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Bastiat, la valeur et le marginalisme


Gio

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Déjà je n'ai pas étudié les harmonies économiques de Bastiat donc je suis incapable d'affirmer qu'il est correctement interprété.

De Bastiat je n'interprète rien, je résume ce qu'il dit, aussi bien que je le peux. (Bastiat est si clair qu'il est difficile de se tromper.) Mais idéalement, il faut lire son chapitre sur la valeur (et sur la richesse) avant d'entamer la discussion sur ce topic.

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Ta joie est prématurée :) Déjà je n'ai pas étudié les harmonies économiques de Bastiat donc je suis incapable d'affirmer qu'il est correctement interprété. Ensuite, je ne comprends pas grand chose à la discussion car les définitions utilisées sont souvent absentes ou vagues à mes yeux. Ah un truc quand même, marginalisme et subjectivisme ont été assimilés quelque part plus haut mais ça ne va pas forcément de pair il me semble.

Je pensais plutôt à une mise au point sur ce que sont réellement le marginalisme et le subjectivisme, choses sur lesquelles tu es plutôt compétent, et qui me semblaient comprises un peu rapidement par certains (peut-être par moi aussi, va savoir). :)
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marginalisme et subjectivisme ont été assimilés quelque part plus haut mais ça ne va pas forcément de pair il me semble.

Gio cherche l'analyse autrichienne de la theorie de bastiat, j'ai fait l'amalgame entre ces deux notions car si les autrichiens sont effectivement parmis les pioniers du marginalisme, ils sont également subjectivistes.

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Je crois que cela ne sert à rien de discourir sur la phrase : La conception subjective de la valeur est une conception de la valeur en économie qui postule que, « pour avoir de la valeur, unobjet doit être utile et rare » .Je n'ai jamais lu ou entendu de près ou de loin un autrichien ou un néoclassique exprimer ce genre de chose.

Au final, cette phrase ne permet pas de comparer l'analyse des autrichiens et celle de Bastiat. 

 

Pour Mises, "la valeur est l'importance que l'homme agissant attache aux fins ultimes". Ni plus, ni moins.

 

 

 

"chez un Autrichien, plus une chose a de l'utilité, plus elle a de la valeur, et plus on est riche. Chez Bastiat, on est d'autant plus riche qu'on détruit de la valeur (donc des obstacles) et qu'on rend ainsi l'utilité gratuite."

C'est là où la formulation est un peu bâtarde à mon sens.

Je prends un exemple courant pour appréhender l'approche marginaliste :

Un premier litre d'eau dans le désert d'eau m'apporte de la satisfaction (il me sauve). Le deuxième litre m'apporte une satisfaction moindre. Grace à de nouvelles technologie, j'ai accès dorénavant à 1 tonne d'eau. Un litre supplémentaire m'apportera toujours de la satisfaction (je peux le stocker) mais une satisfaction clairement moindre que la première gorgée.

 

Le litre d'eau avant le progrès technologique a plus de valeur que le litre d'eau après (on est toutefois plus riche d'une tonne d'eau). C'est la conclusion d'une analyse à la marge. Voyez qu'à aucun moment je n'ai dit "plus une chose a de l'utilité, plus elle a de la valeur, et plus on est riche"

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Gio cherche l'analyse autrichienne de la theorie de bastiat,

Plus exactement, je cherche à savoir si Bastiat est compatible avec les autrichiens, si oui, en quoi est-il compatible, et si non, en quoi a t-il tort ?

 

Pour Mises, "la valeur est l'importance que l'homme agissant attache aux fins ultimes". Ni plus, ni moins.

Ce qui revient somme toute à dire que la valeur c'est l'utilité. (L'utilité étant subjective, mais ça ne change rien.)

 

Un premier litre d'eau dans le désert d'eau m'apporte de la satisfaction (il me sauve). Le deuxième litre m'apporte une satisfaction moindre. Grace à de nouvelles technologie, j'ai accès dorénavant à 1 tonne d'eau. Un litre supplémentaire m'apportera toujours de la satisfaction (je peux le stocker) mais une satisfaction clairement moindre que la première gorgée.

Ce qui revient à dire que l'utilité diminue à mesure que la rareté diminue.

 

Cela recoupe pratiquement la définition de John Moser.

(Ou pour le dire autrement, pour qu'une chose ait de la valeur, il faut qu'elle soit demandée, et que l'offre soi finie ?)

 

Le litre d'eau avant le progrès technologique a plus de valeur que le litre d'eau après (on est toutefois plus riche d'une tonne d'eau). C'est la conclusion d'une analyse à la marge. Voyez qu'à aucun moment je n'ai dit "plus une chose a de l'utilité, plus elle a de la valeur, et plus on est riche"

Dans ton raisonnement, je ne vois rien qui contredit la phrase "plus une chose a de l'utilité, plus elle a de la valeur". (Mettons de côté la question de la richesse pour l'instant.)

 

 

D'un côté le paradigme Bastiat c'est : L'utilité n'est pas évaluable. La valeur c'est le prix et elle peut se détruire sans que l'utilité change. Le prix est le rapport de deux services.

De l'autre, le paradigme Autrichien : L'utilité c'est la valeur, et elle peut se détruire à mesure que la rareté diminue. Le prix est le rapport de deux valeurs.

 

Les paradigmes sont tellement différents que c'est compliqué.

 

Mais je suppute depuis quelques temps que la solution se trouve peut-être dans cette phrase de Bastiat : "J’admettrai avec M. Say que l’Utilité est le fondement de la Valeur, pourvu qu’on convienne qu’il ne s’agit nullement de l’utilité qui est dans les choses, mais de l’utilité relative des services." (Services humain s'entend...)

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"La valeur c'est le prix et elle peut se détruire sans que l'utilité change. "

La différence est là je pense. Pour les autrichiens, la valeur n'est pas le prix. Pourquoi aller chez le coiffeur si le service qu'il te rend est égal au prix que tu paies? Autant le faire soit même... si tu consens à y aller c'est bien parce que le service rendu a plus de valeur que ce que tu es prêt à dépenser.

 

Autre chose :

"L'utilité n'est pas évaluable." Si l'utilité c'est la valeur, et que la valeur n'est pas évaluable, l'utilité non plus. (il n'y a pas de différence sur ce point, si ?) Lorsque j’achète un bien, je n'évalue pas l'utilité du service rendu par ce bien, je compare l'utilité par rapport aux prix. Je ne peux mesurer la différence mais je peux préférer ou écarter.

 

"Le prix est le rapport de deux services." Le prix est le rapport de deux valeurs, la loi d'utilité marginale traite de la valeur des services qu'un homme attend des choses, le prix est donc la projection de deux visions différentes des services attendus de l'objet échangé.

Le coiffeur préfère faire une coupe à 15€ en 20 min plutôt que réaliser une autre activité moins utile pour lui.

Le client préfère se faire coiffer à 15€ en 20 min que le faire lui-même et se rater ou perdre l'opportunité de consacrer le temps perdu à réaliser une activité plus utile.

Les 15€ matérialisent bien un rapport entre deux visions du service.

 

 

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"La valeur c'est le prix et elle peut se détruire sans que l'utilité change. "

La différence est là je pense. Pour les autrichiens, la valeur n'est pas le prix. Pourquoi aller chez le coiffeur si le service qu'il te rend est égal au prix que tu paies? Autant le faire soit même... si tu consens à y aller c'est bien parce que le service rendu a plus de valeur que ce que tu es prêt à dépenser.

Dans l'optique de Bastiat, on va chez le coiffeur car celui-ci nous rend un service en nous épargnant l'effort de le faire nous-même. Et on le paie avec un autre service que nous avons nous-même rendu (qui généralement a été converti en argent). Si le coiffeur met son prix trop cher (=si les services ne se valent pas) autant se couper les cheveux tout seul ou demander à quelqu'un d'autre.

 

Citons un passage essentiel :

 

Ainsi la définition du mot valeur, pour être juste, doit avoir trait non-seulement aux efforts humains, mais encore à ces efforts échangés ou échangeables. L'échange fait plus que de constater et de mesurer les valeurs, il leur donne l'existence. Je ne veux pas dire qu'il donne l'existence aux actes et aux choses qui s'échangent, mais il la donne à la notion de valeur.
 
Or quand deux hommes se cèdent mutuellement leur effort actuel, ou les résultats de leurs efforts antérieurs, ils se servent l'un l'autre, ils se rendent réciproquement service.
 
Je dis donc: La valeur, c'est le rapport de deux services échangés.
 
L'idée de valeur est entrée dans le monde la première fois qu'un homme ayant dit à son frère: Fais ceci pour moi, je ferai cela pour toi, — ils sont tombés d'accord; car alors pour la première fois on a pu dire: Les deux services échangés se valent.
 
Il est assez singulier que la vraie théorie de la valeur, qu'on cherche en vain dans maint gros livre, se rencontre dans la jolie fable de Florian, l'Aveugle et le Paralytique
 
Aidons-nous mutuellement,
La charge des malheurs en sera plus légère.....
À nous deux nous possédons le bien à chacun nécessaire.
J'ai des jambes, et vous des yeux.
Moi, je vais vous porter; vous, vous serez mon guide :
Ainsi, sans que jamais notre amitié décide
Qui de nous deux remplit le plus utile emploi,
Je marcherai pour vous; vous y verrez pour moi.
 
Voilà la valeur trouvée et définie. La voilà dans sa rigoureuse exactitude économique, sauf le trait touchant relatif à l'amitié, qui nous transporte dans une autre sphère. On conçoit que deux malheureux se rendent réciproquement service, sans trop rechercher lequel des deux remplit le plus utile emploi. La situation exceptionnelle imaginée par le fabuliste explique assez que le principe sympathique, agissant avec une grande puissance, vienne absorber, pour ainsi dire, l'appréciation minutieuse des services échangés, appréciation indispensable pour dégager complétement la notion de Valeur. Aussi elle apparaîtrait entière, si tous les hommes ou la plupart d'entre eux étaient frappés de paralysie ou de cécité; car alors l'inexorable loi de l'offre et de la demande prendrait le dessus, et, faisant disparaître le sacrifice permanent accepté par celui qui remplit le plus utile emploi, elle replacerait la transaction sur le terrain de la justice.
 
Nous sommes tous aveugles ou perclus en quelque point. Nous comprenons bientôt qu'en nous entr'aidant la charge des malheurs en sera plus légère. De là l'Échange. Nous travaillons pour nous nourrir, vêtir, abriter, éclairer, guérir, défendre, instruire les uns les autres. De là les services réciproques. Ces services nous les comparons, nous les discutons, nous les évaluons: de là la Valeur.
 
Une foule de circonstances peuvent augmenter l'importance relative d'un Service. Nous le trouvons plus ou moins grand, selon qu'il nous est plus ou moins utile, que plus ou moins de personnes sont disposées à nous le rendre; qu'il exige d'elles plus ou moins de travail, de peine, d'habileté, de temps, d'études préalables; qu'il nous en épargne plus ou moins à nous-mêmes. Non-seulement la valeur dépend de ces circonstances, mais encore du jugement que nous en portons: car il peut arriver, et il arrive souvent, que nous estimons très-haut un service, parce que nous le jugeons fort utile, tandis qu'en réalité il nous est nuisible. C'est pour cela que la vanité, l'ignorance, l'erreur ont leur part d'influence sur ce rapport essentiellement élastique et mobile que nous nommons valeur; et l'on peut affirmer que l'appréciation des services tend à se rapprocher d'autant plus de la vérité et de la justice absolues, que les hommes s'éclairent, se moralisent et se perfectionnent davantage.
 
"L'utilité n'est pas évaluable." Si l'utilité c'est la valeur, et que la valeur n'est pas évaluable, l'utilité non plus. (il n'y a pas de différence sur ce point, si ?)
Bastiat ne dit pas que la valeur n'est pas évaluable, ce serait un non-sens. Il dit justement que ce qui a de la valeur, c'est seulement ce qui peut être évalué. Et selon lui on ne peut pas évaluer les choses intimes comme le désir, le besoin ou la satisfaction...en d'autres termes l'utilité. On ne peut évaluer et comparer que les efforts, précisément parce qu'on peut les transférer à d'autres, contrairement au désir et au besoin.
 
Lorsque j’achète un bien, je n'évalue pas l'utilité du service rendu par ce bien
Ce n'est pas ce que dis Bastiat. Il dit que lorsqu'on achète un bien on évalue le service (ou l'utilité du service) que nous a rendu celui qui nous donne accès à ce bien. Encore une fois pour Bastiat, la valeur c'est un paradigme homme-homme et non pas homme-objet. On évalue pas les services des choses, on évalue les services humains uniquement. Il dit précisément que le service du bien lui-même, ou l'utilité du bien lui-même est impossible à évaluer.
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Je reformule, toujours pour dire la même chose :

 

si tu consens à y aller c'est bien parce que le service rendu a plus de valeur que ce que tu es prêt à dépenser.

Selon Bastiat c'est parce que si c'était plus simple de le faire soi-même, le coiffeur ne t'épargnerait aucun effort, il ne te rendrait aucun service. A partir du moment où le coiffeur t'épargne du travail, il te rend un service. Et on paie avec un autre service. On compare les deux services jusqu'à ce qu'on estime qu'ils se valent, et ainsi l'échange a lieu.

Mais on ne compare pas l'utilité qu'ont les choses pour chacun (intime, impossible à comparer donc à évaluer), on compare uniquement les services, ou disons l'utilité relative des services.

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J'ai pas le temps d'entrer dans un débat sérieux et intéressant en ce moment, mais sachez bien que je vous observe et que dans quelques jours je ne manquerai pas de la ramener. Par contre je veux bien avoir un texte de référence de Bastiat pour pouvoir comparer aux positions marginalistes classiques, qu'est-ce que vous me conseillez ?

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Lorsque j’achète un bien [...] je compare l'utilité par rapport aux prix

Bastiat dit : Lorsque j'achète un bien, je compare les efforts (travail, obstacles, difficultés de toute sorte...) que j'aurais à faire si je voulais obtenir ce bien d'une autre manière. Et si je devais faire moins d'efforts pour obtenir ce bien d'une autre manière, que le prix que me propose l'offreur, je n'ai pas de raison de l'acheter. En revanche si l'offreur m'épargne des efforts, il me rend service, par conséquent l'échange a lieu. L'utilité (c'est à dire le besoin ou le désir) qu'a pour moi le bien n'entre pas vraiment en compte dans la transaction.

 

Par contre je veux bien avoir un texte de référence de Bastiat pour pouvoir comparer aux positions marginalistes classiques, qu'est-ce que vous me conseillez ?

Encore une fois, la discussion porte sur la théorie de la valeur de Bastiat, donc le texte de référence, c'est son chapitre sur la valeur des Harmonies, auquel on peut ajouter son chapitre sur la richesse, qui complète celui sur la valeur.

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Bastiat dit : Lorsque j'achète un bien, je compare les efforts (travail, obstacles, difficultés de toute sorte...) que j'aurais à faire si je voulais obtenir ce bien d'une autre manière. Et si je devais faire moins d'efforts pour obtenir ce bien d'une autre manière, que le prix que me propose l'offreur, je n'ai pas de raison de l'acheter. En revanche si l'offreur m'épargne des efforts, il me rend service, par conséquent l'échange a lieu. L'utilité (c'est à dire le besoin ou le désir) qu'a pour moi le bien n'entre pas vraiment en compte dans la transaction.

Je crois que l'utilité relative est précisément ce que tu viens de décrire.
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On va faire deux secondes de maths, histoire de se mettre d'accord sur le vocabulaire. Mettons qu'on soit dans ce cas actuel. Si on regarde les besoins des gens, on peut les analyser en "j'achèterai un abonnement à un FAI à moins de tant d'euros, et au dessus je n'en achèterai pas" (je passe sur ceux qui sont prêts à en acheter plusieurs pour un tas de raisons, le raisonnement est le même) : ce prix fictif est la valeur accordée à l'accès Internet. Tu obtiens alors, en traçant la quantité demandée en fonction du prix, une jolie fonction de Heaviside (ou plutôt son miroir, puisque notre courbe est décroissante).

Maintenant, tu fais la somme de ces fonctions individuelles pour l'ensemble de la population (où tu as une valeur différente pour chacun). Tu obtiens une jolie courbe décroissante. Faisant de même pour les offreurs, on trouve un graphique très classique prix/quantité, où les deux courbes se croisent avec un prix de marché donné. Le fait est que ce prix de marché ne correspond à la valeur d'à peu près aucun des demandeurs : il est soit plus élevé (auquel cas le demandeur n'achète pas), soit plus bas (auquel cas le demandeur achète, même si il était prêt à mettre davantage sur la table.

Le prix de marché n'a donc qu'un rapport très lointain avec la valeur que chacun accorde au produit échangé.

Tu fais une pétition de principe en postulant que le prix que chaque consommateur est prêt à payer est la valeur que chacun accorde à Internet. Evidemment, sous ce postulat la valeur et le prix sont différents. 
 
Maintenant moi je peux très bien faire le postulat que ce qu'ils sont prêt à payer représente la mesure cardinale de l'utilité qu'ils accordent à Internet. Et on arrive seulement à la conclusion que l'utilité et le prix sont différents. 
 
Enfin pense au fait que ton postulat en plus d'être arbitraire est en contradiction avec la subjectivité de la valeur, puisque qu'il implique qu'il existe une valeur cardinale.
 
Quand on parle de valeur, on ne parle pas de valeur mais de prix ? Mais pourquoi ne pas employer le mot prix, dans ce cas ?

Ben justement Bastiat fait savoir on ne peut plus clairement qu'il parle de la même chose en parlant de valeur et de prix.

 

Le prix est une mesure cardinale de la valeur économique comme le kilomètre est une mesure de la distance. Cela ne nous empêche pas d'employer à la fois les mots distance et kilomètre.

 

Le chef d'entreprise cherche à maximiser la valeur subjective que ses produits ont aux yeux des consommateurs. C'est le rôle du marketing.
Et la seule manière de savoir si le marketing crée effectivement de la valeur subjective ou non c'est en regardant le prix, toutes choses égales par ailleurs. 

Faire de l'économie sans raisonner préalablement un minimum sur ce qui se passe dans la tête des gens, ce n'est pas faire de l'économie. 

 

On ne s'occupe pas de la valeur subjective, parce que précisément elle n'est pas mesurable. De même que la nuit, l'ivrogne cherche ses clés là où il y a de la lumière même si ce n'est pas là qu'il les a perdues. 

Et le meilleur moyen de savoir ce qui se passe dans la tête des gens c'est de regarder ce qu'ils échangent et à quel prix. 
 
Et d'ailleurs Hayek explique que le prix lui-même agit sur les préférences (sur la valeur subjective). Donc il n'y a pas de causalité claire psychologie => économie, il y a un feedback loop infini [...]pyschologie=>économie=>pyschologie>économie[...] où la causalité est dans les deux sens. 
 
Au final il est autant arbitraire de dire que ce qui est la vraie valeur est ce qu'on appelle la valeur subjective que de dire que la vraie valeur est ce qui est révélée par l'échange. C'est une histoire de définition de termes et Bastiat n'a pas tort a priori.
 
Le subjectivisme se traduit chez les autrichiens par la formalisation d'une valeur subjective, chez Bastiat par la notion non-formalisée de préférences. Comme ce n'est pas falsifiable (tout se passe dans la tête), il n'est pas dit que la formalisation soit nécessaire ou même utile.
 
Et j'ai la très forte intuition que la théorisation de la valeur de Bastiat est supérieure sur le plan des prédictions au marginalisme qui lui est une sorte de raisonnement circulaire qui permet simplement d'expliquer pourquoi les choses telles qu'elles le sont a posteriori. 
 
 

 

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Tu fais une pétition de principe en postulant que le prix que chaque consommateur est prêt à payer est la valeur que chacun accorde à Internet. Evidemment, sous ce postulat la valeur et le prix sont différents.

Tu as raison, j'ai fait une petite erreur : j'aurais dû dire non pas "ce prix fictif est la valeur accordée à l'accès Internet", mais "on sait alors que la valeur accordée à l'accès Internet est la même que la valeur accordée à cette somme d'argent". Ca m'apprendra à jouer les néoclassiques. ;)

Une fois cette rectification faite, je crois que mon raisonnement tient toujours.

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Revenons aux fondamentaux :

Qu'est ce que l'utilité ? La propriété qu'ont certains actes ou certaines choses de satisfaire nos besoins (ou nos désirs si l'on préfère).

Qu'entends t-on lorsqu'on parle de la valeur de l'eau ? Lorsqu'on dit l'eau vaut tant ?

Est ce que c'est un rapport entre un individu et l'eau ? Un individu qui évalue l'utilité de l'eau ?

 

Selon Bastiat, non. On évalue pas l'utilité de la matière. On ne peut pas évaluer cette utilité car on ne peut pas mesurer ou comparer le besoin ou la satisfaction : Le besoin ou la satisfaction ne se passent qu'à l'intérieur de l'individu et n'en sort jamais.

Entre le besoin et la satisfaction, il y a toujours un effort à faire. L'effort en revanche, on peut l'évaluer parce qu'on peut le mesurer et le comparer. Autant le besoin et la satisfaction sont intimes, et ne se passent qu'à l'intérieur de l'individu, autant on peut charger quelqu'un d'autre de l'effort. Quelqu'un peut travailler satisfaire nos besoins, c'est à dire nous rendre un service. Mais pour qu'il y consente, il faut qu'on lui rende un service un retour. On cherchera à comparer ces services pour voir à quel moment ils se valent.

On voit donc que selon Bastiat, la valeur implique l'effort dans un rapport uniquement homme-homme qui est l'échange. Il en résulte le prix.

Bastiat n'admet la valeur-utilité qu'en tant qu'on parle de l'utilité des services humains, et non de l'utilité des choses.

 

Un type est assoiffé dans le désert. Que dit Bastiat ? Ce n'est pas parce que l'eau a pour lui une énorme utilité qu'elle coûtera très chère. Il a besoin d'eau, c'est un fait, et Bastiat dit que le besoin ne s'évalue pas. Il dit en revanche, que si elle coûtera très chère, c'est parce que l'eau étant très difficile à acquérir dans le désert, celui qui lui en fournira lui rendra un énorme service en lui épargnant d'énormes difficultés pour l'acquérir. S'il pouvait acquérir de l'eau très facilement dans le désert, celle-ci coûterait moins chère, si assoiffé qu'il soit.

 

Selon les Autrichiens, quand on dit que l'eau vaut tant, on parle bien, il me semble, d'un rapport entre l'homme et l'eau : l'individu évalue l'utilité qu'a l'eau (en tant que chose) pour lui. Mais cela n'implique pas le prix, puisqu'on est toujours pas dans un rapport homme-homme. Le prix c'est la confrontation de deux valeurs, c'est-à-dire de deux utilités, c'est-à-dire la confrontation de deux rapports homme-choses.

Plus il considère que l'eau est utile, plus un individu sera prêt à céder beaucoup pour l'acquérir. Mais il faut toujours que ce beaucoup soit moins utile que l'eau avec laquelle il échange. Si un individu possède beaucoup d'eau, celle-ci perd de son utilité pour lui, donc de sa valeur, et il sera prêt à l'échanger contre pas grand chose.

Chez les Autrichiens, on voit donc que l'utilité des choses se mesure, s'évalue et se compare, et même peut se détruire par l'abondance. Même si la valeur n'est pas le prix, elle contribue grandement à façonner les prix.

 


Bastiat dit : L'abondance rend une chose moins difficile à acquérir, voilà pourquoi elle coûte moins chère.

Les Autrichiens disent : L'abondance rend une chose moins utile, voilà pourquoi elle coûte moins chère.


 

(Je reformule toujours les mêmes trucs je sais, mais je sens qu'à force de reformulation, on verra pointer la solution. :D)

 

Ces deux conceptions sont-elles compatibles, si oui comment ? Si non, qui a tort et pourquoi ?

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Je crois que l'utilité relative est précisément ce que tu viens de décrire.

Bastiat parle uniquement de l'utilité relative des services humains. Il exclue tout le reste.

Les Autrichiens parlent de l'utilité relative des choses, il me semble.

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Tu as raison, j'ai fait une petite erreur : j'aurais dû dire non pas "ce prix fictif est la valeur accordée à l'accès Internet", mais "on sait alors que la valeur accordée à l'accès Internet est la même que la valeur accordée à cette somme d'argent". Ca m'apprendra à jouer les néoclassiques. ;)

Une fois cette rectification faite, je crois que mon raisonnement tient toujours.

Encore une fois il y a le mot valeur qui apparaît dans le postulat, ce qui verrouille la conclusion : valeur et prix son différents.
 
On peut très bien commencer ton raisonnement par "on sait alors que l'utilité accordée à l'accès Internet est la même que l'utilité accordée à cette somme d'argent". Et on arriverait à la conclusion de Bastiat : prix/valeur et utilité sont différents. Un raisonnement ne peut pas concilier deux terminologies différentes puisqu'un raisonnement est forcé de choisir entre l'une des deux. Et un choix terminologique en soi ne peut pas rendre invalide un raisonnement. 
 
En toute rigueur je pense d'ailleurs qu'il faudrait éliminer l'argent : "on sait que le consommateur est prêt à réaliser un certain sacrifice pour avoir un accès à Internet". Car une somme d'argent, en dernière analyse, représente un pouvoir d'achat sur des biens et services de l'économie. Quand un consommateur est prêt à acheter un accès Internet, cela signifie qu'il est prêt à renoncer à la consommation d'autres biens et services de l'économie.
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J'ai trouvé le point de vue d'Hulsmann : http://mises.org/daily/2035

 

[...]

The central proposition of Bastiat's value theory is the bold characterization of market exchange ratios as ratios of human services (Bastiat 1851, p. 118). Again and again he asserts that value is the relationship between two services exchanged on the market and that, moreover, only human services have value, whereas the services of nature are always gratuitous. These positions seem to be irreconcilable with modern marginal-value theory, which explains market prices in terms of consumers' choices. But as we shall see, Bastiat's theory of services and values relates to market prices in a way that is not at all covered by modern value theory. The latter seeks to explain the exact ratio at which things are exchanged on the market, but this is not at all Bastiat's concern. [8]His main interest is in explaining what people exchange on the market, and his answer is that they exclusively exchange human services.

 

As we shall see, this answer not only is entirely correct as far as it goes, but also provides a missing link between the modern economic theory of value and prices on the one hand, and the modern libertarian theory of property on the other hand.

 

[...]

The importance of this characterization of market exchanges derives from its similarities with the Lockean-Rothbardian theory of appropriation and property. [11] According to John Locke's theory of appropriation — which was the standard theory in Bastiat's circle [12] — one owns a piece of land if and insofar as one has transformed it by one's actions. In exchanging this land on the market, then, one surrenders one's past actions — that is, speaking now with Bastiat, one's past services — for a price, which is itself of necessity either an action or a past action mixed with some natural resource. Thus we see that Bastiat's value theory is nothing but a consistent application of the Lockean insistence on the relationship between property and human action to economic theory.[13]

Austrian economists such as Mises (1998), Rothbard (1993), and Hoppe (1989, 1993) routinely stress that exchange and market prices are based on property. There are no things, they observe, that exchange themselves against one another, as in the Walrasian general-equilibrium approach; rather, all market exchanges take place between human beings, and in all market interactions human beings exchange property. For example, when Brown exchanges an apple for a pear from Green, the apple must be Brown's property and the pear must be Green's property, or no exchange could take place. Now, Bastiat's analysis of exchange and value complements and reinforces Austrian price theory by arguing that, ultimately, all pieces of one's property are past, present, or future actions.

Based on this insight, that what we pay for in market exchanges are but the actions of other persons, Bastiat develops a sophisticated analysis of the relationships between value on the one hand, and the joint operation of human action and natural resources on the other.

[...]

 

J'ai fait ressortir les éléments décisifs mais tout est très intéressant, je conseille la lecture.

 

Ce qui rejoint mon intuition : Bastiat est un pur génie, sa théorie de la valeur est non seulement exacte mais va beaucoup plus loin que le marginalisme.

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Bastiat dit : Lorsque j'achète un bien, je compare les efforts (travail, obstacles, difficultés de toute sorte...) que j'aurais à faire si je voulais obtenir ce bien d'une autre manière. Et si je devais faire moins d'efforts pour obtenir ce bien d'une autre manière, que le prix que me propose l'offreur, je n'ai pas de raison de l'acheter. En revanche si l'offreur m'épargne des efforts, il me rend service, par conséquent l'échange a lieu. L'utilité (c'est à dire le besoin ou le désir) qu'a pour moi le bien n'entre pas vraiment en compte dans la transaction.

 

Si le besoin qu'a pour toi le bien n'entre pas en compte dans la transaction, il y a forcément un problème quelque part.  Sinon ca donnerait ce genre de situation : "chérie, j'ai acheté un truc qui ne me sert strictement à rien, de la vrai merde, mais ca me coutait moins cher de l'acheter que de le faire moi-même"

 

S'il pouvait acquérir de l'eau très facilement dans le désert, celle-ci coûterait moins chère, si assoiffé qu'il soit

c'est bien que le prix est différent de l'utilité et donc de la valeur.

 

Plus il considère que l'eau est utile, plus un individu sera prêt à céder beaucoup pour l'acquérir. Mais il faut toujours que ce beaucoup soit moins utile que l'eau avec laquelle il échange. Si un individu possède beaucoup d'eau, celle-ci perd de son utilité pour lui, donc de sa valeur, et il sera prêt à l'échanger contre pas grand chose.

Le raisonnement doit se faire à la marge. Ce n'est pas l'eau qui perd de son utilité mais la quantité d'eau supplémentaire. Il est donc impossible de mesurer l'utilité totale de l'eau si une quantité d'eau n'en vaut pas une autre et que la différence est subjective.

 

Chez les Autrichiens, on voit donc que l'utilité des choses se mesure

Non, Mises : "l'action ne mesure pas l'utilité ou la valeur" Tout est action donc rien ne peut mesurer la valeur. D'ailleurs comment mesurer quelque chose de subjectif ?

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J'ai trouvé le point de vue d'Hulsmann : http://mises.org/daily/2035

 

Ce qui rejoint mon intuition : Bastiat est un pur génie, sa théorie de la valeur est non seulement exacte mais va beaucoup plus loin que le marginalisme.

:rolleyes:

 

C'est gentil de reposter le texte que j'avais déjà posté page 2 de ce topic. (en VF) mais comme je le disais déjà page 2, ce texte ne montre toujours pas en quoi la théorie de la valeur de Bastiat est compatible avec la théorie autrichienne.

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:rolleyes:

 

C'est gentil de reposter le texte que j'avais déjà posté page 2 de ce topic. (en VF) mais comme je le disais déjà page 2, ce texte ne montre toujours pas en quoi la théorie de la valeur de Bastiat est compatible avec la théorie autrichienne.

Comment tu veux montrer que deux théories sont compatibles ?

On peut juste savoir qu'elles ne sont pas contradictoires.

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Citons un passage essentiel :

Merci de pointer du doigt ce passage qui semble effectivement essentiel, tant il discute explicitement d'une définition. Franchement, je ne comprends pas ce qu'il dit. Cette notion de "valeur" me semble très nébuleuse.

 

Selon les Autrichiens, quand on dit que l'eau vaut tant, on parle bien, il me semble, d'un rapport entre l'homme et l'eau : l'individu évalue l'utilité qu'a l'eau (en tant que chose) pour lui. Mais cela n'implique pas le prix, puisqu'on est toujours pas dans un rapport homme-homme. Le prix c'est la confrontation de deux valeurs, c'est-à-dire de deux utilités, c'est-à-dire la confrontation de deux rapports homme-choses.

Plus il considère que l'eau est utile, plus un individu sera prêt à céder beaucoup pour l'acquérir. Mais il faut toujours que ce beaucoup soit moins utile que l'eau avec laquelle il échange. Si un individu possède beaucoup d'eau, celle-ci perd de son utilité pour lui, donc de sa valeur, et il sera prêt à l'échanger contre pas grand chose.
Chez les Autrichiens, on voit donc que l'utilité des choses se mesure, s'évalue et se compare, et même peut se détruire par l'abondance. Même si la valeur n'est pas le prix, elle contribue grandement à façonner les prix.
 
 
Les Autrichiens disent : L'abondance rend une chose moins utile, voilà pourquoi elle coûte moins chère.

Je me garderais de commenter sur Bastiat mais je commenterai sur les autrichiens, ou en tout cas la version moderne canonique (telle que dans Rothbard - Man, Economy, and State):

 

Selon les Autrichiens, quand on dit que l'eau vaut tant, on parle bien, il me semble, d'un rapport entre l'homme et l'eau : l'individu évalue l'utilité qu'a l'eau (en tant que chose) pour lui. Mais cela n'implique pas le prix, puisqu'on est toujours pas dans un rapport homme-homme.

 

Exemple typique des ambiguïtés autour du terme "valeur". Si un autrichien dit "l'eau vaut tant", il ne peut parler que d'un prix. Car cette expression dénote une mesure, et que pour lui l'utilité ou la valeur ne sont pas des grandeurs extensives, i.e. qui peuvent faire l'objet de mesure. Seuls les prix sont de telles grandeurs, en l'occurrence des rapports, observés ou hypothétiques, entre quantités de biens échangés entre plusieurs personnes. Autrement dit, il doit là utiliser le terme de "valeur" dans le sens du langage commun et ne s'exprime pas en tant qu'autrichien stricto sensu: l'observation de prix n'implique aucune théorie, a fortiori autrichienne.

S'il veut maintenir parfaitement ses choix terminologiques en cohérence avec sa théorie, il ne dira pas que "l'eau vaut tant". Car il réservera le terme de valeur (ou d'utilité) à la position qu'a une unité d'un bien en relation à d'autres (du même bien et d'autres biens) sur son "échelle de préférences". La valeur est ordinale pour lui. Une première unité d'un bien servira à satisfaire ses fins les plus élevés, une deuxième aux fins les plus élevées non satisfaites avec la première, etc. par ordre d'importance pour lui. Si bien que plus le stock qu'on a à sa disposition est élevé, plus l'utilité de la dernière unité est basse dans l'échelle et plus le stock est restreint, plus cette utilité ou valeur est élevée. C'est la loi de l'utilité marginale.

 

Le prix c'est la confrontation de deux valeurs, c'est-à-dire de deux utilités, c'est-à-dire la confrontation de deux rapports homme-choses.

Plus il considère que l'eau est utile, plus un individu sera prêt à céder beaucoup pour l'acquérir. Mais il faut toujours que ce beaucoup soit moins utile que l'eau avec laquelle il échange. Si un individu possède beaucoup d'eau, celle-ci perd de son utilité pour lui, donc de sa valeur, et il sera prêt à l'échanger contre pas grand chose.

 

Ce me semble grosso modo correct sauf la première phrase, mais imprécis et prêtant à confusion. Une "confrontation" de valeurs, de deux utilités, ce n'est pas un prix mais un jugement de valeur. Je préfère ceci à cela. Le prix c'est le rapport des quantités auxquels deux biens sont échangés.

Plus je considère que l'eau est utile, plus je serais prêt à céder pour en obtenir, oui. Car mes unités d'eau que je possède ou dont j'envisage l'acquisition, leur utilité est relative à des unités d'autres biens. Admettons que je possède 10 lapins et 0 litre d'eau. Bidule possède 100 litres d'eau et aucun lapin. A un prix hypothétique de 1 lapin pour 10 litres d'eau, mon échelle de préférences est toujours telle qu'une première unité d'eau serait préférée à la seconde, elle même préférée à la troisième, etc. Pareil pour les lapins. Mais il s'agit ici pour moi de comparer des unités d'eau en addition à des unités de lapins en soustraction (à envisager des échanges avec bidule). Donc admettons, l'utilité que je retirerais d'une première unité d'eau (de 10 litres) est loin au dessus de celle que je retire de mon dernier lapin. L'utilité d'une deuxième unité d'eau serait inférieure à celle de la première. L'utilité d'un deuxième lapin que j'abandonnerais est plus élevée que celle du premier, mais admettons inférieure à la deuxième unité d'eau en addition. Par contre à la troisième addition, je trouve qu'abandonner un troisième lapin pour obtenir une troisième unité d'eau ne serait pas intéressant car les fins que je peux satisfaire avec ce lapin, je les juge prioritaires par rapport aux fins que je peux satisfaire avec une troisième unité d'eau. Autrement dit, mes préférences sont telles qu'à un prix hypothétique de 1 lapin pour 10 litres d'eau, je suis prêt à acheter au plus 20 litres d'eau (et donc à vendre deux lapins). A un prix hypothétique plus élevé, je serai prêt à acheter la même quantité d'eau ou moins et à un prix hypothétique plus bas, autant ou plus d'eau du fait de la loi de l'utilité marginale appliquées aux deux biens. Moins j'ai de lapins, plus l'utilité marginale correspondante est élevée et plus j'ai d'eau, plus l'utilité marginale correspondante est basse donc logiquement, plus le prix est élevé (plus je dois abandonner de lapins pour obtenir une unité d'eau, moins je voudrais d'eau: 2 lapins étant préférés à un seul, 10 litres d'eau peuvent bien être préférés à 1 lapin mais pas à deux).

Bref, analytiquement parlant, la séquence c'est:

(1) jugements de valeur sur l'utilité des diverses unités de divers biens, qui déterminent (2) des prix maximum d'achat et des prix minimum de vente à tout prix hypothétique qui bornent (3) le processus d'enchère entre les acteurs déterminant les prix

Quels que soient les prix auxquels les échanges auront lieu s'il y en a, on sait ainsi que ce qui est obtenu par chacun vaut mieux pour lui que ce qu'il abandonne. Si les préférences de bidules sont telles qu'il soit prêt à vendre 20 litres d'eau pour obtenir deux lapins, il est possible qu'on réalise cet échange. Et il n'y a pas là de confrontation de la valeur que j'attribuerais à des unités d'eau contre celle que mon partenaire attribuerait à des lapins. Il y a "confrontation" entre la valeur comparée pour moi de lapins et d'eau d'un côté et la même confrontation du côté de bidule. Et pour qu'il y ait échange, il faut que l'une donne un résultat différent de l'autre, à savoir que nos préférences soient en ordres inverses. Je préfère 20 litres d'eau aux deux lapins, étant donné les stocks à ma disposition par ailleurs, et bidule préfère les deux lapins à 20 litres d'eau.

 

Ainsi, contrairement à ce qui est indiqué ci-dessous, il n'y aucune "mesure" impliquée de valeurs, qu'on pourrait ainsi comparer entre individus, ou même pour un seul individu. Il y a par contre un ordonnancement, des comparaisons ou évaluations faites par chacun.
 

Chez les Autrichiens, on voit donc que l'utilité des choses se mesure, s'évalue et se compare, et même peut se détruire par l'abondance. Même si la valeur n'est pas le prix, elle contribue grandement à façonner les prix.

 
Les Autrichiens disent : L'abondance rend une chose moins utile, voilà pourquoi elle coûte moins chère.

 

Ce sont bien les évaluations qui ultimement déterminent les prix via les prix maximum d'achat et prix minimum de vente de chacun mais il est par contre au mieux mal dit d'affirmer que l'abondance "détruirait" l'utilité. L'utilité de mes premiers 10 litres d'eau est la même que j'en ai 10 de plus ou non. Ce qu'il y a c'est que l'utilité des seconds 10 litres d'eau est plus basse. Mais certainement 20 litres sont plus utiles que 10 puisque j'ai des fins additionnelles qui peuvent être satisfaites avec 20 plutôt que 10 (tant que j'ai quelque chose à faire d'unités additionnelles, tant que l'eau est "rare" (moyen en quantité limitée en relation à mes fins). Donc l'abondance rend quelque chose moins cher parce que si j'ai déjà une quantité X d'un bien, des unités supplémentaires ne peuvent être allouées qu'à la satisfaction de fins toujours moins importantes si bien qu'on sera prêt à sacrifier de moins en moins d'autres moyens pour obtenir ou garder des unités de ce bien en sa possession.

Et dans tout ça, il y a "subjectivisme" en ce sens que l'évaluation se réfère ultimement aux fins des acteurs en cause et "marginalisme" en ce sens que l'évaluation porte sur des unités en cause dans des choix concrets en relation aux stocks en présence et non sur des classes abstraites de biens, comme l'eau en général.

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Si le besoin qu'a pour toi le bien n'entre pas en compte dans la transaction, il y a forcément un problème quelque part.  Sinon ca donnerait ce genre de situation : "chérie, j'ai acheté un truc qui ne me sert strictement à rien, de la vrai merde, mais ca me coutait moins cher de l'acheter que de le faire moi-même"

Je n'ai pas totalement en mémoire les chapitres qui précèdent sur les besoins et l'échange mais je pense qu'il doit y avoir des explications.

 

Selon Bastiat, le besoin n'entre pas en compte dans l'échange en ce sens que s'il est plus facile de faire moi-même cette chose plutôt que par l'échange, pourquoi j'échangerais ? Cela ne change pas le fait qu'à la base, je désire cette chose (un peu, beaucoup, passionnément...), mais ce désir et son intensité n'a rien à voir avec le fait que j'échange ou pas. Ce qui va faire que j'échange, c'est que l'autre me facilite l'accès à cette chose, il m'épargne des efforts, il me rend donc un service. Sinon je n'ai aucune raison d'échanger.

 

En essayant de pas trahir la pensée de Bastiat, je pense que c'est ce qu'il dit.

 

c'est bien que le prix est différent de l'utilité et donc de la valeur

A condition seulement d'assimiler utilité et valeur (tu as l'air de prendre ça pour acquis) ce que Bastiat considère comme erroné pour des raisons que j'ai expliqué en long en large et en travers.

Le prix est différent de l'utilité : selon Bastiat, oui.

L'utilité est différente de la valeur : selon Bastiat, oui.

La valeur est différente du prix : selon Bastiat, non.

 

 

D'ailleurs comment mesurer quelque chose de subjectif ?

Bastiat dit qu'on ne peut pas mesurer qui se passe seulement dans la tête des gens. (Besoin, satisfaction, utilité, désir...) C'est là dessus qu'il s'appuie pour dire que la valeur n'a rien à voir avec l'intensité des besoins ou des satisfactions. Quelque chose qu'on ne peut mesurer, donc pas évaluer, ne saurait être qualifié de valeur économique. Il dit que ce qu'on peut comparer, mesurer et donc évaluer, ce sont seulement les efforts.

Les Autrichiens au contraire, disent que les choses subjectives sont évaluables (je ne dit pas quantifiable, mais évaluable dans le sens comparable et hiérarchisable) puisque c'est le principe même du subjectivisme. (valeur subjective = évaluation subjective = mesure de quelque chose de subjectif) Xara le montre en parlant de valeur plus ou moins haute... Tu dis : "rien ne peut mesurer la valeur"...mais qu'est ce que la valeur sinon une mesure ? C'est comme si tu disais : "rien ne peut mesurer la mesure"...  :online2long:

 

 

Comment tu veux montrer que deux théories sont compatibles ?

On peut juste savoir qu'elles ne sont pas contradictoires.

Si elles ne sont pas contradictoires, elles sont compatibles. Mais je suis pas sûr qu'elles ne soient pas contradictoires. Hulsmann se contente de dire que la théorie de Bastiat s'accorde bien avec la théorie de la propriété des autrichiens, mais est différente de leurs théories de la valeur, sans expliquer en quoi ou pourquoi elles ne se contredisent pas.

 

 

pour lui l'utilité ou la valeur ne sont pas des grandeurs extensives, i.e. qui peuvent faire l'objet de mesure

En m'auto-proclamant le porte-parole de Bastiat, celui-ci dirait que cela n'a aucun sens de parler d'une valeur qui ne se mesure pas. (=une valeur qui ne s'évalue pas), c'est une contradiction dans les termes.

 

Si bien que plus le stock qu'on a à sa disposition est élevé, plus l'utilité de la dernière unité est basse dans l'échelle et plus le stock est restreint, plus cette utilité ou valeur est élevée.

Je ne comprends plus. Vous dites que la valeur/l'utilité ne s'évaluent pas, ensuite vous parlez d'utilité et de valeur plus ou moins haute ou basse.

 

Bref, analytiquement parlant, la séquence c'est:

(1) jugements de valeur sur l'utilité des diverses unités de divers biens, qui déterminent (2) des prix maximum d'achat et des prix minimum de vente à tout prix hypothétique qui bornent (3) le processus d'enchère entre les acteurs déterminant les prix

 S'il y a une relation, même indirecte entre l'utilité et le prix, quid des critiques de Bastiat de la valeur-utilité ? ("Valeur" entendue par Bastiat comme étant le prix.)

 

Quels que soient les prix auxquels les échanges auront lieu s'il y en a, on sait ainsi que ce qui est obtenu par chacun vaut mieux pour lui que ce qu'il abandonne.

Comment mettre ça en perspective avec Bastiat qui dit que ce qui fait l'échange c'est que l'offreur m'épargne des efforts pour obtenir la chose désirée ?

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Si elles ne sont pas contradictoires, elles sont compatibles. Mais je suis pas sûr qu'elles ne soient pas contradictoires. Hulsmann se contente de dire que la théorie de Bastiat s'accorde bien avec la théorie de la propriété des autrichiens, mais est différente de leurs théories de la valeur, sans expliquer en quoi ou pourquoi elles ne se contredisent pas.

Il dit que même si la théorie de Bastiat semble de prime abord irréconciliable avec l'explication de la valeur par le marginalisme en y regardant de plus on s'aperçoit que Bastiat explique la valeur d'une manière totalement différente que le marginalisme et que son explication lui permet d'aller beaucoup plus loin que celui-ci.

 

On peut faire une analogie la force de la gravité en physique. Il y a Newton qui explique l'existence de ce phénomène d'une certaine manière avec la théorie de la gravitation universelle et il y a Einstein qui l'explique d'une autre manière avec la théorie de la relativité générale. Les deux théories expliquent d'une manière très différente le même phénomène sans se contredire. Et il s'avère que la théorie de la gravitation universelle est un cas particulier de la théorie de la relativité générale, qui explique un champ beaucoup plus important de la réalité physique que la théorie de Newton.

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Il dit que même si la théorie de Bastiat semble de prime abord irréconciliable avec l'explication de la valeur par le marginalisme en y regardant de plus on s'aperçoit que Bastiat explique la valeur d'une manière totalement différente que le marginalisme et que son explication lui permet d'aller beaucoup plus loin que celui-ci.

Il le dit, mais il n'explique pas pourquoi ou comment.

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Une précision : quand Bastiat dit que ce qui fait l'échange c'est que l'offreur m'épargne des efforts pour obtenir la chose désirée, il faut avoir en tête que Bastiat présente dans les Harmonies une sorte d'homo œconomicus dans le chapitre 2 (qui est très court)...l'homme du point de vue économique, cherche à réduire le rapport de l'effort à la satisfaction (même si à cet effet il peut se tromper dans ses choix). L'homme analysé du point de vue économique, selon Bastiat, essaie de faire le moins d'effort possible pour le plus de satisfaction possible. (Sinon c'est du sisyphisme, pour faire référence aux Sophismes...) Se rendre des services réciproques est une manière d'optimiser le ratio effort / satisfaction.

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Les Autrichiens au contraire, disent que les choses subjectives sont évaluables (je ne dit pas quantifiable, mais évaluable dans le sens comparable et hiérarchisable) puisque c'est le principe même du subjectivisme. (valeur subjective = évaluation subjective = mesure de quelque chose de subjectif) Xara le montre en parlant de valeur plus ou moins haute... Tu dis : "rien ne peut mesurer la valeur"...mais qu'est ce que la valeur sinon une mesure ? C'est comme si tu disais : "rien ne peut mesurer la mesure"...  :online2long:

 

Je ne comprends plus. Vous dites que la valeur/l'utilité ne s'évaluent pas, ensuite vous parlez d'utilité et de valeur plus ou moins haute ou basse.

Vous venez pourtant de le dire au dessus. Evaluable "dans le sens comparable et hiérarchisable", pas "quantifiable". Et c'est précisément ce que j'ai dit donc vous comprenez bien dès lors que vous ne faites pas d'équivoque sur le terme "valeur".

Quand je dis plus ou moins haute ou basse, ce n'est pas dans le sens de la température de la pièce qui fait 10° ou 20° si bien qu'on peut dire que la seconde est le double de la deuxième. C'est seulement une histoire de rang. Je préfère ceci à cela: "ceci" est au dessus de "cela" dans mon échelle de valeur. L'utilité ou valeur est toujours relative dans cette conception. Il n'y a pas d'unité de mesure là dedans équivalents aux degrés Celcius pour mesure la température. Autrement dit, si la question se pose d'aller au foot ou de rester devant la télé, vous choisissez par exemple la télé, c'est votre choix préféré mais si je vous demande "préféré de combien?", vous n'avez pas de réponse scientifique parce qu'il n'y a pas d'unité pour mesurer la satisfaction de l'un et de l'autre. L'utilité est ordinale, pour à peu près tous les économistes aujourd'hui et pour les autrichiens en particulier qui refusent dans le choix de leurs outils de faire comme si elle était cardinale (qui se passent de la représentation des préférences par des fonctions mathématiques d'utilité).

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Je vois. Je précise que dans aucun de mes messages sur ce topic, quand je parlais de mesure ou d'évaluation, je ne pas de mesure cardinale. (Du genre "utilité = 10") mais toujours de mesure relative. Cela me semblait aller de soi.
A la lumière de cette précision, on voit que les Autrichiens, je le répète, admettent dans l'économie une "mesure" entre l'homme et l'objet, qu'on appelle communément l'utilité, qui est une mesure ordinale, appelée valeur. L'évaluation que font les gens des objets qu'ils échangent rentre en compte dans la transaction.
 
En gros, dans l'échange, l'individu cède un truc qu'il juge moins utile pour obtenir un truc qu'il juge plus utile.
On cède une valeur plus petite pour obtenir une valeur plus grande.
C'est bien ça non ?
 
Bastiat dit lui qu'il y a échange à partir du moment où les deux parties s'accordent pour dire que les choses échangés se valent. Sinon il ne peut pas y avoir d'échange. Ce qui se passe dans la tête des gens à la limite on s'en fiche, seul compte le fait que l'un et l'autre veulent un truc et doivent se mettre d'accord sur une valeur d'échange. Ce qui s'échange ce sont les services, c'est à dire de la difficulté épargnée pour obtenir la satisfaction. Un service humain est utile. Donc on compare des utilités, mais uniquement l'utilité relative des services humains, et en aucun cas l'utilité des objets eux-mêmes (la satisfaction) qui est impossible à évaluer, parce qu'elle se passe dans la tête.
 

Laissons donc aux choses les qualités qui leur sont propres : à l’eau, à l’air, l’Utilité ; aux services, la Valeur. Disons : c’est l’eau qui est utile, parce qu’elle a la propriété d’apaiser la soif ; c’est le service qui vaut, parce qu’il est le sujet de la convention débattue. Cela est si vrai, que, si la source s’éloigne ou se rapproche, l’Utilité de l’eau reste la même, mais la valeur augmente ou diminue. Pourquoi ? Parce que le service est plus grand ou plus petit. La valeur est donc dans le service, puisqu’elle varie avec lui et comme lui.

 
Il ajoute qu'évaluer les objets, c'est donner le flanc au socialisme (pour précision, la valeur qu'on crée est le fondement de la propriété selon Bastiat) :
 

Non-seulement on matérialisait outre mesure la langue, mais on était réduit à la surcharger de distinctions subtiles, afin de réconcilier les idées qu’on avait faussement séparées. On imaginait la valeur d’usage par opposition à la valeur d’échange, etc.

Enfin, et ceci est bien autrement grave, grâce à cette confusion des deux grands phénomènes sociaux, la propriété et la communauté, l’un restait injustifiable et l’autre indiscernable.

En effet, si la valeur est dans la matière, elle se confond avec les qualités physiques des corps qui les rendent utiles à l'homme. Or ces qualités y sont souvent mises par la nature. Donc la nature concourt à créer la valeur, et nous voilà attribuant de la Valeur à ce qui est gratuit et commun par essence. Où est donc alors la base de la propriété ? Quand la rémunération que je cède pour acquérir un produit matériel, du blé, par exemple, se distribue entre tous les travailleurs qui, à l'occasion de ce produit, m'ont, de près ou de loin, rendu quelque service, à qui va cette part de rémunération correspondante à la portion de Valeur due à la nature et étrangère à l'homme? Va-t-elle à Dieu? Nul ne le soutient, et l'on n'a jamais vu Dieu réclamer son salaire. Va-t-elle à un homme? À quel titre, puisque, dans l'hypothèse, il n'a rien fait?

Et qu'on n'imagine pas que j'exagère, que, dans l'intérêt de ma définition, je force les conséquences rigoureuses de la définition des économistes. Non, ces conséquences, ils les ont très-explicitement tirées eux-mêmes sous la pression de la logique.

Ainsi, Senior en est arrivé à dire: « Ceux qui se sont emparés des agents naturels reçoivent, sous forme de rente, une récompense sans avoir fait de sacrifices. Leur rôle se borne à tendre la main pour recevoir les offrandes du reste de la communauté. » Scrope: « La propriété de la terre est une restriction artificielle mise à la jouissance des dons que le Créateur avait destinés à la satisfaction des besoins de tous. » Say: « Les terres cultivables sembleraient devoir être comprises parmi les richesses naturelles, puisqu'elles ne sont pas de création humaine, et que la nature les donne gratuitement à l'homme. Mais comme cette richesse n'est pas fugitive, ainsi que l'air et l'eau, comme un champ est un espace fixe et circonscrit que certains hommes ont pu s'approprier, à l'exclusion de tous les autres qui ont donné leur consentement à cette appropriation, la terre, qui était un bien naturel et gratuit, est devenue une richesse sociale dont l'usage a dû se payer. »

Certes, s'il en est ainsi, Proudhon est justifié d'avoir posé cette terrible interrogation, suivie d'une affirmation plus terrible encore:

« À qui est dû le fermage de la terre? Au producteur de la terre sans doute. Qui a fait la terre? Dieu. En ce cas, propriétaire, retire-toi. »

Oui, par une mauvaise définition, l'économie politique a mis la logique du côté des communistes. Cette arme terrible, je la briserai dans leurs mains, ou plutôt ils me la rendront joyeusement. Il ne restera rien des conséquences quand j'aurai anéanti le principe. Et je prétends démontrer que si, dans la production des richesses, l'action de la nature se combine avec l'action de l'homme, la première, gratuite et commune par essence, reste toujours gratuite et commune à travers toutes nos transactions; que la seconde représente seule des services, de la valeur; que, seule, elle se rémunère; que, seule, elle est le fondement, l'explication et la justification de la Propriété. En un mot, je prétends que, relativement les uns aux autres, les hommes ne sont propriétaires que de la valeur des choses, et qu'en se passant de main en main les produits ils stipulent uniquement sur la valeur, c'est-à-dire sur les services réciproques, se donnant, par-dessus le marché, toutes les qualités, propriétés et utilités que ces produits tiennent de la nature.

Si, jusqu'ici, l'économie politique, en méconnaissant cette considération fondamentale, a ébranlé le principe tutélaire de la propriété, présentée comme une institution artificielle, nécessaire, mais injuste; du même coup elle a laissé dans l'ombre, complétement inaperçu, un autre phénomène admirable, la plus touchante dispensation de la Providence envers sa créature, le phénomène de la communauté progressive.

La richesse, en prenant ce mot dans son acception générale, résulte de la combinaison de deux actions, celle de la nature et celle de l'homme. La première est gratuite et commune, par destination providentielle, et ne perd jamais ce caractère. La seconde est seule pourvue de valeur, et par conséquent appropriée. Mais, par suite du développement de l'intelligence et du progrès de la civilisation, l'une prend une part de plus en plus grande, l'autre prend une part de plus en plus petite à la réalisation de toute utilité donnée; d'où il suit que le domaine de la Gratuité et de la Communauté se dilate sans cesse, au sein de la race humaine, proportionnellement au domaine de la Valeur et de la Propriété: aperçu fécond et consolant, entièrement soustrait à l'œil de la science tant qu'elle attribue de la valeur à la coopération de la nature.

Dans toutes les religions on remercie Dieu de ses bienfaits; le père de famille bénit le pain qu'il rompt et distribue à ses enfants: touchant usage que la raison ne justifierait pas s'il n'y avait rien de gratuit dans les libéralités de la Providence.

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  • 2 weeks later...

Le débat n'est pas clos dans le sens où on ne s'est pas mis d'accord.

 

Je pense que Von Mises a raison et mon discours est orienté pour le prover. Je ne vais pas réinventer la roue, Mises non plus. Lorsqu'il a ecrit l'action humaine il n'a pas voulu créer une theorie economique mais bien partir de l'action comme axiom de base (nier l'action c'est agir),

 

Sa notion de valeur est naturelle. quelle valeur atachez vous aux choses ? Un échange de valeur reste personelle.

 

"Bastiat dit lui qu'il y a échange à partir du moment où les deux parties s'accordent pour dire que les choses échangés se valent. Sinon il ne peut pas y avoir d'échange."

Non, il y  échange quand il y a inégalité précisément.

 

On continue.

 

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"Bastiat dit lui qu'il y a échange à partir du moment où les deux parties s'accordent pour dire que les choses échangés se valent. Sinon il ne peut pas y avoir d'échange."

Non, il y  échange quand il y a inégalité précisément.

Inégalité de quoi ? C'est toute la question.

Selon les Autrichiens, il y a échange lorsqu'il y a inégalité de valeur. Sauf que pour les Autrichiens, la valeur c'est l'utilité. En gros, si Pierre pense que le vase est plus utile que le chapeau qu'il possède, et que Paul pense que le chapeau est plus utile que le vase qu'il possède, il y aura échange.

 

Selon Bastiat, ce n'est pas ainsi que les choses se passent. L'utilité n'entre pas en compte, si ce n'est l'utilité relative des services. Pierre désire un vase, Paul désire un chapeau. Pierre va évaluer la difficulté pour acquérir le vase, et Paul va évaluer la difficulté pour acquérir un chapeau. Si Pierre s'aperçoit qu'il peut obtenir un vase plus facilement qu'en cédant son chapeau, ou si Paul s'aperçoit qu'il peut obtenir un chapeau plus facilement qu'en cédant son vase, l'échange ne peut pas se faire. Pour que l'échange ait lieu il faut que les deux se disent : "Je ne peux pas obtenir le bien que je désire plus facilement qu'en cédant le bien que je possède.". C'est quand il y a difficulté épargné de part et d'autre, et seulement à partir de ce moment là qu'il y a échange (de service) et donc qu'il y a valeur. La valeur est le résultat du processus.

 

C'est-à-dire que chez les autrichiens la valeur est un élément du processus qui va aboutir à l'échange, tandis que pour Bastiat la valeur est le résultat du processus. Pour lui, en un sens, la valeur est l'échange, c'est-à-dire en fait le prix.

 

Selon Bastiat, on ne pourrait de toute façon pas parler d'inégalité d'utilité parce que l'utilité est intime (rapport homme-objet)  et ce qui est intime est impossible à comparer, donc à évaluer.

 

Et en effet le débat n'est pas clos, car je ne sais toujours pas si les deux théories sont compatibles, ou en quoi Bastiat a tort.

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