Aller au contenu

Réflexions sur l'Etat bureaucratique


Messages recommandés

Je commence un fil pour mettre quelques idées au clair. D'où vient l'Etat bureaucratique qui aujourd'hui s'est substitué à l'Etat social sur lequel s'appuyait l'idéologie social-démocrate ?

 

Il émerge comme l'actualisation d'une potentialité présente au sein du gouvernement représentatif, un dérèglement au sein de ce régime mixte particulier qui met en tension trois lieux de souveraineté réelle (le peuple, l'administration, l'exécutif, ou l'aspect démocratique, aristocratique et monarchique) en compétition pour le contrôle de la puissance publique (et donc de l'outil redistributif aussi).

 

C'est la dynamique démocratique, comme l'a vu Tocqueville qui met en branle la dynamique de transformation du régime représentatif en Etat social puis en Etat bureaucratique 'total' (par opposition à la nature bureaucratique de tous les Etats modernes). L'incursion directe et indirecte du demos en politique (via les organes élus, l'appel au peuple, mais aussi au sein de l'appareil d'Etat avec la massification des services publics) conduit l'administration comme l'exécutif à se repositionner pour persister dans son être et se développer.

 

Dans un premier temps, face à la démocratisation, l'administration prétend se faire le porte parole du peuple, plus légitime que le représentant élu : c'est la naissance de l'idéologie du service public/intérêt général et des grandes administrations en Europe, en particulier en GB à la veille de la première guerre mondiale (qui inspirera aussi la réforme de Wilson aux USA).

 

Ensuite, l'administration va se poser comme plus efficace que le parlementarisme et les vieilles institutions du gouvernement représentatif (le moment planiste de l'après-guerre, inspiré par les modèles soviétique puis US, l'idéologie de X crises, les fascismes etc). 

 

Enfin, il va y avoir une alliance dans la compétition pour l'obtention pour la souveraineté entre exécutif et administration (qui de toute façon, ne forme normalement qu'un seul corps) pour assigner à la dimension populaire qu'un rôle secondaire (qui finalement va resurgir la forme sauvage des populismes divers et variés) et progresser dans l'obtention de soutiens au sein de la société civile (l'extension de l'Etat jusqu'à devenir premier employeur et première catégorie électorale à satisfaire aux élections).

 

Depuis peu, le rapport entre exécutif et administrations s'est inversé, le poids des seconds pesant sur le premier plus que l'inverse. La suite au prochain numéro (pour ceux que ça intéresse).

 

 

 

 

 

 

 

  • Yea 7
  • Post de référence 1
Lien vers le commentaire

Dans les pays avec un spoil system comme les USA typiquement, où vois-tu le top management des administrations ? Côté administration, élus ou comme un troisième groupe entre les deux ? 

Lien vers le commentaire
Il y a 1 heure, F. mas a dit :

 

 

Enfin, il va y avoir une alliance dans la compétition pour l'obtention pour la souveraineté entre exécutif et administration (qui de toute façon, ne forme normalement qu'un seul corps)

 

 

En effet, l'administration fait parti de l'exécutif. Je pense que dans ton propos tu désigne par exécutif la partie politique (gouvernement, président, préfets).

La question est de savoir qui, entre l'administration et les politiques, dirigent vraiment. Je pense qu'il s'agit de l'administration. Mais compte tenu que beaucoup de membres de l'executif sont des anciens membres de l'administration, cette évolution est logique.

 

Il y a 1 heure, F. mas a dit :

 

 

Ensuite, l'administration va se poser comme plus efficace que le parlementarisme et les vieilles institutions du gouvernement représentatif (le moment planiste de l'après-guerre, inspiré par les modèles soviétique puis US, l'idéologie de X crises, les fascismes etc). 

 

 

 

On est revenu à ce modèle là depuis le COVID, il me semble. Même si, cette crise n'a été que l'élément déclencheur; il y avait une tendance vers la technocratisation des sociétés qui a recommencé à pointer son nez dans les années 2000s et tout particulièrement après la crise de 2008. 

Lien vers le commentaire
il y a 1 minute, Zagor a dit :

Même si, cette crise n'a été que l'élément déclencheur; il y avait une tendance vers la technocratisation des sociétés qui a recommencé à pointer son nez dans les années 2000s et tout particulièrement après la crise de 2008. 

Oui, sur le plan mondial, il y a eu une première vague après-guerre (le moment planiste, donc), reflux dans les années 80-90 (mais peut-être seulement en apparence, il faudrait se poser la question des QUANGOs outre-Manche, et des "agencies" outre-Atlantique, qui profitent d'un entre-deux constitutionnel qu'analyse Philip Hamburger), et retour de la vague à présent (dont la concomitance avec l'arrivée de la "tech" comme sujet politique ne me semble pas être une coïncidence).

Lien vers le commentaire

Je me rappelle des propos de Nixon, parlant de l'admin, disant que prez des US, c'était comme cornaquer (tenter de cornaquer) un éléphant.

Et ça, c'était du temps de Nixon.

(si qqun a la citation exacte, à vot bon coeur).

Les états n'ont fait que prendre du poids depuis.

Aucune amélioration ne pouvant provenir de l'intérieur du système, c'est l'inverse qui est garanti.

Le "sommet" (ahah) de l'état focalise naturellement l'attention (et occupe les temps de cerveaux),

et pendant que les citoyens regardent le guignol du moment, le cancer grossit gentiment tous les jours.

Lien vers le commentaire

La France est un pays extrêmement fertile : on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts.

 

Clémenceau, ça ne date pas d'hier.

 

 

Pour bosser dans de grandes boîtes le cancer bureaucratique qui s'étend c'est propre à toutes les organisations.

 

 

 

  • Yea 2
Lien vers le commentaire
2 hours ago, Sekonda said:

Dans les pays avec un spoil system comme les USA typiquement, où vois-tu le top management des administrations ? Côté administration, élus ou comme un troisième groupe entre les deux ? 

 

Le spoil system est un pouvoir de contrôle de la présidence sur l'administration fédérale (en gros 5000 postes sur plus de 2 millions). Au fur et à mesure du développement et de la complexification de la bureaucratie fédérale, son pouvoir réel s'est bcp amenuisé, en particulier à partir du New Deal. C'est à ce moment qu'explose la bureaucratie fédérale sous l'impulsion de la présidence, au point que pour certains constitutionnalistes, on change de régime sans pour autant changer de constitution (Cf Bruce Ackerman).

 

En plus de la massification de la bureaucratie fédérale, il y a des contraintes fortes qui pèsent sur la présidence, qui rendent le spoil system assez 'conservateur' : en gros le président change environ un pour cent du personnel de ses administrations (source : Congressional Quaterly 97 pour Clinton), il a des contraintes de temps ce qui fait qu'il délègue énormément, le stock d'individus dispo n'est pas infini, c'est aussi un choix sous l'oeil du public, qui doit donc satisfaire les canons PC du moment, et un certain nombre de nomination passe devant le sénat.

 

J'aurai tendance à classer ce type de gouvernance dans la catégorie administration, puisque ce sont des taches d'administrateurs qui leur sont réservées, et cela indépendamment de leur mode de nomination. Mais ça se discute effectivement. L'enjeu actuelle de la bureaucratie fédérale, qui a explosé au moment du New Deal, et plus encore avec la Great Society de Johnson (CF ici Christopher Caldwell), c'est de coordonner une masse de bureaux aux statuts extrêmement variés pour les rendre efficaces.

 

47 minutes ago, Zagor said:

 

En effet, l'administration fait parti de l'exécutif. Je pense que dans ton propos tu désigne par exécutif la partie politique (gouvernement, président, préfets).

La question est de savoir qui, entre l'administration et les politiques, dirigent vraiment. Je pense qu'il s'agit de l'administration. Mais compte tenu que beaucoup de membres de l'executif sont des anciens membres de l'administration, cette évolution est logique.

 

 

Oui, la distinction que je fais entre exécutif et administration revient à celle que tu désignes. Le triomphe de l'Etat bureaucratique, c'est celui des administrations sur l''exécutif. L'extrême complexité alliée à l'extrême rigidité des administrations rend l'exercice du pouvoir réel impossible, ou plutôt totalement subordonné aux intérêts et à l'inertie de ses supposés exécutants. C'est un gouvernement qui préfère bloquer le pays plutôt que de déplaire à l'administration hospitalière, qui promeut et s'appuie sur ses énarques pour agir et retrouver dans le labyrinthe des règlementations qui constitue la vie des institutions d'aujourd'hui, qui produit au kilomètre des réformettes qui ne marchent pas mais qui sont taillées sur mesure pour être implémentées par une administration planificatrice (qu'on compte par ex le nombre de 'mesures incitatives' à l'emploi produites par nos édiles ces 40 dernières années qui ont surtout servi à utiliser du papier).

 

La subordination de l'exécutif à ses administrations suppose, là encore, la massification de la bureaucratie publique, devenue suffisamment importante pour peser en interne mais aussi en externe (électoralement). Mais je reviendrai dessus.

 

Je trouve globalement le moment de la crise sanitaire intéressant, car c'est une sorte de dévoilement public du fonctionnement bureaucratique de nos institutions : ce qui était jusqu'alors implicite dans le débat public éclate au grand jour. Bon, malheureusement, je ne suis pas sûr que ça fasse tilt pour bcp de monde.

 

  • Yea 6
Lien vers le commentaire

Ah une autre chose sur le spoil système, qui me fait pencher pour l'administration : la disparition du corps préfectoral en France et son remplacement par des nominations en conseil des ministres. Le but est un peu le même (donner une direction à la bureaucratie étatique) mais tout en conservant des tâches de gestion administrative.

Lien vers le commentaire
il y a 17 minutes, F. mas a dit :

Je trouve globalement le moment de la crise sanitaire intéressant, car c'est une sorte de dévoilement public du fonctionnement bureaucratique de nos institutions : ce qui était jusqu'alors implicite dans le débat public éclate au grand jour.

+1. Sachant que ce dévoilement devenait de toutes manières inévitable.

Je vois d'ailleurs la nomination d'un archétype d'ultra minable comme Castex comme un jalon important.

Le cancer s'exhibe désormais.

(Prochaine étape, Juliette postière intermittente à Arcachon présidente).

 

Citation

Bon, malheureusement, je ne suis pas sûr que ça fasse tilt pour bcp de monde.

Le drame c'est que, tilt ou pas tilt, ne changera pas grand chose.

Savoir qu'on a chopé le cancer est une chose, pouvoir en guérir une toute autre.

Lien vers le commentaire

Aux USA, c'est un peu particulier: il y a FDR, des facteurs extérieurs favorisant un pouvoir anti-constitutionnel de plus en plus démesuré de l'administration et du Deep State (le maccarthysme en est un exemple), tout ceci grosso modo avec l'aval de la population jusqu'à Nixon. A partir de ce moment (Watergate et après), on connaît une période éthérée de moralisation de la politique (intérieure et extérieure, quoique beaucoup moins dès Reagan) et la fin du communisme aidant, l'état social-démocrate dont l'Allemagne est le modèle permet de faire la transition: il est un peu la synthèse dialectique du capitalisme soi-disant effréné de l'Ouest et de la bureaucratie moribonde de l'Est. On peut distinguer le système ternaire américain, qui repose sur le pouvoir exécutif du POTUS, avec derrière lui un paquet d'organismes plus ou moins indépendants (CIA, NSC, Ex-Com selon les époques), le pouvoir législatif du Congrès et l'opinion publique, qui resurgit par exemple sous Nixon, et le pouvoir soviétique, strictement exécutif (SG du PCUS, Politburo) et consultatif (comité central).

 

Je sais que c'est un peu un effet de mode, mais je me demande quand même s'il ne faudrait pas intégrer l'Etat colonial à cette évolution de la bureaucratie. Parce que c'est une structure d'administrateurs formés par la République après tout, et ses échecs ou limites, qui la poussent souvent à s'appuyer sur des relais locaux, sont parfois pertinents pour analyser les situations politiques où le pouvoir discrétionnaire de l'administration est total, et où la seule légalité est le 'code de l'indigénat', qui est la légitimation a posteriori d'un état de fait par des décrets. Il y a de nombreuses études, surtout en ce moment, sur la formation des administrateurs, leur théorie politique (je pense A Enders, P Singaravélou, I Surun ou S El-Mechat). Parmi les thèmes intéressants: comment la prolifération de normes favorise l'anomie, la porosité de la frontière entre police et armée, l'absence de monopole de la violence légitime, le pluralisme juridique, càd la coexistence de plusieurs ordres juridictionnels (droit et justice) dans une même société, découlant du maintien du statut personnel, avec des grosses variations selon le territoire considéré. G. Mann distingue entre le droit colonial UK, qui s’appuie sur la coutume, protégeant les chefs locaux, et le système de l’indigénat français, qui garantit l’autorité des administrateurs, dont les chefs locaux ne sont qu’éventuellement les représentants occasionnels (à partir de 1912). Toujours selon lui, le code de l’indigénat limite plutôt qu’il ne régule le pouvoir des commandants, d’où des conflits entre commandants et administrateurs (parisiens) pour le pouvoir. La loi est un outil et un alibi du pouvoir colonial. On observe le paradoxe de « commandants de cercle » ayant un pouvoir à peu près absolu et la délimitation de bornes à ce même pouvoir : un « garde » emprisonné après avoir insulté un missionnaire US au marché en 1944.

 

Du coup là aussi, l'administration prime sur l'exécutif au sens schmittien de la décision efficace, c'est comme une force d'inertie. Paris a en fait très peu de contrôle sur ce qui se passe outre-mer, comme toutes les tentatives de réforme le montrent. C'est un monde en soi. Du coup, ça me fait penser qu'outre les différentes organisations administratives, d'empires très policiers comme l'empire japonais, à des empires qui reposent beaucoup sur le self-government et la collaboration des locaux, comme l'empire UK, on pourrait faire une typologie des bureaucraties, de celles qui contrôlent en fait très peu, à cause d'un faible voire ridicule ratio fonk/population (la Chine est a case in point, que je connais un peu), à celles, comme aujourd'hui, qui ont un ratio beaucoup plus important, et dont je pense que les premiers exemples historiques sont les totalitarismes communistes (avec la RDA au sommet, puisque là on a à peu près autant d'agents que de citoyens normaux).

 

Voilà. Or précisément, la séparation police/armée est au fondement de l'administration publique. Et plutôt que de répéter ce qu'il a dit sur sa dégénérescence, je vous linke l'article de devinez-qui sur le sujet dans City Journal https://www.city-journal.org/the-degeneration-of-public-administration

Poke @Rincevent bien sûr, merci pour cette découverte (je vais commander In Praise of Prejudice et Admirable Evasions).

 

edit le lien sur Mann ne passe pas donc (article souvent cité): https://www.jstor.org/stable/25622051

  • Yea 2
  • Post de référence 1
Lien vers le commentaire
il y a une heure, Vilfredo Pareto a dit :

Et plutôt que de répéter ce qu'il a dit sur sa dégénérescence, je vous linke l'article de devinez-qui sur le sujet dans City Journal https://www.city-journal.org/the-degeneration-of-public-administration

Poke @Rincevent bien sûr, merci pour cette découverte (je vais commander In Praise of Prejudice et Admirable Evasions).

Tiens, je reboucle sur une question pour @F. mas : y a-t-il une différence profonde à faire entre l'état bureaucratique dont tu parles, l'état thérapeutique dont traite Dalrymple (dans les pas de Szasz), et l'état managérial conceptualisé par exemple par Gottfried ? Si tu voulais simplement insister sur le mandat de "réglementateur déréglementé" (qui est en bonne partie un mandat auto-attribué) des agences administratives modernes, alors Philip Hamburger est ton homme ; si tu voulais pousser plus loin l'analyse, je suis tout ouïe.

 

Quant à tes lectures, @Vilfredo Pareto, j'attends de lire tes revues de lecture sur CP (les deux sont très courts, mais c'est le genre de livres où je peux faire une pause après quelques pages pour "digérer" la baffe de réalisme). ;)

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
39 minutes ago, Rincevent said:

Tiens, je reboucle sur une question pour @F. mas : y a-t-il une différence profonde à faire entre l'état bureaucratique dont tu parles, l'état thérapeutique dont traite Dalrymple, et l'état managérial conceptualisé par exemple par Gottfried ?

 

Je ne sais pas ce que dit Dalrymple. La seule réflexion que j'ai pu lire sur l'état thérapeutique vient de Christopher Lasch, mais je ne sais pas dans quelle mesure la réflexion de Lasch recoupe celle de l'auteur dont tu parles. Gottfried est une de mes sources d'inspiration mais pas que.

 

Dans les trois cas, je pense qu'on désigne à peu près le même phénomène, mais ce qui diffère, c'est la manière de le légitimer au yeux du public. Prenons le cas de l'Etat managérial de Gottfried : comme par mimétisme, la bureaucratie va se calquer sur le fonctionnement de l'entreprise -jusqu'à un certain point- et parler son idiome pour bénéficier de son prestige, comme elle s'est servie de la science, du droit public ou de la théologie par le passé.

On peut imaginer la même chose avec l'Etat thérapeutique (selon Lasch), l'administration va parler le langage de solidarité pour justifier son déploiement 'rationnel' en lieu et place des solidarités organiques qu'elle va remplacer.

 

Dans tous les cas, il y a procès de rationalisation au sens de Weber, avec une chaîne de commandement, de la hiérarchie, des procédures et un fonctionnement pyramidale. Et cela quelque soit le langage de justification de la bureaucratie.

 

D'ailleurs une remarque : la bureaucratie avec la crise sanitaire s'est appuyée sur la 'science' pour faire accepter aux populations sa logique hétéronome. En quelque sorte, le covid  est une aubaine pour elle, qui voit son autorité de plus en plus contestée ou réduite à son rôle de redistribution des richesses.

 

  • Yea 2
Lien vers le commentaire

J'ai l'impression qu'il manque deux axes :

- le rôle du pouvoir judiciaire dans tout ça (plutôt administratif en France, plutôt politique aux US, mais disons que je ne sais pas quel est son poids politique) ;

- et la création par l'administration d'un ensemble d'entités supra-nationales qui lui servent de base arrière.

  • Yea 1
Lien vers le commentaire
Il y a 2 heures, F. mas a dit :

au point que pour certains constitutionnalistes, on change de régime sans pour autant changer de constitution (Cf Bruce Ackerman).

Ah oui, d'autant que FDR s'en prend directement à la Cour suprême (il essaie de faire passer le nb de juges de 9 à 15 en 1937 je crois).

Lien vers le commentaire
Il y a 3 heures, F. mas a dit :

pour certains constitutionnalistes, on change de régime sans pour autant changer de constitution (Cf Bruce Ackerman).

C'est dans lequel de ses articles ou livres ?

Lien vers le commentaire
9 hours ago, Vilfredo Pareto said:

Ah oui, d'autant que FDR s'en prend directement à la Cour suprême (il essaie de faire passer le nb de juges de 9 à 15 en 1937 je crois).

 

8 hours ago, Rincevent said:

C'est dans lequel de ses articles ou livres ?

 

Je fais référence à We the People, de Bruce Ackerman (qui est un classique prog en théorie constitutionnelle) : en gros, la constitution comporte trois régimes qui indiquent trois moments où le peuple s'exprime à travers différentes branches de la représentation. Il y a une première période qui court de la fondation de la République à la reconstruction (la fin de la guerre civile), puis de la reconstruction à la red decade de Roosevelt, puis de Roosevelt à maintenant.

 

A titre personnel, je note que ces tournants correspondent toujours à un changement d'échelle concernant la taille de l'Etat fédéral. J'ajoute à ça le moment de la Grande société qui clot la période de la révolution des droits, car, comme le rappelle C Caldwell dans son dernier livre, la taille, le coût et la réforme des programmes engagées afin d'établir l'égalité raciale est sans équivalent dans l'histoire US et change la nature même du régime us.

 

 

Lien vers le commentaire
Il y a 11 heures, Vilfredo Pareto a dit :

mais je me demande quand même s'il ne faudrait pas intégrer l'Etat colonial à cette évolution de la bureaucratie.

J'ai lu plusieurs fois que l'admin coloniale s'est recyclée pour gérer les provinces intérieures.

  • Yea 2
Lien vers le commentaire
il y a 15 minutes, Rübezahl a dit :

J'ai lu plusieurs fois que l'admin coloniale s'est recyclée pour gérer les provinces intérieures.

Oui voilà. Et même lors du retour des pieds-noirs, le recasage le plus facile était celui des fonks (pour les autres, l'Etat a signé des accords pour les recaser à la BdF, EDF etc). Hypothèse farfelue: la fin de l'Etat colonial en France après 1962 a transposé en partie la gestion coloniale sur le territoire à partir du moment où l'immigration l'a favorisé. Janet Abu-Lughod parle d'"apartheid without pass" et c'est ce à quoi me font penser les descriptions contemporaines de certains ghettos ou quand on dit que la France ou d'autres anciens empires coloniaux se tiers-mondisent: la croissance de l'administration et son influence politique sont corrélées au profil démographique du territoire. Quand la droite est au pouvoir, ça donne un arsenal de dispositions sécuritaires; quand la gauche est au pouvoir, ça donne un peu la même chose + l'Etat thérapeutique de Dalrymple, la démission du régalien. Dalrymple souligne aussi comment cette transformation de la répression en prévention permet à l'exécutif d'en foutre le moins possible, parce que les flics se transforment en parodies d'assistantes sociales (il a en tête la police anglaise).

 

Du côté de l'immigrant, la bureaucratie et l'administration est un mur qui l'empêche de rentrer, qui envahit sa vie privée, l'humilie en permanence (il faudrait retrouver l'itw de GK où il évoque les services sociaux qui comptent les brosses à dents dans la salle de bain pour savoir combien il faut donner d'allocations familiales à ce foyer). Que se passe-t-il alors? Le mur bureaucratique diminue l'immigration légale, celle qui se tape la bureaucratie (c'était aussi une des façons du bloc de l'Est de limiter la circulation: en transformant le passage des douanes en remake de Midnight Express), et augmente l'illégale, ce qui fait que they're not sending us the best.

 

C'était ma shower thought droitarde.

  • Yea 1
Lien vers le commentaire

A noter que l'administration coloniale ne se limite d'ailleurs pas uniquement aux administrateurs installés sur place, dans les territoires colonisés (ou assimilés). Faut y ajouter, dans la catégorie des personnes à recycler lors de la fin de l'empire coloniale français, a minima:

- le personnel de l'École coloniale qui formait les cadres de l'administration coloniale (administrateurs, inspecteurs du travail et magistrats), qui deviendra l'École nationale de la France d'outre-mer en 34 puis l'Institut international d'administration publique en 66 ;

- le personnel du ministère des Colonies.

Lien vers le commentaire

Créer un compte ou se connecter pour commenter

Vous devez être membre afin de pouvoir déposer un commentaire

Créer un compte

Créez un compte sur notre communauté. C’est facile !

Créer un nouveau compte

Se connecter

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous ici.

Connectez-vous maintenant
×
×
  • Créer...