Absinthe, Dépénalisation En Suisse

[Chitah]

Je n'ai jamais entendu parler de cette histoire, quelqu'un est au courant?

Sans le goût d’interdit, l’absinthe n’est plus la même

ALCOOL Un an après la levée de l’interdiction de la Fée verte, «repentis» et clandestins s’opposent. Et pas uniquement sur le terrain gustatif.

ANTOINE GROSJEAN

Depuis un an, la «bleue» n'est plus sur liste noire. Pourtant, il subsiste des zones grises autour de la Fée verte. Malgré la levée de l'interdiction de l'absinthe, de nombreux bouilleurs de cru du Val-de-Travers continuent à distiller en eaux troubles.

On estime qu'il y avait auparavant entre 50 et 200 clandestins, produisant annuellement entre 50 000 et 100 000 litres d'absinthe. Aujourd'hui, la production officielle suisse s'élève à 130 000 litres, dont plus de 90% proviennent du Val-de-Travers. Mais, dans le vallon neuchâtelois, seuls treize distillateurs travaillent sous concession de la Régie fédérale des alcools. Quant au reste, certains ont peut-être remisé leur alambic au placard, mais les autres continuent à narguer les autorités. Combien sont-ils et quelle quantité produisent-ils? Mystère, loi du silence oblige.

Ce qui est sûr, c'est que leur gnôle clandestine fait toujours le bonheur des puristes. Le mythique breuvage ne serait plus le même depuis qu'il a perdu son goût d'interdit. «L'absinthe légale n'est pas appréciée au Val-de-Travers et dans le canton», assure Pierre-André Delachaux, historien vallonnier érudit sur le sujet. «Devenue une boisson ordinaire, elle a perdu toute sa saveur. D'un mythe, on a fait un folklore et une affaire commerciale.»

La vérité sur la thuyone?

Producteurs patentés et clandestins affirment chacun que leur produit est le plus authentique. On a beaucoup glosé sur la fameuse thuyone, la molécule accusée de rendre fou. Limitée dans la «bleue» légale à 35 mg/kg, elle serait présente en plus grande quantité dans l'absinthe de contrebande. Pour en avoir le cœur net, le Laboratoire cantonal neuchâtelois a procédé à des analyses comparatives. Et, contrairement aux idées répandues, il se trouve que le taux de thuyone était plus élevé dans l'absinthe légale. Mais ce test n'était pas exhaustif, or il y a autant de recettes qu'il y a de distillateurs.

Pour Yves Kübler, patron de la plus grande distillerie d'absinthe, tenant plus de la moitié du marché, la «bleue» légale est plus authentique, car elle est faite avec des plantes cultivées au Val-de-Travers, alors que les clandestins devaient importer la petite et la grande absinthe d'Espagne ou d'Europe de l'Est. Certains nous ont pourtant affirmé avoir toujours utilisé des plantes endémiques. Allez savoir où est la part du mythe.