisonnement amha c'est qu'il n'aborde pas le problème d'un point de vue quantitatif. Si la violence existe, ça ne signifie pas pour autant qu'elle est omniprésente. J'ai déjà évoqué l'analogie avec les systèmes proies-prédateurs. Le fait qu'une vache puisse brouter de l'herbe sans limite et que l'herbe ne puisse pas se défendre n'est pas une preuve que le système vache+herbe ne peut pas exister.

La présence de l'un nuit à celle de l'autre, mais, contrairement au concept de loi, elle ne l'interdit pas. C'est un système dynamique qui crée en général un équilibre. Si les vaches sont trop nombreuses, la quantité d'herbe diminue et de nombreuses vaches meurent de faim, ce qui diminue la pression sur l'herbe qui peut alors repousser, permettant ainsi aux vaches de prospérer à nouveau, etc.

Pour la violence et les contrats, c'est pareil. Si la violence augmente, la confiance envers autrui pour faire commerce diminue, mais du coup la richesse diminue et la violence diminue puisqu'il y a moins à piller (soit les voleurs meurent de faim, soit la rentabilité du vol devient négative et les voleurs deviennent honnêtes). Bref le coût de la violence dans l'économie trouve automatiquement son prix.

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@JC : je me contente ici de montrer que certains titres dont se prévaut l'Etat moderne n'ont pas de valeur. Il ne s'agit pas d'une défense positive de la société de droit privée, qui est une théorie qui a aussi des trous, j'en conviens parfaitement :)

@NA : Disons que pour Hobbes, l'état de nature est un peu le bogeyman qui permet d'instituer la puissance publique comme arbitre suprême des conflits entre individus sur un territoire donné. Cela veut dire qu'il ne s'agit pas d'une description objective de la nature, où de la situation antérieure à la monopolisation de la violence légale par les Etats. Comme je le dis souvent, dans les guerres de religions qui éclatent au moment où il écrit, il est à la fois juge et partie : contre les Eglises et pour l'Etat.

La différence entre Hobbes et Locke, c'est que Locke estime que l'état de nature n'est pas si invivable que ça est qu'on peut même y coopérer, même su les institutions de l'état de nature sont moins solides que celles civiles (instituées pour protéger les individus et la propriété).

Sur la dernière partie : c'est un peu l'idée de l'ordre spontané qu'on trouve chez certains héritiers de Smith, Hayek et d'autres encore. La reconnaissance de la propriété, c'est une convention comparable à un équilibre de coordination : si tout le monde l'adopte, ça améliore la situation de tout le monde. La question est de savoir comment émergent les conventions (certainement pas par décret étatique, comme le prétend le récit contractualiste).

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Pour la violence et les contrats, c'est pareil. Si la violence augmente, la confiance envers autrui pour faire commerce diminue, mais du coup la richesse diminue et la violence diminue puisqu'il y a moins à piller (soit les voleurs meurent de faim, soit la rentabilité du vol devient négative et les voleurs deviennent honnêtes). Bref le coût de la violence dans l'économie trouve automatiquement son prix.

Oui, la violence trouve son prix et n'engendre effectivement pas la croissance éco. L'argument est valide et satisfaisant d'un point de vue philosophique. L'est-il concrètement pour des populations qui de facto se retrouvent dans un cycle permanent de vendettas et de sous-développement chronique ?

Sinon, oui les questions de développement d'un ordre spontané et la naissance des coutumes sont captivantes. Mais peuvent-elles éclore avant qu'un groupe de brigands, voyant que les querelles sont mauvaises pour les affaires, ne mettent le holà à toute violence qui n'est pas exercée par eux-mêmes ? J'ai entendu parler d'un nombre incalculable de tribus et de sociétés vivant dans un état largement comparable à celui défini par Hobbes, mais jamais de tribus qui développent spontanément et sans coercition des règles plus efficaces pour prévenir la violence qu'un Etat de droit du XX/XXIème siècle.

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@JC : je me contente ici de montrer que certains titres dont se prévaut l'Etat moderne n'ont pas de valeur. Il ne s'agit pas d'une défense positive de la société de droit privée, qui est une théorie qui a aussi des trous, j'en conviens parfaitement :)

@NA : Disons que pour Hobbes, l'état de nature est un peu le bogeyman qui permet d'instituer la puissance publique comme arbitre suprême des conflits entre individus sur un territoire donné. Cela veut dire qu'il ne s'agit pas d'une description objective de la nature, où de la situation antérieure à la monopolisation de la violence légale par les Etats. Comme je le dis souvent, dans les guerres de religions qui éclatent au moment où il écrit, il est à la fois juge et partie : contre les Eglises et pour l'Etat.

La différence entre Hobbes et Locke, c'est que Locke estime que l'état de nature n'est pas si invivable que ça est qu'on peut même y coopérer, même su les institutions de l'état de nature sont moins solides que celles civiles (instituées pour protéger les individus et la propriété).

Sur la dernière partie : c'est un peu l'idée de l'ordre spontané qu'on trouve chez certains héritiers de Smith, Hayek et d'autres encore. La reconnaissance de la propriété, c'est une convention comparable à un équilibre de coordination : si tout le monde l'adopte, ça améliore la situation de tout le monde. La question est de savoir comment émergent les conventions (certainement pas par décret étatique, comme le prétend le récit contractualiste).

Alors nous sommes tout à fait d'accord ^^.

Oui, la violence trouve son prix et n'engendre effectivement pas la croissance éco. L'argument est valide et satisfaisant d'un point de vue philosophique. L'est-il concrètement pour des populations qui de facto se retrouvent dans un cycle permanent de vendettas et de sous-développement chronique ?

Sinon, oui les questions de développement d'un ordre spontané et la naissance des coutumes sont captivantes. Mais peuvent-elles éclore avant qu'un groupe de brigands, voyant que les querelles sont mauvaises pour les affaires, ne mettent le holà à toute violence qui n'est pas exercée par eux-mêmes ? J'ai entendu parler d'un nombre incalculable de tribus et de sociétés vivant dans un état largement comparable à celui défini par Hobbes, mais jamais de tribus qui développent spontanément et sans coercition des règles plus efficaces pour prévenir la violence qu'un Etat de droit du XX/XXIème siècle.

+1 . C'est pour cela qu' à mon avis on doit dissocier des marchés qui ne nécessitent pas des moyens de coercition physique pour exister et des marchés qui utilisent des moyens de coercition physique pour exister , même dans le cadre d'u contrat de droit privé.

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Oui, la violence trouve son prix et n'engendre effectivement pas la croissance éco. L'argument est valide et satisfaisant d'un point de vue philosophique. L'est-il concrètement pour des populations qui de facto se retrouvent dans un cycle permanent de vendettas et de sous-développement chronique ?

Que l'absence d'une force centralisée de contrôle de la violence soit responsable du sous-développement me paraît être un raccourci facile. Par exemple il parait qu'en Somalie il y a eu une période de recouvrement économique qui a correspondu à la période la plus anarchique du pays, et au retrait complet des organisations internationales.

Quant aux cycles permanents de vendettas, font-ils vraiment beaucoup de morts parmi les civils ? Personnellement j'en doute.

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Sinon, oui les questions de développement d'un ordre spontané et la naissance des coutumes sont captivantes. Mais peuvent-elles éclore avant qu'un groupe de brigands, voyant que les querelles sont mauvaises pour les affaires, ne mettent le holà à toute violence qui n'est pas exercée par eux-mêmes ?

Pourquoi chercher une cause exogène au fonctionnement de certaines catégories de conventions ? Pourquoi ne pas imaginer qu'elles ont émergé par répétition et adoption implicite, avant d'être codifié ? De Jasay prend l'exemple de la queue dans les magasins, qui pour lui donne un parfait exemple de ces conventions antérieures à l'institution de la justice, qui ne sont donc ni justes, ni injustes, adoptées par des individus pour améliorer le fonctionnement des relations sociales sans que personne n'en décrète l'existence ou n'intervienne pour en assurer le bon déroulement.

Depuis ces trente dernières années, certains chercheurs ont par exemple été attentif à l'émergence endogène de telles conventions (la coordination d'agents afin d'améliorer la situation de tous) en s'inspirant de la théorie des jeux. On cite souvent sur ce forum Axelrod et l'évolution de la coopération, ce qui ne me semble pas idiot pour expliquer à la fois l'émergence de zone de coopération pacifique tout comme la persistance d'autres zones de violence endémiques (la fameuse stratégique "tit for tat).

A mon avis, mais je ne suis pas anthropologue, la prédation et la soumission par conquête n'intervient qu'après l'établissement de telles conventions. C'est d'ailleurs assez logique : on ne devient prédateur qu'en constatant l'existence de bien à piller ou de cheptels à mettre en coupe réglée.

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Que l'absence d'une force centralisée de contrôle de la violence soit responsable du sous-développement me paraît être un raccourci facile. Par exemple il parait qu'en Somalie il y a eu une période de recouvrement économique qui a correspondu à la période la plus anarchique du pays, et au retrait complet des organisations internationales.

Quant aux cycles permanents de vendettas, font-ils vraiment beaucoup de morts parmi les civils ? Personnellement j'en doute.

L'argument sur la Somalie me paraît bancal. S'il y'avait une corrélation simple et directe entre retrait de l'Etat et développement, je vivrais en Somalie, pas en France. Force est de constater que même à la période de recouvrement dont tu parles, si jamais elle a existé, on n'a pas vu de mouvements migratoires importants d'occidentaux opprimés par l'Etat-Providence en direction de la Somalie libertarienne.

Quant à l'impact du cycle permanent de vendettas :

- version courte : voir l'article "Feud", d'une excellente qualité, sur le wiki anglophone

- version longue (plusieurs centaines de pages) : lire The Better Angels of Our Nature de S. Pinker, ne serait-ce que les premiers chapitres. Je te le dis en toute sincérité, c'est captivant et l'abondance de statistiques précises sur le taux de criminalité à travers les âges est indispensable pour quiconque s'intéresse aux questions liées à la culture de l'honneur et aux vendettas.

@F.Mas

Malheureusement, le respect des files d'attente n'est pas une donnée universelle. Cela nécessite, au strict minimum, une certaine éducation et une capacité de se montrer empathique. Lors de voyages hors du monde occidental il m'est arrivé de me trouver face à des situations cocasses où le respect de la file d'attente n'était pas vraiment la priorité.

Pour être franc, au vu de ton érudition ça me coûte un peu d'être en désaccord avec toi sur le sujet. Hélas, mes lectures sur le sujet indiquent toute autre chose. Si tu pouvais me balancer quelques références empiriques plus précises ça et là, je t'en saurais gré.

Juste comme ça, pourquoi indiquer "tendance minarchiste" sur ton profil si tu crois sincèrement en l'émergence spontanée, sans pré-requis, de coutumes pacificatrices ? :)

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@F.Mas

Malheureusement, le respect des files d'attente n'est pas une donnée universelle. Cela nécessite, au strict minimum, une certaine éducation et une capacité de se montrer empathique. Lors de voyages hors du monde occidental il m'est arrivé de me trouver face à des situations cocasses où le respect de la file d'attente n'était pas vraiment la priorité.

Moi aussi, dans mes voyages de plus de 2km en dehors du monde civilisé, ou confronté à des agents exogènes, j'ai pu me trouver face à des situations ou le respect de la file d'attente n'était pas la priorité :D

Dans ce cas-là, ce qui est comique, c’est que pour rétablir la civilisation, a une échelle très symbolique, mais non mineure, Il faut à la fois une majorité ‘civilisée’ et (donc ?) passive, un incivil (évidemment), et une personne, qui est du bon côté de la barricade, mais dont le verni civilisateur est un chouia craquelé, ou plus précisément, un homme qui est civilisé par choix et non par conditionnement, pour rétablir l’ordre en intimant le respect des convenances locales par la menace implicite d’usage peu légitime de la force…

Je n’ose pas en tirer de conclusions d’ordre général, il se pourrait qu’elles soient légèrement politiquement incorrectes, même en ces lieux.

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@F.Mas

Malheureusement, le respect des files d'attente n'est pas une donnée universelle. Cela nécessite, au strict minimum, une certaine éducation et une capacité de se montrer empathique. Lors de voyages hors du monde occidental il m'est arrivé de me trouver face à des situations cocasses où le respect de la file d'attente n'était pas vraiment la priorité.

Je te rassure, bien qu'étant très casanier, il m'arrive aussi de sortir, et même d'aller par exemple en Italie, où cette convention curieuse ne semble pas être vraiment rentrée dans les moeurs. L'idée d'appliquer aux coutumes la théorie du choix rationnel (et en particulier par la théorie des jeux) ne revient pas à dire que tous les hommes font l'expérience universelle de telle ou telle famille de convention mais que sous certaines circonstances, pour certains groupes d'hommes, l'expérience répétée aboutit à l'adoption de certaines règles qui améliore leur coopération. Dans le cas de la file d'attente, pas forcément besoin de sympathie (personne ne se connait dans une file) et pas d'éducation spéciale : personne n'a appris à respecter les files d'attente et personne ne les a inventé, on apprend à les respecter quand on essaie d'en intégrer une.

Sur la littérature sur le sujet : il y a Contract, Public Goods, Free Ride, de A de Jasay qui est pas mal, mais aussi le premier tome de Droit Législation et liberté, de Hayek sur l'évolution des règles de juste conduite. Il y a aussi les travaux de M. Polyani Personal Knowedge et The Tacit dimension (qui ont influencé ceux de T Kuhn). Plus généralement, Wittgenstein, Schrödinger, Oakeshott, Bruce Benson, etc.

Sur le minarchiste : indiquer que l'Etat n'a pas de titre spécial à dominer est une chose, souhaiter sa disparition en est une autre. Rien n'indique qu'en cas de substitution totale du marché à la politique une autre bande de prédateur ne le remplace pour imposer un ordre plus oppressif que le précédent.

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Moi aussi, dans mes voyages de plus de 2km en dehors du monde civilisé

Genre, dans les arrondissements intérieurs ? ;)

Sinon, tu peux développer en MP, je serai moins choqué que le forumeur standard.

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Le problème avec vous c'est que vous continuez à voir l'étalissement de règles et de coutumes comme la seule réponse à la violence. Ce n'était pas du tout mon propos. Les concepts de règles et de coutumes ne veulent pas dire grand chose: seuls importent les préférences comportementales au niveau individuel, et leur répartition statistique au sein de la population.

Cette idée selon laquelle il devrait exister des règles de comportement qui auraient vocation à s'appliquer à tout le monde sort de nul part, et en tout cas certainement pas de l'argument mathématique que j'avançais plus haut.

Par exemple, imaginez qu'au sein d'une population le même "le divorce, c'est mal" se répend essentiellement à la suite du phénomène dynamique selon lequel lorsque les divorces sont trop nombreux, la population a tendance à diminuer car il y a moins d'enfants. Le nombre de cerveaux occupés par ce même augmente d'un point de vue purement statistique, et un cerveau placé au sein de cette population constatera cette domination. Et là, c'est le drame: le cerveau va faire le paralogisme suivant: « domination statistique = règle, loi » Autrement dit le cerveau va donner une valeur d'inférence à un constat statistique, ce qui est une erreur très fréquente même parmi les cerveaux les plus évolués.

Maintenant, imaginez qu'à la suite d'une évolution culturelle le divorce devient moins nocif, par exemple parce que le taux de mortalité infantil diminue de telle sorte qu'une femme n'a pas à enfanter dix enfants pour assurer la survivance de deux d'entre eux. Normalement le même « le divorce, c'est mal », devrait diminuer car il n'a plus de raison de se répandre d'un point de vue dynamique. L'ennui c'est que ce même s'est muté en « le divorce, c'est mal donc il ne faut pas le faire et il faut punir ceux qui divorcent. C'est la loi » Et là, le même persiste dans la population pour des raisons purement mémétiques, et non plus dynamiques. Il est devenu purement parasitique.

C'est pareil pour les lois, coutumes, religions et autre saletés.

PS. quand j'y pense je me dis que le vrai problème c'est peut-être l'existence du méta-même «mes préférences morales personnelles sont les meilleures donc je dois les imposer à la société par la force s'il le faut». Ce même là a un très fort pouvoir reproductif ce qui en fait un parasite très efficace.

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Les concepts de "coutume", "habitude", "tradition" et "pratique"ont à peu près autant de sens que ceux de "préférences comportementales" et "répartition statistique au sein de la population". Par contre, ils n'ont pas la connotation de préférence morale que vous semblez leur prêter, et qui visiblement suscite en vous des réactions -pour le coup- morales assez contrastées, comparables à celles tenues à propos de l'homosexualité sur un autre fil.

Les règles de comportement que j'évoque sont avant tout des règles logiques, qui s'appliquent donc a priori comme a posteriori. Par exemple, si l'intensité de la violence diminue dans une communauté donnée, les ressources individuelles confisquées pour la prévention de la prédation diminuent et peuvent être réinvesties ailleurs. Ce n'est pas un raisonnement inductif mais déductif, et se contenter de repérer les occurrences statistiques qui en découle nécessairement ne nous serait pas d'un grand secours (en plus ça pose d'autres problèmes touchant à la découverte des "faits" comptabilisés par la statistique).

L'émergence de ce type de règles n'est en soi ni morale ni immorale, ce n'est qu'après coup que se créera le sens moral s'attachant à en préserver le fonctionnement. Un certain nombre de règles peuvent s'ossifier en moralisme, une fois disparu les raisons de la formation des conventions (et le triomphe de règles concurrentes pour assurer le même type de biens plus efficacement), ce que vous expliquez avec vos mots à vous, et qui, encore une fois, ressemble un peu au raisonnement des théoriciens de l'ordre spontané, en plus rudimentaire quand même.

Reste à ne pas confondre toutes les conventions, c'est d'ailleurs pour cette raison que je parle de familles de conventions, puisque certaines subissent plus sûrement l'usure de la concurrence que les autres, et que certaines s'effacent artificiellement avec les distorsions introduites par l'interventionnisme politique (notamment par l'invention de la législation).

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Moi aussi, dans mes voyages de plus de 2km en dehors du monde civilisé, ou confronté à des agents exogènes, j'ai pu me trouver face à des situations ou le respect de la file d'attente n'était pas la priorité :D

Dans ce cas-là, ce qui est comique, c’est que pour rétablir la civilisation, a une échelle très symbolique, mais non mineure, Il faut à la fois une majorité ‘civilisée’ et (donc ?) passive, un incivil (évidemment), et une personne, qui est du bon côté de la barricade, mais dont le verni civilisateur est un chouia craquelé, ou plus précisément, un homme qui est civilisé par choix et non par conditionnement, pour rétablir l’ordre en intimant le respect des convenances locales par la menace implicite d’usage peu légitime de la force…

Je n’ose pas en tirer de conclusions d’ordre général, il se pourrait qu’elles soient légèrement politiquement incorrectes, même en ces lieux.

ça sens le mec qui a filé une paire de claques à un merdeux qui voulait s'affranchir d'une longue file d'attente. Me trompe-je ?

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