Aller au contenu

Macron : ministre, candidat, président... puis oMicron


Messages recommandés

@Rincevent: je nuancerais légèrement le propos de @Cortalus (parce qu'il est légèrement doloriste, et, interprété de façon un peu malveillante, on arrive vite à "vivement une bonne guerre pour ressouder tout ce petit monde"): ce qui forme un esprit de groupe (que le groupe soit une nation ou pas), c'est le fait de concourir ensemble à une entreprise signifiante, et pas la souffrance en elle-même. Les difficultés sont inhérentes à toute entreprise. Et les joies relatives au succès de toutes les étapes intermédiaires et de la réalisation ultime de l'entreprise unissent aussi.

 

Le sentiment national était plus fort en France après la guerre de cent ans ou après les deux guerres mondiales, mais pas uniquement à cause des malheurs subis en commun, la victoire joue aussi un rôle cohésif. La réussite donne envie d'appartenir au groupe à succès. Elle améliore la confiance en soi et dans les autres "soi-même", ce qui favorise la coopération sociale.

 

J'en veux pour preuve a contrario que l'Allemagne, après la même Première guerre mondiale, était au bord de la guerre civile (doublée de tendances sécessionnistes sur une base géographique plutôt qu'entre des factions révolutionnaires ou républicaines).

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
Il y a 2 heures, Mégille a dit :

On peut aussi constater qu'une croyance similaire existe au niveau des peuples. C'est en forçant les catalans à être espagnols qu'ils vont devenir copains-copains, c'est en forçant les européens à être tous bruxellois qu'ils vont êtres heureux et en paix...

Le problème de tous ces gens, c'est qu'ils sont trop riche pour expérimenter par eux même les joies de la vie en collocation.

 

C'est en effet une idée reçue qu'on retrouve à des multiples niveau, en particulier dans le domaine du logement et de l'urbanisme où elle est baptisée "mixité sociale".

 

Plus les individus ou les familles vivent dans la promiscuité, plus les probabilités de friction augmentent. Mais plus ces individus ou familles partagent des modes de vie proches plus ces probabilités de frictions diminuent. De là on devrait en déduire :

1. que l'urbanisme le moins défavorable à la diversité est l'habitat pavillonnaire le moins dense possible ;

2. que plus l'habitat est collectif et dense, plus l'homogénéité de la population limitera les tensions.

 

En pratique, les gens comprennent ça instinctivement : quand ils doivent se contenter d'un habitat collectif pour des raisons économiques, ils souhaitent avoir des voisins qui leur ressemblent le plus possible dans leur mode de vie.

 

Or, c'est exactement l'inverse que souhaitent les politiques : plus l'habitat est concentré, collectif, plus ils veulent de la "mixité sociale". L'idée, encore une foi, est que forcer les interactions entre des individus ou familles très différentes va développer la compréhension et la tolérance. C'est bien évidemment l'inverse qui se produit dans le logement social, où les élus peuvent grâce à la politique d'attribution mettre en œuvre leurs idées en décidant de l'endroit où vont vivre les gens selon leur profil. Résultat : on loge la famille turque dans le quartier marocain et la famille marocaine dans le quartier turc, parce que sinon "on va créer des ghettos", on place le couple avec jeunes enfants dans une résidence de vieux parce qu'il faut "faire de l'inter-générationnel", etc. Et la haine grandit, jusqu'à des explosions de violence parfois.

 

Il y a aussi souvent des idées similaires dans la politique de transport urbain. On va par exemple trouver des parcours biscornus pour faire passer la ligne qui dessert le quartier pavillonnaire huppé en plein milieu du "quartier prioritaire", afin que les gamins qui prennent le bus puissent "s'enrichir mutuellement de leur diversité". Et si la fréquentation des transports en communs diminue parmi les habitants du quartier pavillonnaire, on va faire des aménagements qui favoriseront la congestion de la voirie aux heures de pointe tout en privilégiant les bus : typiquement on réserve sur une 2x2 la moitié des voies aux transports en commun. En général, ce genre de saloperie n'incitera pas plus les gens à prendre les transports en communs, mais au moins les individus à l'origine du plan de déplacement urbain se consolent et s'endorment la conscience tranquille en sachant qu'il ont pourri la vie du bourgeois.

  • Yea 8
  • Post de référence 2
Lien vers le commentaire
il y a 15 minutes, Johnathan R. Razorback a dit :

@Rincevent: je nuancerais légèrement le propos de @Cortalus (parce qu'il est légèrement doloriste, et, interprété de façon un peu malveillante, on arrive vite à "vivement une bonne guerre pour ressouder tout ce petit monde"): ce qui forme un esprit de groupe (que le groupe soit une nation ou pas), c'est le fait de concourir ensemble à une entreprise signifiante, et pas la souffrance en elle-même. Les difficultés sont inhérentes à toute entreprise. Et les joies relatives au succès de toutes les étapes intermédiaires et de la réalisation ultime de l'entreprise unissent aussi.

 

Hum, j'ai parlé des "épreuves endurées ensemble", pas de souffrance. Le succès en groupe n'a pas de valeur s'il n'y a pas eu besoin d'un effort, donc d'une épreuve. Je maintiens mon choix de vocabulaire.

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
il y a 10 minutes, Cortalus a dit :

Plus les individus ou les familles vivent dans la promiscuité, plus les probabilités de friction augmentent. Mais plus ces individus ou familles partagent des modes de vie proches plus ces probabilités de frictions diminuent. De là on devrait en déduire :

1. que l'urbanisme le moins défavorable à la diversité est l'habitat pavillonnaire le moins dense possible ;

2. que plus l'habitat est collectif et dense, plus l'homogénéité de la population limitera les tensions.

 

En pratique, les gens comprennent ça instinctivement : quand ils doivent se contenter d'un habitat collectif pour des raisons économiques, ils souhaitent avoir des voisins qui leur ressemblent le plus possible dans leur mode de vie.

This, this, this mille fois. Pour le dire autrement : diversité + proximité = tensions.

 

il y a 10 minutes, Cortalus a dit :

C'est en effet une idée reçue qu'on retrouve à des multiples niveau, en particulier dans le domaine du logement et de l'urbanisme où elle est baptisée "mixité sociale". 

A chaque fois qu'on me parle de "mixité sociale", je vois ce genre d'images cauchemardesques :

 

5caQ5gE.jpg

 

Ou encore :

 

P2NUqOi.jpg%5B

 

  • Ancap 1
Lien vers le commentaire
Il y a 2 heures, Bézoukhov a dit :

C'était vachement utile jusqu'à au moins 1918 hein. Si on est passé vers une armée de métier, c'est pour des raisons très pragmatiques. Rien à voir avec de l'idéologie ou autre chose.

 

La levée en masse de 1793 n'est certainement pas exempte de soubassements idéologiques. La révolution française a posé les bases stratégiques, mais aussi idéologiques, de la guerre moderne : on passe de conflits dynastiques et familiaux réglés par des armées de métier et des mercenaires à des luttes justifiées par une conception de l'identité nationale et menées par un peuple enrôlé de force et gorgé de propagande. La levée en masse est une composante majeure de l'ensemble des épisodes proto-totalitaires qui caractérise la Terreur.

 

Bref, la révolution française a universalisé la guerre et le phénomène des conflits mondiaux découle au moins en partie de ce changement de paradigme idéologique et stratégique. C'est donc un contre-sens de justifier le service militaire par les conflits du XIXème et du XXème siècle : ceux-ci n'auraient pas eu la même forme, et on peut même argumenter qu'ils n'auraient peut-être pas eu lieu, sans l'invention française de la guerre nationale et de la conscription universelle.

 

Certes, les lois de la guerre sont telles que toutes les méthodes possibles d'obtenir un avantage sur l'ennemi finissent par être testées, et que tous les belligérants finissent par être obligés d'adopter ou de s'adapter aux innovations tactiques et technologiques qui changent la configuration du champ de bataille. On peut donc argumenter que si les français n'avaient pas posé les bases de la guerre totale, d'autres auraient fini par le faire. Mais l'histoire est écrite, et s'il y a bien un état qui ne peut pas se justifier d'avoir établi la conscription universelle parce que d'autres l'avaient inventé d'abord, c'est bien l'état français.

 

Je maintiens donc qu'il y a ici une mythologie à déconstruire. Car si les "intellectuels" français sont prompts à démolir le roman national, peu nombreux sont ceux qui ont bravé les dogmes attachés à la révolution.

  • Yea 2
Lien vers le commentaire
Il y a 3 heures, Cortalus a dit :

En pratique, les gens comprennent ça instinctivement : quand ils doivent se contenter d'un habitat collectif pour des raisons économiques, ils souhaitent avoir des voisins qui leur ressemblent le plus possible dans leur mode de vie.

 

Je connais des gens qui souhaite vivre dans une ferme collective avec justement que des gens qui leur ressemblent, il n'y a rien de mieux que le vivre-ensemble pour communautariser les gens.

Lien vers le commentaire
il y a une heure, Cortalus a dit :

La levée en masse est une composante majeure de l'ensemble des épisodes proto-totalitaires qui caractérise la Terreur.

 

Non. La levée en masse était non seulement antérieure à la Terreur, mais largement indépendante, le point commun entre les deux n'étant que le fait qu'il s'agit de réactions du pouvoir politique pour tenter d'éviter d'être renversé (mais pas par les mêmes).

 

On peut parfaitement contester la légitimité de la conscription sans galvauder la notion de totalitarisme en la plaquant n'importe où.

Plutôt qu'une préfiguration du 20ème siècle, il faut voir la levée masse comme une mesure à la fois pragmatique  (comme l'a dit @Bézoukhov, le contexte étant la supériorité démographique française), mais aussi idéologique comme tu le dis, sauf que le modèle des dirigeants de l'époque était l'image des romains de la République, peuple de citoyens en armes -et non un projet d'encadrement totalitaire ou même juste de militarisation de la société civile.

  • Yea 2
Lien vers le commentaire

Je ne sais pas si cet article a plus sa place ici que dans "Liberté d'expression" mais :

Citation

Nicole Belloubet s’attaquera-t-elle à la loi de 1881 ? Pour mieux réprimer la haine sur internet, la ministre de la Justice envisage de sortir l’injure raciale du texte qui régit la liberté de la presse, ce qui constituerait un « non sens » et une « grave menace » préviennent des avocats. [...]

« Depuis le début, ce gouvernement a montré qu’il considérait la liberté d’expression comme très secondaire », abonde Christophe Bigot, vice-président de l’Association des avocats praticiens du droit de la presse. « Sortir l’injure et la diffamation, c’est mettre à néant la loi sur la presse puisqu’elles représentent 90% du contentieux. C’est une abrogation », tempête-t-il.

https://www.nouvelobs.com/justice/20190618.OBS14554/haine-sur-internet-belloubet-envisage-de-reformer-la-loi-de-1881-sur-la-liberte-de-la-presse.html#Echobox=1560876295

 

il y a 1 minute, Johnathan R. Razorback a dit :

La levée en masse était non seulement antérieure à la Terreur, mais largement indépendante

Tu fais référence aux "presses" ? Système supprimé par Colbert. Les Milices ? On pouvait payer pour ne pas se faire enrôler. Quant au système de "classes" dans la Marine, avec tirage au sort, il ne fit pas long feu (en concurrence avec le recrutement des navires corsaires et de la flotte de commerce (où on ne s’amusait pas non plus : scorbut).) Du coup peux-tu préciser ce à quoi tu penses ?

Lien vers le commentaire
il y a 1 minute, Johnathan R. Razorback a dit :

 

Non. La levée en masse était non seulement antérieure à la Terreur, mais largement indépendante, le point commun entre les deux n'étant que le fait qu'il s'agit de réactions du pouvoir politique pour tenter d'éviter d'être renversé (mais pas par les mêmes).

 

On peut parfaitement contester la légitimité de la conscription sans galvauder la notion de totalitarisme en la plaquant n'importe où.

Plutôt qu'une préfiguration du 20ème siècle, il faut voir la levée masse comme une mesure à la fois pragmatique  (comme l'a dit @Bézoukhov, le contexte étant la supériorité démographique française), mais aussi idéologique comme tu le dis, sauf que le modèle des dirigeants de l'époque était l'image des romains de la République, peuple de citoyens en armes -et non un projet d'encadrement totalitaire ou même juste de militarisation de la société civile. 

 

Ne me fais pas dire ce que je n'ai pas dit : je ne parle pas de totalitarisme, mais de phénomènes proto-totalitaires.

 

Tu te places du point de vue de la réaction pragmatique des politiciens français de l'époque face à des menaces extérieures. Bien sûr qu'il y a une rationalité militaire. J'examine quant à moi la postérité de ce phénomène. Je parle de la généalogie des idées et des représentations mentales de Lénine et consorts. D'où le "proto".

 

L'universalité de la conscription est un caractère fondamental qui n'a pas d'équivalent dans l'antiquité, dont les peuples n'avaient pas la même conception de la citoyenneté. Il y a plus de rapport entre le citoyen qui prend les armes des cités antiques et les chevaliers du moyen-âge qu'avec le conscrit de 1793. Bien sûr que Robespierre et alii avaient un imaginaire marqué par la république romaine. Mais après eux viendront ceux dont l'imaginaire a été marqué par Robespierre et alii.

 

Après, on est fondamentalement en désaccord sur la chronologie. La levée en masse avant la Terreur ? J'imagine qu'on n'a pas la même idée du début de la Terreur. Je fais partie de ceux qui considèrent que les massacres de septembre 1792 en sont le début.

Lien vers le commentaire
Il y a 1 heure, Cortalus a dit :

Je fais partie de ceux qui considèrent que les massacres de septembre 1792 en sont le début.

 

Et puis quoi encore ?

Les massacres de septembre 1792 sont un phénomène spontané de panique / vengeance populaire, une réaction à l'approche perçue comme imminente des armées étrangères.

 

La Terreur est une politique d'Etat, légitimée précisément par l'idée qu'il faut substituer à la violence populaire celle plus régulée de l'Etat (d'où le mot célèbre de Danton: "Soyons terrible pour éviter au peuple de l'être").

Tu places donc dans la même catégorie des phénomènes non seulement distincts mais contradictoires !

Lien vers le commentaire
Il y a 1 heure, Johnathan R. Razorback a dit :

 

Et puis quoi encore ?

Les massacres de septembre 1792 sont un phénomène spontané de panique / vengeance populaire, une réaction à l'approche perçue comme imminente des armées étrangères.

 

La Terreur est une politique d'Etat, légitimée précisément par l'idée qu'il faut substituer à la violence populaire celle plus régulée de l'Etat (d'où le mot célèbre de Danton: "Soyons terrible pour éviter au peuple de l'être").

Tu places donc dans la même catégorie des phénomènes non seulement distincts mais contradictoires !

 

Je pense que nous sommes tous les deux capables de rester courtois dans l'expression de notre désaccord. Non ? Je ferais l'effort de mon côté, en tout cas.

 

Tu te rattaches à l'interprétation qui est, je le reconnais bien volontiers, celle de l'historiographie la plus orthodoxe. Celle-ci se base notamment sur une conception essentiellement juridique du point de passage dans l'exceptionnalité de la Terreur. D'autres retiendront plutôt, d'un point de vue plus symbolique, la condamnation à mort de Louis XVI comme le tournant (je pense notamment au dernier libre de Sloterdijk, pour une référence récente).

 

Quand à moi, je défends simplement l'approche psycho-politique. La Terreur ne surgit pas dans le vide. Elle est sur le plan des affects le résultat d'une généralisation et d'une intensification de la paranoïa : l'ennemi est partout, c'est l'étranger qui franchit nos frontières, c'est le contre-révolutionnaire qui ourdit dans l'ombre, c'est l'espion qui se cache, etc. Les massacres de septembre sont la première expression massive de cette contagion paranoïaque. Rappelons au passage que c'est l'un des cas les plus frappants étudiés par Gustave Le Bon dans la Psychologie des foules.

 

À cet égard, on peut noter que l'origine plus ou moins spontanée de cette éruption de violence est justement l'un des éléments qui justifient de ne pas traiter la Terreur française comme une manifestation du totalitarisme au sens classique. Le pouvoir est ici suiveur, il récupère le mouvement par peur d'en perdre le contrôle. On dirait aujourd'hui que les dirigeants sont débordés par leur base. Dans le cas de la Terreur rouge, au contraire, Lénine et ses sbires sont à la manœuvre, il y a un dessein politique (que l'on considère que les bolchéviques ont simplement encouragé la Terreur rouge ou qu'ils en sont les responsables directs). C'est justement parce qu'ils sont inspirés par leurs héros révolutionnaires français qu'ils sont dès le début convaincus de la nécessité politique de la terreur. Bref, la Terreur française est une manifestation de la paranoïa de la contre-révolution d'origine essentiellement populaire, qui sera encadrée et structurée par un pouvoir craignant d'être débordé. La Terreur rouge est une manifestation de la paranoïa de la contre-révolution contrôlée ou encouragée depuis le début par les bolchéviques. Mais même quand elle prend la forme d'une "politique d'état", pour reprendre tes termes, la terreur a toujours besoin de la mentalité de la foule. C'est la condition du sentiment d'irresponsabilité de ses particules individuelles, indispensables pour maintenir la mobilisation des bourreaux. Toute "politique d'état" qu'elle soit, la Terreur ne peut prendre que sur un terreau psycho-politique propice. Et le niveau de contrôle du personnel politique sur le mouvement de Terreur est tout relatif. En pratique, les dirigeants se feront souvent engloutir par le monstre qu'ils auront tenté de dompter. A cet égard, les évènements politico-légaux qui ont lieu durant la terreur sont presque des minuties par rapport à la thermo-dynamique interne du mouvement.

 

En conclusion, la paranoïa inspirée par la menace réelle ou supposée de la contre-révolution est bien l'affect primordial qui explique l'émergence et l'intensité de la terreur lors de la révolution française puis ultérieurement dans les régimes totalitaires. Même quand les systèmes communistes passeront dans une phase de stabilisation, ils en garderont les traces et la paranoïa demeurera l'un de leurs traits les plus marquants. Paranoïa des dirigeants comme du peuple, d'ailleurs. Pour les manifestations les plus extrêmes de cette psycho-politique, on se tournera bien sûr vers la Chine maoïste et le Kampuchea démocratique.
 

Lien vers le commentaire
Il y a 9 heures, Cortalus a dit :

La révolution française a posé les bases stratégiques, mais aussi idéologiques, de la guerre moderne

 

Tous les éléments se sont mis en place au milieu du XVIIIeme siècle. La conscription, ce sont les prussiens qui l'inventent à partir des années 1730 (toujours très forts pour découvrir la prochaine innovation militaire les prussiens). La guerre mondiale, c'est une conséquence de la mondialisation qu'on voit pointer son nez pendant la Guerre de 7 ans.

 

La Révolution ne fait que révéler de manière fracassante des idées politiques et des phénomènes sociaux qui existaient déjà ; sinon, comment imaginer que tout se mette en place à une telle vitesse ? Le méchant nationalisme ne naît pas en 1789, pouf !, comme ça.

 

L'idéologie sous jacente à la conscription française vient de l'an II, mais elle est spécifiquement française. Les allemands n'auront pas ce type de conscription démocratique et égalitaire, sans corps d'élite officiel. Et elle a disparu assez tôt parce que ceux qui n'ont pas compris qu'elle avait joué dans la défaite de 40 ont pu s'appercevoir qu'elle était bien morte en Algérie.

Lien vers le commentaire
Il y a 6 heures, Cortalus a dit :

 

 

 

Quand à moi, je défends simplement l'approche psycho-politique. La Terreur ne surgit pas dans le vide. Elle est sur le plan des affects le résultat d'une généralisation et d'une intensification de la paranoïa : l'ennemi est partout, c'est l'étranger qui franchit nos frontières, c'est le contre-révolutionnaire qui ourdit dans l'ombre, c'est l'espion qui se cache, etc. Les massacres de septembre sont la première expression massive de cette contagion paranoïaque. Rappelons au passage que c'est l'un des cas les plus frappants étudiés par Gustave Le Bon dans la Psychologie des foules.

 

 

 

La "contagion paranoïaque" apparait dès 1789.

Lien vers le commentaire
Il y a 3 heures, Bézoukhov a dit :

 

 

 

L'idéologie sous jacente à la conscription française vient de l'an II, mais elle est spécifiquement française. Les allemands n'auront pas ce type de conscription démocratique et égalitaire, sans corps d'élite officiel. Et elle a disparu assez tôt parce que ceux qui n'ont pas compris qu'elle avait joué dans la défaite de 40 ont pu s'appercevoir qu'elle était bien morte en Algérie.

Très sincèrement, je ne vois pas le lien avec la défaite de 40. Ni avec l'Algérie. Il va falloir argumenter a minima.

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
Il y a 5 heures, Bézoukhov a dit :

 

Tous les éléments se sont mis en place au milieu du XVIIIeme siècle. La conscription, ce sont les prussiens qui l'inventent à partir des années 1730 (toujours très forts pour découvrir la prochaine innovation militaire les prussiens). La guerre mondiale, c'est une conséquence de la mondialisation qu'on voit pointer son nez pendant la Guerre de 7 ans.

 

La Révolution ne fait que révéler de manière fracassante des idées politiques et des phénomènes sociaux qui existaient déjà ; sinon, comment imaginer que tout se mette en place à une telle vitesse ? Le méchant nationalisme ne naît pas en 1789, pouf !, comme ça.

 

L'idéologie sous jacente à la conscription française vient de l'an II, mais elle est spécifiquement française. Les allemands n'auront pas ce type de conscription démocratique et égalitaire, sans corps d'élite officiel. Et elle a disparu assez tôt parce que ceux qui n'ont pas compris qu'elle avait joué dans la défaite de 40 ont pu s'appercevoir qu'elle était bien morte en Algérie.

 

Quand je dis que la révolution a posé les bases stratégiques de la guerre moderne, je ne pense pas qu'à la méthode de mobilisation des troupes. Il y a aussi la mobilité et la manœuvre napoléonienne.

 

C'est vrai que j'ai ignoré la conscription prusienne. En fait, je ne lui donne pas le même sens parce qu'elle s'inscrit toujours dans un contexte traditionnel de conflits dynastiques et familiaux, et pas dans l'idéologie nationale et démocratique. Mais du point de vue militaire, l'idée n'était en effet pas si neuve que ça en 1793. Ce qui me frappe, c'est que la grande révolution démocratique censée renverser les tyrans finit par enrôler de force les paysans comme le roi soldat le plus caricatural. Un cas de "il y a la bonne conscription, et il y a la mauvaise conscription" ?

Lien vers le commentaire
Il y a 2 heures, Dardanus a dit :

 

La "contagion paranoïaque" apparait dès 1789.

 

Ce qui ne contredit en rien mon propos, à savoir que son intensification et sa généralisation aboutissent à une première expression massive lors des massacres de septembre.

Lien vers le commentaire
il y a une heure, Cortalus a dit :

 

Ce qui ne contredit en rien mon propos, à savoir que son intensification et sa généralisation aboutissent à une première expression massive lors des massacres de septembre.

Je ne cherchais pas à contredire, plutôt à confirmer.

Lien vers le commentaire
Il y a 5 heures, Dardanus a dit :

Très sincèrement, je ne vois pas le lien avec la défaite de 40. Ni avec l'Algérie. Il va falloir argumenter a minima.

 

Tout simplement l'idée d'armée de métier n'apparaît pas magiquement dans les années 90.

Les évolutions de l'art de la guerre posent la question plus tôt. Dans les guerres de décolonisation, la motivation des conscrits est forcément limitée. En 1940, la notion d'armée de métier a émergé un peut avant la guerre non ?

 

Il y a 2 heures, Cortalus a dit :

Il y a aussi la mobilité et la manœuvre napoléonienne.

 

Qui est rendue possible par des réformes antérieures, par exemple celles de Gribeauval.

 

Il y a 3 heures, Cortalus a dit :

En fait, je ne lui donne pas le même sens parce qu'elle s'inscrit toujours dans un contexte traditionnel de conflits dynastiques et familiaux, et pas dans l'idéologie nationale et démocratique

 

Et la Révolution américaine, c'est quoi ? Une jacquerie fiscale traditionnelle et dynastique ?

 

La Révolution française a inventé l'idéologie mais ça ne veut pas dire que tous les éléments de modernité qu'elle révèle lui sont nécessairement liés. Elle est aussi dans la continuité de ce qui lui a précédé. La Guerre de Sept ans n'a presque que des casus belli liés à la notion de puissance politique ; ce n'est pas une guerre de religion, ni une guerre dynastique.

  • Yea 1
Lien vers le commentaire

Je ne vois pas toujours pas le rapport avec la défaite de 40. La seconde guerre mondiale n'a pas été menée par des armées de métier quel que soit le pays. Même les Américains ont du faire appel à la conscription.

L'Indochine, faite sans les conscrits, a été une défaite. En Algérie, les Français ont toujours surclassé leurs adversaires sur le plan militaire.

Mais le problème était politique.

Et je ne vois pas en quoi la professionnalisation américaine a fait ses preuves en Irak et en Afghanistan par exemple.

Lien vers le commentaire
il y a 25 minutes, Bézoukhov a dit :

 

Tout simplement l'idée d'armée de métier n'apparaît pas magiquement dans les années 90.

Les évolutions de l'art de la guerre posent la question plus tôt. Dans les guerres de décolonisation, la motivation des conscrits est forcément limitée. En 1940, la notion d'armée de métier a émergé un peut avant la guerre non ?

 

 

Qui est rendue possible par des réformes antérieures, par exemple celles de Gribeauval.

 

 

Et la Révolution américaine, c'est quoi ? Une jacquerie fiscale traditionnelle et dynastique ?

 

La Révolution française a inventé l'idéologie mais ça ne veut pas dire que tous les éléments de modernité qu'elle révèle lui sont nécessairement liés. Elle est aussi dans la continuité de ce qui lui a précédé. La Guerre de Sept ans n'a presque que des casus belli liés à la notion de puissance politique ; ce n'est pas une guerre de religion, ni une guerre dynastique.

 

Tout cela est vrai, bien sûr. Mais la généalogie est sans fin en histoire. Quand on s'attache à l'analyse du caractère original d'un phénomène historique, c'est parce qu'il conjugue dans une combinaison inédite différents sous-phénomènes qui ont tous quant à eux leur propre généalogie de précurseurs. Et la révolution française est bien un de ces évènements saillants. On peut isoler chacune de ses composantes et dire "ce n'est pas nouveau", "ça vient de loin", etc. Et pourtant elle constitue une rupture fondamentale.

 

En ce qui concerne les insurgents de la révolution américaine, je ne vois pas trop leur rapport avec les conscrits de 1793. Sauf erreur de ma part, ce sont des volontaires, et il n'y a pas de sentiment national spécifiquement américain pré-existant. A la limite, je trouve qu'ils ont plus de caractères communs avec les vendéens, dans le sens où ce sont des habitants d'un territoire périphérique qui luttent contre un pouvoir colonial. Parce que quitte à lancer une nouvelle polémique, je considère qu'à bien des égards la révolution française inaugure une ère de colonisation des provinces françaises par l'état parisien, ère qui n'est pas prête de s'achever si l'on en juge par l'esprit jacobin toujours profondément enraciné dans nos institutions. Quoi qu'il en soit, les épisodes de révoltes paysannes et de rébellions populaires ne sont que des éléments périphériques et non contradictoires par rapport à la problématique que j'évoque, à savoir celle de la transformation de l'armée du roi en armée du peuple, qui est une manifestation symbolique frappante de ce que j'appelle le passage des guerres dynastiques et familiales aux guerres nationales. C'est évidemment une tendance générale et on pourra bien sûr trouver quantités de contre-exemples et d'exceptions. Mais si on refuse toute élaboration de généralités sur la base d'un axe de lecture des évènements historiques, aucun discours synthétique sur l'histoire n'est possible, uniquement la documentation atomisée d'une succession chronologique d'évènements.

Lien vers le commentaire
il y a 55 minutes, Cortalus a dit :

On peut isoler chacune de ses composantes et dire "ce n'est pas nouveau", "ça vient de loin", etc. Et pourtant elle constitue une rupture fondamentale.

Biais rétrospectif.

 

il y a 55 minutes, Cortalus a dit :

Mais si on refuse toute élaboration de généralités sur la base d'un axe de lecture des évènements historiques

Ce n'est pas comme ça qu'on fait de l'histoire. Tu pars d'une thèse et tu cherches les sources / faits qui confirment ton intuition / ton à priori, et tu exclus les autres, présentés ici par tes interlocuteurs. C'est pas bueno, problème de méthode. (édit : je ne sais pas qui a raison ici, je m'en contrefous je peux pas blairer la moderne).

 

il y a 55 minutes, Cortalus a dit :

uniquement la documentation atomisée d'une succession chronologique d'évènements.

Mais l'histoire est uniquement une succession chronologique d'événements, rien de plus, à cause de l'effet papillon. Tu es à mi-chemin entre le biais rétrospectif et l'illusion biographique puissance 1000.

Lien vers le commentaire
Il y a 1 heure, Dardanus a dit :

Je ne vois pas toujours pas le rapport avec la défaite de 40. La seconde guerre mondiale n'a pas été menée par des armées de métier quel que soit le pays. Même les Américains ont du faire appel à la conscription. 

 

Ce que je dis c'est qu'avant 40, on commence à ressentir le besoin d'avoir une partie notable de l'armée qui est professionnelle, du fait de la technicité des nouvelles armes, et du temps que la mobilisation met à se faire en vis à vis de la vitesse des troupes motorisées. Cette professionnalisation d'une partie l'armée est à rebours de la tradition française de la conscription, et surtout des craintes de la gauche vis à vis d'une armée qui serait autre chose que le peuple en armes.

 

Il y a 1 heure, Dardanus a dit :

L'Indochine, faite sans les conscrits, a été une défaite. En Algérie, les Français ont toujours surclassé leurs adversaires sur le plan militaire. 

 

Pour l'Algérie, l'intervention du contingent est justement, selon moi, une des causes de la défaite politique. C'est en envoyant des gens qui n'en avaient que foutre de l'Algérie là-bas que la légitimité de l'intervention a été minée.

 

Tout ça, ce sont des éléments qui dessinent de nouveaux types d'opérations qui viennent nuancer l'importance des armées de masse, sans les disqualifier dans certaines situations.

 

Il y a 1 heure, Dardanus a dit :

Et je ne vois pas en quoi la professionnalisation américaine a fait ses preuves en Irak et en Afghanistan par exemple.

 

Parce que sans professionnalisation, ces opérations sont impossibles. C'est ce dont les français se rendent compte lors de la première guerre d'Irak.

 

Il y a 1 heure, Cortalus a dit :

la problématique que j'évoque, à savoir celle de la transformation de l'armée du roi en armée du peuple, qui est une manifestation symbolique frappante de ce que j'appelle le passage des guerres dynastiques et familiales aux guerres nationales.

 

Déjà, entre les guerres dynastiques et familiales, c'est à dire l'apogée de la féodalité, et les guerres nationales, il y a les guerres de religion. Les véritables conflits dynastiques, c'est au Moyen-Âge ; le Prince de Machiavel, des années avant la Révolution, n'a pas grand chose de dynastique. La guerre nationale qui apparaît petit à petit, c'est une conséquence de la solution qui avait été trouvée aux guerres de religion avec la paix de Westphalie.

 

Il y a 1 heure, Cortalus a dit :

Mais si on refuse toute élaboration de généralités sur la base d'un axe de lecture des évènements historiques, aucun discours synthétique sur l'histoire n'est possible, uniquement la documentation atomisée d'une succession chronologique d'évènements. 

 

Il y a deux grands écueils en historiographie :

  • Voir des continuités partout, ie. le haut moyen-âge est indifférentiable de l'antiquité tardive ;
  • Tout faire porter à des évènements symboliques, ie. la déposition de l'Empereur est un évènement qui change tout.

Pour distinguer, il faut se rendre compte que les idées se répandent et s'inscrivent assez lentement dans les esprits, et qu'un évènement peut soit révéler une idée qui couvait (la Nation), soit faire émerger une idée nouvelle qui se développera plus tard (l'idéologie). Et la Révolution française est tellement large et complexe qu'elle mélange de nombreuses typologies d'évènements.

 

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
Il y a 1 heure, Wayto a dit :

Biais rétrospectif.

 

Ce n'est pas comme ça qu'on fait de l'histoire. Tu pars d'une thèse et tu cherches les sources / faits qui confirment ton intuition / ton à priori, et tu exclus les autres, présentés ici par tes interlocuteurs. C'est pas bueno, problème de méthode. (édit : je ne sais pas qui a raison ici, je m'en contrefous je peux pas blairer la moderne).

 

Mais l'histoire est uniquement une succession chronologique d'événements, rien de plus, à cause de l'effet papillon. Tu es à mi-chemin entre le biais rétrospectif et l'illusion biographique puissance 1000.

 

Ah oui quand même. Penser que la révolution française est une rupture, quelle idée saugrenue n'est-ce-pas.

 

Merci. J'imagine que tu as dû te retenir très fort pour que ton commentaire soit si peu insultant et condescendant. Le petit "puissance 1000" est une délicate attention qui encourage la poursuite de la conversation sur les bases d'une saine cordialité. Très constructif.

Lien vers le commentaire
Il y a 9 heures, Dardanus a dit :

La "contagion paranoïaque" apparait dès 1789.

It's not a bug, it's a feature. C'est quasiment une caractéristique naturelle de certaines sociétés ; que ce soit les démocraties issues d'une révolution, si j'en crois à la fois Furet pour la France, et Jesse Walker pour les USA (il a d'ailleurs pas mal écrit sur le sujet pour Reason) ; mais aussi un bon nombre de sociétés primitives pacifiques, selon David Graeber.

Lien vers le commentaire

Créer un compte ou se connecter pour commenter

Vous devez être membre afin de pouvoir déposer un commentaire

Créer un compte

Créez un compte sur notre communauté. C’est facile !

Créer un nouveau compte

Se connecter

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous ici.

Connectez-vous maintenant
×
×
  • Créer...