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Hayek et le DN


Messages recommandés

16 hours ago, Vilfredo said:

Certes, mais on voit déjà que le rôle de la boîte change selon qu'il y a quelque chose dedans ou pas.

Pas vraiment. Le terme désigne toujours "ce qui est dans la boîte" qui peut être n'importe quoi ou rien, de toute manière par définition dans cette histoire on ne peut pas le savoir à moins de fantasmer un point de vue omniscient qui ne correspondrait à celui d'aucune des personnes concernées.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

dire à quelqu'un ça m'a fait plaisir de te voir même si nous savons tous les deux que c'est faux

Ces développements sur les différentes sortes de mensonge sont intéressantes mais je n'ai pas grand chose à en dire, à part que ça ressemble vachement à des jeux de langage pour moi pour des choses qui sont supposées ne pas y avoir de place.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Mais n'est-il pas clair dans ce cas que l'acte de nommer le concept crée le concept?

On en revient encore là mais ça dépend comme tu définis un concept, on en reparle plus bas avec les bébés.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Dans le cas de LW, il n'y a pas d'autre lien de cohérence ou d'adhérence des occurrences de S entre elles que l'acte par lequel je les signifie, et qui consiste pour moi à inscrire un S sur le calendrier.

Ben c'est pas vrai puisqu'il y a aussi la sensation. Si tu veux prendre un cas critique, disons que cette sensation n'a aucun autre effet que celui de te pousser à écrire un S, un peu comme la powder that makes you say yes:

011.jpg

Même dans ce cas présumément tu peux aussi écrire S sans cette sensation et donc on pourrait la nommer plus précisément "sensation qui te pousse à écrire S dans un contexte inapproprié". Pour aller plus loin disons que tu ne peux pas écrire S sans sensation et que tu ne peux écrire S qu'avec elle, dans ce cas oui le signe et la sensation se confondent (on pourrait définir la sensation en termes de schéma moteur ou quelque chose comme ça j'imagine). Mais on a quand même dû aller chercher loin.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Ça ne me rassure guère, le gars a l'air de gravement planer :online2long:

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Of course mais ce n'est pas l'inconscient freudien. Il y a une différence entre les biais inconscients qu'on étudie en sciences cognitives et l'inconscient freudien.

C'est la comparaison que j'aurais voulu voir dans l'article. Par contre désolé j'ai pas compris le rapport avec les histoires de Kant. Soit j'ai perdu le fil entre trois digressions et deux métaphores, soit c'est toi. Si j'essaie de résumer en une phrase tu penses que l'inconscient en sciences cognitives est "technique" ce qui signifie qu'il est défini comme une limite à ce qu'on essaie de faire avec des mécanismes conscients (?) tandis que l'inconscient psychanalytique pousse juste dans une direction (pour le lulz) qui peut ou pas correspondre à ce qu'on essaie de faire mais il y est orthogonal (?).

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Alors disons-le comme ça (et j'espère parvenir à rendre Kant excitant dans ce qui va suivre)

Encore une fois déso mais de mon point de vue c'est un peu une bouillie de "Kant dit ça et Freud dit ça et Lacan et Hegel et Heidegger et Marivaux et Proust et tout converge tkt", sachant que tout part d'une métaphore que je n'ai aucune raison particulière d'accepter comme ayant la moindre pertinence à part TGCM. En bref je sens que tu t'éclates à écrire et ce n'est pas désagréable à lire mais je vois peu d'arguments.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Ce que Kant peut apporter c'est une compréhension complexe de ce que ça veut dire que d'avoir des représentations accessibles à l'entendement, en expliquant quels autres "contenus" de pensée peuvent être présents à l'esprit sans être représentés, comment les différentes facultés de l'esprit interagissent, comment elles constituent le monde et comment cette constitution du monde présuppose la constitution a priori du moi (l'aperception). On n'exagère rien en disant que c'est l'un des plus grands penseurs de tous les temps. Mais ce n'est pas empirique.

Alors que je peux avoir tout ça avec des arguments empiriques sans lire Kant. Ce n'est pas que je suis incapable d'être sensible à des arguments non empiriques, mais quand il s'agit d'un sujet sur lequel il est pertinent de faire de la science... Je ne dis pas ça pour rabaisser Kant non plus d'ailleurs. Kant ne se serait peut-être pas contenté du non empirique si il avait eu accès au pool de connaissance empirique contemporain.

 

16 hours ago, Vilfredo said:

C'est-à-dire qu'à partir du moment où les catégories sont des concepts j'ai du mal à comprendre. Mais je suppose que c'est un peu begging the question que de te demander de m'expliquer avec le langage ce que ça fait de catégoriser sans y avoir recours.

Laisse moi te présenter le paradigme de regard préférentiel.

Quote

an experimental method for assessing the perceptual capabilities of nonverbal individuals (e.g., human infants, nonhuman animals). Infants will preferentially fixate a “more interesting” stimulus when it is presented at the same time with a “less interesting” stimulus, but only if the stimuli can be distinguished from one another. To minimize bias, on each trial the investigator is positioned so that he or she can observe the infant and make a judgment about which stimulus the infant fixates, but the stimuli themselves are visible only to the infant. To assess visual acuity, for example, on the first trial a coarse acuity grating is paired with a homogeneous gray stimulus of the same mean luminance. The infant preferentially looks at the grating. On successive trials, the spatial frequency of the grating is increased (the bars are made narrower) and the position of the grating versus the homogeneous field is randomized. When the grating can no longer be discriminated by the infant, the likelihood that the grating will be chosen for fixation will drop to chance.

Et une étude comme référence.

Quote

Sifre, R., Olson, L., Gillespie, S., Klin, A., Jones, W., & Shultz, S. (2018). A Longitudinal Investigation of Preferential Attention to Biological Motion in 2- to 24-Month-Old Infants. Scientific Reports, 8(2527), 1–10. doi: 10.1038/s41598-018-20808-0

 

Preferential attention to biological motion is an early-emerging mechanism of adaptive action that plays a critical role in social development. The present study provides a comprehensive longitudinal mapping of developmental change in preferential attention to biological motion in 116 infants at 7 longitudinal time points. Tested repeatedly from 2 until 24 months of age, results reveal that preferential attention to biological motion changes considerably during the first months of life. Previously reported preferences in both neonates and older infants are absent in the second month but do reemerge by month 3 and become increasingly pronounced during the subsequent two years. These results highlight the second month of life as a potentially critical transition period in social visual engagement.

Est-ce que tu dirais qu'un bébé de trois mois a un concept de biological motion?

Point_Light_Display_of_ASL_sentence.gifMig2UrH.gif

 

 

16 hours ago, Vilfredo said:

Si c'est automatique j'aurais justement pensé que tu le considérerais comme quelque chose d'inconscient.

Deux choses ici : d'abord le lien entre attention et conscience est compliqué. On peut accorder une attention minimale à quelque chose (par exemple une tâche automatique) sans pour autant être inconscient de ce qu'on fait. Par exemple quand je conduis je peux faire autre chose en même temps et ne pas avoir sans arrêt mon nez sur la route, pour autant je ne vais pas oublier que je suis en train de conduire (et heureusement !). Par contre si on en croit Kahneman ou Dehaene effectivement seuls les processus automatisés peuvent être inconscients.

Ensuite le lien n'est pas si évident non plus entre conscient/inconscient et verbal/non verbal. Dehaene encore une fois:

Quote

van Gaal, S., Naccache, L., Meuwese, J. D. I., van Loon, A. M., Leighton, A. H., Cohen, L., & Dehaene, S. (2014). Can the meaning of multiple words be integrated unconsciously? Philosophical Transactions of the Royal Society B: Biological Sciences, 369(1641), 20130212. doi: 10.1098/rstb.2013.0212

 

What are the limits of unconscious language processing? Can language circuits process simple grammatical constructions unconsciously and integrate the meaning of several unseen words? Using behavioural priming and electroencephalography (EEG), we studied a specific rule-based linguistic operation traditionally thought to require conscious cognitive control: the negation of valence. In a masked priming paradigm, two masked words were successively (Experiment 1) or simultaneously presented (Experiment 2), a modifier (‘not’/‘very’) and an adjective (e.g. ‘good’/‘bad’), followed by a visible target noun (e.g. ‘peace’/‘murder’). Subjects indicated whether the target noun had a positive or negative valence. The combination of these three words could either be contextually consistent (e.g. ‘very bad - murder’) or inconsistent (e.g. ‘not bad - murder’). EEG recordings revealed that grammatical negations could unfold partly unconsciously, as reflected in similar occipito-parietal N400 effects for conscious and unconscious three-word sequences forming inconsistent combinations. However, only conscious word sequences elicited P600 effects, later in time. Overall, these results suggest that multiple unconscious words can be rapidly integrated and that an unconscious negation can automatically ‘flip the sign’ of an unconscious adjective. These findings not only extend the limits of subliminal combinatorial language processes, but also highlight how consciousness modulates the grammatical integration of multiple words.

 

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Le 16/03/2022 à 21:36, Lancelot a dit :

Pas vraiment. Le terme désigne toujours "ce qui est dans la boîte" qui peut être n'importe quoi ou rien, de toute manière par définition dans cette histoire on ne peut pas le savoir à moins de fantasmer un point de vue omniscient qui ne correspondrait à celui d'aucune des personnes concernées.

C'est une question intéressante, le "3e point de vue". Il n'y a pas de quiproquo sans 3e point de vue par exemple (tant que dure le quiproquo).

Le 16/03/2022 à 21:36, Lancelot a dit :

C'est la comparaison que j'aurais voulu voir dans l'article. Par contre désolé j'ai pas compris le rapport avec les histoires de Kant. Soit j'ai perdu le fil entre trois digressions et deux métaphores, soit c'est toi. Si j'essaie de résumer en une phrase tu penses que l'inconscient en sciences cognitives est "technique" ce qui signifie qu'il est défini comme une limite à ce qu'on essaie de faire avec des mécanismes conscients (?) tandis que l'inconscient psychanalytique pousse juste dans une direction (pour le lulz) qui peut ou pas correspondre à ce qu'on essaie de faire mais il y est orthogonal (?).

Je réponds essentiellement parce que je viens de lire dans un article (sur Hegel, donc par hasard) une bonne formulation:

Citation

For Freud, the subject cannot simply state what it desires but instead reveals its desire through the failures and excesses of language. Psychoanalysis functions on the basis of this split between what the subject desires and what the subject says, and it locates the truth of the subject’s unconscious desire where the subject loses track of itself in language. The psychoanalyst locates the subject’s desire when the subject says what it doesn’t want to say, not when the subject corrects itself by explaining what it meant to say. No amount of effort on the part of the subject can align what it desires and what it says because this gap constitutes subjectivity as such. The psychoanalyst can draw attention to the gap between what the subject says it desires and what it desires, but no one can eliminate the alienation of the subject’s desire in the signifier.

https://zizekstudies.org/index.php/IJZS/article/download/779/784

(L'article n'a rien à voir, je mets juste la source)

 

Le 16/03/2022 à 21:36, Lancelot a dit :

Laisse moi te présenter le paradigme de regard préférentiel.

J'ai du mal à voir en quoi ça prouve qu'il a déjà des concepts, le môme. Ça pourrait très bien seulement vouloir dire qu'il réagit instinctivement en fonction de je ne sais quels impératifs darwiniens. Par exemple son attention au mouvement parce que ce qui bouge est vivant donc potentiellement dangereux ou "intéressant" pour sa survie (ça pourrait être ses parents, ça pourrait être plus généralement d'autres humains donc des gens susceptibles de prendre soin de lui et d'assurer sa survie). J'invente une just-so story mais c'est pour dire que je ne vois pas trop où est le concept là-dedans; un concept c'est plutôt être capable de dire ce que le rouge à lèvres de Madonna, le drapeau de la Chine et mes joues quand je suis gêné ont en commun. Je n'en suis plus à un auteur que tu n'aimes pas près, donc je vais citer Rousseau (le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité), dont le propos me paraît au coeur de notre problème.

Citation

D’ailleurs, les idées générales ne peuvent s’introduire dans l’esprit qu’à l’aide des mots, et l’entendement ne les saisit que par des propositions. C’est une des raisons pour quoi les animaux ne sauraient se former de telles idées, ni jamais acquérir la perfectibilité qui en dépend. Quand un singe va sans hésiter d’une noix à l’autre, pense-t-on qu’il ait l’idée générale de cette sorte de fruit, et qu’il compare son archétype à ces deux individus ? Non sans doute ; mais la vue de l’une de ces noix rappelle à sa mémoire les sensations qu’il a reçues de l’autre, et ses yeux, modifiés d’une certaine manière, annoncent à son goût la modification qu’il va recevoir. Toute idée générale est purement intellectuelle ; pour peu que l’imagination s’en mêle, l’idée devient aussitôt particulière. Essayez de vous tracer l’image d’un arbre en général, jamais vous n’en viendrez à bout, malgré vous il faudra le voir petit ou grand, rare ou touffu, clair ou foncé, et s’il dépendait de vous de n’y voir que ce qui se trouve en tout arbre, cette image ne ressemblerait plus à un arbre. Les êtres purement abstraits se voient de même, ou ne se conçoivent que par le discours. La définition seule du triangle vous en donne la véritable idée : sitôt que vous en figurez un dans votre esprit, c’est un tel triangle et non pas un autre, et vous ne pouvez éviter d’en rendre les lignes sensibles ou le plan coloré. Il faut donc énoncer des propositions, il faut donc parler pour avoir des idées générales ; car sitôt que l’imagination s’arrête, l’esprit ne marche plus qu’à l’aide du discours. Si donc les premiers inventeurs n’ont pu donner des noms qu’aux idées qu’ils avaient déjà, il s’ensuit que les premiers substantifs n’ont pu jamais être que des noms propres.

Après je ne veux pas donner le sentiment que "la philosophie" whatever that is a settled the science et que la pensée n'est pas antérieure au langage. Nietzsche et Bergson beg to differ par exemple. Mais ce sont deux auteurs que je connais assez bien et on ne trouve pas chez eux grand chose qui rende compte de la formation des concepts, à ma connaissance.

 

Le 16/03/2022 à 21:36, Lancelot a dit :

Deux choses ici : d'abord le lien entre attention et conscience est compliqué. On peut accorder une attention minimale à quelque chose (par exemple une tâche automatique) sans pour autant être inconscient de ce qu'on fait. Par exemple quand je conduis je peux faire autre chose en même temps et ne pas avoir sans arrêt mon nez sur la route, pour autant je ne vais pas oublier que je suis en train de conduire (et heureusement !). Par contre si on en croit Kahneman ou Dehaene effectivement seuls les processus automatisés peuvent être inconscients.

D'accord, et en effet j'ai relu cette partie de mon message et je la trouve partiale et partielle. Mais que Kahneman et Dehaene diraient-ils des traumas (de ce qui est refoulé pour Freud)? Est-ce qu'autre chose que des "processus" peuvent être inconscients? Et le processus de refoulement lui-même est par définition inconscient, mais ce n'est pas un processus automatisé. Ici encore, j'ai bien l'impression qu'on parle d'un inconscient "technique", comme un défaut dans les facultés du sujet (un peu comme l'imperfection de la mémoire) et non comme quelque chose de constitutif, comme ça l'est dès la première topique de Freud (conscience/préconscient/inconscient). Il n'y a pas de situation dans laquelle on pourrait y remédier, comme ça m'a l'air d'être le cas pour l'inconscient des sciences cognitives; il suffirait de développer son attention, quitte même à prendre des amphétamines. Rien ne peut, en revanche, diminuer l'inconscient ou ses effets dans Freud. Cette phrase n'a même pas de sens dans sa théorie.

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11 hours ago, Vilfredo said:

C'est une question intéressante, le "3e point de vue". Il n'y a pas de quiproquo sans 3e point de vue par exemple (tant que dure le quiproquo).

Savoir ce qui se trouve dans la boîte ne nécessite pas juste un troisième point de vue mais un point de vue omniscient (i.e. dans ce cas qui n'est pas forcé de respecter la règle du jeu). Si on revient un peu en deçà de l'analogie, quand on parlait des émotions, ça nécessite un point de vue capable de littéralement sonder les cœurs et les reins.

 

11 hours ago, Vilfredo said:

Je réponds essentiellement parce que je viens de lire dans un article (sur Hegel, donc par hasard) une bonne formulation:

https://zizekstudies.org/index.php/IJZS/article/download/779/784

(L'article n'a rien à voir, je mets juste la source)

Je ne vois pas le rapport.

 

11 hours ago, Vilfredo said:

J'ai du mal à voir en quoi ça prouve qu'il a déjà des concepts, le môme. Ça pourrait très bien seulement vouloir dire qu'il réagit instinctivement en fonction de je ne sais quels impératifs darwiniens. Par exemple son attention au mouvement parce que ce qui bouge est vivant donc potentiellement dangereux ou "intéressant" pour sa survie (ça pourrait être ses parents, ça pourrait être plus généralement d'autres humains donc des gens susceptibles de prendre soin de lui et d'assurer sa survie).

Ce n'est pas juste le mouvement ici puisqu'on contraste un mouvement quelconque et un mouvement biologique. L'enfant s'intéresse plus au mouvement biologique donc déjà rien que ça montre qu'il perçoit la différence entre les deux sans pour autant pouvoir les différencier par le langage. D'ailleurs je pense que toi aussi tu aurais très aisément perçu la différence entre les deux types de stimuli par exemple ici (source), même avant d'avoir un terme comme "biological motion" pour expliquer cette différence par le langage :

n2WzXH4.gif

 

Ceci étant j'avais sélectionné cette étude parce que le visuel était amusant mais je suis d'accord qu'on peut aller plus loin, et d'ailleurs allons-y. Une extension du regard préférentiel est le paradigme d'habituation et de réaction à la nouveauté. Quand tu montres plusieurs fois la même chose à un bébé, disons un carré bleu, au début il le regarde beaucoup puis de moins en moins. Maintenant que le bébé est habitué au bleu, tu lui présentes finalement deux carrés, un qui est d'une différente teinte de bleu et un qui est à la même distance du premier bleu d'un point de vue physique mais qui traverse la démarcation entre bleu et vert (imagine un dégradé entre bleu et vert, le premier stimulus est dans le bleu, le second est aussi dans le bleu mais s'éloigne du vert, le troisième est à la même distance du premier que le second mais traverse la frontière). Et tu regardes quel nouveau stimulus le bébé préfère regarder.

 

Quote
Franklin, A., & Davies, I. R. (2004). New evidence for infant colour categories. British Journal of Developmental Psychology, 22(3), 349-377.
 

ziIc7Ya.png

 

Bien sûr il y a d'autres contrôles. Tu reproduis l'expérience en habituant au vert à la place. Tu reproduis en présentant à la fin deux couleurs qui ne traversent pas la frontière entre les catégories (donc deux bleus si tu as habitué au bleu). Tu testes aussi d'autres paires de couleurs et différentes distances entre le stimulus utilisé pour l'habituation et les deux derniers. Et on s'aperçoit que le bébé ne se fait pas avoir : quand on lui propose deux bleus à la fin, même très différents, il ne regarde pas l'un plus que l'autre. Par contre dès que ça traverse la frontière entre bleu et vert ça l'intéresse et il regarde plus.

 

11 hours ago, Vilfredo said:

Mais que Kahneman et Dehaene diraient-ils des traumas (de ce qui est refoulé pour Freud)? Est-ce qu'autre chose que des "processus" peuvent être inconscients?

Je ne sais pas si ces auteurs ont écrit sur cette question en particulier (et je ne pense pas) mais il y a de la littérature cognitive par exemple sur les ruminations et les pensées intrusives. Encore une fois la clinique n'est vraiment pas mon truc mais genre :

Quote
Nixon, R. D., Roberts, L. N., Sun, Y. T. J., & Takarangi, M. K. (2021). Are Individuals Always Aware of Their Trauma-Related Intrusive Thoughts? A Study of Meta-Awareness. Behavior therapy, 52(4), 874-882.
 
 Individuals are not always aware of their mental content. We tested whether lack of awareness occurs in those who have experienced trauma, with and without posttraumatic stress disorder (PTSD). We also examined the role of proposed cognitive mechanisms (working memory and inhibition) in explaining unnoticed intrusions. Individuals with PTSD (n = 44), and varying levels of symptoms (high posttraumatic stress [PTS]: n = 24; low PTS: n = 37) reported on intrusive thoughts throughout a reading task. Intermittently, participants responded to probes about whether their thoughts were trauma related. Participants were “caught” engaging in unreported trauma-related thoughts (unnoticed intrusions) for between 24 and 27% of the probes in the PTSD and high PTS groups, compared with 15% of occasions in the low PTS group. For trauma-related intrusions only, participants lacked meta-awareness for almost 40% of probes in the PTSD group, which was significantly less than that observed in the other groups (∼60%). Contrary to predictions, working memory and response inhibition did not predict unnoticed intrusions. The results suggest that individuals who have experienced significant trauma can lack awareness about the frequency of their trauma-related thoughts. Further research is warranted to identify the mechanisms underpinning the occurrence of unnoticed intrusions.

Idem pour d'autres types de mécanismes j'imagine mais je ne vais pas faire semblant de savoir de quoi je parle.

 

11 hours ago, Vilfredo said:

Ici encore, j'ai bien l'impression qu'on parle d'un inconscient "technique", comme un défaut dans les facultés du sujet (un peu comme l'imperfection de la mémoire) et non comme quelque chose de constitutif, comme ça l'est dès la première topique de Freud (conscience/préconscient/inconscient). Il n'y a pas de situation dans laquelle on pourrait y remédier, comme ça m'a l'air d'être le cas pour l'inconscient des sciences cognitives; il suffirait de développer son attention, quitte même à prendre des amphétamines. Rien ne peut, en revanche, diminuer l'inconscient ou ses effets dans Freud. Cette phrase n'a même pas de sens dans sa théorie.

Par contre je ne vois pas où tu vas chercher que l'inconscient en sciences cognitives est défini comme quelque chose d'intrinsèquement négatif qu'il serait préférable d'éliminer. Au contraire si tu lis Kahneman c'est tout à fait normal, nécessaire et même très bien que la plupart des trucs qu'on fait soient automatisés pour ne pas gaspiller nos précieuses ressources attentionnelles. On serait bien emmerdés si on devait être conscients de tout tout le temps.

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D'ailleurs, il y a des gens qui ont déjà essayé de chiffrer le coût de la conscience ? Parce que j'ai l'impression qu'on est un peu conditionnés à prendre pour évident que c'est que du bénef (comme si on était le pinacle nécessaire de l'évolution).

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En fait je crois qu’on confond le subconscient (le système 1) le préconscient et l’inconscient (freudien). L’idée qu’on ne pourrait pas survivre en étant conscient de tout on la trouve dans Schopie et Nietzsche. Je vois bien que je galère à expliquer pourquoi Freud dit autre chose je vais y réfléchir et je reviendrai poster quand j’aurai un truc concluant (d’autant que j’ai lu Système 1 système 2)

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il y a 25 minutes, Lancelot a dit :

Savoir ce qui se trouve dans la boîte ne nécessite pas juste un troisième point de vue mais un point de vue omniscient (i.e. dans ce cas qui n'est pas forcé de respecter la règle du jeu). Si on revient un peu en deçà de l'analogie, quand on parlait des émotions, ça nécessite un point de vue capable de littéralement sonder les cœurs et les reins.

Par contre la dessus: si deux personnes parlent de leur beetle chacun supposant que l’autre a la même chose que lui dans sa boîte il faut un troisième point de vue qui regarde dans la première puis la deuxième boîte et se rende compte, pour prendre l’exemple le plus extrême, que le premier a un scarabée dans sa boîte et l’autre rien du tout. Ce 3e point de vue considère alors que les deux autres emploient certes les mêmes mots mais ne parlent pas de la même chose. En fait, on a même besoin de ce 3e point de vue (défini comme quiconque a accès à plus que seulement son beetle) pour formuler la règle du jeu, qui est qu’on appelle beetle quoi que ce soit qui se trouve dans la boîte et pas un type d’objet particulier comme chaque participant a toutes les raisons du monde de le supposer tant qu’il n’a pa accès aux beetles des autres ou seulement un accès indirect par le langage 

 

Ça fait quand même drôlement penser au complexe de castration cette histoire de beetles 

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17 minutes ago, Boz said:

D'ailleurs, il y a des gens qui ont déjà essayé de chiffrer le coût de la conscience ? Parce que j'ai l'impression qu'on est un peu conditionnés à prendre pour évident que c'est que du bénef (comme si on était le pinacle nécessaire de l'évolution).

Il y a aussi toute une tradition de pensée qui voit la conscience comme un épiphénomène, un truc qui est là par hasard et qui n'a in fine aucun impact sur quoi que ce soit.

 

Puis il y a les gens comme Ligotti qui vont au bout de la logique (je précise tout de même au cas où que c'est à lire avec une saine dose de recul) :

Quote

https://en.wikipedia.org/wiki/The_Conspiracy_Against_the_Human_Race

 

Ligotti assumes a pessimistic outlook from the outset of the book. Taking as a starting assumption the premise that "being alive is not all right," or that in general suffering outweighs pleasure, he argues that the existence of consciousness entails a tragedy: The more conscious one is of the meaningless and often horrifying nature of the world (which is referred to as being "malignantly useless"), the more one wishes not to be aware of this fact, and so overly conscious beings must constantly engage in exercises which limit their awareness of the negative aspects of existence, either intentionally or instinctively. This makes consciousness something that "should not be," and humanity's attempts at either coping with, ignoring, or actively suppressing this fact drive a significant portion of modern society's obsessions, such as the quest for healthy living (despite the fact that everyone dies regardless), art and horror (as acts of sublimation), and the desire to have children (as a futile attempt at a form of genetic immortality), among many other common behavioral norms. Ligotti argues that the only complete escape from the predicament of consciousness is either to undergo ego death, which very few humans successfully achieve, or for humanity to cease existing, preferably through voluntary human extinction (which Ligotti believes is highly unlikely to ever happen), but which may also be achieved on an individual level through death, although that may entail further suffering in the process, and is therefore not always worth the increased pain.

 

Ligotti posits that very few people would be willing to be born in the past (due in part to the inevitable increased suffering of inferior medical care), but that very few people feel bad about being alive in the present, despite the strong possibility that future generations will feel the same about us that we feel towards the past (that their lives were filled with more suffering than we would be willing to bear). Philosophical pessimism is not held or even widely considered by most humans, which, according to Ligotti, is because of its terrifying implications rather than the strength of the arguments for or against it.

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il y a 10 minutes, Lancelot a dit :

Il y a aussi toute une tradition de pensée qui voit la conscience comme un épiphénomène, un truc qui est là par hasard et qui n'a in fine aucun impact sur quoi que ce soit.

 

Puis il y a les gens comme Ligotti qui vont au bout de la logique (je précise tout de même au cas où que c'est à lire avec une saine dose de recul) :

Much edgy content. Ce mec me rappelle une blague juive un juif qui dit à l’autre la vie est tellement horrible il vaudrait mieux n’être pas né (ou ne pas être conscient). L’autre répond oui mais qui a eu cette chance? Pas une personne sur 50k

Il faut qu’ils lisent Nietzsche ces gens 

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Le 21/03/2022 à 14:52, Boz a dit :

Ou les Stoïciens.

Désolé, je continue à trouver ça edgy too

Citation

C’est « conformément à la nature » que vous voulez vivre ! Ô nobles stoïciens, quelle duperie est la vôtre ! Imaginez une organisation telle que la nature, prodigue sans mesure, indifférente sans mesure, sans intentions et sans égards, sans pitié et sans justice, à la fois féconde, et aride, et incertaine, imaginez l’indifférence elle-même érigée en puissance, — comment pourriez-vous vivre conformément à cette indifférence ? Vivre, n’est-ce pas précisément l’aspiration à être différent de la nature ? La vie ne consiste-t-elle pas précisément à vouloir évaluer, préférer, à être injuste, limité, autrement conformé ? Or, en admettant que votre impératif « vivre conformément à la nature » signifiât au fond la même chose que « vivre conformément à la vie » — ne pourriez-vous pas vivre ainsi ? Pourquoi faire un principe de ce que vous êtes vous-mêmes, de ce que vous devez être vous-mêmes ? — De fait, il en est tout autrement : en prétendant lire, avec ravissement, le canon de votre loi dans la nature, vous aspirez à toute autre chose, étonnants comédiens qui vous dupez vous-mêmes ! Votre fierté veut s’imposer à la nature, y faire pénétrer votre morale, votre idéal ; vous demandez que cette nature soit une nature « conforme au Portique » et vous voudriez que toute existence n’existât qu’à votre image — telle une monstrueuse et éternelle glorification du stoïcisme universel ! Malgré tout votre amour de la vérité, vous vous contraignez, avec une persévérance qui va jusqu’à vous hypnotiser, à voir la nature à un point de vue faux, c’est-à-dire stoïque, tellement que vous ne pouvez plus la voir autrement. Et, en fin de compte, quelque orgueil sans limite vous fait encore caresser l’espoir dément de pouvoir tyranniser la nature, parce que vous êtes capables de vous tyranniser vous-mêmes — car le stoïcisme est une tyrannie infligée à soi-même, — comme si le stoïcien n’était pas lui-même un morceau de la nature ?… Mais tout cela est une histoire vieille et éternelle : ce qui arriva jadis avec les stoïciens se produit aujourd’hui encore dès qu’un philosophe commence à croire en lui-même. Il crée toujours le monde à son image, il ne peut pas faire autrement, car la philosophie est cet instinct tyrannique, cette volonté de puissance la plus intellectuelle de toutes, la volonté de « créer le monde », la volonté de la cause première.

 

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Blague à part, je ne vois aucune contradiction entre l'idée que la nature soit totalement indifférente et que nous soyons le résultat d'un processus évolutif aveugle avec l'idée qu'on puisse discuter d'une nature humaine (dans un sens différent du mot nature) et que les Stoïciens aient fait d'excellentes découvertes à son sujet pour qui veut mener ce qu'ils appellent une vie bonne et atteindre la tranquillité. Il suffit de les concevoir comme des philosophes/psychologues plutôt que comme des philosophes purement analytiques au sens moderne (ce que je fais allègrement pour ma part, sue me comme dirait l'autre).

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Nietzsche ne dit pas qu'on ne peut pas discuter d'une nature humaine (même si je préfère éviter le terme et que dans Nietzsche il n'aurait pas de sens). L'idée est que comme la nature est totalement indifférente à notre existence, on ne peut pas avoir pour projet éthique de conformer notre existence à la nature. Ça ne marchera pas. Ensuite on atteint toujours et on tend naturellement vers la tranquillité (dans la mort) donc on peut aussi penser que faire autre chose de sa vie peut être une bonne idée. Dans Le Gai Savoir, §1, on trouverait une idée équivalente avec la critique de la volonté de conservation: on est naturellement poussés à se conserver, il n'y a pas à le vouloir! c’est la nature qui détermine le modus vivendi, car il n’y a pas autre chose que la nature. Ce rôle déterminant de la nature et de la vie, qui fait de la morale une manifestation contre-nature (héritage kantien), est analysé dans le Crépuscule des idoles, "Les quatre grandes erreurs", §1, à propos de la diète de Cornaro, qui attribue sa longévité à son régime alimentaire, comme s’il était libre de choisir un autre régime. Il ne l’est pas : s’il choisit un régime trop mauvais, il meurt. Bien sûr, the catch est qu'ils prétendent lire les canons de leurs lois dans la nature, mais ils imposent en fait à la nature leur loi (héritage kantien bis). La philosophie "crée le monde à son image", c’est pourquoi N écrit : "étonnants comédiens qui vous trompez vous-mêmes !" Et ainsi, la morale fait son retour, sous la forme, qualitativement différente, de la volonté de ne pas être trompé, qui est très utilitaire, malgré que les "positivistes" en aient. La volonté de vérité ne peut pas être dans son principe volonté de ne pas être trompé: cette volonté ne peut en être que la conséquence morale.

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19 hours ago, Vilfredo said:

L'idée est que comme la nature est totalement indifférente à notre existence, on ne peut pas avoir pour projet éthique de conformer notre existence à la nature. Ça ne marchera pas. Ensuite on atteint toujours et on tend naturellement vers la tranquillité (dans la mort) donc on peut aussi penser que faire autre chose de sa vie peut être une bonne idée

J'ai beau tourner et retourner ça dans ma tête depuis hier, je n'y comprends rien. Alors je n'ai aucune véritable base en philo et c'est Nietzsche donc j'ai conscience que la probabilité que ça indique juste que je ne comprends tout simplement pas ce qu'il veut dire réellement est très élevée, mais j'ai vraiment l'impression d'un mauvais jeu de mots sur le sens du mot nature. Je ne comprends pas comment tu passes de "nature indifférente" (vision moderne avec laquelle je suis 100% OK) à "on ne peut pas avoir pour projet éthique de conformer notre existence à la nature" (en fait je ne comprends pas ce bout de phrase du tout).

Il faut me parler comme à un demeuré (peut-être @Mégille puisqu'il est prof et qu'il doit bien parfois devoir simplifier des idées abstraites ?) : encore une fois, le fait que la nature soit indifférente n'a pour moi aucun lien avec l'idée qu'on peut quand même tirer des caractéristiques de notre espèce des principes pour mener sa vie d'une certaine façon (on a quand même des milliers d'années d'observations sur la nature du désir, des émotions, des épreuves de l'existence, des tentations j'en passe et des meilleures, et puis la psycho moderne, la psycho évolutionniste etc).

En plus, la tranquillité décrite par les Stoïciens n'a rien à voir avec la "tranquillité" de la non-existence qu'est la mort, c'est un état mental dans lequel les émotions négatives sont ressenties moins fortement et sont mieux contrôlées, ce qui débouche à terme (je ne fais que paraphraser les auteurs antiques) sur un sentiment de joie et de paix. 

Moi quand je lis ton paragraphe de Nietzsche j'ai l'impression d'un galopin malicieux qui joue sur la polysémie du mot nature pour se foutre de mecs qui ont vécu 2000 ans avant lui en faisant semblant de ne pas comprendre leur propos, en tissant un bel homme de paille qui passe crème parce que c'est un type brillant qui écrit super bien. Avec un petit côté romantique torturé "parce que je le vaux bien" pour faire classe.

 

Bon j'exagère exprès hein ;) , mais vraiment je comprends rien à ce qu'il raconte. 

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Je suis heureux de te parasiter le cerveau mais je crois que le point de Nietzsche est plus simple que tu ne t'imagines: on ne peut pas se conformer à quelque chose de chaotique. Il faut vouloir créer une forme dans ce chaos. La beauté naturelle, ça n'existe pas. Il ne faut pas y voir un argument sur la nature humaine.

 

Il y a 5 heures, Boz a dit :

En plus, la tranquillité décrite par les Stoïciens n'a rien à voir avec la "tranquillité" de la non-existence qu'est la mort, c'est un état mental dans lequel les émotions négatives sont ressenties moins fortement et sont mieux contrôlées, ce qui débouche à terme (je ne fais que paraphraser les auteurs antiques) sur un sentiment de joie et de paix. 

L'ataraxie quoi, l'absence de troubles. Ce qui est malheureux, c'est qu'on doive faire un effort pour maintenir cet équilibre. Heureusement, avec la mort, même plus besoin de faire cet effort. Vivement.

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Je fais deux lectures très lancelotiennes en ce moment: Second Philosophy de Maddy, qui explique comment on peut résoudre empiriquement les questions transcendentales, et Freud Biologist of the Mind de Frank J Sulloway qui présente une interprétation empirique biologique de la théorie freudienne; une sorte de biographie intellectuelle. C’est un peu ancien bien sûr mais c’est un bel ouvrage. I’ll be back 

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  • 1 month later...

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