Aller au contenu

Le Magicien D'oz Et L'etalon Or


Librekom

Messages recommandés

article intéressant: http://rue89.nouvelobs.com/rue89-culture/2014/03/01/pourquoi-navez-sans-doute-rien-compris-magicien-doz-250326

Pourquoi vous n’avez (sans doute) rien compris au « Magicien d’Oz »

 

 

« 12 Years a Slave », « American Bluff » et « Gravity ». Sauf surprise, ces trois films devraient se tailler la part du lion lors de la cérémonie des Oscars qui se tient dimanche. Le temps d’un hommage, ils se feront pourtant voler la vedette par le 75e anniversaire du « Magicien d’Oz ».

Depuis sa sortie en 1939, les aventures de Dorothy au pays d’Oz sont devenues un classique du cinéma et une référence de la culture populaire aux Etats-Unis. « Le Magicien d’Oz » a été élu dixième meilleur film américain de tous les tempspar l’American Film Institute en 2007, et des répliques comme « Toto, j’ai l’impression que nous ne sommes plus au Kansas » ou « On n’est jamais aussi bien que chez soi » sont connues de presque tous les Américains.

Bien que « Le Magicien d’Oz » soit devenu mondialement célèbre grâce au film et à l’interprétation inoubliable de Judy Garland, il s’agit avant tout d’une série de romans écrits par L. Frank Baum, et dont le premier tome est paru en 1900. Il est même considéré par la bibliothèque du Congrès comme le premier conte américain destiné aux enfants.

Pourtant, depuis sa parution, le livre a suscité de nombreuses controverses, en plus d’être l’objet d’interprétations plus adultes. Il est même considéré par certains économistes comme une parabole sur la situation politique des Etats-Unis à la fin du XIXe siècle.
Dorothy perdue en pleine tempête

D’abord, l’histoire. « Le magicien d’Oz » a pour héroïne Dorothy, une jeune fille vivant dans le Kansas. Au cours d’une tempête, elle se retrouve transportée au pays d’Oz. Pour pouvoir retourner chez elle, elle doit aller à la rencontre d’un puissant magicien. Sur son chemin, elle rencontre L’épouvantail, L’homme de fer blanc et Le lion peureux.

Tous les trois veulent aussi rencontrer le magicien. L’épouvantail veut lui demander un cerveau, L’homme de fer-blanc un cœur et Le lion peureux du courage. Avant d’exaucer leurs vœux, le magicien d’Oz exige que Dorothy et ses quatre amis ramènent le balai de la méchante sorcière de l’Ouest.

photo_1_magicien_doz_1200.jpg

Les personnages du « Magicien d’Oz »

 

Dès sa parution, « Le Magicien d’Oz » suscite la colère des Américains les plus croyants. Ils voient dans ce conte un outil de propagande faisant l’apologie de la sorcellerie. Ces attaques, qui rappellent celles dont « Harry Potter » a fait l’objet, ont continué jusque dans les années 80.

En 1986, plusieurs parents du comté de Hawkins dans le Tennessee saisissent ainsi la justice. Ils veulent que « Le Magicien d’Oz » ne soit plus enseigné dans les écoles publiques. Ils critiquent le livre de Baum pour sa promotion de la sorcellerie et de « l’humanisme laïc ».

En première instance, ces parents obtiennent le droit que leurs enfants n’assistent pas aux cours pendant lesquels « Le Magicien d’Oz » est enseigné. La décision est finalement annulée l’année d’après, en appel.

Une allégorie du populisme à l’américaine ?

L’interprétation la plus célèbre et la plus discutée du « Magicien d’Oz » ne doit pourtant rien à la sorcellerie. En 1964, Henry M. Littlefield, professeur dans un lycée de l’Etat de New York, publie l’article « The Wizard of Oz : Parable on Populism » dans la prestigieuse revue American Quarterly. Selon lui, « Le Magicien d’Oz » serait en fait une allégorie sur le courant populiste américain de la fin du XIXe siècle et sur son incapacité à réformer les Etats-Unis.

Littlefield voit en Dorothy l’incarnation du peuple américain plongé en pleine crise économique dans les années 1890. A l’époque, un grand mouvement populaire se forme contre un ennemi : l’étalon-or. Pour les Etats-Unis, il est impossible d’imprimer plus de monnaie tant que la quantité d’or n’augmente pas. Pour tous les fermiers endettés jusqu’au coup, l’étalon-or fait le jeu des financiers.

Le remède : sortir de l’étalon-or et adopter le « bimétallisme », en utilisant l’argent en plus de l’or. L’afflux d’argent provoquerait une forte inflation, allégeant la dette des agriculteurs. Pour soutenir cette réforme, le Parti populiste est créé en 1892.

photo_3__william_jennings_bryan_1200.jpg

William Jennings Bryan

Quatre ans plus tard, le candidat démocrate William Jennings Bryan fait de cette réforme son cheval de bataille lors de l’élection présidentielle de 1896.

Dans son discours de la Croix d’or, l’un des plus célèbres de l’histoire américaine, il compare même l’étalon-or à la couronne d’épines portée par le Christ lors de sa crucifixion. Cela n’empêche pas Bryan de perdre l’élection face au Républican William McKinley.

Pour Hittlefield, aucun doute n’est permis : Le lion peureux à la recherche de son courage est en réalité William Jennings Bryan, qui cherche à aider le peuple américain déboussolé (Dorothy), les fermiers (L’épouvantail) et les ouvriers (L’homme de fer-blanc).

Ensemble, ils marchent jusqu’à la Cité d’Emeraude du magicien d’Oz en suivant la route de brique jaune (l’étalon-or).

photo_2_le_chemin_de_brique_jaune_1200.j

Le chemin de brique jaune du « Magicien d’Oz »

Le magicien d’Oz se révèle malheureusement être un imposteur, comme beaucoup d’hommes politiques de cette époque marquée par la corruption. Peu importe : Dorothy n’a pas besoin de lui. A la fin, elle apprend en effet qu’il lui suffit de taper trois fois des talons avec ses chaussures pour retourner chez elle.

Si elles sont d’un rouge éclatant dans le film (les studios MGM voulaient montrer aux spectateurs les capacités du Technicolor), les chaussures de Dorothy sont en fait argentées dans l’histoire originale de Baum.

photo_4_l.frank_baum_ok.jpg

L. Frank Baum

Pour Littlefield, il s’agit clairement d’un éloge du bimétallisme de la part de L. Frank Baum, qui était en plus un fervent supporter de William Jennings Bryan lors de l’échec présidentiel de 1896.

Cinquante ans après, la thèse de Littlefield est toujours vivement débattue dans les universités américaines. S’il était encore vivant, L. Frank Baum en aurait peut-être été le premier surpris.

Dans son introduction au « Magicien d’Oz », il assurait que « l’histoire du Magicien d’Oz a été écrite pour le seul plaisir des mômes d’aujourd’hui ».

 

 

 

Lien vers le commentaire

Créer un compte ou se connecter pour commenter

Vous devez être membre afin de pouvoir déposer un commentaire

Créer un compte

Créez un compte sur notre communauté. C’est facile !

Créer un nouveau compte

Se connecter

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous ici.

Connectez-vous maintenant
×
×
  • Créer...