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Al Et La Décentralisation


John Loque

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J'ai fais quelques bonds en écoutant le discours de Edouard Fillias devant le congrès fondateur d'Alternative Libérale, notamment lorsqu'il a plaidé pour la suppression des départements au profit de "vraies" régions. Hans-Hermann Hoppe a démontré (ici et au chapitre V On Centralization and Secession de son livre Democracy, The God That Failed) qu'au plus le pouvoir s'exerce à un niveau proche de l'individu, au plus est forte la contrainte externe qui pèse sur le pouvoir et limite son expansion. Cette contrainte (qui s'explique par la baisse des coûts de sortie) est de loin plus forte que la contrainte interne, sensée être incarnée par la constitution (on a vu ce qu'il en était…). Les libéraux authentiques doivent donc se battre pour que chaque "compétence" étatique soit exercée au niveau de pouvoir le plus proche de l'individu (subsidiarité ascendante). Lors du référendum sur la constitution européenne, des gens comme Cécile Philippe ou Pascal Salin ne s'y sont d'ailleurs pas trompés. Ils ont appelé à rejeter le texte, non pas parce qu'il n'était pas assez libéral, mais bien parce qu'il rajoutait une couche institutionnelle et éloignait le pouvoir de décision de son détenteur légitime : l'individu.

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La position de Salin sur le TCE est exprimée ici : Les bienfaits de la victoire du non.

On pouvait craindre en effet que, dans un processus de centralisation des décisions, la mécanique même des négociations conduise à un renforcement continuel de l'interventionnisme européen, alors que, dans une Europe décentralisée, les pays qui le désirent peuvent mettre en oeuvre des solutions plus libérales comme le font maintenant avec succès un grand nombre de pays anciennement communistes – de telle sorte que l'on peut espérer la mise en oeuvre d'un processus de contagion des bonnes idées par l'exemple.

Jacques de Guénin défend la position inverse ici : Il faut voter oui à la Constitution européenne !

Certes, nous pouvons déplorer les aspects les plus constructivistes de la construction européenne. Mais faut-il pour autant être assez aveugle pour ne pas voir que l’Europe nous a permis des avancées libérales qu’aucun de nos gouvernements n’aurait accomplies de lui-même ?

Paradoxalement, c’est la Commission, si critiquée pour son dirigisme, qui a poussé le plus à la libéralisation des échanges. Mais qui est mieux à même que les fonctionnaires de la Commission, obligés de se déplacer d’un pays à l’autre, d’apprécier les nuisances causées par les contrôles aux frontières ?

Les règles de l’Union nous ont peu à peu amenés à ouvrir à la concurrence les services dits publics, c’est-à-dire ceux qui prennent le public en otage pour défendre les intérêts de leurs salariés. Chaque fois nous y avons gagné. Et cela ne fait que commencer.

Voilà - mis à part le pseudo-argument de la paix repris par tous les politocards et autres intellectuels de comptoirs - comment Jacques de Guénin défend le "oui" : il vante les mérites de la dictature technocratique bruxelloise. Pas besoin de s'étendre sur les dangers de ce genre de raisonnement… :icon_up:

Posté
La position de Salin sur le TCE est exprimée ici : Les bienfaits de la victoire du non.

Jacques de Guénin défend la position inverse ici : Il faut voter oui à la Constitution européenne !

Voilà - mis à part le pseudo-argument de la paix repris par tous les politocards et autres intellectuels de comptoirs - comment Jacques de Guénin défend le "oui" : il vante les mérites de la dictature technocratique bruxelloise. Pas besoin de s'étendre sur les dangers de ce genre de raisonnement… :icon_up:

Est-il faux de dire que c'est l'Europe qui a forcé l'Etat français a briser certains monopoles d'Etat ? Est-il faux de dire que moins nous avons de monopoles d'Etat mieux c'est ?

Posté
J'ai fais quelques bonds en écoutant le discours de Edouard Fillias devant le congrès fondateur d'Alternative Libérale, notamment lorsqu'il a plaidé pour la suppression des départements au profit de "vraies" régions. Hans-Hermann Hoppe a démontré (ici et au chapitre V On Centralization and Secession de son livre Democracy, The God That Failed) qu'au plus le pouvoir s'exerce à un niveau proche de l'individu, au plus est forte la contrainte externe qui pèse sur le pouvoir et limite son expansion. Cette contrainte (qui s'explique par la baisse des coûts de sortie) est de loin plus forte que la contrainte interne, sensée être incarnée par la constitution (on a vu ce qu'il en était…). Les libéraux authentiques doivent donc se battre pour que chaque "compétence" étatique soit exercée au niveau de pouvoir le plus proche de l'individu (subsidiarité ascendante). Lors du référendum sur la constitution européenne, des gens comme Cécile Philippe ou Pascal Salin ne s'y sont d'ailleurs pas trompés. Ils ont appelé à rejeter le texte, non pas parce qu'il n'était pas assez libéral, mais bien parce qu'il rajoutait une couche institutionnelle et éloignait le pouvoir de décision de son détenteur légitime : l'individu.

On en discute par ailleurs dans un autre fil, la conclusion générale à laquelle on est arrivé après quelques pages de discussions, c'est qu'a priori on s'en fout de savoir quel échelon on élimine, pourvu qu'on en élimine un.

Il faudrait examiner les ressources exactes des régions et leur provenance, afin de vérifier si l'argumentation de Hoppe, en supposant qu'elle soit vraie, s'applique à la France, je m'y emploie de suite.

Exemple : en 2004, sur le total de 16,7 milliards de ressources pour les régions françaises), 9,3 provenaient de transferts reçus de la part du Léviathan central, et 4,7 milliards de leur fiscalité propre.

Ce doit être tout à fait pareil pour les régions. Si la part de la fiscalité propre était de 100%, alors le raisonnement de Hoppe s'appliquerait (à supposer qu'il soit juste).

Du coup, la position d'Edouard semble plus juste que celle de Hoppe en ce qui concerne la France.

Notons que là où la fiscalité directe représente 28% du budget des régions en 2004, elle représentait près de 60% en 1998 (depuis, beaucoup de choses ont été transférées aux régions, comme des trucs ferroviaires, etc…)

Voir ceci : http://www.dgcl.interieur.gouv.fr/Publicat…m%E9tropole.pdf

Posté

Effectivement, la décentralisation ne peut-être que très partielle, i.e. quand seules les compétences - donc les dépenses publiques - sont transférées. Dans ce cas de figure, la concurrence ne joue que sur la qualité de la dépense publique, la fiscalité étant un donné. C'est pourquoi les libéraux doivent militer pour l'autonomie fiscale la plus large possible.

Tous les chiffres que tu donnes et sur lesquels vous semblez vous appuyer sont sans intérêt réel. Le raisonnement de Hoppe est praxéologique et évidemment ceteris paribus. Nous en avions discuté avec Xavier Méra, RH et Melo et ils prenaient le cas de la Belgique pour contrer le raisonnement. Ca n'a pas de sens. C'est comme si je t'affirmais que la hausse du niveau de vie au XXème siècle est une conséquence directe de l'augmentation de l'interventionnisme.

Ce que dit Hoppe, c'est que toutes choses égales par ailleurs, si le territoire français était deux fois plus grand, par exemple, l'interventionnisme serait supérieur à ce qu'il est (de combien, on ne le sait pas).

Dans Democracy… il explique d'ailleurs la lente émergence du capitalisme au Moyen Age par la "balkanisation" qui règnait à l'époque.

Une dernière remarque : le raisonnement qui prévaut ici est précisément le même que celui qui sous-tend la théorie de la concurrence fiscale. Si vous rejettez l'un, alors vous rejettez les deux, il n'y a pas d'autre issue.

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Est-il faux de dire que c'est l'Europe qui a forcé l'Etat français a briser certains monopoles d'Etat ?
Non.
Est-il faux de dire que moins nous avons de monopoles d'Etat mieux c'est ?
Non.

C'est plutôt marrant de constater que les libéraux démocrates sont les premiers à louer des procédés quasi-dictatoriaux… :icon_up:

Posté
Dans le même ordre d'idées, voir l'article de Murray Rothbard: Nations by Consent: Decomposing the Nation-State

Merci Xara. Rothbard ne dit pas grand chose dans ce texte d'un point de vue strictement économique, je n'ai quasiment noté que ça :

A common response to a world of proliferating nations is to worry about the multitude of trade barriers that might be erected. But, other things being equal, the greater the number of new nations, and the smaller the size of each, the better. For it would be far more difficult to sow the illusion of self sufficiency if the slogan were "Buy North Dakotan" or even "Buy 56th Street" than it now is to convince the public to "Buy American." Similarly, "Down with South Dakota," or a fanion, "Down with 55th Street," would be a more difficult sell than spreading fear or hatred of the Japanese. Similarly, the absurdities and the unfortunate conse-quences of fiat paper money would be far more evident if each province or each neighborhood or street block were to print its own currency. A more decentralized world would be far more likely to turn to sound market commodities, such as gold or silver, for its money.
Posté
Merci Xara. Rothbard ne dit pas grand chose dans ce texte d'un point de vue strictement économique, je n'ai quasiment noté que ça :

Oui, bien sûr, il ne dit pas grand chose du point de vue étroitement économique, en dehors du passage que tu cites (merci, j'avais la flemme de le retrouver). Ce qui est intéressant, me semble-t-il, c'est le lien entre cette considération et les considérations culturelles, politiques, etc. C'est ce qui nous manque souvent pour prendre des positions dans le débat politique et y avoir une place, alors que nous nous contentons trop de rappeler l'déal, et de constater qu'on n'y est pas (ce qui n'aide pas beaucoup pour influencer le cours de l'histoire).

Posté

Sinon, tu es d'accord sur le fait que cette théorie doit être incorporée au programme d'AL ?

On ne parle même pas d'anarcapie ici, le principe de subsidiarité ascendante (le pouvoir vient d'en bas, pas d'en haut) était puissamment ancré dans l'esprit révolutionnaire américain. C'est à mon avis dommageable aux libéraux de ne pas connaître ou de ne pas maîtriser cela.

Invité (=S=)
Posté
… plus le pouvoir s'exerce à un niveau proche de l'individu, au plus est forte la contrainte externe qui pèse sur le pouvoir et limite son expansion. Cette contrainte (qui s'explique par la baisse des coûts de sortie) est de loin plus forte que la contrainte interne, sensée être incarnée par la constitution (on a vu ce qu'il en était…). Les libéraux authentiques doivent donc se battre pour que chaque "compétence" étatique soit exercée au niveau de pouvoir le plus proche de l'individu (subsidiarité ascendante).

Je ne suis pas sûr d'être plus libre si l'on instaurait l'échelon du quartier (à Colmar nous sommes loin de pouvoir faire des arrondissements), par contre je suis intimement persuadé que la communauté de communes découpée selon les limites d'un bassin d'emploi/bassin de vie serait bien plus rationelle que les communes, et je ne crois pas faire entorse à mon libéralisme en les défendant même si du coup je descends d'un cran dans la subsidiarité.

Quant au département, même si c'est peut-être moins vrai ailleurs qu'en Alsace où il n'y en a que deux, il parait être un échelon superflu qui n'a pas sa place entre les deux pôles locaux que sont la région et la communauté de commune. (la suite étant : l'Europe, une gouvernance mondiale… 4 au lieu de 6)

Posté
Effectivement, la décentralisation ne peut-être que très partielle, i.e. quand seules les compétences - donc les dépenses publiques - sont transférées. Dans ce cas de figure, la concurrence ne joue que sur la qualité de la dépense publique, la fiscalité étant un donné. C'est pourquoi les libéraux doivent militer pour l'autonomie fiscale la plus large possible.

D'accord, pour le reste que penses-tu de ce débat-là, qui parle précisément de décentralisation : http://www.liberaux.org/index.php?showtopic=25919&st=0

Une dernière remarque : le raisonnement qui prévaut ici est précisément le même que celui qui sous-tend la théorie de la concurrence fiscale. Si vous rejettez l'un, alors vous rejettez les deux, il n'y a pas d'autre issue.

Pour ce qui concerne la concurrence fiscale, je crois que la mobilité des gens est telle(ment faible en fait) qu'il me semble que ce concept a du mal à trouver une réalisation pratique.

Je ne suis pas certain qu'une famille déménagerait simplement pour payer moins d'impôt, la décision est complexe et a un grand impact sur la vie de celle-ci, il faut d'autres choses à mon avis.

Posté
Je ne suis pas sûr d'être plus libre si l'on instaurait l'échelon du quartier (à Colmar nous sommes loin de pouvoir faire des arrondissements), par contre je suis intimement persuadé que la communauté de communes découpée selon les limites d'un bassin d'emploi/bassin de vie serait bien plus rationelle que les communes, et je ne crois pas faire entorse à mon libéralisme en les défendant même si du coup je descends d'un cran dans la subsidiarité.

Le principe de subsidiarité ascendante n'est absolument pas incompatible avec celui des économies d'échelle.

Sur le même thème toujours : What we mean by decentralization - Lew Rockwell

Back to the libertarian presumption in favor of decentralization. There are several reasons for it.

First, under decentralization, jurisdictions must compete for residents and capital, which provides some incentive for greater degrees of freedom, if only because local despotism is neither popular nor productive. If despots insist on ruling anyway, people and capital will find a way to leave. If there is only one will and one actor, you cannot escape.

Second, localism internalizes corruption so that it can be more easily spotted and uprooted. Along the same lines, local government corruption can be rather benign by comparison; it is easier, on a middle-class budget, to pay off the zoning board than to bribe the State Department.

Third, tyranny on the local level minimizes damage to the same extent that macro-tyranny maximizes it. If Hitler had ruled only Berlin, Stalin only Moscow, and FDR only Washington, the effects of their demented policies might have been contained. This is not only a utilitarian consideration. It means that evil people are prevented from violating the rights of people outside their jurisdiction.

Fourth, no government can be trusted to use the power to intervene wisely. With such power, central governments will always invoke good motives even when they are a mere mask for power grabs (as when the US invaded Iraq, for example). The typical path goes this way. An intervention takes place that might be celebrated by good liberals, such as the Lochner decision (1905) by the Supreme Court that invalidated New York's labor regulations. But once that power is gained, it is used to put a legal imprimatur on central planning and prevent local governments from finding an escape (the central planning of World War I was Lochner's daughter).

Fifth, a plurality of governmental forms—a "vertical separation of powers," to use Stephan Kinsella's phrase prevents the central government from accumulating power. Lower governments are rightly jealous of their jurisdiction, and resist. This is to the good. In fact, the whole history of liberty is bound up with the glorious results of competing institutional structures, no one of which can be trusted with complete control.

Posté
Pour ce qui concerne la concurrence fiscale, je crois que la mobilité des gens est telle(ment faible en fait) qu'il me semble que ce concept a du mal à trouver une réalisation pratique.

Je ne suis pas certain qu'une famille déménagerait simplement pour payer moins d'impôt, la décision est complexe et a un grand impact sur la vie de celle-ci, il faut d'autres choses à mon avis.

Tu mets le doigt pile sur ce que j'essaie d'expliquer ! Tu habites à Paris : d'un déménagement à Orléans ou à Strasbourg, lequel des deux minimise tes coûts de sortie (le coût subjectif total) ?

Je ne suis pas certain qu'une famille déménagerait simplement pour payer moins d'impôt

Les français qui ont émigré en masse à Bruxelles ou à Londres pour éviter l'ISF? Les Wallons frontaliers qui font 20km pour payer moins d'impôt sur le revenu? Il y a certainement bien d'autres exemples a citer.

Invité (=S=)
Posté
Le principe de subsidiarité ascendante n'est absolument pas incompatible avec celui des économies d'échelle.

Ai-je dit le contraire ? Je te répondais surtout sur le point pratique de l'existence des départements en France, dont l'utilité est loin d'être évidente puisque l'on pourrait transférer leurs compétences à la région et qu'il serait grand temps (depuis les années que l'on en parle) de faire voler en éclat ces 36 000 communes qui ne correspondent à rien au profit des communautés de communes qui sont un échelon, quant à lui, bien utile (évidemment de manière provisoire, en attendant que l'on démantèle peu à peu, et les uns après les autres, les compétences qu'une autorité publique n'a pas à avoir).

Posté

Ce fil part d'une intervention d'Edouard Fillias, parlant de la situation française (vraisemblablement appliquable ào d'autres pays).

Si on ne parle pas précisément de choses concrètes, je crois que ce débat tournera autour de deux idées :

- celles que Molinari défend, et qui, si elles me semblent un peu trop systémique et pas assez pratique, sont intéressantes et nécessitent d'être déclinées sur des cas précis (attribution du foncier, permis de construire, gestion des lycées, du rail, des transports en commun, du RMI, etc..)

- des batailles concernant les échelons allant de l'arrondissement à l'Etat central, où chacun dira qu'il préfère le département à la région, la commune à l'Etat, ou l'inverse.

En fin de compte je crois modestement que la question que je posais dans l'autre fil me paraît plus apte à nous aider à discuter : pour tel service actuellement accaparé par l'Etat, peut-on libéraliser tout de suite ou pas? Et si non, quelle est l'instance administrative (de la commune à l'Etat) la mieux apte à le gérer, en attendant une libéralisation.

Voilà, il me paraît plus simple de partir d'exemples plutôt que de construire la théorie qui marche dans tous les cas et sous toutes les lattitudes, à toutes les époques humaines.

Posté
Je ne suis pas sûr d'être plus libre si l'on instaurait l'échelon du quartier (à Colmar nous sommes loin de pouvoir faire des arrondissements), par contre je suis intimement persuadé que la communauté de communes découpée selon les limites d'un bassin d'emploi/bassin de vie serait bien plus rationelle que les communes, et je ne crois pas faire entorse à mon libéralisme en les défendant même si du coup je descends d'un cran dans la subsidiarité.

Il ne faut pas réfléchir à cette question de manière statique. Je parle ici d'une dynamique et cette dynamique n'est autre que celle de la… concurrence !!!

Imaginons que le pouvoir politique de ton quartier soit ultra-interventionniste, que l'Alsace est divisée en entités politiques de tailles comparables et que ces entités prélèvent 50% de la charge fiscale globale pesant sur chaque citoyen. Tu comprends bien que dans un tel contexte une dynamique concurrentielle se met en place. Les entités politiques constituent l'offre et les habitants (qui expriment leurs choix en déménageant, en "votant avec leurs pieds") la demande. La pression concurrentielle sur les offreurs les pousse à offrir le meilleur service possible aux habitants au prix le plus bas possible. En bons libéraux, notre anticipation quant au résultat de ce processus va vers une diminution drastique du fardeau fiscal et de l'interventionnisme politique.

Invité (=S=)
Posté
Il ne faut pas réfléchir à cette question de manière statique. Je parle ici d'une dynamique et cette dynamique n'est autre que celle de la… concurrence !!!

Imaginons que le pouvoir politique de ton quartier soit ultra-interventionniste, que l'Alsace est divisée en entités politiques de tailles comparables et que ces entités prélèvent 50% de la charge fiscale globale pesant sur chaque citoyen. Tu comprends bien que dans un tel contexte une dynamique concurrentielle se met en place. Les entités politiques constituent l'offre et les habitants (qui expriment leurs choix en déménageant, en "votant avec leurs pieds") la demande. La pression concurrentielle sur les offreurs les pousse à offrir le meilleur service possible aux habitants au prix le plus bas possible. En bons libéraux, notre anticipation quant au résultat de ce processus va vers une diminution drastique du fardeau fiscal et de l'interventionnisme politique.

Si mon quartier devenait ultra-interventionniste, je vais râler, aller acheter le dernier comparatif des quartiers et devoir faire un calcul utilitariste dans laquelle équation je vais devoir mettre : libertés locales, mes propres compétences linguistiques, prix des terrains, ai-je souscris un prêt immobilier depuis moins de trois ans et autres freins à ma mobilité?, qualité de vie, proximité avec mes amis/familles, perte d'enracinement culturel, présence ou non d'infrastructures scolaires, sportives, culturelles, taux de toutes les taxes possibles privées et pour les entreprises (si je suis entrepreneur), possibilité de trouver un emploi, etc. Du coup mon calcul sera impossible à établir, je vais aller au bar et râler …tout en restant. Les coûts de sortie seront (sauf si je suis jeune, sans attache, sans famille et propriétaire de mon seul corps ) de toutes façons élevés. Bref, je comprends ton idée qui est de dire plus il y a d'entités plus il y a concurrence, mieux c'est, mais c'est loin d'être prouvé dans les faits…

Qui plus est, puisque tu veux réfléchir de manière dynamique, si je planifie et que je me dis qu'à Maubeuge (ville la plus moche du monde) les terrains ne sont pas chers, que d'ici cinquante ans - réchauffement du climat oblige - la région sera sympa et que je pourrais aller m'y installer parce que le maire (ou x) du coin a mis toutes les taxes au plus bas pour attirer du peuple**, qui me dit qu'une fois le client appaté il ne va pas changer de politique et me foutre les taux à fond, ou repolitiser des pans de l'activité humaine qu'il avait libéralisé ? Tu crois franchement que je vais bouger (sachant alors que ma maison serait presque invendable ?). Je préfererais encore râler en attendant que mon "maire" local saute pour un autre plus conforme à mes voeux et continuer à jouir du spectacle permanent du coucher de soleil sur les Vosges bleues quand les cigognes passent au dessus des maisons à colombages qui surveillent au loin les vignes vallonnés qui se gonflent de jus et nous de fierté chauvine en mangeant une délicieuse flammekueche et buvant un bon Gewurstramminer. Bref, ta question de la concurrence, doit en plus intégrer la question de la portée des compétences qui sont allouées à ton échelon (si petit soit-il) et les garanties de stabilité.

Sinon, quand je parle d' "échelon politique", je te parle en minarchiste, c'est-à-dire que mon échelon sert, dans mes rêves les plus fous, à assurer un contrôle sur les délégations de services publiques (n'entrons pas le débat de leur extension) et la justice.

Quand je propose la région et la communauté de communes, de manière provisoire (pour simplifier la France avant de démanteler la plupart du pouvoir politique) pour être concret et pragmatique à court terme, c'est du point de vue de l'Alsace (= fuck les échelonnages décidés en haut lieu, et laissez-nous faire selon les particularités locales). La région a, chez nous, une unité culturelle indéniable. La communauté de communes (ou syndicat de communes, je ne sais plus…) a une unité fonctionnelle : déplacements quotidiens maison/travail, économies d'échelles et harmonisation du territoire pour les infrastructures lourdes (piscines, stades, etc.): il y a quelques années, par ex., il y avait prix différent pour les clients de la piscine colmarienne selon que l'on était colmarien (et donc qu'on la finançait via ses impôts) ou non; habitant le village d'à coté, il est idiot que mon voisin paye pour elle et moi non, habitant à 500 m de là… Evidemment si elle était privée, la question ne se poserait pas.

** je n'ai jamais compris pourquoi l'augmentation de la population était une fin en soi, d'ailleurs…

Posté

Je souscris totalement à l'analyse de (=S=)

L'expérience, par exemple, montre que le simple fait de changer de banque est un acte plutôt peu courant, et qu'il se produit à deux occasions notamment : entrée dans la vie active (je passe de la banque de papa maman à la mienne à moi) et achat d'un logement.

Pour le reste, les mensuels grand public ont beau exposer en long en large et en travers des tableaux de chiffres avec les coûts comparatifs des services bancaires, la rotation de la clientèle n'est pas aussi grande que cela…

Posté
Je souscris totalement à l'analyse de (=S=)

Et de ce fait envoie au bac Menger, Mises, Rothbard, Hoppe et tous les autres, sans parler d'une des vues fondamentales du libéralisme classique qui semble oubliée par une large majorité de ceux qui se disent aujourd'hui libéraux. :icon_up:

Invité jabial
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La réalité est un mélange des deux. Enormément de gens restent, quitte à prendre des risques importants (opposition ou carrément tentative de coup de force) pour obtenir ce qu'ils veulent. D'autres partent. Ceux-là vivent généralement bien mieux que la moyenne de gens, parce qu'ils ont quelque chose qui est rare à revendre - le dynamisme. Et mis à part quelques rares cas, il s'amenuise avec l'âge.

Posté
Et de ce fait envoie au bac Menger, Mises, Rothbard, Hoppe et tous les autres, sans parler d'une des vues fondamentales du libéralisme classique qui semble oubliée par une large majorité de ceux qui se disent aujourd'hui libéraux. :icon_up:

Je ne comprends pas en quoi. Qu'est-ce qui envoie au bac tous ces honorables personnes?

Ce que je dis de la réalité du marché bancaire, ou l'idée selon laquelle la concurrence entre mini-Etats, si conceptuellement on se représente parfaitement ce que c'est, souffre d'un frein dans la réalisation majeure qu'elle est censée apporter, le déplacement d'individus et de familles d'un endroit à l'autre?

Il y a d'ores et déjà concurrence entre Etats, on observe des mouvements migratoires lorsque les situations de départ sont extrêmement hardcore (boat people, guerres, etc…), et de moindre mouvements lorsqu'il s'agit de concurrence fiscale, c'est tout, ce n'est tout de même pas extraordinaire, si?

Invité (=S=)
Posté
Et de ce fait envoie au bac Menger, Mises, Rothbard, Hoppe et tous les autres,

As-tu des textes précis que l'on puisse discuter, plutôt que d'égréner les noms d'une nouvelle Sainte Famille ? (si tu regardes le Wikibéral je suis en train de mettre l'entrée [[Décentralisation]] à jour… à moins que tu ne veuilles le faire…)

…sans parler d'une des vues fondamentales du libéralisme classique qui semble oubliée par une large majorité de ceux qui se disent aujourd'hui libéraux. :icon_up:

Si parle en (?) ! Un doute s'installe en moi, suis-je passé du mauvais côté de la Force ?

Je m'objecte que l'impossibilité de tirer une équation claire de mon calcul utilitariste n'est pas un argument. Ce calcul n'est jamais objectivable, et au final on est toujours guidé par un marqueur somatique (subjectif, intime) qui vient décider du choix et fait la synthèse d'un calcul dont on ne peut déconstruire analytiquement les raisons. Mais de là à dire qu'en régime d'incertitude les gens seront poussés à la mobilité, j'aurais tendance à penser l'inverse.

En tous cas l'équation : autonomie fiscale + concurrence politique (multiplication de l'offre) = advenue du libéralisme (ou amélioration de la situation) ne me paraît pas établi.

Posté
L'expérience, par exemple, montre que le simple fait de changer de banque est un acte plutôt peu courant, et qu'il se produit à deux occasions notamment : entrée dans la vie active (je passe de la banque de papa maman à la mienne à moi) et achat d'un logement.

De façon générale, lorsque l'on a besoin d'un prêt conséquent, ce qui peut également arriver lorsque l'on monte sa boîte. Me trompé-je ?

Posté
De façon générale, lorsque l'on a besoin d'un prêt conséquent, ce qui peut également arriver lorsque l'on monte sa boîte. Me trompé-je ?

Oui, si c'est une petite boite (sinon les données sont très différentes), quoi que dans ce cas, je déconseillerai à quiconque d'avoir son compte perso et le compte de sa boite dans la même banque, il vaut mieux éviter de mélanger (si la boite est dans une passe difficile, cela va inquiéter le conseiller qui gère le compte perso).

Posté
As-tu des textes précis que l'on puisse discuter, plutôt que d'égréner les noms d'une nouvelle Sainte Famille ? (si tu regardes le Wikibéral je suis en train de mettre l'entrée [[Décentralisation]] à jour… à moins que tu ne veuilles le faire…)
Je m'objecte que l'impossibilité de tirer une équation claire de mon calcul utilitariste n'est pas un argument. Ce calcul n'est jamais objectivable, et au final on est toujours guidé par un marqueur somatique (subjectif, intime) qui vient décider du choix et fait la synthèse d'un calcul dont on ne peut déconstruire analytiquement les raisons.

Très bon début. Merci de m'avoir épargné ce rappel.

Invité (=S=)
Posté

Revenons au texte de Hoppe (qui pour une fois ne m'a pas agacé, merci de m'avoir presque réconcilié), je synthétise les idées :

a) plus les états sont petits, moins il coûte de changer (proximité géographique qui fait tomber bien des freins)

b-) plus les états sont petits, plus les politiciens sont contrôlés*, donc attentifs à leur administrés

c) un état plus petit est un état qui ne peut pas être autosuffisant : pousse au libre-échange

d) plus il y a d'états, plus il y aura concurrence entre eux et donc possibilité de trouver d1) son bonheur via la diversité, d2) de richesse culturelle

e) un état plus petit est un état où les gens se connaissent et se choisissent (ex. de l'immigration)

* Il faudrait ajouter, à l'appui, cette remarque de Fredo sur l' "effet spectateur" en psychologie sociale. Mais est-ce que faire partie d'une foule de plaignants n'est pas plus sécurisant pour un caractère faible que de l'ouvrir dans un petit groupe ?

Objections possibles* :

a') Les gens se diront "c'est partout pareil", argument du prêt immobilier qui… immobilise ou de l'état dans lequel personne ne veut venir = impossibilité de revendre ses biens immobiliers pour en acheter d'autres = captifs, proximité de la famille (personnes âgées par ex.), etc. Hoppe oublis les freins non quantifiables (attachement culturel, habitude) et psychologiques (servitude volontaire, peur de bouger)

b') plus un état est petit plus les administrés sont contrôlables (phénomène de village), certes avec des moyens armés moins conséquents, mais bien d'autres moyens comme la délation, la pression sociale (l'anonymat de la foule est à cet égard salutaire), un phénomène de société close (cf. Bergson) où règne l'uniformité et le traditionnalisme sclérosant ; plus un état est petit, moins la planification est complexe, plus le socialisme est possible non, sans marché même les choses les plus simples sont impossibles.

c') OK pour la nécessité d'ouverture, mais qu'est-ce qui l'empêche de devenir un petit centre de production collectiviste et fraternel (type mutualisme de Proudhon ou des anarcho-communistes) unis dans une Internationale qui assure la coordination des échanges (organise le libre-échange et la division rationnelle du savoir) ?

-Rép: il serait en faillite économique et les modèles libéraux l'emporteraient, obligeant le régime du micro-Etat à changer de politique

-Re:Re: Et pourquoi le régime plutôt que de bien diagnostiquer le problème, n'y verrait-il pas la nécessité de plus d'état encore (comme on le fait en France et en Belgique) et accentuerait la pression

d1') et pourquoi pas un phénomène d'imitation qui pousserait à l'uniformisation des politiques, comme Kuhn explique la création d'un standard (la science normale) ; on crée des palaces avec le budget de la France, on crée une Histoire; avec des petites Etats, c'est la fin de l'Histoire, la fin du faste et de l'art, plein de villes à l'américaine fâdes et uniformes…

d2') la richesse culturelle n'a rien à voir avec la taille d'un Etat mais avec son degré de libéralisme; un état communisant comme la France n'a-t-il pas une richesse culturelle indéniable ? Monaco, le Luxembourg, Saint-Marin, Andorre témoignent-t-ils d'une richesse culturelle propre ? Paris oui. Londres aussi, New York, etc.

e') plus un état est petit, plus le communautarisme est fort, plus les gens sont soudés et l'étranger mal accepté ; une personne qui vient dans un endroit pour y occuper un emploi qu'il a déjà trouvé auparavant, s'intégrera bien plus facilement et ne sera pas vu par les habitants plus anciens comme un parasite: il sera donc mieux accueilli => c'est une question de politique d'assistance sociale et non pas de taille du pays qui rentre ici en compte.

J'écarte l'idée qu'un état trop petit n'aura pas assez de moyen pour se défendre: plusieurs états peuvent bien mutualiser une armée.

Il faudrait suivre une par une (c'est-à-d. en bons individualistes méthodologiques) les histoires des Cités-Etats pour savoir quels enseignements en tirer…

Ce n’est pas par hasard qu’on trouve généralement plus de beauté et d’honnêteté dans la vie des petites nations, et que chez les grandes on rencontre plus de bonheur et de contentement dans la mesure où elles ont su éviter le fléau mortel de la centralisation. La démocratie n’a nulle part bien fonctionné sans une large autonomie des gouvernements régionaux, offrant une école d’éducation politique aussi bien au peuple qu’à ses futurs dirigeants. Là où l’échelle politique grandit au point que seule la bureaucratie dispose d’une formation suffisante pour l’embrasser, l’impulsion créatrice de l’individu doit disparaître. Je crois que l’expérience des petits pays comme la Hollande ou la Suisse renferme beaucoup de choses dont même les riches et grands pays comme la Grande-Bretagne peuvent bénéficier. Nous gagnerons tous à pouvoir créer un monde dans lequel les petits Etats puissent subsister.

(* de plus ou moins bonne foi et qu'importe ce que j'en pense réellement)

Bref, j'aurais plutôt tendance à dire que ce n'est pas la taille mais la nature du pouvoir qui est important, et, une fois encore, il faut encore me convaincre sur l'idée que taille et nature sont corrélées

Imaginez par exemple qu'un simple ménage, ou un village, soit territoire indépendant. Un père pourrait-il faire à son fils, ou un Maire à son village, ce que le gouvernement de l'Union Soviétique a fait à ses sujets (c'est-à-dire leur dénier tout droit de propriété sur le capital), ou ce que les Etats dans toute l'Europe occidentale et les Etats-Unis font à leurs citoyens (c'est-à-dire leur confisquer jusqu'à 50 % de ce qu'ils ont produit) ? Evidemment non. Ou bien il y aurait une révolte immédiate et le gouvernement serait renversé, ou alors tout le monde s'en irait dans le village d'à côté.

Imaginez par exemple que l'Etat se désengage de ses prérogatives et laisse une totale indépendance aux familles ou aux villages. Un père ne battrait jamais sa femme et sinon celle-ci le quitterait, évidemment. Jamais il ne maintiendrait ses enfants en esclavage, sinon ils s'en iraient dans la famille d'à côté, évidemment. Jamais un village ne deviendrait une secte où le maire, mâle dominant, s'octroie le monopole des femelles, et maintient sous son joug les autres, évidemment. Par contre un Etat aussi vaste que la Russie et ses milliers de villages éparpillés, peut être maintenu sous une poigne de fer et un imposer un panoptisme imparable, évidemment. (mince, rechute)

EDIT : voilà qui va faire plaisir à Hoppe, le Monténégro se sépare de la Serbie et que l'ex-Yougoslavie est désormais éclatée en six pays.

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