Aller au contenu

Antony Beevor


Roniberal

Messages recommandés

Posté

Cet historien (que j'avoue honteusement n'avoir découvert que depuis quelques semaines) me semble avoir écrit des opus intéressants:

De plus, il me semble avoir été victime d'une campagne de lynchage qui ne peut que me le rendre sympathique.

Quelqu'un pourrait-il m'en dire quelques mots?

  • 2 weeks later...
Posté

J'ai lu "La chute de Berlin" de Beevor il y a 6 ans de cela. C'est très bien documenté et ça se lit (presque) comme un roman. D'après Wikipedia les critiques virulentes viendrait de la Russie qui a très mal pris que Beevor dépeigne longuement les atrocités commises par les "libérateurs" Soviétiques durant leur offensive sur l'Allemagne ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Beevor#Critiques ).

  • 3 months later...
Posté

Le livre d'Antony Beevor sur la guerre d'Espagne est sorti en poche:

J'en ai lu environ 100 pages hier soir. Cela m'a paru très bien recherché et très équilibré, quoique marqué par de légers préjugés favorables envers la démocratie et le "libéralisme progressiste" et défavorable envers l'église catholique. Cependant, les atrocités commises par les républicains et qui déclenchèrent la guerre sont décrites sans aucune ambiguité. Je le recommande sans réserve pour quelqu'un qui n'y connaît pas grand-chose, comme moi.

Posté
…quelqu'un qui n'y connaît pas grand-chose, comme moi.

Si le sujet t'intéresse, le livre toujours d'actualité pour comprendre l'origine de la Guerre d'Espagne est l'ouvrage à peine vieilli de Gerald Brenan, Le labyrinthe espagnol :

Posté

Sinon, pour répondre à la première question de Roniberal, si les ouvrages purement descriptifs militairement de Beevor sur les batailles de Stalingrad et Berlin sont intéressants, son livre sur la Guerre d'Espagne, c'est du petit caca.

Ce livre est parfaitement médiocre dans son acceptation crédule des poncifs les plus eculés concernant les camps adverses en présence, sa dépendance des sources secondaires de piètre qualité, sans compter les erreurs factuelles. Le tout présenté d'un point de vue gauchiste mou.

Ainsi donc, pour décrire l'Espagne du début du 20e siècle, Beevor reprend la bête logomachie de l'analyse de classe marxiste sans aucun appareil critique, incapable de monter comment ce furent justement les partisans de la droite qui organisèrent le système démocratique, instaurèrent la Seconde République, etc., tombant dans la caricature lorsqu'il s'agit de décrire la réelle pénétration des socialistes ou des anarchistes au sein de la population, par exemple en attribuant grotesquement au PSOE la défense des petites propriétaires agricoles et des classes moyennes urbaines, alors même que ce parti était plus radical que le parti communiste, ou en attribuant à la CNT le chiffre relevant de la propagande de 700.000 affiliés au syndicat anarchiste après la Première Guerre mondiale.

D'autres erreurs factuelles ou présentations biaisées concernent les statistiques choisies concernant la pauvreté, l'analphabétisme, etc. au début du 20e siècle, présentées sans critique et surtout sans éléments de comparaison avec d'autres pays du même niveau que l'Espagne ou avec la situation antérieure (comparaisons qui montrent que, certes, l'Espagne était en retard par rapport au pays riches d'Europe, mais dans la norme par rapport au pays de même rang). Une présentation qui empêche ainsi de comprendre que, oui, l'Espagne était arriérée par rapport à la dynamique européenne, conséquences du traumatisme de l'invasion napoléonienne, mais que le pays, dès la fin du 19e siècle, commençait à se développer à un rythme soutenu et accéléré.

Le biais idéologique de Beevor - découlant de la présentation des acteurs selon "l'intérêt de classe" - apparaît également dans la sous-estimation systématique du messianisme violent, anti-démocratique et liberticide de la gauche espagnole et, à l'inverse, dans la charge contre les "réactionnaires" et l'Église grossièrement présentés sous les couleurs les plus noires. L'Espagne du 20e siècle étant décrite comme un pays fanatiquement religieux, patrie de l'Inquisition et des autodafés. (On pourrait ainsi présenter la Grande-Bretagne de Beevor comme la patrie de la piraterie et de la traite des noirs.) Beevor semble ignorer que malgré l'horreur, l'Inquisition n'est créditée que de 1.000 morts en trois siècles, un chiffre atteint par n'importe quelle dictature gauchiste en quelques semaines, ou que l'Espagne échappa, grâce au Saint Office à la chasse aux sorcières qui liquida entre 50.000 et 100.000 personnes dans l'Europe protestante.

Sinon, le respect de Beevor avec la réalité chiffrée est souvent très relative (sans doute à mettre sur le compte de sources secondaires extrêmement peu fiables, mais sans doute idéologiquement kasher). Comme attribuer à l'armée d'Afrique espagnole le double des effectifs réellement existant ou plus du double de la superficie réelle du protectorat espagnol sur le Maroc ; comme attribuer un taux d'analphabétisme de 45% au début de la République, alors que selon les sources les plus fiables, celui-ci ne devait pas concerner plus d'un quart de la population ; comme oser avancer de manière ridicule que la moitié des soldats ne disposaient pas d'uniformes ni de fusils (alors que, par exemple, le nombre de fusils étaient quatre fois supérieur au nombre de soldats) ; comme parler du soulèvement de 1936 comme une révolte des généraux, sans mentionner le fait que la majeure partie des officiers généraux restèrent dans le camp républicain.

Beevor décrit également assez mal la réelle répartition de forces des adversaires en présence en 1936, "oubliant" ainsi de décrire l'écrasante supériorité du camp républicain dans l'industrie de guerre, ainsi que les terres agricoles de la Manche, du Levant ou de l'Aragon, ou en valorisant à la baisse les énormes ressources financières des républicains. Par contre, il omet de signaler des chiffres très parlants, comme le fait que les miliciens républicains recevaient une solde 20 fois plus élevée que celle reçue par les soldats nationalistes. Ou il sous-estime la massive intervention de l'Union soviétique pour se concentrer presque exclusivement sur l'intervention italienne et allemande, alors que jusqu'à la moitié de 1937, les républicains disposeront de la supériorité en matériel militaire et que parfois jusqu'à un tiers du matériel militaire des nationalistes était du butin pris à l'ennemi (ainsi certaines brigades de chars nationalistes étaient presque entièrement composées de chars soviétiques capturés).

En ce qui concerne la description de certains bombardements aériens nationalistes, il y a aussi à redire. Ceux de Madrid causèrent, selon les chiffres même du camp républicain, 312 morts, en trois semaines, sur une population d'un million d'habitants. Mais la lectiure de Beevor laisserait penser à plusieurs milliers, surtout des enfants. En ce qui concerne Guernica, Beevor, au moins ne reprend plus les chiffres élaborés par la propagande gauchiste de près de 2.000 morts (les chiffres réels faisant état d'une centaine de tués), mais endosse sans critique aucune la version gauchiste qui veut que ce bombardement fut un acte criminel gratuit réalisé sur un village paumé loin du front seulement en vue de vérifier les effets de la terreur aérienne, alors que le bombardement réalisé visait, au contraire, des objectifs militaires précis (destruction d'un pont pour couper la retraite à l'armée républiciaine en retraite, d'une usine d'armement) sur une localité proche du front.

Là où Beevor fait très fort, c'est aussi lorqu'il reprend sans autre forme de procès les chiffres fantaisistes de la gauche en ce qui concerne la répression d'après-guerre, jusqu'à 200.000 tués, en considérant, par exemple, comme fiables les travaux d'un communiste fanatique comme Espinosa. Par contre, Beevor, même s'il la dénonce, présente la terreur de la gauche comme "populaire" et "spontanée", alors même que le caractère systématique des assassinats de masse du camp républicain n'est plus à démontrer. Il présente ainsi le plus grand massacre de la guerre, celui de Paracuellos - le Katyn espagnol -, comme un acte de la population en furie après des siècles d'humiliations, condamnable certes, mais si compréhensible.

Bref, un livre nullissime à éviter. Pour ceux qui cherchent une vision anglo-saxonne de la Guerre d'Espagne, on conseillera les ouvrages de Stanley Payne ou celui cité ci-dessus de Gerald Brenan.

Sinon :

Posté
Sinon, pour répondre à la première question de Roniberal, si les ouvrages purement descriptifs militairement de Beevor sur les batailles de Stalingrad et Berlin sont intéressants, son livre sur la Guerre d'Espagne, c'est du petit caca.

Je manque de temps pour répondre point par point mais il me semble que c'est toi qui commets quelques erreurs de lecture du livre de Beevor (l'as-tu lu d'ailleurs? :icon_up: ). Je prends un seul exemple, que j'avais en mémoire pour l'avoir lu la veille.

[…] comme oser avancer de manière ridicule que la moitié des soldats ne disposaient pas d'uniformes ni de fusils (alors que, par exemple, le nombre de fusils étaient quatre fois supérieur au nombre de soldats) ; […]

Pourrais-tu citer ce passage précis? Car, dans l'édition que je lis, je ne trouve rien de tel. Je cite un passage qui se rapproche de ce que tu décris:

En 1936, l'armée espagnole comptait quelque cent mille hommes. […] Plusieurs milliers de soldats n'avaient pas d'uniforme et un plus grand nombre encore n'avaient jamais reçu aucune instruction militaire.

Seulement quelques milliers de soldats sans uniforme et aucune mention de l'équipement en fusils, ni dans ce paragraphe ni ailleurs…

Posté
…l'as-tu lu d'ailleurs?

Ben non, c'te question.

En 1936, l'armée espagnole comptait quelque cent mille hommes. […] Plusieurs milliers de soldats n'avaient pas d'uniforme et un plus grand nombre encore n'avaient jamais reçu aucune instruction militaire.

Si ma mémoire est bonne, après il dit que cette armée comprend 150.000 hommes. On voit que la fourchette est large.

Posté

Tu commets également d'autres erreurs.

[…] Ainsi donc, pour décrire l'Espagne du début du 20e siècle, Beevor reprend la bête logomachie de l'analyse de classe marxiste sans aucun appareil critique, incapable de monter comment ce furent justement les partisans de la droite qui organisèrent le système démocratique, instaurèrent la Seconde République, etc., tombant dans la caricature lorsqu'il s'agit de décrire la réelle pénétration des socialistes ou des anarchistes au sein de la population, par exemple en attribuant grotesquement au PSOE la défense des petites propriétaires agricoles et des classes moyennes urbaines, alors même que ce parti était plus radical que le parti communiste, ou en attribuant à la CNT le chiffre relevant de la propagande de 700.000 affiliés au syndicat anarchiste après la Première Guerre mondiale. […]

J'ai en mémoire le chiffre de 70 000 adhérents, pas le chiffre de 700 000, qui serait parfaitement grotesque en effet. Et Beevor décrit au contraire très bien la radicalisation du PSOE, à travers le discours révolutionnaire fantasque de son leader Francisco Caballero, par opposition au parti communiste, qui appliquait la stratégie du Komintern consistant en une alliance avec les partis de gauche modérés.

Posté
J'ai en mémoire le chiffre de 70 000 adhérents, pas le chiffre de 700 000, qui serait parfaitement grotesque en effet.

Je crois que ta mémoire te trahit :

The CNT had an outstanding role in the events of the La Canadiense general strike, which paralyzed 70% of industry in Catalonia in 1919, the year the CNT reached a membership of 700,000 (Beevor 2006, p. 13)

http://en.wikipedia.org/wiki/Confederaci%C…Peak_of_the_CNT

Posté

Qui fustigeait la "dépendance de sources secondaires"? :icon_up:

J'ai retrouvé le passage en question. Il s'agit manifestement d'une coquille puisque les autres chiffres cités dans le même passage sont de 160 000 pour l'UGT et 42 000 pour le PSOE. Pas de quoi clamer que c'est un chiffre de propagande ou alors il faut que tu trouves une source de propagande qui annonce des chiffres comparables.

Posté
Qui fustigeait la "dépendance de sources secondaires"?

Ma mémoire est meilleure que la tienne. Nananananèreeuuuhhh….

Il s'agit manifestement d'une coquille puisque les autres chiffres cités dans le même passage sont de 160 000 pour l'UGT et 42 000 pour le PSOE.

Non, ce n'est pas une coquille : Beevor crédite ensuite la CNT d'un million et demi d'affiliés en 1937. Les chiffres véritables (que l'on peut déduire des congrès, etc.) se situent, au plus, à la moitié des chiffres fournis par Beevor.

Posté
Ma mémoire est meilleure que la tienne. Nananananèreeuuuhhh….

Non, ce n'est pas une coquille : Beevor crédite ensuite la CNT d'un million et demi d'affiliés en 1937. Les chiffres véritables (que l'on peut déduire des congrès, etc.) se situent, au plus, à la moitié des chiffres fournis par Beevor.

Euh, non. D'abord, il s'agit de 1934 et puis Beevor cite les sources de ces chiffres: le gouvernement (de gauche) avançait un chiffre de 1 440 000 tandis que la CNT prétendait avoir 1 580 000 adhérents. L'argument de Beevor est que la CNT était plus populaire que l'UGT.

De façon plus générale, j'ai beau chercher des exemples du biais et de la nullité de Beevor et je n'en trouve pas.

Posté
…j'ai beau chercher des exemples du biais et de la nullité de Beevor et je n'en trouve pas.

Tu en cites déjà toi-même, déjà la présentation grossière de l'Église, mais aussi :

…Beevor cite les sources de ces chiffres: le gouvernement (de gauche) avançait un chiffre de 1 440 000 tandis que la CNT prétendait avoir 1 580 000 adhérents.

Or, il se trouve que ces chiffres sont contestés (parce que les chiffres du gouvernement républicain, hein… qui dénombrait plus de 1.600 morts à Guernica… ou qui refusait de fournir les résultats des élections de 1936…) par d'autres historiens, qui ne créditent la CNT que de la moitié des adhérents revendiqués, et en comptant très large. Si Beevor avait fait son boulot correctement, il aurait dû signaler que ces chiffres sont contestés et dire pouquoi il préférait reprendre tels quels ceux de la gauche. Non, il se contente de reprendre sans appareil critique ceux fournis par la gauche. De la même manière, il reprend les chiffres de la propagande de gauche de 200.000 victimes de la répression franquiste d'après-guerre, alors que nombres d'auteurs établissent une fouchette allant de 25.000 à 80.000.

Une autre manière de biais, à part celui de ne citer que les sources partisanes d'un seul camp, est la méthode qui consiste à pointer quelques failles du système sans faire le bilan général de la situation. L'exemple que j'ai repris ci-dessus était celui de l'éducation et de la pauvreté en Espagne durant l'entre-deux-guerre, plus précisément durant la période de la dictature de Primo de Rivera. Si l'on se fie au tableau fait par Beevor, la situation était catastrophique (justifiant, de manière sous-entendue, les excès de la gauche espagnole tout au long de la Seconde République et durant la guerre civile). Or, dans les faits, la période qui précède la Seconde République fut celle de la plus grande croissance de l'économie espagnole depuis le début du 19e siècle. Pour la première fois depuis l'invasion napoléonienne, l'Espagne commençait à rattraper son retard sur les riches pays européens et à se rapprocher de la moyenne européenne. Quant à l'éducation, loin du sombre tableau d'une population à moitié analphabète dépeint grossièrement par Beevor, des données précises indiquent clairement l'évolution très positive : explosion du chifres des étudiants universitaires, création de réseaux d'enseignement professionnel de qualité (essentiellement des collèges religieux), doublement du nombre des étudiantes, diminution drastique de l'analphabétisme, etc.

Encore une autre manière de travailler de Beevor n'est plus de biaiser, mais de carrément travestir la présentation des faits historiques et des motifs des acteurs. Comme tu l'as relevé, Beevor note bien la bolchevisation du PSOE sous Largo Caballero - le nier comme le faisait jusqu'alors la gauche devenant par trop ridicule -, mettant ce parti à la gauche même du parti communiste. Et là, tu me dis "Haha ! Tu vois bien qu'il est objectif, le Beevor." Mon cul, oui. Car lorsqu'il explique le pourquoi de cette radicalisation (qu'il fait erronément commencer en 1934, alors qu'elle avait déjà eu lieu lors du dégommage d'un précédent patron du PSOE, Besteiro) qui conduira à la tentative du coup d'État de la gauche de 1934, Beevor laisse entendre qu'il s'agissait d'une réaction préventive d'auto-défense contre une droite qui menacait d'imposer une dictature, à la manière de ce qui venait de se passer en Autriche avec le coup d'État de Dolfuss. Ce faisant, Beevor se contente de nous resservir la soupe froide de la propagande révolutionnaire qui faisait de la droite espagnole un mouvement fascistoïde et de Gil Robles un Hitler ibérique et qui agitait sans cesse la menace du risque de fascisation de l'Espagne, chose que la gauche elle-même ne croyait pas. Alors que la réalité des faits démontrent que la gauche espagnole était purement et simplement anti-démocratique et liberticide et n'aspirait qu'a prendre le pouvoir à tout prix, par la voie parlementaire si c'était possible, par le coup d'État dans le cas contraire (Caballero ayant clairement dit lors d'un meeting que si la droite gagnait les élections de 1933, il fallait aller à la guerre civile). L'idée générale étant que la Seconde République espagnole n'était légitime que si elle était dirigée par la gauche, et la plus extrême qui plus est, et que pour parvenir à ce but, un des moyens à employer était la démonisation de la droite espagnole.

Sinon, Beevor n'hésite pas à s'abaisser à colporter les rumeurs les plus infondées ou les anecdotes les plus mensongères comme celle de Sainz Rodríguez rapportée à l'envie par la gauche depuis 60 ans qui veut que Franco signait les arrêts de mort en prenant son café avec son chapelain. Mensonge décliné sous différentes formes, Beevor reprenant celle où Franco ajoutait en plus en marge de la condamnation à mort la mention "garrot et presse" pour les cas qu'il voulait exemplaires. Inutile de dire qu'il n'existe aucune preuve tangible de ce fait, ni que ce n'était pas Franco qui établissait les condamnations mais des tribunaux, civils et militaires, et que Franco ne se limitait qu'à commuer les peines de mort - puisque c'était sa prérogative - par une mesure de grâce, chose qu'il fit dans des milliers de cas.

Posté

Encore une fois, je pense que tes reproches, qui consistent à traiter Beevor de nul parce qu'il n'a pas exactement la même vision des choses que la tienne ou parce qu'il ne cite pas toutes les sources disponibles, sont injustifiés.

Ton analyse de la position de Beevor au sujet de l'église est grossièrement erronée. Il est possible que Beevor en ait un léger préjugé négatif cependant, pour prendre un seul exemple de ce que j'ai lu hier, Beevor démonte le mythe républicain des prêtres équipés de fusils qu'il était légitime d'assassiner parce qu'ils étaient partie prenante de l'insurrection des généraux.

Tu as également écrit que Beevor avait omis que beaucoup d'officers restèrent fidèles au gouvernement républicain. Or je viens de lire la très longue description des affrontements entre insurgés et républicains dans chaque ville espagnole, en juillet 1936. Certaines villes qui paraissaient acquises aux insurgés, la moindre n'étant pas Barcelone, restèrent aux mains des républicains justement parce que nombre d'officiers, y compris supérieurs, s'opposèrent aux insurgés. La marine, essentielle pour rapatrier le contingent marocain, ne bascula pas non plus. Franco dut demander l'intervention des nazis et de leur Junkers pour acheminer des troupes depuis le Maroc. Cette longue description se termine par un rapport de forces au sein de l'armée, que Beevor calcule comme étant légèrement en faveur des insurgés.

Exemple final: les accusations de fascisme envers les insurgés sont clairement balayées comme les élucubrations qu'elles sont.

Posté
…tes reproches, qui consistent à traiter Beevor de nul parce qu'il n'a pas exactement la même vision des choses que la tienne ou parce qu'il ne cite pas toutes les sources disponibles, sont injustifiés.

Tu comprendras pourtant qu'il est prudent de prendre avec des pincettes un ouvrage qui se donne l'apparence de l'objectivité, mais qui, dans les faits, nous refile en douce une version partisane des événements en ne présentant souvent sans la moindre critique que les chiffres donnés par un camp, et même la propagande gauchiste ou des mensonges purs et simples, qui régulièrement présente un camp sous les traits les plus noirs et caricaturaux mais qui, par contre, trouve souvent des excuses, des explications, des justifications, des atténuants pour l'autre camp.

…Beevor démonte le mythe républicain des prêtres équipés de fusils qu'il était légitime d'assassiner…

Et peu après il nous déclare bisounoursement que "rarement" un honnête marchand ou un religieux qui traitait également riche et pauvre étaient molestés.

Cette longue description se termine par un rapport de forces au sein de l'armée, que Beevor calcule comme étant légèrement en faveur des insurgés.

Et ce bilan est simplement faux, le gouvernement républicain disposant d'une supériorité écrasante : 60% du territoire, la majorité de la population, toutes les zones industrielles, toutes les usines d'armement, la majorité des officiers généraux, la moitié des troupes, la moitié de la Garde civile, la presque totalité des Gardes d'assaut, pratiquement toute la marine et l'aviation, la majorité du parc d'artillerie, la presque totalité des véhicules blindés, mais aussi toutes les réserves monétaires (la 5e ou 6e réserve d'or au monde à l'époque, qui sera refilée aux Soviétiques), toutes les ressources de l'État, ainsi que la moitié de la production agricole située dans la Manche, le Levant et l'Aragon. Le socialiste Indalecio Prieto vantera lui-même cette écrasante supériorité dans les jours qui suivirent le soulèvement nationaliste en se félicitant du fait que le rapide écrasement de la rébellion allait permettre de faire avancer le programme de prise du pouvoir à la sauce soviétique par la gauche.

Normalement, en toute logique, une fois que le putsch avait échoué, la rébellion ne pouvait qu'être écrasée. C'était mathématique. Pourquoi ce ne fut pas le cas ? Justement parce qu'au début, la gauche, tenant pour assuré sa victoire, se lança dans une révolution interne qui détruisit la République, provoquant une gabegie monstrueuse, à commencer par la désorganisation des forces armées restées fidèles au gouvernement et un gaspillage des ressources par la faute des forces centrifuges. Par contre, en face, contrairement à la présentation de Beevor qui sous-estime les capacités de Franco et de nombres de cadres supérieurs nationalistes, aiguillonés par le danger de mort que représentait la disproportion des forces, ces derniers utilisèrent au mieux leurs atouts : une armée d'Afrique professionnelle, une unité de commandement, le courage, la tenacité et l'abnégation de leurs troupes, une audace stratégique (le passage des troupes d'Afrique était à moitié réalisé avant que n'arrivent les avions italiens et allemands), le puissant soutien de la population dans leur secteur, etc.

Bref, les nationalistes gagnèrent cette guerre car ils exploitèrent à fond leurs maigres ressources initiales, alors que les républicains perdirent pour avoir, de manière folle, gaspillé temps, argent et écrasante supériorité matérielle. La Guerre d'Espagne, de fait, est un cinglant démenti de la boutade de Clémenceau : la guerre est une chose trop sérieuse pour la laisser aux politiques.

Posté

Pour un panorama général, l'historien galicien Pío Moa recommande l'ouvrage de Burnett Bolloten, fondamental pour comprendre l'évolution des gauches :



Un peu onéreux mais c'est véritablement une œuvre de maître.

Pour les hispanophones, de bonnes introductions à cette période sont Historia de la Guerra Civil Española de Ricardo de la Cierva et Los datos exactos de la guerra civil de Ramón Salas Larrazábal. Les travaux de Pío Moa et Stanley Payne sont incontournables ; je suis d'ailleurs étonnée que ces deux-là n'aient jamais été traduits en français.

Ce fut mon modeste apport de pierres à l'édifice.

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...