(V) Posted December 16, 2008 Report Posted December 16, 2008 C’est dans l’une des dernières newsletters du webzine de Pierre Lemieux < www.liberteaucanada.ca > que j’ai découvert l’existence d’un tout nouveau magazine : Books. Le célèbre anarchiste canadien y a en effet été interviewé, pour le premier numéro, à propos de la notion de rationalité en économie. Notons au passage son habile propos renvoyant les pourfendeurs de la rationalité à leurs propres contradictions : la critique de l’homo oeconomicus vise souvent à justifier implicitement l’intervention de l’Etat - puisque les individus sont irrationels, donc, irresponsables, il faut « s’occuper » d’eux… - or, comme le fait alors remarquer Pierre Lemieux, concluant ainsi l’interview, « si les individus sont imparfaitement rationnels, ils le demeurent tout autant quand ils deviennent politiciens ou bureaucrates »… Excellent retournement. Tout aussi excellent, ce nouveau magazine offrant cette interview. Books propose de présenter « l’actualité par les livres du monde ». Les faits et événements qui font l’actualité nationale et internationale sont mis en perspective par la lecture d’un ouvrage présentant un intérêt particulier. Books est donc l’occasion d’une nouvelle approche des problèmes du monde par la découverte de nombreux et merveilleux ouvrages. C’est le magazine rêvé des amoureux des livres. Le directeur de publication de Books est Olivier Postel-Vinay, qui fut également rédacteur en chef de Courrier International. On retrouve en effet dans l’organisation et le contenu de Books l’aspect et l’idée de cet autre magazine. Courrier International offre un panorama du monde à travers une sélection d’articles et extraits de journaux, magazines et revue du monde entier. Ici c’est autour de livres du monde entier. On trouve à la fin de Books une rubrique « skoob », relevant des extraits littéraires inédits ou surprenants, pendant de la fameuse rubrique « Insolite » de C.I., également placée à la fin. Outre un découpage et une maquette similaires, le format et le papier sont les mêmes. Un aspect particulièrement intéressant de ce projet est « l’engagement culturel » que revendique la rédaction. Le Figaro Littéraire du 4/12/2008 notait : « Olivier Postel-Vinay ne veut pas s'inscrire dans une chapelle intellectuelle ou une tendance politique. Est-ce possible ? Il cultive un regard volontairement critique, et pourquoi pas iconoclaste. » Cette difficulté à classer dans une tendance, un courant ou un mouvement ce nouveau magazine en intrigue plus d’un. A la rubrique « courrier des lecteurs » du n°1, une étudiante posait explicitement la question : A gauche ou à droite ? Ce à quoi elle se voyait répondre : « Books n’est ni à gauche ni à droite. Notre engagement politique est culturel. Les idées de gauche et de droite sont bonnes à prendre, quand elles stimulent la réflexion, l’ouverture d’esprit et le non-conformisme. Nous privilégions les points de vue novateurs et les analyses qui bousculent les convictions établies. A commencer par les nôtres ! » Cet engagement culturel me semble profondément libéral - non pas libéral au sens doctrinal ou politique du terme, mais dans sa signification philosophique et humaniste. Olivier Postel-Vinay se présenterait-il ainsi, en libéral transcendant les clivages et les partis ? Il a en tout cas pris des positions intéressantes affirmant une telle inclination, notamment à propos des universités, critiquant les politiques de recherche publique et invitant à laisser les établissement universitaires à sélectionner eux-mêmes leurs étudiants et leurs enseignants tout en abandonnant le système des chercheurs fonctionnaires. Il n’est peut-être pas non plus anodin qu’un auteur subversif comme Pierre Lemieux soit invité dès le premier numéro. Mais il s’agit là d’un libéralisme encore trop politique, qui n’est pas celui que je veux percevoir dans l’idée d’engagement culturel - et qui en est peut-être même, dans une certaine mesure, l’antithèse… Le libéralisme de l’engagement culturel, c’est cette volonté d’offrir à chacun les outils nécessaires tant pour travailler à son développement personnel que pour décrypter notre monde de la façon la plus juste, motiver le débat, dynamiser le marché des idées et bâtir progressivement une société toujours plus libre et florissante. L’accroissement de la production culturelle, son accès au plus grand nombre, la stimulation intellectuelle, l’invitation à la réflexion et à l’exercice critique de la raison furent tout autant de projets et motivations des Lumières, conduisant et prolongeant la révolution libérale. Bref, précipitez-vous dans le kiosque le plus proche de chez pour découvrir Books ! Et pour le lancement du magazine, le n°1 est à 3 euros au lieu de 6, raison de plus pour en profiter ! > http://www.booksmag.fr/
(V) Posted December 16, 2008 Author Report Posted December 16, 2008 *Un article intéressant sur le "libéralisme" d'Olivier Postel-Vinay : http://www.amateur-idees.fr/forum.php?id_article=95 …« Je suis frappé par le contraste des idées traitées par la presse française et la presse anglo-saxonne » dit avec prudence Olivier Postel-Vinay, histoire de ne pas se mettre trop de journalistes à dos en cette période de lancement. On sent bien qu’il bout sous des airs de civilité. Que la presse française l’exaspère souvent avec son manque de curiosité et son déficit analytique. Il suffit de se reporter à son essai, Le Grand Gâchis (Eyrolles), publié en 2002. C’est un opuscule qui derrière les chiffres et ses surplombs, développe une analyse à la cruauté effilée du système français de recherche et d’enseignement supérieur. Il y prenait déjà la mesure des budgets alloués par l’Etat, et de leur utilisation sans aucun sens politique. Ses recommandations en revanche pour une sélection des universités de leurs étudiants et de leurs enseignants-chercheurs, la mise à bas de chercheurs fonctionnarisés, ou encore le financement de la recherche par projets et selon une évaluation des pairs, ont recueilli un accueil très chahuté au CNRS. Reste que le diagnostic s’avérait juste et annonçait quelques mois plus tard, la crise durable des chercheurs. On le voit néo-libéral, alors qu’il perpétue la tradition du libéralisme politique et philosophique. « Depuis la mort d’Aron, le débat a perdu de sa puissance en France. Il manque cruellement de cerveaux bien faits et de polémistes à la Jean-François Revel, que ce soit dans les universités, les grandes écoles ou dans les médias. D’une part, le journalisme français n’est jamais que le parent pauvre du système de sélection des élites et d’autre part, la relation de la presse avec les intellectuels s’avère peu spécialisée, et beaucoup trop révérencieuse. Si je veux prendre connaissance par exemple des débats critiques sur la pensée de Claude Lévi-Strauss, mieux vaut se reporter au Wikipédia en anglais. Même chose pour Derrida et Foucault. » L’exercice de liberté critique a même produit quelques effets dans la préparation des numéros zéro. « Notre article sur « Michel Foucault, le crépuscule d’une idole » a déclenché quelque passion au comité éditorial » sourit Olivier-Postel Vinay. …
Silhouette Posted December 17, 2008 Report Posted December 17, 2008 Merci Valentin, pour m'avoir fait découvrir ce magazine nouveau que j'ai parcouru rapidement avec l'intention d'y revenir et dont je vais suivre les numéros prochains avec intérêt. C'est dans les réponses au courrier des lecteurs qu'on trouve la meilleure description de Books : Books n'est pas un magazine sur les livres. Les livres ou, plus exactement les analyses parues à propos des livres, sont l'instrument que nous privilégions pour décrypter l'actualité, pour éclairer les sujets d'intérêt général. Nous ne sommes pas un concurrent des magazines littéraires […]. Nous sommes un mensuel d'information générale qui exploite la profondeur du livre pour fournir des repères différents de ceux proposés par les autres journaux. J'ai pu lire, dans ce premier numéro, des articles aux thèmes variés, allant de Babar aux origines du signe "V", et repéré des points de vue à l'originalité salutaire sur Googlebooks ou la Corée du Nord. À l'instar de mon camarade, je vous recommande donc vivement la découverte de ce nouveau-venu dans les kiosques.
jmserigny Posted December 17, 2008 Report Posted December 17, 2008 Merci Valentin, pour m'avoir fait découvrir ce magazine nouveau que j'ai parcouru rapidement avec l'intention d'y revenir et dont je vais suivre les numéros prochains avec intérêt.C'est dans les réponses au courrier des lecteurs qu'on trouve la meilleure description de Books : J'ai pu lire, dans ce premier numéro, des articles aux thèmes variés, allant de Babar aux origines du signe "V", et repéré des points de vue à l'originalité salutaire sur Googlebooks ou la Corée du Nord. À l'instar de mon camarade, je vous recommande donc vivement la découverte de ce nouveau-venu dans les kiosques. Y'à des images?
Silhouette Posted December 17, 2008 Report Posted December 17, 2008 Y'à des images? Il y a des illustrations oui, mais il y a aussi beaucoup de mots de plus de trois syllabes ; donc à mon avis sa lecture est peine perdue pour toi.
(V) Posted December 17, 2008 Author Report Posted December 17, 2008 Y'à des images? Books n'est pas une revue intellectuelle spécialisée, mais un magazine, très accessible. On y trouve des articles de toute longueur, des entrevues, nombre de "brèves littéraires", d'extraits et de citations, le tout illustré de photos, dessins, et par les couvertures des ouvrages présentés ! Tu auras bien assez d'images à regarder pendant que Silhouette te fera la lecture le soir avant d'aller dormir
Silhouette Posted December 18, 2008 Report Posted December 18, 2008 On avait dit qu'on ébruitait pas ça !
Rémy Posted December 19, 2008 Report Posted December 19, 2008 Outre les articles consacrés aux ressorts psychologiques de la crise - dans la droite ligne des idées de Taleb -, l'article géopolitique sur la Corée du Nord est très intéressant. A partir d'une critique d'un roman racontant la vie d'une jeune femme sous le régime de Kim Jong Il, l'auteur de l'article (journaliste à Newsweek) décrit une société aux antipodes de l'image véhiculée ailleurs : des individus pratiquant la désobéissance civile, tentant par tous les moyens de commercer pour échanger des denrées alimentaires quitte à corrompre les autorités militaires et policières. L'auteur montre que cette ouverture et cette résistance de la population sont liées au modèle du voisin chinois capitaliste.
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