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Comment êtes-vous devenu libéral ?


Gio

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  • 3 months later...

Je ne sais pas si je suis libéral. Mais ce qui est bien dans le libéralisme c'est que une pensée qui se distingue des autres dans sa façon de poser les questions essentielles. C'est la seule pensée qui trouve sa légitimité de façon rationnelle.

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  • 2 months later...

Il y a une chose que je peux vous affirmer avec certitude : je ne suis pas né libéral.

Je ne le suis pas devenu non plus dans l'enfance, ni dans l'adolescence. Voyez-vous, j'ai grandi dans un milieu très populaire, peuplé de syndicalistes (CGT ou FO), votant pour Lutte Ouvrière, le PCF ou le PS. Un environnement a priori peu libéral.

A l'époque, le libéralisme pour moi se confondait nécessairement avec le capitalisme, ce dernier étant le Mal Absolu. Les guerres, les injustices, les malheurs de ce monde étaient dus au capitalisme et à l'ultra-néo-libéralisme.

 

J'étais collectiviste, constructiviste, droitdelhommiste, convaincu (forcément) d'avoir raison. Un beau système bien rationnel permettra de résoudre l'ensemble des problèmes.

 

Puis vinrent mes études de droit. Elles eurent une influence déterminante sur moi, pour une triple raison :

1. la première m'est personnelle : je suis intellectuellement curieux, très féru de philosophie. J'ai lu, bien sûr, les auteurs de Gauche (Lafargue, Engels, Jaurès). J'ai également lu Kropotkine ou Bakounine.

 

Mais ce qui eut une influence déterminante, ce fut mon intérêt pour la philosophie classique. En effet, c'est à cette période que je me suis abreuvé de John Locke, de Rawls, de Bentham, de Burke, de Tocqueville. Locke avait ma préférence, d'ailleurs. 

 

Nietzsche acheva de me rendre particulièrement critique vis-à-vis de systèmes orgueilleux, comme le socialisme. 

 

D'autres auteurs, non cités comme des références libérales, m'ont aussi influencé. Par exemple, M. Crozier, que j'apprécie. Ou ma passion pour l'histoire (qui permet de relativiser).

 

2. la deuxième intervient dans le cadre de ma formation. En effet, en 1ère année de droit, nous étudions nécessairement le Discours de Portalis. Ce fut une révélation. Chaque phrase de son introduction sonnait (et sonne encore) à mes oreilles comme une maxime, l'énoncé d'une vérité d'autant plus frappante que je n'avais jamais pu la penser aussi clairement et distinctement. 

 

Pourtant, je ne devins pas libéral à ce moment-là, malgré tout ce bagage intellectuel. Je le devins plus tard, après la fin de mes études

 

3. la troisième s'appelle vie professionnelle. J'ai eu l'immense bonheur d'être confronté au RSI et d'exercer mon métier dans le domaine du droit social. Ces deux éléments permettent de grandement relativiser la vertu de notre protection sociale et la qualité de notre législateur.
Notre système de protection sociale apparaît à mes yeux comme un vol.
Notre législateur adoré m'apparaît comme un escroc, un clown ou un bouffon. Au choix.

 

La pluie de textes stupides déferlant sur moi chaque mois, textes inspirés par une idéologie étatiste et constructiviste, m'a mis en colère. A suscité en moi la haine. Je ne peux plus voir en peinture un député ou un ministre. Je ne peux plus entendre un discours étatiste sans voir mon poil se hérisser. C'est devenu profondément viscéral. L'alternance, les changements de cap ne changeaient rien à la médiocrité, aux effets pervers : j'ai été contraint de constater que ce n'était pas un problème de personnes, ni même d'idées (Gauche/Droite) mais du postulat selon lequel l'Etat et le Droit sont des solutions aux problèmes de société.

 

Chaque semaine, une taxe, une interdiction, une limitation de nos droits et de nos libertés. Etant masochiste, je lis également la presse. Je me souviens d'une époque où je pensais que la presse informait objectivement, et que le plus objectif des journaux était le Monde. Quelle profonde naïveté ! La dissonance cognitive entre ce qui est raconté par nos politiques ou la presse et ce que je peux constater chaque jour de ma vie est devenu un immense fossé me coupant définitivement de toute pensée étatiste.

 

Combien de fois ai-je pu constater que les meilleures intentions aboutissent au mieux à des usines à gaz, au pire à des désastres? Je suis vacciné des bonnes intentions. Je suis vacciné de nos élites qui ont l'orgueil de croire savoir ce qu'il convient à chacun de nous. Vacciné de cette croyance naïve dans un progrès infini, et de la conviction que les problèmes viennent nécessairement de l'ignorance ou de la bêtise d'autrui. Vacciné, enfin, du manichéisme.

 

J'en étais plus ou moins là dans mes réflexions quand j'ai découvert h16. Il ne m'a pas convaincu, il exprimait simplement ce que je pensais déjà. 

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Et j'ajoute une réflexion, peut-être que quelqu'un a des éléments de réponse : 

 

la formation que l'on suit a-t-il une influence sur notre disposition vis-à-vis du libéralisme? En effet, j'ai remarqué que les juristes et les informaticiens étaient, en moyenne, plus sensibles à certaines questions relatives aux libertés. 

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En effet, c'est à cette période que je me suis abreuvé de John Locke, de Rawls, de Bentham, de Burke, de Tocqueville. Locke avait ma préférence, d'ailleurs.

Comment ce fait-il que tu n'ais pas rejeté violemment ces auteurs, étant donné que tu étais socialiste à cette époque ?

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Tu es bavard, mais alors, bienvenue !

la formation que l'on suit a-t-il une influence sur notre disposition vis-à-vis du libéralisme? En effet, j'ai remarqué que les juristes et les informaticiens étaient, en moyenne, plus sensibles à certaines questions relatives aux libertés.

Pour l'informatique, la partie programmation, je dirais que l'incohérence est toujours punie. Lorsqu'on en laisse une, par facilité, on s'en mord ensuite les doigts. Cela incite à la rigueur. Mais la rigueur en programmation est acquise avec l'expérience et non pas les études.

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@ Gio :

 

La curiosité et une certaine appétence pour la philosophie. Ces auteurs sont des incontournables. Et je suis masochiste, j'aime lire ceux qui m'agacent, c'est encore le cas aujourd'hui (je lis de la littérature féministe, du Althusser et je m'aventure dans Libération, le Nouvel Observateur, le Monde chaque jour alors que je les vomis). J'aime aussi me cogner des trucs dégueulasses, par exemple des liasses fiscales, les utilisations de la réserve parlementaire, les rapports de la Cour des comptes. Je veux comprendre. 

 

@ laffreuxthomas

 

J'ai du mal à faire court. 

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La curiosité et une certaine appétence pour la philosophie. Ces auteurs sont des incontournables. Et je suis masochiste, j'aime lire ceux qui m'agacent, c'est encore le cas aujourd'hui (je lis de la littérature féministe, du Althusser et je m'aventure dans Libération, le Nouvel Observateur, le Monde chaque jour alors que je les vomis). J'aime aussi me cogner des trucs dégueulasses, par exemple des liasses fiscales, les utilisations de la réserve parlementaire, les rapports de la Cour des comptes. Je veux comprendre. 

Oui mais quand tu lis Althusser aujourd'hui, il ne t'engage pas sur la voie du marxisme. Comment Locke a pu faire de toi un libéral ? Comment ce qu'il dit a pu te sembler correct ?

(Au fait, tu fais référence au deuxième Traité de gouvernement civil ?)

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J'ai lu les deux traités du Gouvernement Civil et la Lettre sur la Tolérance. 

 

Locke n'a pas fait de moi un libéral. Comme je l'ai dit, je le suis devenu a posteriori. L'avoir lu m'a sans doute fourni l'armature intellectuelle nécessaire pour être libéral, mais n'a pas suffi à me convaincre.

Ce qui m'a définitivement convaincu, c'est ma vie professionnelle. Le constat cinglant, chaque jour, de l'échec de la bureaucratie, de l'étatisme, du constructivisme. Avec la maturité nécessaire, et plus de recul, les vieilles lubies marxistes paraissent puériles. J'en suis arrivé à la conclusion qu'un bon législateur était un législateur en faisant le moins possible. 

 

J'ignore si en l'absence de lecture libérale je serais devenu libéral. Par contre, je sais que sans mon expérience professionnelle, sans m'être frotté au crépis rêche de la réalité, je ne serais jamais devenu libéral.

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Ca fait une décennie, hein. 

 

Je le percevais comme un homme brillant. Je le perçois toujours ainsi, d'ailleurs.

Si je ne devais retenir qu'une idée, c'est que l'Etat ou l'Eglise ou une quelconque entité ne peuvent pas s'occuper du salut des âmes (ou la rectitude des pensées). Que cette liberté est inaliénable, et qu'une entité agissant à l'encontre de cette liberté et des droits les plus essentiels doit être anéantie (ce qui convenait à un révolutionnaire en herbe).

 

Mais, au fond, Locke a mal vieilli sur de nombreux points. Portalis est plus percutant, et plus actuel sur toute la partie de son Discours préliminaire relative au rôle de la loi.

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Si je ne devais retenir qu'une idée, c'est que l'Etat ou l'Eglise ou une quelconque entité ne peuvent pas s'occuper du salut des âmes (ou la rectitude des pensées). Que cette liberté est inaliénable, et qu'une entité agissant à l'encontre de cette liberté et des droits les plus essentiels doit être anéantie (ce qui convenait à un révolutionnaire en herbe).

Tu n'as perçu aucune dissonance cognitive avec ce que tu croyais alors ?

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Pas que je me souvienne. Il défendait le contrat social, le droit à la révolution, ça me suffisait. L'aspect "propriété privée" me semblait non pertinent.

 

La dissonance, elle est empirique. Entre un discours me promettant des lendemains qui chantent et une réalité qui pue, il y a dissonance. C'est beaucoup plus efficace que les pures idées.

Par exemple, quand j'entends de la part de la "Vraie Gauche" que nous vivons une époque ultra-libérale avec une dérégulation massive du droit du travail, il y a dissonance avec ce que je vis au quotidien. Il y a un parfum de foutage de gueule. 

J'ai la certitude que c'est ce parfum de foutage de gueule qui m'a dégoûté du socialisme. Pas en lisant un livre, que de toute façon je lis nécessairement au travers de ma perception du monde. Si demain je constate que le communisme marche admirablement bien, je deviendrai probablement communiste, Althusser n'aura que peu à voir là-dedans.

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Pas que je me souvienne. Il défendait le contrat social, le droit à la révolution, ça me suffisait. L'aspect "propriété privée" me semblait non pertinent.

Pourtant la propriété privée me semble un concept central chez lui.

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La formation que l'on suit a-t-il une influence sur notre disposition vis-à-vis du libéralisme? En effet, j'ai remarqué que les juristes et les informaticiens étaient, en moyenne, plus sensibles à certaines questions relatives aux libertés.

Question intéressante.

Le truc c'est qu'il y a nécessairement un effet social à prendre en compte en plus de la formation elle-même. Par exemple les facs de Droit sont typiquement moins gauchistes (et donc moins de terrorisme intellectuel) que le reste, ce qui peut expliquer en partie pourquoi plus de libéraux s'y retrouvent.

Les informaticiens sont des geeks donc ils sont déjà habitués à penser en dehors des clous, ils ne craignent pas d'être marginalisés et ils sont sensibilisés aux idées libérales par la SF.

Dans les deux cas il y a aussi une sensibilisation au raisonnement logique, mais démêler les causes et les conséquences est un exercice difficile...

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Gio : La propriété privée est un concept central chez Locke, mais note que les new liberals du début du siècle insistait bcp plus sur l'aspect parlement plus prééminence du législatif que sur la propriété (ex : ce qu'en dit Bertrand Russell ou plus récemment Louis Hartz)

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Je dois être un cas unique, car je n'ai jamais vu un étudiant en art français de conviction libérale.

Sinon, pour ceux que ça intéresse, sur le site de l'INA on peut voir en entier l'émission d'Apostrophe avec Pierre Daix où il raconte (un peu) comment il est revenu du communisme : http://www.ina.fr/video/CPB76052383/les-communistes-francais-changent-ils-video.html

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Question intéressante.

Le truc c'est qu'il y a nécessairement un effet social à prendre en compte en plus de la formation elle-même. Par exemple les facs de Droit sont typiquement moins gauchistes (et donc moins de terrorisme intellectuel) que le reste, ce qui peut expliquer en partie pourquoi plus de libéraux s'y retrouvent.

Les informaticiens sont des geeks donc ils sont déjà habitués à penser en dehors des clous, ils ne craignent pas d'être marginalisés et ils sont sensibilisés aux idées libérales par la SF.

Dans les deux cas il y a aussi une sensibilisation au raisonnement logique, mais démêler les causes et les conséquences est un exercice difficile...

Effet do it yourself des geeks doit aussi jouer beaucoup.

Y a un bouquin sorti l'année dernière je crois qui s'appelait l'éthique du hacker que j'aimerai lire à ce sujet

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Pourtant la propriété privée me semble un concept central chez lui.

 

Pas chez moi, à l'époque. Le lire n'a pas modifié mon système de pensée. Tu as du mal à le comprendre, pourtant ça s'est passé ainsi. Je ne peux pas t'expliquer pourquoi il ne m'a pas convaincu à l'époque.

 

Question intéressante.

Le truc c'est qu'il y a nécessairement un effet social à prendre en compte en plus de la formation elle-même. Par exemple les facs de Droit sont typiquement moins gauchistes (et donc moins de terrorisme intellectuel) que le reste, ce qui peut expliquer en partie pourquoi plus de libéraux s'y retrouvent.

Les informaticiens sont des geeks donc ils sont déjà habitués à penser en dehors des clous, ils ne craignent pas d'être marginalisés et ils sont sensibilisés aux idées libérales par la SF.

Dans les deux cas il y a aussi une sensibilisation au raisonnement logique, mais démêler les causes et les conséquences est un exercice difficile...

 

L'aspect SF peut jouer, effectivement. Je n'avais pas pensé à l'éventuelle influence de la littérature SF (genre que j'adore, d'ailleurs).

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Pas chez moi, à l'époque. Le lire n'a pas modifié mon système de pensée. Tu as du mal à le comprendre, pourtant ça s'est passé ainsi. Je ne peux pas t'expliquer pourquoi il ne m'a pas convaincu à l'époque.

Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est au contraire pourquoi il t'a convaincu.

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Parce que j'étais déjà convaincu sur le point de faire la Révolution et de limiter le rôle de l'Eglise? Il n'est pas évident, 10 ans après, de retracer mes processus mentaux.

Le point central, c'est la réalité. Subir le RSI participe plus à te dégoûter du socialisme triomphant que 20 pamphlets. 

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Progressif, c'est bien pour ça que je ne te donne pas LE moment, LA situation qui m'a ouvert les yeux.

Lire les journaux te disant blanc, lire la loi qui te dit noir, écouter les politiciens et leurs promesses, observer sur le terrain les effets de leurs actions : la dissonance grandit, chaque jour, jusqu'à ce que tu ne puisses tout simplement plus adhérer à un système de valeurs, de pensée qui te paraissent faux, hypocrite, intolérant et avilissant. 

 

Une fois que tu ne te reconnais plus dans ce système de pensée, et que tu t'es débarrassé de tout biais cognitif, tu deviens libéral malgré toi. Tu veux juste qu'on te foute la paix.

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You may be asking, why didn't Gary Klein and I come up immediately with the idea [...]? And what did we think the answer could be? These are good questions because the contours of the solution were apparent from the beginning. [...] It is difficult to reconstruct what it was that took years, long hours of discussion, endless exchanges of drafts and hundreds of e-mails negociating over words, and more than once almost giving up. But this is what always happens when a project ends reasonably well: once you understand the main conclusion, it seems it was always obvious.

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A la fac j'étais baigné par la littérature d'auteurs comme Jean-Claude Michéa et entouré par des professeurs qui se réveillaient sûrement tous les matins avec l'Internationale Communiste. Sauf mon directeur de mémoire, qui m'a forcé à me mettre à la place des accusés lors d'une étude sur les effets de la politique de Menem (qualifiée de néolibérale) en Argentine. 

J'ai étudié le mouvement et ai découvert Hayek grâce au wikibéral. Et je n'ai pour l'instant pas trouvé mieux ailleurs. Merci d'ailleurs d'avoir mis un tel outil en ligne. 

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A la fac j'étais baigné par la littérature d'auteurs comme Jean-Claude Michéa et entouré par des professeurs qui se réveillaient sûrement tous les matins avec l'Internationale Communiste. Sauf mon directeur de mémoire, qui m'a forcé à me mettre à la place des accusés lors d'une étude sur les effets de la politique de Menem (qualifiée de néolibérale) en Argentine. 

J'ai étudié le mouvement et ai découvert Hayek grâce au wikibéral. Et je n'ai pour l'instant pas trouvé mieux ailleurs. Merci d'ailleurs d'avoir mis un tel outil en ligne. 

 

Encore un juriste ingénieur.

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