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Complotistes & théories de compote


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  • 3 months later...

Ce doit être parce que je n'en ai jamais vu en vrai, mais je me demandais si parmi vous ici d'autres gens pensaient ça : personne n'ayant jamais lu un livre ne pense réellement que la terre est plate. J'ai vu un docu sur les platistes et j'ai vraiment l'impression que c'est un canular de 4chan ultra élaboré, un gorafi où tout le monde est tombé dans le piège.

PS : j'ai enseigné dans le fond du fond des ploucs, je ne parle pas du paysan ouzbek mais de gens qui ont le bac ou équivalent.

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Il y a 7 heures, Jean_Karim a dit :

Ce doit être parce que je n'en ai jamais vu en vrai, mais je me demandais si parmi vous ici d'autres gens pensaient ça : personne n'ayant jamais lu un livre ne pense réellement que la terre est plate. J'ai vu un docu sur les platistes et j'ai vraiment l'impression que c'est un canular de 4chan ultra élaboré, un gorafi où tout le monde est tombé dans le piège.

PS : j'ai enseigné dans le fond du fond des ploucs, je ne parle pas du paysan ouzbek mais de gens qui ont le bac ou équivalent.

Une amie instruite et intelligente mais très religieuse (musulmane) m'a dit qu'elle avait des amis turcs platistes et que elle-même ne se prononçait pas sur la question.

 

On distingue parfois, parmi les superstitions, entre les croyances péri-religieuses (souvent d'anciens dogmes religieux laissés de coté par les institutions : anges, démons, miracles, etc), para-religieuses (se présentant comme spirituelles plutôt que comme scientifique, mais hors des religions organisés, réincarnation, astrologie, spiritisme, etc), et para-scientifiques (se présentant comme de la science mais étant souvent d'anciennes idées religieuses masquées, parapsychologie, ufologie, cryptozoologie, etc). Elles sont chacune répandue dans un public très différent, en fonction du niveau de religiosité. Les périreligieuses chez des gens très religieux, les parareligieuses chez des gens ayant vaguement eu une éducation religieuse, mais incomplète, et sans s'y identifier (mais pas forcément en la rejetant), et les parascientifiques, chez des gens sans aucun rapport avec les religions. Donc en fonction de ton milieu, il y a des chances que tu n'entres jamais en contact avec certaines croyances.

 

Ce qui est intéressant avec le platisme, c'est que c'est une croyance périreligieuse relativement neuve. J'ai l'impression que ça vient de créationnistes (et ils sont plus nombreux qu'on ne le croit, même en France) qui ont radicalisé leur rejet de la science.

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10 hours ago, Jean_Karim said:

Ce doit être parce que je n'en ai jamais vu en vrai, mais je me demandais si parmi vous ici d'autres gens pensaient ça : personne n'ayant jamais lu un livre ne pense réellement que la terre est plate. J'ai vu un docu sur les platistes et j'ai vraiment l'impression que c'est un canular de 4chan ultra élaboré, un gorafi où tout le monde est tombé dans le piège.

PS : j'ai enseigné dans le fond du fond des ploucs, je ne parle pas du paysan ouzbek mais de gens qui ont le bac ou équivalent.

Si c'est celui de Netflix, j'ai trouvé ça très intéressant. Je pense que l'idée commune (dans un milieu comme le nôtre, disons) comme quoi seuls des crétins très arriérés peuvent gober ce genre d'idée en dit plus long sur l'émetteur de l'avis et sa vision étroite de l'humanité que sur les croyants eux-mêmes (sans offense, je ne te vise pas, ou alors pas plus que moi-même).

A une époque, je fréquentais le forum de la flat earth society, c'est très intéressant à prendre comme un exercice : est-ce à ma portée de réfuter chacun de leurs arguments avec rigueur (la réponse est non en ce qui me concerne ou alors pas sans réviser et/ou ouvrir un bouquin, car il y en a de très ingénieux).

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Relevant thread:

 

On 12/4/2020 at 1:08 PM, Lancelot said:

Il manque le périscientifique à cette classification. J'imagine que le deboonker, I fucking love science etc. rentreraient dedans.

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Ce qui est triste sur le sujet c’est que ça a été prouvé par des types qui se sont contentés de regarder la Lune il y a 2 500 ans. Un des problèmes c’est que ce n’est pas vraiment enseigné à l’école du coup les gens savent que la Terre est ronde mais ne savent pas comment on le sait. Et ils sont démunis face à un tir de barrage platiste. 

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Il y a 6 heures, Mégille a dit :

On distingue parfois, parmi les superstitions, entre les croyances péri-religieuses (souvent d'anciens dogmes religieux laissés de coté par les institutions : anges, démons, miracles, etc), para-religieuses (se présentant comme spirituelles plutôt que comme scientifique, mais hors des religions organisés, réincarnation, astrologie, spiritisme, etc), et para-scientifiques (se présentant comme de la science mais étant souvent d'anciennes idées religieuses masquées, parapsychologie, ufologie, cryptozoologie, etc). Elles sont chacune répandue dans un public très différent, en fonction du niveau de religiosité. Les périreligieuses chez des gens très religieux, les parareligieuses chez des gens ayant vaguement eu une éducation religieuse, mais incomplète, et sans s'y identifier (mais pas forcément en la rejetant), et les parascientifiques, chez des gens sans aucun rapport avec les religions. Donc en fonction de ton milieu, il y a des chances que tu n'entres jamais en contact avec certaines croyances.

Je suis content de voir que tu ouvres et lis les liens que le cite. :) (Tu as juste oublié de mentionner que le parareligieux était plutôt un truc de gonzesses).

 

Il y a 2 heures, Tramp a dit :

Ce qui est triste sur le sujet c’est que ça a été prouvé par des types qui se sont contentés de regarder la Lune il y a 2 500 ans. Un des problèmes c’est que ce n’est pas vraiment enseigné à l’école du coup les gens savent que la Terre est ronde mais ne savent pas comment on le sait. Et ils sont démunis face à un tir de barrage platiste. 

Même sans regarder la Lune, ils ont regardé les bateaux, dont le mât disparaît en dernier derrière l'horizon. 

 

Quant au "comment a-t-on su que", c'est exactement le but de la dernière collection de livres lancée par Étienne Klein.

  • Nay 1
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Il y a 3 heures, Rincevent a dit :

Je suis content de voir que tu ouvres et lis les liens que le cite. :) (Tu as juste oublié de mentionner que le parareligieux était plutôt un truc de gonzesses).

J'avais oublié d'où ça venait, merci alors !

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Le coup du "je sais que X mais je ne sais pas pourquoi c'est le cas" n'est pas encore trop grave quand X est un truc comme "la terre n'est pas plate". Par contre quand c'est "les confinements sont nécessaires"...

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Ca me rappelle la discussion qui avait eu lieu quand un avion avait “troué le mur du son au-dessus de Paris” parce que les gens croyaient que le bruit c’était l’avion qui trouait le mur du son (et après je sais pas plus rien sans doute). Je ne sais pas dans quelle mesure la conception magique ou enfantine (“poétique”?) de la science ou du fonctionnement de la réalité n’a pas des effets délétères en politique.
 

Bien sûr que les hommes du Moyen Âge ne connaissaient pas la Physique d’Aristote, mais (1) la science moderne a atteint un degré d’éloignement de l’observable et d’abstraction mathématique à la cheville duquel Aristote n’arrivait même pas, et on se retrouve dans le paradoxe d’un monde rationalisé mais ou en même temps personne ne sait comment ça fonctionne; on est entourés de produits de la science moderne (:= post newton on va dire) sans y connaître que dalle et (2) le médiéval moyen n’avait pas du tout l’influence sociale et politique du péquin moyen de maintenant. Et je schématise à l’extrême, il y a le facteur religieux qui entre en compte aussi (fournissait une explication basique du monde que les gens n’ont plus ajd, d’où le succès un peu absurde de l’astrophysique pour les nuls, de l’athéisme à la sauce fucking love science etc). Et je continue de croire dur comme fer que la politique est fondée sur une épistémologie, donc avec une vision merdique du fonctionnement des systèmes complexes (pour éviter de dire “de la réalité” because what the hell is that even supposed to mean), on finit par avoir des conceptions politiques dangereuses (parce que complètement inappropriées et parfois revendiquées comme telles). De ce point de vue, c’est la politique qui remplace la religion, et on peut être reconnaissant à Hayek d’avoir bien décrit les mécanismes psychologiques à l’œuvre dans ces perversions de la raison.
 

Ce que je veux dire par la au-delà de la fameuse querelle de la sécularisation c’est que la pratique de la politique est par certains aspects religieuse (la campagne messianique de Obama), ce qui donne à la politique des objectifs démesurés, puisqu’avec la religion organisée qui décline et la science que personne ne comprend, elle devient la seule emprise que les gens de base ont sur “le monde” on va dire. Alors vous me direz d’où ils ont besoin d’avoir une emprise sur le monde. Je pense que la mondialisation explique assez bien ça (le pécheur du Sénégal utilise son iPhone pour surveiller les cours du poisson). La crise du Covid m’a révélé à quel point j’étais touchant de naïveté par mon optimisme: avec toutes ces discussions sur les faux négatifs, l’ARN messager, je me disais que ça allait donner de la culture scientifique aux gens (et à moi aussi, I’m more of a humanities kind of guy), mais C’est tout le contraire qui s’est produit. Les gens ont vu les médecins pas être d’accord et en ont été surpris (lolwut ils croyaient quoi), l’Etat a vite rendu le débat scientifique impossible de toute façon. Comment en serait-il autrement puisqu’il n’y a quasiment plus un seul secteur de la science qui ne soit pas politisé (a part la physique quantique?), ou, plus subtilement, que les opinions politiques en viennent (je parle pas seulement d’aujourd’hui là) à déterminer les prémisses épistémologiques, un lien qu’explore bien Pinker au début de The Blank Slate. Il trouvait que la psychologie est épargnée bon le débat sur le QI montre bien que c’est pas le cas. Le problème c’est que l’ignorance scientifique se trouve la une justification politique. Là encore vous me direz que le mépris de la science était justifié avant par la religion mais la encore on parle pas des mêmes échelles. Et pardon mais science et religion ça va beaucoup beaucoup mieux ensemble que science et politique. Genre si Newton était pas religieux taré je sais pas de qu’il vous faut. Bien sûr que la religion n’explique pas tout. Et ce n’est pas un problème éducatif au contraire la science, même si dans le cas français ces matières sont de moins en moins bien enseignées, est beaucoup plus à l’honneur qu’il y a cent ans, ou les matières nobles était les langues anciennes; justement, c’était pas tout à fait le même rapport au monde et le même rapport à la politique. Mais je digresse. 
 

Plus les gens s’y connaissent en science, plus ils sont humbles. Des dynamiques complexes m’ont l’air d’être à l’œuvre qui les rendent moins humbles. Ils commencent à convertir en idéologie leur vision poétique du monde. C’est problème.

 

Je dis tout ça parce que je lis John Gray et mes posts sont le tamis de mes lectures :mrgreen:

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il y a une heure, Rincevent a dit :

Sur les liens entre politique et religion, il va être temps de lire Carl Schmitt. (Puis Hans Blumenberg, pour le son de cloches d'en face). Dans les deux cas, je crois que @F. mas pourra en dire quelques mots. ;)

Oui mais je suis con j'ai digressé un peu, même si ça reste cohérent. J'ai lu la Théologie politique, et puis on pourrait ajouter Voegelin à la biblio, mais je voulais plus répondre à la question: "quel genre d'idées politiques se fait un mec qui croit que le nucléaire augmente le RCA ou a une explication poétique du bruit des avions?" Le rapport entre la conception scientifique (ou poétique) du monde physique et les préférences politiques, au sens où, dans les deux cas, un package de connaissances sur le fonctionnement de systèmes est un peu impliqué. Mon avis, pour l'instant, est que quand on est complètement out pour comprendre des systèmes physiques, on est aussi complètement out pour comprendre des systèmes sociaux aujourd'hui, où la décision politique est beaucoup plus technique que dans la Cité d'Aristote.

 

On pourrait (j'en suis pas sûr) abstraire, en théorie, certains patterns d'analyse, certaines façons de pensée ou de poser les problèmes qui cadrent le discours et évitent de dire trop de conneries (bannir le recours à la métaphore (par exemple organiciste), parce qu'elle transfère un principe de fonctionnement connu (pour l'organicisme, celui du corps humain, enfin, à supposer que le mec en question le connaisse) sur un système inconnu* de façon méthodologiquement illégitime. On voit ça quand on parle de la Terre comme d'un être humain ou ce genre de choses (sans parler des âneries sur l'immigration). Voilà un exemple, il y en aurait d'autres (comprendre ce que veut dire "non-linéaire" par exemple, ou d'autres outils d'analyse transdisciplinaires (Taleb dirait que je suis juste en train de dire que le monde va mal parce que les gens ne savent pas faire de stats, mais en un sens c'est pas étonnant que John Gray me ramène à NNT, si?)).

 

Après il y a une histoire de religion mais la première question qui m'occupe c'est ça. Même si je pense aussi que l'évolution du rapport à la science, compte tenu de ce que la science moderne est devenue (càd un truc très abstrait et mathématisé), est aussi influencé par les effets du vide religieux (mais là j'invente l'eau tiède). Certains conservateurs, d'ailleurs, sont tout aussi à côté de la plaque que les autres, justement parce que leur compréhension scientifique est du type poétique de les avions font du bruit quand ils trouent le mur du son.

 

Attention, je veux bien parler quand même de Schmitt et Blumenberg et Taubes et toute la bande, juste je connais bien Schmitt, les autres rigolos un peu moins, et la Théologie politique II j'ai trouvé ça difficile (apparemment c'est normal). Tout ça reste un peu désorganisé dans ma tête aussi, c'est normal, je suis pas en train d'expliquer la pensée d'un autre mec, j'essaie de mettre de l'ordre dans la mienne (ce qu'on enseigne assez peu dans les humanités, en fait, mais c'est normal.)

 

*Je dis système mais on pourrait dire ordre, dans le sens hayékien de "ensemble de variables fortement intercorrélées, ou suffisamment pour qu'on puisse en utiliser certaines pour faire des prédictions valables sur d'autres." Hayek fait partie de ces penseurs (de fait transdisciplinaires) qui articulent l'épistémologie à la politique. Popper est son grand frère; par exemple: "The situation is really very simple. The belief of a liberal--the belief in the possibility of a rule of law, of equal justice, of fundamental rights, and a free society--can easily survive the recognition that judges are not omniscient and may make mistakes about facts and that, in practice, absolute justice is hardly ever realized in any particular legal case. But this belief in the possibility of a rule of law, of justice, and of freedom, can hardly survive the acceptance of an epistemology which teaches that there are no objective facts; not merely in this particular case, but in any other case; and that the judge cannot have made a factual mistake because he can no more be wrong about the facts than he can be right." (Conjectures and Refutations, "On the Sources of Knowledge and of Ignorance")

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Le fait est que les gens (et ça veut dire tout le monde moi y compris) ont nécessairement (je renvoie à Hayek) une connaissance très incomplète du monde, que ce soit le monde physique ou les phénomènes sociaux comme le marché, sauf éventuellement quelques aspects dans lesquels ils se spécialisent. Pour combler les lacunes dans tout le reste ils font appel à une logique simplifiée "magique", ce qu'on peut appeler en anglais la folk science (même si la dénomination est souvent utilisée de manière politique pour signifier "les croyances de ces débiles de négationnistes que je n'ai pas besoin d'examiner" et donc l'accusation de folk science elle-même devient un acte de folk science, c'est le zététicien qui se mord la queue).

 

Maintenant la question qui se pose est "que peut-on y faire ?" La plupart des gens parleraient d'éducation mais il n'est ni possible ni souhaitable d'éduquer tout le monde en tout. Même l'objectif d'avoir une connaissance suffisante pour avoir un avis pertinent dans tous les domaines possibles est irréalisable et de toute façon non souhaitable. Une société où chacun est expert en tout est une société sans division du travail et personne ne veut ça. La vraie solution à mon sens est de faire en sorte que les gens aient le moins possible le pouvoir de nuire dans les domaines où ils sont ignorants. Or la connaissance est une ressource et le meilleur mécanisme d'attribution des ressources qu'on connaisse est le marché. En somme arrêtons de demander aux gens leur avis sur tout et n'importe quoi quand ils n'y connaissent rien (qu'ils en aient conscience ou pas, la vraie mesure d'être un expert c'est que quelqu'un soit prêt à payer pour cette expertise) et n'ont pas de skin in the game (ou ne réalisent pas qu'ils en ont). C'est le meilleur moyen de se retrouver devant un barrage d'incantations magiques, l'apparition de gourous d'opinions, la confusion entre science et politique et tout ce qui s'ensuit. Ça s'applique à twitter comme aux politiciens ou aux journalistes. Bien entendu dans nos démocraties centralisées on ne fait que ça tout le temps.

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il y a 21 minutes, Lancelot a dit :

Le fait est que les gens (et ça veut dire tout le monde moi y compris) ont nécessairement (je renvoie à Hayek) une connaissance très incomplète du monde

Oui bien sûr mais il me semble que ce n'est devenu un problème que récemment. Quand tout l'univers sur lequel devait s'exercer la décision était le patelin, la rationalité bornée, ça suffisait très bien (et peut-être qu'il y a un argument à construire comme quoi c'est pour ça que c'est fait, je ne sais pas). En outre je me demande dans quelle mesure cette incomplétude de la connaissance n'est pas plus grande aujourd'hui, quand la science décrit de plus en plus le non observable et avec des maths de plus en plus compliquées. Mais bon c'est un autre débat.

 

Sinon évidemment agree avec le §2.

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Il y a 1 heure, Vilfredo Pareto a dit :

Oui mais je suis con j'ai digressé un peu, même si ça reste cohérent. J'ai lu la Théologie politique, et puis on pourrait ajouter Voegelin à la biblio, mais je voulais plus répondre à la question: "quel genre d'idées politiques se fait un mec qui croit que le nucléaire augmente le RCA ou a une explication poétique du bruit des avions?" Le rapport entre la conception scientifique (ou poétique) du monde physique et les préférences politiques, au sens où, dans les deux cas, un package de connaissances sur le fonctionnement de systèmes est un peu impliqué. Mon avis, pour l'instant, est que quand on est complètement out pour comprendre des systèmes physiques, on est aussi complètement out pour comprendre des systèmes sociaux aujourd'hui, où la décision politique est beaucoup plus technique que dans la Cité d'Aristote.


Il y a des gens qui comprennent très bien les systèmes complexes (genre physique ou biologique) mais qui restent naïfs lorsque le système est social. 

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il y a 19 minutes, Tramp a dit :


Il y a des gens qui comprennent très bien les systèmes complexes (genre physique ou biologique) mais qui restent naïfs lorsque le système est social. 

Oui il y a le problème du scientisme mais celui la est assez bien connu (l’exemple de lorganicisme s’applique bien sûr dans ce sens, je n’y avais pas pensé alors que c’est évident); moi je posais la question inverse, mais sans poser la connaissance scientifique comme condition suffisante de la compétence politique. 
 

Je ne sais pas si j’étais clair mais je ne voulais pas dire du tout qu’il y a des philosophes rois qui pourraient décider pour tout le monde ou qu’on pourrait être compétent en tout. Mais une société de plus en plus complexe (selon JBP qui laisse de moins en moins de travail aux bas QI par exemple (je me fiche un peu de savoir si ses chiffre sont vrais ça a été débattu dans ces lieux et je pense qu’il se plante mais je retiens l’idée générale)) ou plus aliénante (dans le sens où le monde dont parle la science est plus étranger que jamais au monde observable), ce qui génère sans doute son propre nihilisme politique, demande à la fois des compétences plus complexes pour la politique et à la fois rend l’acquisition de ces connaissances plus impossible que jamais (et Lancelot a raison d’ajouter que la démocratisation s’ajoute à ce grand écart). La division du travail permet justement la spécialisation et elle est “naturelle” dans ce sens.
 

Je ne cherche pas tant le système adapté à la bounded rationality, je me demande plutôt , pour reformuler : “depuis quand est-ce que la bounded rationality est un problème politique?” 

Et il me semble que la réponse est depuis la sécularisation.

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il y a une heure, Tramp a dit :

Il y a des gens qui comprennent très bien les systèmes complexes (genre physique ou biologique) mais qui restent naïfs lorsque le système est social. 

Le malheur #1, c'est de trop généraliser des savoirs là où ils ne sont plus valables. Le malheur #2, c'est de ne pas assez généraliser des approches qui pourraient se montrer fructueuses. Mais le malheur #0, c'est de laisser son raisonnement être corrompu par ses propres intérêts personnels, et construire le raisonnement en partant d'une conclusion intéressée.

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11 hours ago, Vilfredo Pareto said:

“depuis quand est-ce que la bounded rationality est un problème politique?” 

Et il me semble que la réponse est depuis la sécularisation.

Trop de variables, difficile de tirer une conclusion claire de cette coïncidence.

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il y a 9 minutes, Boz a dit :

Trop de variables, difficile de tirer une conclusion claire de cette coïncidence.

Pas faux, mais ce n'est pas un raisonnement historique que je fais, et qui irait de Newton à Hawking. Ça peut s'observer aujourd'hui aussi sur un nb de variables plus restreint:

  • Aux USA, tu as de plus en plus de gens qui se disent religieux et de moins en moins de gens qui vont à l'Eglise. Où passe cette religiosité?
  • Au passage, en philosophie, la concomitance entre les premières formulations de la bounded rationality sont explicitement des rejets de Dieu hors de la métaphysique: Kant being a case in point ("je dus abolir le savoir pour faire place à la foi"). On pense une objectivité de la phénoménalité détachée de la transcendance (Dieu, le noumène etc.) Ça pour le coup, ça n'est pas une coïncidence, c'est le but avoué.
  • Le new atheism, qui défend une version appauvrie du rationalisme du genre la "science" vs la religion (Dawkins, Harris, tout ce que déteste Gray), comme courant intellectuel, montre bien aussi que ce qu'on appelle communément la rationalisation, le retrait de la religion et le recours à la "science" (je mets des guillemets parce que ces gens ont, selon Gray, une conception simpliste de la science et du progrès dont elle serait porteuse) sont liés dans un même projet politique. @Tramp a raison d'évoquer le scientisme, on pourrait aussi y voir une forme de nihilisme. Dans un autre fil, je parlais aussi bien du fait que le débat sur les mesures liberticides oppose l'argument "ça marche" à l'argument "ça marche pas". De ce point de vue, et peut-être que c'est encore trop schématique, la sécularisation contribue à remplacer le débat sur les valeurs (qui devrait être le propre du politique) par un débat sur les faits, d'où mon emploi de "nihilisme", et => compétence technique élevée, pourtant impossible à atteindre pour tout le monde (as @Lancelot pointed out).
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12 hours ago, Vilfredo Pareto said:

“depuis quand est-ce que la bounded rationality est un problème politique?”

Tu as donné un élément en parlant de quand les décisions se limitent au patelin. La limite est problématique dans la mesure où le système politique s'applique à une échelle suffisante pour la dépasser. Je parle en termes d'extension physique sur le territoire/le nombre de personnes mais surtout en termes de centralisation et d'extension de son domaine d'intervention. Un roi médiéval qui se contente de profiter de la vie dans son château en prélevant un impôt ou un droit de cuissage de temps en temps est un moindre mal. Le problème de la modernité dans cette perspective est qu'elle offre des solutions techniques pour permettre aux délires totalitaires de se concrétiser. Le problème de la démocratie est qu'elle transmet (en apparence au moins mais ça suffit) le fardeau du tyran, qui est le poids de devoir faire sans arrêt des choix dans le noir en sachant dans le fond qu'il n'y comprend rien, à tous les citoyens. D'où l'idéologie, le politiquement correct, la mentalité partisane, le café du commerce, le virtue signalling, twitter, le pragmatisme, le culte de la personnalité... mais aussi les croyances bizarres diverses et variées qui peuvent sans doute à un niveau psychologique être désignés comme des mécanismes de défense pour vivre avec cette pression.

 

Le détour était grand mais je crois que je suis finalement revenu au sujet :lol:

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il y a 5 minutes, Lancelot a dit :

La limite est problématique dans la mesure où le système politique s'applique à une échelle suffisante pour la dépasser.

C'est aussi une question de limite de l'horizon temporel. La religion était censée être ce qui projette l'homme dans l'éternité (ordre spirituel), la modernité (post-sécularisation) donne cette fonction à la politique (traditionnellement ordre temporel) (paix perpétuelle, progressisme, totalitarisme, ça prend plusieurs formes bien sûr). Mais symétriquement, la démocratie donne une fenêtre d'action beaucoup plus restreinte dans le temps aux gouvernements successifs, justifiant cette limitation pour éviter la dictature ou le totalitarisme, justement. A ce sujet, le skin in the game des gouvernants diminue voire disparaît et la préférence temporelle augmente dans la décision politique (/Hoppe). Ici, il y a aussi un trait distinctif de la conception religieuse de l'Etat, qui est axiologiquement neutre tant qu'on maintient la dichotomie des ordres temporels et spirituels. La vraie vie étant au ciel, sur terre, il faut se contenter de se démerder dans l'ordre de la concupiscence, sans réaliser le bonheur de tous. D'autre part, ça ne donnait pas au prince un blanc-seing pour faire tout ce qu'il voulait, au contraire. On avait pas besoin d'un contrat pour établir le partage du légitime et de l'illégitime, ce partage était pas seulement formel (écrit sur du papier) mais réel: il était l'objet d'une morale sociale effective (/Villey).

il y a 22 minutes, Lancelot a dit :

Je parle en termes d'extension physique sur le territoire/le nombre de personnes mais surtout en termes de centralisation et d'extension de son domaine d'intervention.

Pour le coup, Rousseau lui-même notait que la démocratie ne fonctionnait que dans les petits Etats (Genève et pas la Russie) :mrgreen:

il y a 23 minutes, Lancelot a dit :

Le problème de la modernité dans cette perspective est qu'elle offre des solutions techniques pour permettre aux délires totalitaires de se concrétiser. Le problème de la démocratie est qu'elle transmet (en apparence au moins mais ça suffit) le fardeau du tyran, qui est le poids de devoir faire sans arrêt des choix dans le noir en sachant dans le fond qu'il n'y comprend rien, à tous les citoyens.

+1000

 

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24 minutes ago, Vilfredo Pareto said:

C'est aussi une question de limite de l'horizon temporel. La religion était censée être ce qui projette l'homme dans l'éternité (ordre spirituel), la modernité (post-sécularisation) donne cette fonction à la politique (traditionnellement ordre temporel) (paix perpétuelle, progressisme, totalitarisme, ça prend plusieurs formes bien sûr). Mais symétriquement, la démocratie donne une fenêtre d'action beaucoup plus restreinte dans le temps aux gouvernements successifs, justifiant cette limitation pour éviter la dictature ou le totalitarisme, justement.

C'est vrai que l'échelle temporelle marche d'une manière un peu différente. Dans les systèmes comme le nôtre le gouvernement en place tend à vouloir appliquer des trucs très vite et à se foutre des conséquences (parce que mandat limité dans le temps et si ça peut être la merde quand l'autre parti arrivera au pouvoir c'est tout bénef), mais à se justifier avec des causes transcendantes (la mode est à l'écologisme bien sûr).

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Le 03/04/2021 à 19:00, Vilfredo Pareto a dit :

 

Plus les gens s’y connaissent en science, plus ils sont humbles.

 

Je ne suis pas certain (du tout) qu'avoir des connaissances scientifiques ou être "rationaliste" soient un frein à la volonté (commune à tous je pense) de vouloir "réenchanter le monde" i.e. vouloir lui donner un sens (qu'il n'a pas nécessairement) et lui attribuer des fins (au sens aristotélicien) qui n'existent (probablement) pas.

  • Yea 2
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