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Éthique et tac


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La présente position déontologique n'empêche pas du tout de tenir en même temps la position soi-disant conséquentialiste, l'inverse n'est pas vrai. Je dis soi-disant parce que le conséquentialisme est normatif et tu le réduis ici à une position purement positive.


Ça dépend de quel conséquentialisme on parle.

Le conséquentialisme anarcho-capitaliste de David Friedman affirme par exemple que le marché produira les lois, tandis que celui basé sur les droits naturels fait découler les lois de ces droits (c'est-à-dire qu'il suppose implicitement que les législateurs respecteront cette conception philosophique). Un tel conséquentialisme n'est en fait pas éthique ou moral à proprement parler.
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Principalement la 3 en ce qu'elle n'est pas une éthique qui "pré"-juge. La 1 peut sembler séduisante (sur le mode libertés formelles vs libertés réelles)  mais souffre de cet a priori nécessairement inadapté pour interpréter la vie (il y a toujours des circonstances imprévues). Quant à la 2 elle n'est pas opérante pour quelqu'un qui n'est pas Dieu : jusqu'où délimiter les conséquence de nos actions est déjà suffisamment complexe alors pour en plus juger du bien de ces actions c'est une autre histoire.

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il y a 13 minutes, Turgot a dit :

 


Ça dépend de quel conséquentialisme on parle.

Le conséquentialisme anarcho-capitaliste de David Friedman affirme par exemple que le marché produira les lois, tandis que celui basé sur les droits naturels fait découler les lois de ces droits (c'est-à-dire qu'il suppose implicitement que les législateurs respecteront cette conception philosophique). Un tel conséquentialisme n'est en fait pas éthique ou moral à proprement parler.

 

C'est bien pour cela que j'ai utilisé le terme normatif plutôt qu'éthique ou moral. La loi et le droit sont eux aussi normatifs. Quand tu dis qu'un moyen n'est pas efficace pour atteindre une fin donnée, ce n'est pas normatif : tu énonces là une proposition positive avec laquelle déontologues et vertueux peuvent parfaitement être d'accord. Le thème de cette discussion, c'est "qu'est-ce qui fait qu'une action est bonne/souhaitable/positive/punissable/etc.. ?" ; si tu veux parler sociologie ou économie, ce n'est pas ici qu'il faut le faire, et si tu considères que mettre en oeuvre un moyen inefficace ou contre-productif est immoral ou devrait être interdit, alors c'est une position déontologique ou vertueuse.

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il y a 13 minutes, Johnathan R. Razorback a dit :

Ce qui important en termes d'histoire des idées, c'est de comprendre l'éthique de la vertu comme une réaction à la domination du conséquentialisme de type utilitariste, pour lequel la réalisation d'un but moral n'implique pas un agent lui-même moral en quelque façon:

L'éthique des vertus n'est pas une réaction aux deux autres écoles, puisqu'elle leur préexistait de plusieurs siècles. C'était la forme dominante de l'éthique antique, spécialement chez les Grecs.

 

En revanche, les deux autres écoles ont échoué dans de telles impasses que les années 60 et 70 ont abouti à un regain d'intérêt, complètement mérité à mon avis, pour l'éthique de la vertu, sous les influences indépendantes de Rand et d'Anscombe.

  • Yea 1
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il y a 25 minutes, Rincevent a dit :

L'éthique des vertus n'est pas une réaction aux deux autres écoles, puisqu'elle leur préexistait de plusieurs siècles. C'était la forme dominante de l'éthique antique, spécialement chez les Grecs.

 

Oui, oui, tu gioues sur les mots. L'éthique des vertus est un courant de la philosophie morale contemporaine qui appelle à une ressaisie de la pensée morale des Anciens, qui n'appelaient pas eux-mêmes ce qu'ils faisaient ou leurs écoles "éthiques des vertus".

 

Rigoureusement parlant, une partie de son contenu ou de ses propositions lui préexistaient, mais le courant est forcément différent de cela, puisqu'il s'inscrit dans un contexte historique différent, avec un panorama différents d'alliés ou d'adversaires, etc. On peut donc parler d'un courant ou d'une école, tout comme il y eut un courant matérialiste au sein les Lumières françaises du 18ème, alors même que le matérialisme lui préexistait dans l'antiquité gréco-romaine.

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il y a 33 minutes, Rincevent a dit :

sous les influences indépendantes de Rand et d'Anscombe.

 

Vu la singularité de la position (extra-académique) de Rand, je ne la rattacherais pas à ce courant intellectuel (académique). Mieux vaudrait parler de deux formes de néo-aristotélismes. Il y en a d'autres.

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il y a 28 minutes, Johnathan R. Razorback a dit :

Oui, oui, tu gioues sur les mots. L'éthique des vertus est un courant de la philosophie morale contemporaine qui appelle à une ressaisie de la pensée morale des Anciens, qui n'appelaient pas eux-mêmes ce qu'ils faisaient ou leurs écoles "éthiques des vertus".

Je ne joue pas sur les mots. Seulement, tu traites le sujet comne le ferait un spécialiste de philosophie, alors que j'essaie de me placer dans la position d'un disciple de philosophe.

 

(Et le matérialisme antique était bien un matérialisme quand bien même le mot n'existait pas encore)

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4 hours ago, Bisounours said:

@Lancelot je suis pas très douée en concept et toute cette sorte de choses, mais pour le 2 et le 3, c'est un peu comme se poser la question de savoir si un acte x est moral dès l'instant où il apporte un bienfait incontestable ?

C'est la 2. Mais on peut trouver des formes stupides et moins stupides pour les trois positions.

 

2 hours ago, Rincevent said:

même si je la trouve fort mal retranscrite par Lancelot

Wah l'autre eh. Ma retranscription vient du fait que j'en suis arrivé au même point que @Johnathan R. Razorback : l'éthique déontologique insiste sur l'action et l'éthique téléologique sur la conséquence de l'action, les deux évacuent l'acteur. L'éthique de la vertu fait le contraire en insistant sur la motivation de l'action.

 

Sinon puisqu'on parle de Rand, question à 100 euros : est-ce que Nietzsche défend une éthique de la vertu ? :mrgreen:

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Il y a 5 heures, Lancelot a dit :

En enlevant les courants marginaux on se retrouve à peu près avec trois gros courants que je simplifie outrageusement :

  • l'éthique déontologique "une action est morale dans la mesure où elle respecte un corpus de règles morales" (et on s'engueule pour savoir quelles sont les bonnes règles)
  • l'éthique téléologique "une action est morale dans la mesure où elle a des conséquences positives" (et on s'engueule pour savoir comment définir une conséquence positive)
  • l'éthique des vertus "une action est morale dans la mesure où elle a été faite pour de bonnes raisons" (et on s'engueule pour savoir quelles sont les bonnes motivations)

 

Mon problème est que je pourrais défendre les trois selon le contexte. Je me doute qu'il y en a ici qui ont un avis péremptoire, où vous situez-vous et pourquoi ?

 

Formulé ainsi, la position de philosophie morale vers laquelle j'incline est compatible avec ces trois courants ; j'ai donc tendance à penser que ce sont des clivages surfaits et que les vraies oppositions se jouent ailleurs.

 

Je soutiens une forme de réalisme moral déterministe, égoïste et rationaliste* (je préfère parler d' https://fr.wikipedia.org/wiki/Eudémonisme plutôt que d'égoïsme rationnel, mais ça revient au même), avec une branche proprement morale, universel et négative ("Une norme est moralement bonne/légitime/appropriée lorsque sa non-transgression est une condition nécessaire du bonheur de l'agent"), et une branche éthique, particulière et positive ("Une norme est éthiquement bonne/légitime/appropriée lorsque son respect rapproche l'agent du bonheur").

 

On peut donc considérer que c'est un genre de conséquentialisme (il faut tester expérimentalement les normes et constater leurs effets pour savoir si elles sont légitimes ou pas), mais une fois les normes dégagées de l'observation et du raisonnement, on peut les fixer en un "corpus de règles connaissables à l'avance". Mais elles ne sont pas connaissables a priori (sauf à avoir a priori une connaissance exhaustive de la nature humaine, ce que les platoniciens croient avoir sans le savoir du fait de la contemplation des Idées avant la chute dans la matière...). Il est possible que suivre des normes morales impliquent des vertus morales, et c'est encore plus probable pour les règles éthiques.

 

*Quelqu'un pourrait me faire remarquer: tu es juste objectiviste. Mais en fait il n'est pas certain qu'une philosophie morale de ce genre soit solidaire d'une métaphysique (et d'une anthropologie philosophie) telle(s) que celle(s) de Rand. J'éviterais donc de me dire objectiviste jusqu'à atteindre un début de convictions en la matière.

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il y a 1 minute, Lancelot a dit :

L'éthique de la vertu fait le contraire en insistant sur la motivation de l'action.

Pas tant sur la motivation de l'action (because l'enfer était déjà notoirement pavé de bonnes intentions dans l'Antiquité), que sur l'acteur lui-même. 

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il y a 13 minutes, Lancelot a dit :

Sinon puisqu'on parle de Rand, question à 100 euros : est-ce que Nietzsche défend une éthique de la vertu ? :mrgreen:

 

Nietzsche est intéressant pour approcher la morale de façon métaéthique ("quelle est la nature de la morale/des énoncés moraux ?"), ou "sociologique" ("quelle société, et quel groupe, et quel individu, et quel dosage d'affects* chez un individu, engendre telle pensée morale ?") -Marx aussi d'ailleurs, avec une méthode différente. Mais il est tout sauf évident que Nietzsche ait une éthique normative. Ou plutôt, tout sauf évident que Nietzsche ait des arguments pour fonder sa préférence pour une éthique normative donnée.

 

*On peut d'ailleurs se demander si Nietzsche ne tire pas une conclusion ontologique de sa méthode généalogique, conclusion implicite en faveur de l'émotivisme: https://fr.wikipedia.org/wiki/Émotivisme 

Et la même question vaut pour Spinoza, à qui Nietzsche doit beaucoup.

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il y a 23 minutes, Johnathan R. Razorback a dit :

On peut donc considérer que c'est un genre de conséquentialisme (il faut tester expérimentalement les normes et constater leurs effets pour savoir si elles sont légitimes ou pas), mais une fois les normes dégagées de l'observation et du raisonnement, on peut les fixer en un "corpus de règles connaissables à l'avance". Mais elles ne sont pas connaissables a priori [...]

Tu m'as l'air de confondre conséquentialisme et empirisme. Au mieux, le conséquentialiste dit qu'il faut forcément prendre en compte les conséquences d'une action pour en juger la valeur, au pire il dit qu'il ne faut prendre en compte que ses conséquences (de même qu'un déontologisme fort serait de ne jamais prendre en compte les conséquences et qu'un déontologisme faible serait ne ne pas forcément les prendre en compte).

En tout cas je ne considère pas non plus qu'il soit possible de produire une ethique a priori (à moins de considérer qu'il n'y a de Salut que dans le lambda-calcul mais c'est réservé au Surhomme).

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Il y a 4 heures, Turgot a dit :

Friedman prend deux exemples extrêmes.

Le premier. Un fou furieux arrive au milieu d'une foule et tire dans le tas. Je sais que je peux l'arrêter en m'introduisant dans la propriété d'une personne et en saisissant son arme, ce qui me permet d'arrêter le fou furieux. En faisant cela je viole les droits d'une personne, mais les conséquences de ce viol sont bonnes (j'empêche un fou furieux de faire un massacre).

Le deuxième. Un astéroïde se dirige vers la Terre et menace de tout détruire. Il se trouve que j'ai une solution et que pour la mettre en œuvre je dois voler un dollar à mon voisin. Même chose que pour le premier exemple. Je viole les droits d'une personne mais les conséquences de cette action sont bonnes (la terre entière est sauvée).

 

1): On ne peut pas savoir à l'avance si les conséquences seront si bonnes que ça (tu vas peut-être rater ton coup et tuer un innocent, avant de te faire toi-même neutraliser par le forcené). Le choix est donc entre un mal (modéré) certain (violation de propriété et vol), et un effet positif douteux. C'est suffisant pour ne pas le faire. Dégage et appelle les flics. Ou si tu veux vraiment intervenir, trouve autre chose.

 

Je dis un effet positif douteux et non un bien, car le bien de l'agent à intervenir n'est pas évident (à moins qu'on rajoute des éléments dans le scénario: par exemple, il ne peut pas fuir et voler l'arme est sa seule défense possible ; auquel cas ma réponse pourrait être différente). Le gain par rapport à la fuite est inexistant. De plus, la morale prime sur l'éthique, on ne peut pas transgresser une règle morale ("respecte la propriété d'autrui"), même s'il s'ensuit un comportement vertueux ("faire preuve de courage en essayant de sauver des gens"), qui est optionnel, non obligatoire. On ne peut pas atteindre une fin bonne avec des moyens qui ne le sont pas.

 

2): Je note, comme s'en agaçait Rand, qu'on commence par imaginer des situations invraisemblables (et souvent critiques) et ensuite on se demande que faire, ce qui n'a aucune utilité pour les gens qui ont des problèmes en général infiniment plus ordinaires et que ce genre de réponses n'aident pas. Je vois mal dans quel univers un dollar de plus ou de moins déciderait de la survie de l'humanité. Et quand bien même, il suffirait de lui expliquer pourquoi, il devrait vraisemblablement te le donner.

 

Mais il pourrait aussi avoir une très bonne raison de te le refuser. Peut-être qu'il veut se payer un billet de métro pour aller voir sa mère mourante à l'autre bout de la ville. C'est son dollar et tu n'as pas le droit de le voler. Là encore le dommage est certain et le gain hypothétique (au mieux la météorite n'a aucune conséquence sur toi, au pire tu vas mourir en un clin d'œil et comme disait Épicure, la mort n'est rien pour nous car on ne peut pas sentir la mort en tant que telle).

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il y a 16 minutes, Nihiliste frustré a dit :

Tu m'as l'air de confondre conséquentialisme et empirisme.

 

Je confonds probablement plein de choses. Je ne suis même pas très convaincu de ma propre distinction entre morale et éthique (est-ce que l'une est soluble dans l'autre ?). Je pense aussi qu'aucune définition très satisfaisante du déontologisme, du conséquentialisme et de l'éthique des vertus n'a encore été avancée.

 

Il n'y a pas de dictionnaire ou d'index des notions dans le recueil Métaéthique édité par Vrin. Un dictionnaire de philosophie morale ne serait pas du luxe dans ma bibliothèque.

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48 minutes ago, Johnathan R. Razorback said:

Nietzsche est intéressant pour approcher la morale de façon métaéthique ("quelle est la nature de la morale/des énoncés moraux ?"), ou "sociologique" ("quelle société, et quel groupe, et quel individu, et quel dosage d'affects* chez un individu, engendre telle pensée morale ?") -Marx aussi d'ailleurs, avec une méthode différente. Mais il est tout sauf évident que Nietzsche ait une éthique normative. Ou plutôt, tout sauf évident que Nietzsche ait des arguments pour fonder sa préférence pour une éthique normative donnée.

Et pourtant toute la Généalogie de la morale peut être lue comme une entreprise d'argumentation contre une forme d'éthique de la vertu (morale des faibles, ascétique, culpabilisante et anti-humaine incarnée selon lui dans les vertus chrétiennes) et en faveur d'une autre (morale des forts, libre, cruelle et joyeuse).

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1 hour ago, Rincevent said:

Pas tant sur la motivation de l'action (because l'enfer était déjà notoirement pavé de bonnes intentions dans l'Antiquité), que sur l'acteur lui-même. 

Les deux sont largement interdépendants. C'est un grand classique de la narration : tel personnage commet un acte horrible, mais soudain grâce à une phase d'exposition on comprend pourquoi il a commit cet acte et on peut sympathiser avec lui ou même le considérer comme un héros.

 

En d'autres termes c'est parce que je suis qui je suis que mes motivations sont les miennes et vice-versa.

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C'est bien pour cela que j'ai utilisé le terme normatif plutôt qu'éthique ou moral. La loi et le droit sont eux aussi normatifs. Quand tu dis qu'un moyen n'est pas efficace pour atteindre une fin donnée, ce n'est pas normatif : tu énonces là une proposition positive avec laquelle déontologues et vertueux peuvent parfaitement être d'accord. Le thème de cette discussion, c'est "qu'est-ce qui fait qu'une action est bonne/souhaitable/positive/punissable/etc.. ?" ; si tu veux parler sociologie ou économie, ce n'est pas ici qu'il faut le faire, et si tu considères que mettre en oeuvre un moyen inefficace ou contre-productif est immoral ou devrait être interdit, alors c'est une position déontologique ou vertueuse.


Justement je me suis immiscé pour remettre en question la vision déontologique du libéralisme, ce qui n'est pas tellement hors sujet mais plutôt une tentative d'attaquer le débat sous un certain angle. L'éthique sur laquelle je me base fait appelle à l'utilité et la subjectivité de l'individu, plutôt qu'à une définition objective de ses droits naturels. L'économie a donc toute sa place ici.

D'ailleurs je me suis gouré en disant que le conséquentialisme de Friedman n'est pas une éthique à proprement parler, c'est bien une éthique normative comme tu le rappelais, une éthique conséquentialiste quoi. Désolé pour cette erreur. ^^
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il y a 42 minutes, Turgot a dit :

L'éthique sur laquelle je me base fait appelle à l'utilité et la subjectivité de l'individu, plutôt qu'à une définition objective de ses droits naturels.

 

 

 

Tu es utilitariste ?

 

(C'est pas un soupçon infâmant hein ; c'est juste que s'il y a des utilitaristes libéraux, comme l'était Bentham d'après Mises, c'est selon moi by mere accident, et non parce que l'utilitarisme conduit nécessairement au libéralisme ou parce qu'il en consisterait le fondement moral adéquat.

 

Et d'ailleurs l'utilitarisme est "déontologique" si on veut, en ce sens que son système de principes inclus des choses totalement arbitraires. La règle égalitaire qui veut que l'utilité d'un individu vaut moralement autant que celle d'un autre surgit typiquement de nulle part).

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il y a une heure, Turgot a dit :

 


Justement je me suis immiscé pour remettre en question la vision déontologique du libéralisme, ce qui n'est pas tellement hors sujet mais plutôt une tentative d'attaquer le débat sous un certain angle. L'éthique sur laquelle je me base fait appelle à l'utilité et la subjectivité de l'individu, plutôt qu'à une définition objective de ses droits naturels. L'économie a donc toute sa place ici.

D'ailleurs je me suis gouré en disant que le conséquentialisme de Friedman n'est pas une éthique à proprement parler, c'est bien une éthique normative comme tu le rappelais, une éthique conséquentialiste quoi. Désolé pour cette erreur. ^^

 

Juste pour info, les mots utilité et subjectivité m'apportent énormément d'information sur ton positionnement, plus que tes formulations précédentes et citations d'auteurs.

 

il y a 41 minutes, Johnathan R. Razorback a dit :

Et d'ailleurs l'utilitarisme est "déontologique" si on veut, en ce sens que son système de principes inclus des choses totalement arbitraires. La règle égalitaire qui veut que l'utilité d'un individu vaut moralement autant que celle d'un autre surgit typiquement de nulle part).

J'imagine qu'on peut être utilitariste sans pour autant reconnaître cette règle, particulièrement quand on se réfère au marché plutôt qu'à la démocratie. L'utilitarisme classique ne me parait pas plus objectif que cohérent (en général ça s'arrête bien avant ce genre de règle mais plutôt sur des intuitions, des évidences, l'opinion majoritaire, etc..), mais une version libérale peut à mon avis être théoriquement satisfaisante.

Le problème est alors dans la possibilité technique d'agréger les préférences subjectives, de prévoir les conséquences des actions, de calculer l'utilité agrégée, etc... Le principe de non-agression est largement moins utopique que tout ce bousin, qui en général sera implémenté sous la forme de "ouai bah dans un premier temps il faut que le gouvernement gère les hôpitaux et puis après on verra".

Mais c'est encore loin d'épuiser la facette philosophique du problème.

 

 

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1): On ne peut pas savoir à l'avance si les conséquences seront si bonnes que ça (tu vas peut-être rater ton coup et tuer un innocent, avant de te faire toi-même neutraliser par le forcené). Le choix est donc entre un mal (modéré) certain (violation de propriété et vol), et un effet positif douteux. C'est suffisant pour ne pas le faire. Dégage et appelle les flics. Ou si tu veux vraiment intervenir, trouve autre chose.
 
Je dis un effet positif douteux et non un bien, car le bien de l'agent à intervenir n'est pas évident (à moins qu'on rajoute des éléments dans le scénario: par exemple, il ne peut pas fuir et voler l'arme est sa seule défense possible ; auquel cas ma réponse pourrait être différente). Le gain par rapport à la fuite est inexistant. De plus, la morale prime sur l'éthique, on ne peut pas transgresser une règle morale ("respecte la propriété d'autrui"), même s'il s'ensuit un comportement vertueux ("faire preuve de courage en essayant de sauver des gens"), qui est optionnel, non obligatoire. On ne peut pas atteindre une fin bonne avec des moyens qui ne le sont pas.



L'hypothèse la plus probable c'est que celui qui utilisera l'arme en question sera un membre de la foule qui sait l'utiliser (au moins un minimum). Donc si j'ai l'arme en question et que je ne sais pas m'en servir je la passerai à une personne compétente.

C'est l'hypothèse la plus probable. Et si la personne en question se manque sur son premier tir et qu'elle blesse quelqu'un, elle aura malgré tout permis de sauver beaucoup de vies en descendant ensuite le fou furieux. Si elle se fait descendre après s'être manquée, une autre personne peut ensuite se saisir de l'arme. Enfin, il y a une probabilité que le fou furieux arrive à se saisir de l'arme mais elle est minime.

Dans tous ces cas des membres de la foule essaient de toute façon de sauver des dizaines de vies, au prix peut-être de la leur ou de quelques unes (dans le cas du tireur ou des tireurs qui se manquent).

Et j'ai oublié de préciser que dans l'exemple de Friedman le propriétaire de l'arme est un misanthrope bien connu, qui ne laisserait personne prendre son arme même si ça permettait de sauver cent personnes.
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7 minutes ago, Nihiliste frustré said:

J'imagine qu'on peut être utilitariste sans pour autant reconnaître cette règle, particulièrement quand on se réfère au marché plutôt qu'à la démocratie.

On peut surtout être conséquencialiste sans être utilitariste. Exemple : l'évolutionnisme.

  • Yea 2
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il y a 1 minute, Lancelot a dit :

On peut surtout être conséquencialiste sans être utilitariste. Exemple : l'évolutionnisme.

Oui, c'est parce que notre ami est sorti du bois que le vocabulaire change. Et l'évolutionnisme n'est pas normatif. Un conséquentialisme, ce serait de vouloir laisser faire l'évolution, et ce parce que ça produit de bonnes choses.

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Tu es utilitariste ?
 
(C'est pas un soupçon infâmant hein ; c'est juste que s'il y a des utilitaristes libéraux, comme l'était Bentham d'après Mises, c'est selon moi by mere accident, et non parce que l'utilitarisme conduit nécessairement au libéralisme ou parce qu'il en consisterait le fondement moral adéquat.
 
Et d'ailleurs l'utilitarisme est "déontologique" si on veut, en ce sens que son système de principes inclus des choses totalement arbitraires. La règle égalitaire qui veut que l'utilité d'un individu vaut moralement autant que celle d'un autre surgit typiquement de nulle part).


Non je ne me définirais pas comme utilitariste. Y a des exemples très connus sur ce à quoi l'utilitarisme peut mener, en terme de conséquences justement. Friedman prend l'exemple d'un sheriff qui décide de pendre un innocent pour éviter à trois ou quatre autres d'être lynchés par des habitants échauffés par une série de meurtres (le meurtrier ayant quitter la ville, mais les habitants n'y croyant pas et pensant qu'il est toujours là). On peut justifier un tel acte sur une base utilitariste. Personnellement je rejoins Friedman quand il dit qu'il ne l'accepte pas.

En revanche ce que je pense c'est qu'en anarcapie il peut très bien y avoir des lois qui vont contre la liberté, produites par le marché. Maintenant ces lois ont un coût, et les systèmes les plus coercitifs seront aussi les plus chers.

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51 minutes ago, Nihiliste frustré said:

Un conséquentialisme, ce serait de vouloir laisser faire l'évolution, et ce parce que ça produit de bonnes choses.

Bah c'est très exactement comme ça que je conçois l'évolutionnisme : laisser un max de solutions émerger parce qu'à terme (et à nature humaine constante) les meilleures s'imposeront.

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il y a 2 minutes, Lancelot a dit :

Bah c'est très exactement comme ça que je conçois l'évolutionnisme : laisser un max de solutions émerger parce qu'à terme (et à nature humaine constante) les meilleures s'imposeront.

Okay, c'est juste une question de vocabulaire. Il me semble que le terme se cantonne habituellement au descriptif (désigne uniquement des théories en biologie, en sociologie ou autre). Ce que tu décris correspond à une prescription. Prescription avec laquelle j'ai tendance à être d'accord, à ceci près que parmi les solutions en question, j'intègre des éthiques diverses et variées, déontologiques donc. Cela dit dans mon cas, c'est plus de l'humilité qu'une éthique en soi (à nature humaine constante, si je connaissais la meilleure solution, je considérerais que l'appliquer partout serait une bonne chose).

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Un article intéressant de David Friedman sur le sujet : https://www.cato-unbound.org/2012/04/06/david-d-friedman/natural-rights

J'aime bien sa conclusion :

"One conclusion is that I can imagine circumstances where the consequentialist benefits of some act are sufficiently large relative to the cost in rights violation that I would approve of it—stealing a nickel from its rightful owner to prevent an asteroid strike that would destroy the world was my old example. Another is that I can imagine circumstances where the rights violation costs are sufficiently large relative to the utility gains so that I would disapprove of it—for an example, check the index of the second edition of The Machinery of Freedom (available as a free pdf from my web page) for the entry “utilitarian, why I am not.” The implications of my moral intuitions are not as tidy as the theories of Rand or Rawls or, for that matter, Bentham. But then, I know of no a priori reason to expect the truth, in moral philosophy or anything else, to always be simple."

Je trouve la conclusion de Friedman humble et ouverte.

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il y a une heure, Lancelot a dit :

Bah c'est très exactement comme ça que je conçois l'évolutionnisme : laisser un max de solutions émerger parce qu'à terme (et à nature humaine constante) les meilleures s'imposeront.

 

Mais qu'est-ce que veut dire "meilleures" si on se limite à cette définition, sinon "qui finit par s'imposer historiquement" ou "qui dure longtemps" ?

 

A moins que ce que tu décris ne soit qu'une conséquence du point de vue évolutionniste, auquel cas je ne vois pas quel genre de philosophie morale ce serait.

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