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L'existentialisme - Pourquoi Tant De Haine?


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Aussi, ce qu'on enseigne au lycée est éminemment basique et ne rend pas justice à l'existentialisme.

On m'avait fait lire L'Existentialisme est un humanisme intégralement en terminale. Plus tard j'ai découvert que les mêmes idées qui me paraissaient alors si fraiches n'étaient que des resuscées, plus ou moins teintées d'idéologie, de concepts mieux compris par d'autres. J'en garde depuis une impression de m'être fait arnaquer qui peut expliquer le peu de cas que je fais de ce courant de pensée.

 

En ce qui concerne les auteurs plus roboratifs, ma référence est Schopenhauer parce que c'est lui qui m'a fait la plus forte impression dans la catégorie "je fabrique mon système explicatif du monde tout seul dans mon coin" dans laquelle on retrouve aussi Sartre.

 

Je pense au contraire, voir supra, qu'il y a de bonnes intuitions psychologiques dans l'existentialisme, à commencer par les notions d'angoisse ou de déréliction.

Dire que rien ne nous détermine c'est factuellement faux. Nous sommes déterminés dès la naissance par notre biologie et par les lois de pa physique, puis par notre environnement social, notre culture, notre langue, et enfin par notre propre conscience.

Il est vrai que d'un point de vue moral, devant un choix (que ce soit agir ou juger) il est utile de se concentrer sur le dernier point en disant qu'il existe un libre-arbitre et que nous sommes en dernier recours responsables. Là dessus l'existentialisme peut être pertinent, mais il est loin d'être seul à s'intéresser à ce problème ou à le résoudre.

Sinon, en plus roboratif sur la psychologie il y a Jung par exemple. Ou toute la recherche sur le fonctionnement congnitif.

 

Quant au mariage avec le droit naturel: ça dépend. Les conceptions classiques ça ne se marie pas bien, non. Les conceptions modernes à la HHH, oui ;)

Je ne suis pas certain que les conceptions modernes me conviennent. Je connais en gros le débat chez les juristes (via Villey), mais j'ai l'intuition qu'il y a là dessous des enjeux que je ne comprends pas pour l'instant, entre autres en épistémologie de l'économie, qui font favoriser une approche a prioriste à beaucoup de libéraux. Je serai peut-être en mesure d'y voir plus clair d'ici quelques années.

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Dire que rien ne nous détermine c'est factuellement faux. Nous sommes déterminés dès la naissance par notre biologie et par les lois de pa physique, puis par notre environnement social, notre culture, notre langue, et enfin par notre propre conscience.

 

Là il y a une grosse différence entre Heidegger et Sartre.

 

Heidegger dirait qu'étant donné que le Dasein est le sujet en tant qu'il se comprend comme ouverture sur les objets, il doit toujours comprendre que sa véritable essence n'est pas celle d'un objet déterminé, sinon il s'aliène. En gros il dirait que si tu te considères comme un étant, donc comme une chose du monde déterminée, tu omets ta caractéristique fondamentale d'être ce qui est toujours la possibilité de quelque chose d'autre.

En gros, il rejette tout objectivisme quant à la personne (il dit même que c'est trop spécifié pour le Dasein de se considérer comme être humain).

 

En gros tout cela repose sur une possibilité pour le sujet de penser se penser d'une façon différente dont il pense les objets. C'est un argument mystique à mon avis, mais on voit d'où il vient, en gros de Kant et de l'idée que l'être a eux face, une face subjective par laquelle on conçoit l'action, et une face objective par laquelle on conçoit l'essence.

 

Heidegger ne fait que radicaliser et dire qu'en tant que sujet, l'on n'est qu'une subjectivité radicale, donc pas un objet dont on pourrait dire ce qu'il est.

 

Chez Sartre c'est encore plus foireux, sa métaphysique n'est même pas à proprement parler matérialiste ni continuiste, il pense que la réalité est fondamentalement l'opposition entre l'action, libre par essence, et la matière, qui limite l'action par essence. L'Homme même ne serait qu'une instance de cette opposition entre liberté et inertie.

 

Cette fable est un emprunt direct à Marx bien sûr, puisque l'obsession qui guida la vie de Jean-Paul était d'être appelé "marxiste".

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En niant l'existence (oups) d'une essence humaine qui précède l'existence humaine, donc en posant l'individu en absolu qui décide non pas de choisir ses contraintes mais de s'affranchir de toute contrainte, l'existentialisme ne serait-il pas plus proche de la pensée libertaire, ou encore de ce "néolibéralisme" purement économique et utilitariste qui pense la société humaine comme une juxtaposition d'atomes égoïstes qui ne vivent que pour leur intérêt bien compris et qui est le prélude - par la critique qui en est faite - des idéologies visant à forcer étatiquement la solidarité (socialisme, communisme, collectivisme divers et variés) ?

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Non.

 

Ou seulement improprement, parce que l'existentialisme ne peut logiquement pas penser une pluralité d'individus, et ne peux pas considérer l'intérêt bien compris comme un principe authentique de l'action. La détermination de l'action est essentiellement tautologique dans l'existentialisme : une subjectivité abstraite et sans essence (le Dasein) décide d'assumer sa propre condition, qui est celle d'un être pouvant s'échapper dans le possible, mais aucune situation concrète pour cette libération ne peut être conçue, puisque l'individu ne peut pas assumer sa condition de manière déterminée (puisqu'il ne peut se comprendre que comme pure possibilité, etc, etc).

 

Les existentialistes espèrent que de cette tautologie sorte quelque chose de miraculeux.

 

En fait c'est peut être ce que les libertaires croient poursuivre en jouant la libération radicale et la révolution permanente, mais c'est une illusion de création de la "situation" authentique.

 

Cela dit si on lit bien Sartre, il en est conscient, et la seule chose qu'il démontre vraiment dans le texte c'est que toute action collective de libération est impossible, puisque toute organisation tend à l'inertie etc.

 

Mais cette pensée tourne dans le vide, étant donné sa tautologie elle pourrait tout aussi bien affirmer que la libération ne passe par aucun acte, même pas un acte de pensée, puisque rien ne nous dit que le Dasein a une propriété telle que la pensée.

 

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Heidegger dirait qu'étant donné que le Dasein est le sujet en tant qu'il se comprend comme ouverture sur les objets, il doit toujours comprendre que sa véritable essence n'est pas celle d'un objet déterminé, sinon il s'aliène. En gros il dirait que si tu te considères comme un étant, donc comme une chose du monde déterminée, tu omets ta caractéristique fondamentale d'être ce qui est toujours la possibilité de quelque chose d'autre.

En gros, il rejette tout objectivisme quant à la personne (il dit même que c'est trop spécifié pour le Dasein de se considérer comme être humain).

 

En gros tout cela repose sur une possibilité pour le sujet de penser se penser d'une façon différente dont il pense les objets. C'est un argument mystique à mon avis, mais on voit d'où il vient, en gros de Kant et de l'idée que l'être a eux face, une face subjective par laquelle on conçoit l'action, et une face objective par laquelle on conçoit l'essence.

 

Heidegger ne fait que radicaliser et dire qu'en tant que sujet, l'on n'est qu'une subjectivité radicale, donc pas un objet dont on pourrait dire ce qu'il est.

Ça correspond plus ou moins au monde comme volonté de Schopenhauer (sauf que lui ça ne le défrisait pas de le faire coexister avec le monde comme représentation, il les considérait même interdépendants comme l'observateur et l'observé).

On peut aussi noter que pour lui, la volonté ne se limite pas à l'humain mais qu'elle est présente à des degrés divers dans toute matière, ce qui limite le biais humaniste ("les humains sont des créatures spéciales, élues de Dieu") dans lequel paradoxalement l'existentialisme se complait.

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Oui, l'humanisme de Sartre qu'il défend contre Levi-Strauss notamment et qui le distingue de Heidegger est complètement bizarre, et pas du tout justifié par sa propre métaphysique. Mais Sartre est comme ça, il ne se sent pas obligé à la rigueur quand il a les moyens de se faire bien voir.

 

De manière générale il est intéressant de voir que l'existentialisme, qui à mon avis est le stade final de l'idée d'un sujet et d'une liberté abstraits, dont, quoi qu'on en dise, le libéralisme est une étape historique, l'existentialisme donc, a tendance à faire renoncer à tout impératif substantiel, toute maxime avec un contenu (renoncer à la tradition, à son intérêt, et aux instincts naturels surtout), pour ensuite justifier telle ou telle autre idéologie comme "la plus proche" de cette abstraction... Donc en fait en réhabilitant un contenu insidieusement.

 

La preuve c'est que l'humanisme de gauche ne voit aucun problème à redéfinir l'Homme après l'avoir abstrait, Sartre en est le meilleur exemple, et si on lit la deuxième partie d'Être et Temps de Heidegger, celui là parvient par un retournement assez louche à proposer le Volk comme entité de libération.

 

Cela a tendance à me confirmer dans l'idée de Edmund Burke selon laquelle les idées des Lumières qui font intervenir la raison dans la détermination des impératif, contre la tradition et contre l'intérêt, sont un bon outil de manipulation des individus. Après avoir déconstruit les certitudes qui les aidaient à se débrouiller tant bien que mal, de façon diverses et variées, on arrive paradoxalement à les convaincre de nouveaux principes qui ont l'air plus assurés parce qu'ils sont universels, mais au non de quoi peut-on dire qu'ils sont meilleurs? Remarquez que cette nouvelle conviction est aussi contraire aux principes de la déconstruction par la raison, qui ne peut amener qu'à l'abstraction, mais que paradoxalement dans bien des cas ça se passe ainsi... Il suffit de lire Foucault ou la philosophie de déconstruction des identités qui se pratique aujourd'hui à Berkeley pour s'en convaincre, derrière la déconstruction il y a souvent une idéologie révolutionnaire à l'oeuvre.

 

L'abstractionnisme dont vient le libéralisme ne devrait pas mener à l'humanisme, pourtant historiquement il a été suivi par l'installation des humanismes les plus radicaux comme le socialisme ou le fascisme (humanisme au sens de recherche de l'accomplissement de l'Homme), notamment par le biais de l'idée de progrès, et surtout de l'universalisme qui remplace une variété de tradition et de moeurs par un seul principe soit disant démontré.

 

Ma religion n'est pas faite à se sujet (d'autant qu'un argument historique n'est pas un argument logique), mais ça serait un problème pour le libéralisme (ou en tout cas pour les libéralismes trop tempérés, ou les libéralismes moraux), ou en tout cas ça obligerait à la parcimonie, surtout quand on a tendance à invoquer le bonheur, la prospérité, l'effacement des frontières...

 

Le droit naturel conçu de manière subjective, avec un contenu, et sans universalisme, est éventuellement une solution.

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Beaucoup de libéraux tendent à détester l'existantialisme comme mouvement philosophique. Ca m'a toujours profondément échappé. Je comprends qu'on soit dégoûté par le gauchisme outrancier de Sartre, mais non seulement ça ne le résume pas, mais l'existentialisme ne se limite pas à Sartre.

A l'inverse, j'ai toujours pensé l'existentialisme comme une philosophie de la liberté et de la responsabilité, une double thématique qui me semble pertinente pour les libéraux.

Alors, adversaires de l'existentialisme, pourquoi tant de haine? Je suis curieux de savoir ce qui vous déplaît tant.

 

Je me suis souvent posé la question, mais je n'ai lu aucun livre existencialiste. J'ai toujours vu ça comme une forme d'invididualisme version gaucho (et donc "bon individualisme", à l'inverse de sa version libérale bien sur).

Je vais donc lire attentivement ce thread.

 

bon sujet sinon.

 

Je ne sais pas de qui tu parles, mais je ne déteste pas l'existentialisme. L'étranger, d'Albert Camus, est d'ailleurs un de mes livres favoris.

 

Tout pareil. Dans la même veine, "le procès" de Kafka.

A faire aimer le droit (d'ailleurs, je dois ces lectures à l'un de mes profs de droit, Olivier Corten).

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 Je trouve ça au contraire puissant (bon "définir l'essence de l'homme" est une formule malheureuse). Et ça correspond en fait à certaines dispositions psychologiques (d'où la critique compréhensible de psychologisme): on ne choisit pas le mal. On est toujours en train de dire, au fond, ce que je fais là, c'est bien. Et ça alourdit ma responsabilité. Et tout ce qui responsabilise, je tends à trouver ça bien :)

 

Là où je n'adhère c'est quand il dit qu'un choix individuel est une affirmation de ce que devrait faire chaque homme.

L'exemple qu'il prend est celui du mariage : quelqu'un qui se marie affirme par son acte que le mariage est son choix concernant l'essence de l'homme, donc que c'est ce que l'homme devrait faire.

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