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Économicisme, juridicisme et autres mots moches


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Vous n'êtes pas sans savoir que notre terminologie et nos idées se retrouvent souvent récupérées et corrompues à droite et à gauche, d'autant plus en ce moment où le libéralisme devient marginalement plus connu. Une de ces dérives est le mythique (parce que je n'ai pas trop l'impression de le rencontrer dans la nature) économicisme qui consiste à ne voir dans le libéralisme qu'une doctrine économique. Une autre dérive, apparue sans doute en réponse aux accusations d'économicisme, est ce que j'appellerais (improprement sans doute) le juridicisme qui consiste à ne voir dans le libéralisme qu'une doctrine juridique. C'est là-dedans qu'on pourra faire entrer les divers axiomatismes.
Or être autrichien ou idolâtrer le PNA ne sont en soi ni nécessaires ni suffisants pour être libéral, ou leur absence pour douter du libéralisme d'autrui. Je proposerais que le libéralisme réside dans la conclusion (contre l'interventionnisme dans un domaine donné) et pas dans le raisonnement qui y mène. Les systèmes qui dépassent ça (et quelque part une pensée politique mature a besoin de le dépasser) peuvent prétendre que ce qu'ils rajoutent est nécessaire à leur conception du libéralisme mais pas au libéralisme en soi. Notez que ce que je dis ne recoupe pas exactement l'opposition entre thin et thick parce qu'un système simpliste reste un système.

 

Prenons un exemple. Pour répondre à un troll récemment @Johnathan R. Razorback disait (et je ne lui jette pas la pierre mais ça illustre bien le truc) :

Quote

Le libéralisme est une philosophie politique qui présente un aspect axiomatique puisqu'elle part du principe de non-agression et en tire ensuite toutes les conséquences (notamment les droits naturels de l'individu) pour résoudre tous les problèmes politiques imaginables.

Voyez-vous pourquoi je qualifierais ça de juridicisme, fût-il thin ?

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Assez d'accord avec toi sur la nature du libéralisme qui ne dépend pas directement de tel ou tel système de justifications (on est d'ailleurs une tradition étonnement diversifié en terme de fondement différents envisagés pour les mêmes conclusions, je pense pas que d'autres doctrines soient dans ce cas).

Remarque en passant (mais je crois que tu es d'accord là dessus) être autrichien en économie ou être monomaniaque du npa, est bien suffisant, même sans être nécessaire, pour être libéral ; et l'économicisme et le juridicisme ne sont pas propre au libéralisme (les fans respectivement de Keynes et de Kelsen sont bien pire que les pires d'entre nous).

 

Ce juridicisme m'a marqué particulièrement chez Daniel Tourre, qui présente le libéralisme comme une philosophie du droit avant d'être quoi que ce soit d'autre, ce qui me semble un peu réducteur. Par contre, je ne suis pas sûr que la réduction au seul npa puisse être qualifié ainsi, puisqu'il s'agit d'une norme presque plus morale que juridique.

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Je pense que ce problème d'économisme et de juridicisme vient du fait que les 3/4 des organisations libérales sont axés sur l'économie et que la plupart des penseurs libéraux sont souvent des juristes ou des économistes.

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il y a une heure, Mégille a dit :

Ce juridicisme m'a marqué particulièrement chez Daniel Tourre, qui présente le libéralisme comme une philosophie du droit avant d'être quoi que ce soit d'autre, ce qui me semble un peu réducteur.

Le mainstream liborgien d'il y a 10 ans. ;)

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1 hour ago, Mégille said:

Remarque en passant (mais je crois que tu es d'accord là dessus) être autrichien en économie ou être monomaniaque du npa, est bien suffisant, même sans être nécessaire, pour être libéral

Être autrichien est un bon background pour être libéral sur les questions économiques la plupart du temps, et le pna est une boussole efficace contre les dérives juridiques la plupart du temps, mais dans les deux cas ce n'est pas à l'abri de perversions (les limites du pna sont régulièrement débattues sur liborg).

 

Quote

et l'économicisme et le juridicisme ne sont pas propre au libéralisme (les fans respectivement de Keynes et de Kelsen sont bien pire que les pires d'entre nous).

Oui. Ça me fait penser qu'il faudrait sans doute rajouter le biologicisme aux mots laids si on s'éloigne du cas spéficique libéral (enfin quoique certains évolutionnistes...).

 

51 minutes ago, Rincevent said:

Le mainstream liborgien d'il y a 10 ans. ;)

À la pointe du progrès :sorcerer:

Et je compte bien qu'on y reste.

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J'aurais tendance à dire que le problème vient essentiellement de la domination de l'économie (c'est dans ce champ que le libéralisme a reçu ses lettres de noblesse ces 60 dernières années) plus que du droit, parce que le droit souvent proposé par les libéraux 'à système', c'est du droit concassé et passé par la case 'analyse économique du droit', voire law et institutions machin : le traitement ainsi proposé donne une sorte de sabir juridique globalisant compatible avec la discipline économique, et pas nécessairement l'inverse. Typiquement, il y a parfois des simplifications excessives quand on parle de l'efficacité 'libérale' de la common law (mon oeil) par exemple, ou des rapprochements entre droit et coutume (des fictions bien pratiques pour être intégrées dans un raisonnement éco, mais assez loin de la réalité du droit).

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J'ai toujours pensé, et je pense toujours, que le libéralisme est une philophie du droit et que le reste (comme l'économisme) sont des conséquences.

 

Je ne sais pas si c'est ce que tu appelles "juridicisme" mais si oui, j'aimerais savoir en quoi j'ai tort et quelle serait dès lors "l'alternative".

 

Et en passant, s'il y a bien un théorique avec un biais économiciste, c'est le marxisme (la définition des classes, qui organisent la lutte des classes qui elle même résume l'histoire humaine, est basé sur la division économique).

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Il y a 16 heures, Lancelot a dit :

Or être autrichien ou idolâtrer le PNA ne sont en soi ni nécessaires ni suffisants pour être libéral, ou leur absence pour douter du libéralisme d'autrui. Je proposerais que le libéralisme réside dans la conclusion (contre l'interventionnisme dans un domaine donné) et pas dans le raisonnement qui y mène.

 

Ah mais je suis d'accord. Et il est vrai que la remarque que j'ai faite contre l'autre newbie était un réductionnisme (oh le vilain mot ?) s'agissant de la nature globale du libéralisme. Il a des raisons différentes qui peuvent amener à défendre la liberté, on trouve même des penseurs libéraux dont il est difficile de comprendre les justifications de leurs choix politiques (je pense à Tocqueville). C'est juste que j'ai spontanément tendance à défendre la liberté à partir de mes propres prémisses (philosophiques /morales). Mais je suis d'accord que d'autres gens qui ne les partagent pas sont des libéraux. 

 

Sinon, la distinction que tu fais est tout de même plutôt de raison qu'une distinction à l'œuvre dans les choses. Dans la pratique le libéral se justifiera très souvent par rapport au NAP et/ou à  des arguments-passerelles d'efficacité comme peuvent en fournir les économistes autrichiens. Le libéralisme est dans la conclusion certes, mais du point de vue de la vérité et de la cohérence, il ne faut pas faire passer la conclusion avant les prémisses. Les gens qui sont libéraux pour des raisons que je trouve mauvaises ou absurdes (par exemple parce que c'est ce que Jésus voudrait d'eux) peuvent être des alliés politiques, ça ne m'empêche pas de les trouver moralement et intellectuellement douteux, et potentiellement plus susceptibles que d'autres de faire des choix politiques erratiques.

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Il y a 18 heures, Lancelot a dit :

Or être autrichien ou idolâtrer le PNA ne sont en soi ni nécessaires ni suffisants pour être libéral, ou leur absence pour douter du libéralisme d'autrui.

 

Evidemment puisqu'il existe des libéraux non-autrichiens ( souvent monétaristes) et inversement il existe des autrichiens non-libéraux ( le seul exemple que je connaisse est Von Wieser).

Il y a 18 heures, Lancelot a dit :

Je proposerais que le libéralisme réside dans la conclusion (contre l'interventionnisme dans un domaine donné) et pas dans le raisonnement qui y mène. 

Razorback ne serait pas en désaccord avec cela puisqu'il dit lui-même que le libéralisme est une philosophie politique, la question du régime politique le meilleur est à propos de la fin. Xara nous répète depuis longtemps la différence entre descriptif et normatif.

 

Même si on est pas jusnaturaliste ( en particulier moderne), on doit pouvoir être d'accord sur le fait que le libéralisme est au moins en partie une philosophie du Droit, désolé José. Certes il ne dit rien concernant le montant d'une amende spécifique, l'âge de majorité etc etc mais de manière plus globale il se positionne lorsque des injustices sont commises.

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Il y a 14 heures, Lancelot a dit :

Être autrichien est un bon background pour être libéral sur les questions économiques la plupart du temps, et le pna est une boussole efficace contre les dérives juridiques la plupart du temps, mais dans les deux cas ce n'est pas à l'abri de perversions (les limites du pna sont régulièrement débattues sur liborg).

*pna oui désolé, je ne sais pas quel Poutou m'a pris !

Il me semble que même le dernier des "brutalistes" qui se contenterait de l'économie autrichienne ou du pna resterait un libéral, un mauvais libéral peut-être, un déviant, un idiot, mais pas autre chose que libéral pour autant.

 

il y a 3 minutes, Atika a dit :

Evidemment puisqu'il existe des libéraux non-autrichiens ( souvent monétaristes) et inversement il existe des autrichiens non-libéraux ( le seul exemple que je connaisse est Von Wieser).

La première école autrichienne n'était pas spécifiquement libérale, effectivement. Menger se situait dans la tradition caméraliste germanique et était un interventionniste modéré, et à coté de l'aile libérale de Bohm Bawerk (d'où viennent Mises et Schumpeter), il y avait la branche socialiste de Von Wieser et de ses disciples (Ernst Mayer, et le jeune Hayek). Mais cette première école, en Autriche et de langue allemande, s'est plus ou moins dissoute dans l'économie orthodoxe, et c'est seulement Mises qui l'a fait revivre et l'a constituée comme un système excluant les orientations dominantes chez les néo-classiques. Un économiste autrichien aujourd'hui, c'est un héritier de Mises, éventuellement à travers Rothbard. Les courants socialistes des débuts sont rejetés, et sont a posteriori considérée comme non-autrichiens, même les hayékiens sont regardés de travers.

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Il y a 20 heures, Mégille a dit :

Ce juridicisme m'a marqué particulièrement chez Daniel Tourre, qui présente le libéralisme comme une philosophie du droit avant d'être quoi que ce soit d'autre, ce qui me semble un peu réducteur.

Ah alors du coup c'est quoi de plus qu'une philosophie du droit? J'ai pas tout suivi.

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il y a 39 minutes, Alchimi a dit :

Ah alors du coup c'est quoi de plus qu'une philosophie du droit? J'ai pas tout suivi.

Et bien, dire une théorie politique, ça me semblerait déjà plus pertinent. Il semble dire que le libéralisme est équivalent au jusnaturalisme (qui est bien une théorie du droit, pour le coup), mais il y a aussi des pas mal de libéraux qui ne sont pas de l'école des droits naturels (Mill, Mises, Hayek...), et de jusnaturalistes non libéraux (Thomas d'Aquin, Grotius, Filmer...). Mais en plus de ça, c'est aussi une théorie économique, et une théorie des relations internationales.

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il y a une heure, Mégille a dit :

Et bien, dire une théorie politique, ça me semblerait déjà plus pertinent. Il semble dire que le libéralisme est équivalent au jusnaturalisme (qui est bien une théorie du droit, pour le coup), mais il y a aussi des pas mal de libéraux qui ne sont pas de l'école des droits naturels (Mill, Mises, Hayek...), et de jusnaturalistes non libéraux (Thomas d'Aquin, Grotius, Filmer...). Mais en plus de ça, c'est aussi une théorie économique, et une théorie des relations internationales.

Voilà, une théorie politique, une philosophie politique, qui se décline sur des aspects juridiques, économiques, et autres domaines où une théorie politique peut avoir des conséquences.

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12 hours ago, F. mas said:

J'aurais tendance à dire que le problème vient essentiellement de la domination de l'économie (c'est dans ce champ que le libéralisme a reçu ses lettres de noblesse ces 60 dernières années) plus que du droit, parce que le droit souvent proposé par les libéraux 'à système', c'est du droit concassé et passé par la case 'analyse économique du droit', voire law et institutions machin : le traitement ainsi proposé donne une sorte de sabir juridique globalisant compatible avec la discipline économique, et pas nécessairement l'inverse. Typiquement, il y a parfois des simplifications excessives quand on parle de l'efficacité 'libérale' de la common law (mon oeil) par exemple, ou des rapprochements entre droit et coutume (des fictions bien pratiques pour être intégrées dans un raisonnement éco, mais assez loin de la réalité du droit).

Donc le juridicisme serait un économicisme masqué ? :mrgreen:

Je conçois bien la parenté entre les deux et j'imagine qu'une partie substantielle des axiomatistes bourrins ont/auraient été des réductionnistes économiques tout aussi bourrins à une autre époque.

 

9 hours ago, poney said:

J'ai toujours pensé, et je pense toujours, que le libéralisme est une philophie du droit et que le reste (comme l'économisme) sont des conséquences.

 

Je ne sais pas si c'est ce que tu appelles "juridicisme" mais si oui, j'aimerais savoir en quoi j'ai tort et quelle serait dès lors "l'alternative".

L'alternative c'est n'importe quel autre système qui ne considère pas que le libéralisme est avant tout une philosophie du droit et qui aboutit à des conclusions libérales quand même. Moi-même ces temps-ci j'ai tendance à mettre en position fondamentale des considérations évolutionnistes. Mon propos est qu'un tel système sera tout autant libéral.

 

9 hours ago, poney said:

Et en passant, s'il y a bien un théorique avec un biais économiciste, c'est le marxisme (la définition des classes, qui organisent la lutte des classes qui elle même résume l'histoire humaine, est basé sur la division économique).

J'y pensais très fort en créant le thread et j'aurais pu partir en troll sur les marxistes de droite et ce qui s'ensuit si je maîtrisais assez le bonhomme pour ça..

 

9 hours ago, Johnathan R. Razorback said:

Sinon, la distinction que tu fais est tout de même plutôt de raison qu'une distinction à l'œuvre dans les choses. Dans la pratique le libéral se justifiera très souvent par rapport au NAP et/ou à  des arguments-passerelles d'efficacité comme peuvent en fournir les économistes autrichiens. Le libéralisme est dans la conclusion certes, mais du point de vue de la vérité et de la cohérence, il ne faut pas faire passer la conclusion avant les prémisses. Les gens qui sont libéraux pour des raisons que je trouve mauvaises ou absurdes (par exemple parce que c'est ce que Jésus voudrait d'eux) peuvent être des alliés politiques, ça ne m'empêche pas de les trouver moralement et intellectuellement douteux, et potentiellement plus susceptibles que d'autres de faire des choix politiques erratiques.

Un des intérêts est que ça ouvre la possibilité de souligner les limites du NAP en tant que principe juridique sans se prendre des excommunications.

 

7 hours ago, Atika said:

Même si on est pas jusnaturaliste ( en particulier moderne), on doit pouvoir être d'accord sur le fait que le libéralisme est au moins en partie une philosophie du Droit, désolé José. Certes il ne dit rien concernant le montant d'une amende spécifique, l'âge de majorité etc etc mais de manière plus globale il se positionne lorsque des injustices sont commises.

Il est tout à fait pertinent de souligner les limites de l'interventionnisme dans le domaine juridique, pas de problème.

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Il y a 3 heures, Mégille a dit :

Et bien, dire une théorie politique, ça me semblerait déjà plus pertinent. Il semble dire que le libéralisme est équivalent au jusnaturalisme (qui est bien une théorie du droit, pour le coup), mais il y a aussi des pas mal de libéraux qui ne sont pas de l'école des droits naturels (Mill, Mises, Hayek...), et de jusnaturalistes non libéraux (Thomas d'Aquin, Grotius, Filmer...). Mais en plus de ça, c'est aussi une théorie économique, et une théorie des relations internationales.

 

Non, pas du tout. 

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Il y a 3 heures, Lancelot a dit :

Moi-même ces temps-ci j'ai tendance à mettre en position fondamentale des considérations évolutionnistes.

Tiens, j'en suis moi aussi arrivé à ce point de ma réflexion. Notamment parce que c'est un point de départ qui cannot be untrue ; mais aussi parce que ça me semble pertinent (euphémisme, lire "indispensable") de s'intéresser aux contraintes de conception qui pèsent sur les sociétés humaines quant on ambitionne de discourir sur ces dernières, et à ce que l'on sait de la nature humaine comme produit de l'évolution de notre espèce quand on prétend trouver un système social correspondant à ladite nature.

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Le 24/09/2019 à 20:50, Lancelot a dit :

Je proposerais que le libéralisme réside dans la conclusion (contre l'interventionnisme dans un domaine donné) et pas dans le raisonnement qui y mène. 

 

Ici, tu sembles confondre le libéralisme avec le fait de défendre la liberté dans un domaine X. C'est indéfendable, le libéralisme forme un tout, on ne peut pas le découper en tranche, sinon la catégorie perd toute pertinence et on se retrouve avec les livres d'histoire politique que je me farcis quotidiennement, où des tonnes de politiciens parfois mainstream sont qualifiés de libéraux, même quand ils sont en réalité planistes, fascistes, "néo-libéraux", keynésiens, centristes, catholique sociaux, conservateurs, etc etc. 

 

Sinon le libéralisme est souvent réduit au constitutionnalisme (c'est l'erreur que commet Nicolas Roussellier dans L'Europe des libéraux, du coup la quasi-totalité du bouquin est hors sujet) ou à l'idée de séparation des pouvoirs (nécessaire mais absolument pas suffisante, puisque, comme pour l'idée constitutionnelle, c'est un moyen et pas une fin ou une défense de la liberté dans son ensemble). 

 

Mais le réductionnisme le plus populaire et le plus ancien est la réduction du libéralisme à la défense du libre-marché. Et même souvent, dans ce réductionnisme on oublie que tel politicien est pro-marché dans tel centimètre de son action en oubliant d'autres trucs qui vont dans le sens contraire. C'est comme ça qu'on se retrouve à lire des aberrations du style: "la Chine est un pays néo-libéral ; la preuve, elle défend le libre-échange !". Idem de la politique de Sarkozy, Hollande, Macron etc.

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Sinon le libéralisme est souvent réduit au constitutionnalisme (c'est l'erreur que commet Nicolas Roussellier dans L'Europe des libéraux, du coup la quasi-totalité du bouquin est hors sujet) ou à l'idée de séparation des pouvoirs (nécessaire mais absolument pas suffisante, puisque, comme pour l'idée constitutionnelle, c'est un moyen et pas une fin ou une défense de la liberté dans son ensemble). 

 

Mais le réductionnisme le plus populaire et le plus ancien est la réduction du libéralisme à la défense du libre-marché. Et même souvent, dans ce réductionnisme on oublie que tel politicien est pro-marché dans tel centimètre de son action en oubliant d'autres trucs qui vont dans le sens contraire. C'est comme ça qu'on se retrouve à lire des aberrations du style: "la Chine est un pays néo-libéral ; la preuve, elle défend le libre-échange !". Idem de la politique de Sarkozy, Hollande, Macron etc.

Alors ce sont de bons exemples, pour moi se focaliser sur l'exégèse du pna est le même type d'erreur que se focaliser sur la recherche de la meilleure constitution et finir avant tout fétichiste de la démocratie.

Cependant on a deux manières de résoudre le conflit. Soit on dit que ces gens (démocrates, libre-échangistes...) ne sont pas libéraux et puis c'est tout parce qu'ils n'ont pas le bon système, mais alors il faut définir une marge de tolérance et s'engueuler sur le "bon système" sachant que l'engueulade va porter sur des points qui dépassent le libéralisme, soit on admet qu'ils sont libéraux dans la mesure où ils combattent de facto pour telle ou telle cause libérale.

 

9 hours ago, Tramp said:

Le libéralisme est une philosophie de la limitation du pouvoir, en particulier celui de l’Etat. 

Je ne suis pas sûr d'être d'accord (c'est pour ça que j'étais resté vague dans le premier message) mais la question est intéressante.

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11 hours ago, Lancelot said:

Donc le juridicisme serait un économicisme masqué ? :mrgreen:

Je conçois bien la parenté entre les deux et j'imagine qu'une partie substantielle des axiomatistes bourrins ont/auraient été des réductionnistes économiques tout aussi bourrins à une autre époque.

 

 

Oui, c'est ce que je pense. Il y a comme une volonté d'intégrer le droit à la théorie économique pour tout faire tenir d'un seul corps qui peut aboutir à sa stylisation excessive.

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1 minute ago, Dardanus said:

Je me souviens d'un échange IRL avec F. mas il y a quelques années où je disais le libéralisme c'est ceci et cela et lui de répondre : pas du tout.

 

:D Le problème avec le libéralisme, c'est qu'il s'agit d'une sensibilité aux contours flous, ce qui explique aussi ses crises régulières. D'ailleurs je me demande (et je ne suis pas le seul), si ce n'est pas aussi la raison de sa permanence et de sa résilience. Pour John Gray par exemple,  il est illusoire de trouver la bonne définition du libéralisme qui clôt le débat comme il est illusoire de vouloir mettre un point final à la philosophie, les deux sont en discussion permanente sur son contenu. Enfin je pense quand même qu'on peut isoler des éléments communs aux différentes formes de libéralisme, à défaut d'avoir une définition claire qui puisse les englober tous.

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Je pense aussi que son vocabulaire est un vocabulaire politique et historique hérité de circonstances particulières (l'histoire européenne), et que les usages qu'on en fait varie en fonction des auteurs et des époques. En d'autres termes, il y a un lexique libéral commun, pas nécessairement de grammaire commune. Tel auteur parle de "justice", de "liberté", d'"égalité", mais ne les définit pas et ne articule pas au sein d'une théorie général comme le fait un autre. Sur un fil on parlait de JS Mill : de loin, il parle le même langage que Mises, Hayek ou Rawls et Brian Barry. Ils disent pourtant tous des choses très différentes. Ce que je dis ne vise pas à brouiller les cartes, c'est juste que je me dis qu'il faut faire attention quand on cherche à systémiser, c'est parfois déroutant.

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il y a 30 minutes, F. mas a dit :

Je pense aussi que son vocabulaire est un vocabulaire politique et historique hérité de circonstances particulières (l'histoire européenne), et que les usages qu'on en fait varie en fonction des auteurs et des époques. En d'autres termes, il y a un lexique libéral commun, pas nécessairement de grammaire commune. Tel auteur parle de "justice", de "liberté", d'"égalité", mais ne les définit pas et ne articule pas au sein d'une théorie général comme le fait un autre. Sur un fil on parlait de JS Mill : de loin, il parle le même langage que Mises, Hayek ou Rawls et Brian Barry. Ils disent pourtant tous des choses très différentes. Ce que je dis ne vise pas à brouiller les cartes, c'est juste que je me dis qu'il faut faire attention quand on cherche à systémiser, c'est parfois déroutant.

 

Ce n'est pas propre au libéralisme, c'est une dérive propre au travail intellectuel : "tout le monde" reprend des termes a son compte. Il suffit d'ouvrir une page wikipédia ou un dictionnaire des idées philosophiques (ou sociologiques) pour s'en rendre compte. Il y a au moins deux raisons à mon avis. La première est que le sens des mots tend à changer au fil du temps, c'est un processus humain naturel. La seconde tient de l'égo des intellectuels qui tiennent à "marquer le coup" (ou le temps, ou leur discipline) et tiennent tout particulièrement à développer un vocabulaire propre.

Il n'y a pas de raison que le libéralisme échappe à ça, mes lectures du socialisme ou du communisme me font penser que c'est pareil dans le camps d'en face. D'ailleurs, ils leur parfait équivalent du "je doute de ton libéralisme", pas un jour sans que je lise "cette personne n'est pas vraiment de gauche".

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Oui, c'est propre au vocabulaire politique européen. Pour ceux que ça intéresse, Michael Oakeshott a écrit un texte très intéressant sur cette confusion épistémologique de base dans un texte intitulé 'Talking politics' (republié dans Rationalism in politics and other essays).

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Il y a 1 heure, poney a dit :

 D'ailleurs, ils leur parfait équivalent du "je doute de ton libéralisme", pas un jour sans que je lise "cette personne n'est pas vraiment de gauche".

 

Je pense que tous les groupes politiques (voire tous les groupes humains) définissent un intérieur et un extérieur, et ensuite on se bagarre sur qui est vraiment in-group ou pas. 

 

Là hier soir sur le discord de Relève de France, c'était tout un cirque et un concours de meme contre Sarkozy, qui n'est évidemment pas de droite car immigrationniste, d'origine hongroise et apôtre du "défi du métissage"...

 

Et là tout de suite il se déchaîne contre je cite: "la "droite" twitter qui pense que Chirac était de droite".

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