Aller au contenu

Il N'y A Pas Que Ségolène Qui Ment


Freeman

Messages recommandés

Posté

La source : NEWSMAG. Comment peut-on changer les français si les médias ne font pas leur boulot correctement ? De toute façon, je me suis toujours méfié de la presse et je ne regarde quasiment plus les infos.

__________________________________

L’ABC de la manipulation

La presse francophone continue à me surprendre. L’hebdomadaire français L’Express a publié lundi un article inspiré par plusieurs déserteurs américains ayant fui au Canada, sous la plume de Gilbert Charles, et qui vise par ce biais à décrire un phénomène apparemment massif, conséquence supposée du moral exécrable au sein des Forces armées américaines et du refus croissant suscité par les opérations en Irak. Ce texte tente également de montrer les difficultés insolubles que poserait le recrutement, et la nécessité d’engager des individus aussi peu fortunés qu’informés pour remédier aux pénuries de jeunes adultes que compensent tant bien que mal des réservistes. En d’autres termes, L’Express brosse le portrait d’un outil militaire au bord de l’effondrement, usé par une opération impopulaire et dépeuplé par une politique désastreuse. Il n’y a qu’un seul problème : rien de tout cela n’est vrai. Cet article donne à des récits individuels un sens général strictement contraire à la réalité, et forme de ce fait un exemple de manipulation flagrante qu’il vaut la peine d’analyser.

Le premier mensonge n’est pas nouveau : il s’agit de ce fameux chiffre de 5500 déserteurs prétendument annoncé par le Pentagone, qui joue un rôle central dans la dimension du phénomène supposé. J’ai déjà montré dans ce carnet que ce chiffre correspond au nombre de militaires absents sans autorisation dénombrés depuis un peu plus de 2 ans, et que la plupart des cas sont dus à des emprisonnements civils, consécutifs à des crimes ou des délits commis en congé. C’est la chaîne CBS qui a clamé en novembre dernier que le Pentagone reconnaissait 5500 déserteurs, et donc lancé la première ce mensonge ; les autorités militaires américaines ont démenti ces assertions en montrant la cause des absences sans autorisation. Gilbert Charles a donc repris sans vérifier d’un autre média une « information » dont la source supposée a nié l’authenticité, et il l’a sans autre recyclée en écartant tout doute à son sujet. Il est vrai que sans elle, son article n’existait pas.

Le deuxième mensonge s’inscrit dans la lignée du premier : il consiste à affirmer que le phénomène supposé massif des déserteurs est en augmentation, et à prédire « une ruée » si le Canada leur accordait l’asile politique. Charles est certes un brin embarrassé pour fournir les faits susceptibles de fonder son assertion, puisque seuls 8 déserteurs américains sont selon lui recensés au Canada et que 67 demandes d’objection de conscience ont été déposées en 2004 ; il en est donc réduit à affirmer que « des centaines » d’autres se cachent dans la clandestinité. En réalité, comme je l’ai également déjà montré, le nombre de militaires américains absents sans autorisation a nettement diminué ces dernières années, passant de 4597 en 2001 à 2376 en 2004 pour l’US Army, et de 1594 à 1227 pour les Marines. Que Gilbert Charles taise cette information significative suffit à illustrer la malhonnêteté intellectuelle de sa démarche : les faits ne doivent pas faire obstacle au message recherché.

Le troisième mensonge est un mythe déjà éculé, celui du moral « au plus bas » des GI’s. Cette notion est essentielle pour faire accroire le caractère contagieux des désertions, mais Charles ne peut fournir que des faits périphériques pour tenter de démontrer son affirmation : un taux de 72% de militaires « insatisfaits de leurs conditions de vie » dans une enquête non citée prêtée à l’US Army, ou 3000 appels par mois sur la « GI rights hotline ». Là encore, la réalité contredit ces assertions, et le moral au sein des Forces armées doit être considéré comme élevé : une enquête du quotidien Army Times auprès de 4165 militaires a par exemple montré que 73% d’entre eux étaient satisfaits de leur situation et prêts à se réengager. Le taux de rétention est en effet un indice qui ne trompe pas : il a dépassé les 100% dans toutes les unités combattantes l’an dernier, et oscille entre 94% et 96% des objectifs pour les 4 premiers mois de l’année fiscale 2005, malgré une économie américaine qui affiche une santé remarquable. Les reportages effectués ces jours en Irak ou en Afghanistan tendent d’ailleurs à confirmer la haute tenue du moral dans les rangs.

Le quatrième mensonge relève également d’un cliché ancien, selon lequel les jeunes adultes américains s’engagent au sein des armées avant tout pour des motifs économiques, et sont des individus peu instruits et prioritairement recrutés dans des milieux défavorisés. Cette notion permet à l’auteur de victimiser les GI’s pour mieux accabler leurs supérieurs, mais Charles ne fournit cette fois pas même un fait pour la confirmer. En fait, le 90% des jeunes adultes qui s’engagent dans l’US Army sont des bacheliers, alors que les jeunes issus de milieux défavorisés ont précisément plus de difficultés à obtenir leur baccalauréat. De plus, la forte réduction des nouvelles recrues de couleur – traditionnellement motivées par les avantages économiques – indique l’évolution des motifs qui poussent les candidats à la vie militaire. Les incitations financières ont certes une importance considérable, surtout pour les familles des militaires, mais l’impact du patriotisme après le 11 septembre – malgré l’absence d’étude fournissant des éléments chiffrés – ne doit pas être négligé.

Le cinquième mensonge consiste à dire que les difficultés de recrutement imposent le recours à des réservistes dans les opérations en Irak. Il vaut la peine de noter que l’US Army, pour la première fois depuis 5 ans, n’a pas réussi en février dernier à atteindre ses objectifs de recrutement mensuels – 5114 contre 7050 – contre un résultat de 100,8% l’an passé. Cependant, ces chiffres montrent également à quel point les propos de Charles sont erronés : affirmer que le manque de 2000 recrues dans l’armée d’active entraîne la présence de 60'000 membres de la Garde nationale et de la réserve en Irak est risible. Leur proportion de 40% s’explique en fait par deux raisons : d’une part, certaines fonctions essentielles sont prioritairement remplies par des réservistes (comme la police militaire ou les affaires civiles) ; d’autre part, c’est le nombre insuffisant de divisions d’active (10 aujourd’hui, 18 en 1991) qui rend nécessaire l’envoi de brigades et de divisions de la Garde. Le volume insuffisant et l’alimentation inadaptée des Forces armées US sont la cause de leur recours important aux composantes non actives.

Ces cinq mensonges identifiés et corrigés, que reste-t-il du texte de Gilbert Charles ? Le récit de quelques déserteurs américains réfugiés au Canada, présentés sous un jour favorable sans le moindre sens critique à leur endroit (on parle par exemple de Pablo Paredes, ce marin emprisonné pour avoir refusé de prendre la mer en direction de l’Irak, sans rappeler que son navire, l’USS Bonhomme Richard, a d’abord participé intensivement aux opérations d’aide humanitaire en Asie du Sud). Mais la tentative de décrire un phénomène croissant et significatif est un échec complet. On veut bien croire que les déserteurs sont au nombre de quelques dizaines, voire quelques centaines, malgré l’absence d’indice probant d’une telle ampleur ; sur des Forces armées qui comptent 2,2 millions d’hommes et de femmes, le problème reste singulièrement minoritaire. Par ailleurs, il faut noter que depuis le 11 septembre 2001, plus de 12'000 militaires américains libérés de leurs obligations contractuelles se sont portés volontaires pour servir à nouveau. Un chiffre hélas absent de L’Express…

Les Forces armées américaines ont naturellement des difficultés de taille en matière de personnel, et le rythme des opérations en cours commence à faire sentir ses effets sur la disponibilité des forces terrestres (l’Air Force et la Navy connaissent au contraire des sureffectifs problématiques). Mais rien de tout cela ne peut justifier les allégations stupéfiantes de Gilbert Charles, et il est difficile de ne pas voir derrière son article la volonté presque irrépressible de décrire sous un angle apocalyptique l’état de la première armée du monde. La méthode est simple : prendre une information non représentative, l’extraire de son contexte et l’utiliser pour construire un sens totalement éloigné de la réalité, mais conforme à l’idée – voire à l’idéologie – de l’auteur. Une sorte d’ABC de la désinformation pratiquée au quotidien, ou plutôt à la petite semaine, qui fait froid dans le dos.

Posté par Ludovic Monnerat à 08:36 PM | Commentaires (3) | Pisteur (0)

Posté
[…]

Posté par Ludovic Monnerat à 08:36 PM | Commentaires (3) | Pisteur (0)

Ce qui est hallucinant, ce sont surtout les fantasmes du sieur Ludovic Monnerat au sujet de cet article de l'Express, accessible ici:

http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/….asp?ida=432257

Le seul point discutable de l'article de l'Express est le nombre de déserteurs. Effectivement cet article laisse à penser que tous les déserteurs ont été causés par l'invasion de l'Irak, alors qu'en fait seuls 7 déserteurs américains ont demandé l'asile politique au Canada.

Pourtant, l'insuffisance des effectifs de l'armée US et les difficultés de ses recruteurs sont réelles. A la différence de Monnerat (qui s'appuie sur un article du Washington Times qui lui-même ne fait que recracher un communiqué du Pentagone), je prends un journal sérieux, le New York Times:

http://www.nytimes.com/2005/03/27/nyregion/27recruit.html?

Je cite la première phrase:

The Army's recruiters are being challenged with one of the hardest selling jobs the military has asked of them in American history, and many say the demands are taking a toll.

Une autre citation:

Gen. Richard A. Cody, Army vice chief of staff, told Congress on March 16 that he is concerned about whether the Army can continue to provide the troops the nation needs.

On apprend dans cet article que 37 recruteurs de l'armée US ont eux-mêmes déserté depuis octobre 2002, que toutes les branches de l'armée ont des difficultés de recrutement, etc…

Les autres points de Ludovic Monnerat tiennent du fantasme, comme l'encart intitulé "Superpatriotes" dans l'article de l'Express le prouve.

D'autres fantasmes du même personnage sont accessibles ici:

http://www.ludovicmonnerat.com

Posté

Monnerat est ce "spécialiste" auquel se réfèrent tous les fanatiques de la guerre qui se prendraient une branlée ou se cacheraient sous une table à la première rixe de café.

Invité jabial
Posté
Monnerat est ce "spécialiste" auquel se réfèrent tous les fanatiques de la guerre qui se prendraient une branlée ou se cacheraient sous une table à la première rixe de café.

Sans défendre la guerre, ce n'est pas un argument sauf conscription. Ce n'est pas parce que tu as peur de faire quelque chose que faire cette chose est mal.

Posté

Voila ce qui arrive quand on pêche ses sources chez les PF, Freeman :icon_up:

Non, blague à part, j'avais vu cet article, et j'avais bien gobé sa prose (très bien écrite) aussi.

Et, somme toute, ni l'armée américaine ni les médias français n'ont besoin de leçons de propagande.

Invité jabial
Posté
La guerre c'est le crime.

Ca dépend de ce que tu entends par guerre. Si tu entends bombarder, oui, c'est un crime contre les irakiens. Si tu entends dépenser l'argent public, oui, c'est un crime contre les américains. Si tu entends intervenir dans un territoire étranger, la notion de territoire étranger n'a aucun sens en Droit libertarien, et si cette intervention est privée et vise uniquement des criminels ce n'est pas un crime.

Posté
Ca dépend de ce que tu entends par guerre. Si tu entends bombarder, oui, c'est un crime contre les irakiens. Si tu entends dépenser l'argent public, oui, c'est un crime contre les américains. Si tu entends intervenir dans un territoire étranger, la notion de territoire étranger n'a aucun sens en Droit libertarien, et si cette intervention est privée et vise uniquement des criminels ce n'est pas un crime.

Bien sûr que la notion de "territoire étranger" a un sens. Les pro-guerre le refusent généralement puisqu'ils souhaitent étendre l'influence de l'Etat qui a leurs faveurs et qui commet l'agression. (Je ne dis pas que c'est ton cas, je le précise.)

Ensuite, ce n'est pas parce que l'intervention est privée qu'elle en devient nécessairement justifiée.

Invité jabial
Posté
Bien sûr que la notion de "territoire étranger" a un sens. Les pro-guerre le refusent généralement puisqu'ils souhaitent étendre l'influence de l'Etat qui a leurs faveurs et qui commet l'agression. (Je ne dis pas que c'est ton cas, je le précise.)

La notion de territoire étranger n'a aucun sens. Aucun. Ce qui a un sens, c'est la notion de propriété d'autrui, point final.

Ensuite, ce n'est pas parce que l'intervention est privée qu'elle en devient nécessairement justifiée.

Bien entendu. Un acte criminel privé est par définition non justifié.

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...