free jazz Posté 5 août 2010 Signaler Posté 5 août 2010 Le terme de mafia est souvent utilisé à tort et à travers dès qu'il est question de crime organisé. Or une mafia n'est pas un simple réseau criminel, ni un super gang. La science criminologique définit une mafia comme une organisation criminelle secrète parvenue au stade de l'institution, c'est-à-dire le stade symbiotique d’intégration durable dans la société, dont l'espérance de vie est supérieure à celle de ses membres. On trouve d'autres critères comme son activité monopolistique sur un territoire et sa pénétration progressive de la sphère politique par la corruption. J'avais commencé une ébauche de définition ici. La mafia se distingue aussi du caïdat et des zones de non-droit, encore que les zones de non-droit constituent un terrain criminogène favorable au développement de l'alter-droit mafieux. En faisant un peu de prospective le risque est donc que nos banlieues connaissent à terme une évolution similaire à celle des Balkans post Yougoslavie. Les organisations criminelles satisfaisant ces critères sont, outre les mafias italiennes, les Triades chinoises, les Boryokudan japonais (dont les membres sont appelés « Yakuza »), la mafia italo-américaine, la «Mafija» Serbe, la « Mafiya » russe, la « Maffya » turque et la mafia albano-kosovare. Les autres autres groupes criminels comme les trafiquants de drogue des cités ou la pègre du sud de la France, ne peuvent pas être qualifiés de « mafias » au sens strict. Je cherche des articles sérieux faisant le point sur la situation actuelle des influences mafieuses en Europe. Pour l'instant, je trouve ces résultats : Mafia albano-kosovare vs Mafia russe : 1-0 Mafia albano-kosovare vs Mafias italiennes : 1-0 Mafias et organisations criminelles La Mafia Albanaise, 1ère partie Structure Les mafieux Albanais sont soumis à un « code d'honneur », le Canon du 15ème siècle écrit par Leke Dukagjini. En plus du mariage, de la famille et de la propriété, il y est question d'honneur : il est impossible de revenir sur une parole donnée. Ce Canon a régi la vie quotidienne des clans du Nord et de l'Est du pays jusqu'au 20ème siècle et a codifié la pratique de la vendetta. Lors de la chute du communisme en 1990, les criminels dont la vie et les pratiques avaient peu changé depuis la Guerre Froide se sont convertis aux méthodes modernes. Ils ont traversé les frontières au début des années '90 et le mouvement migratoire s'est poursuivi même après la guerre du Kosovo. Ils ont commencé à travailler comme assistants dans des réseaux de trafic de drogue déjà existants dirigés par des Turcs et des Kurdes. D'après la police, ils sont rapidement parvenus à se tailler une place et faire valoir leurs « droits ». Les clans du crime albanais sont organisés selon les anciennes règles de la vie rurale. Le chef de chaque clan reçoit l'allégeance d'un groupe de vassaux qui ont souvent des liens de sang avec lui. Ils se réunissent en comité, nommé « Bajrak », où l'on discute de nouvelles entreprises. Par exemple, la somme nécessaire à l'ouverture d'une maison close à Soho sera fournie par les membres du comité et une partie des profits sera expédiée aux proches restés au pays. La loi du silence est inviolable. Les Albanais ont quatre atouts dans leur manche : comme toute mafia florissante, ils bénéficient d'un lieu sûr dans leur patrie et d'une large diaspora ; leur pays se situe au carrefour des plus importantes voies du trafic de drogue ; leurs contacts avec l'Armée de Libération du Kosovo leur ont permis de se fournir en armes et, enfin, ils sont résolus à employer une violence extrême. (1) Activités La Mafia Albanaise contrôle plus de 70 % du marché de l'héroïne en Suisse, en Autriche, en Allemagne et dans les pays scandinaves, des milliers de prostituées "travaillant" dans des conditions horribles, de l'Italie à la Suède, des dizaines de commandos de cambrioleurs ultra-professionnels, formés d'anciens militaires ou policiers. En Angleterre, des Albanais, qu'ils soient originaires d'Albanie ou du Kosovo, sont soupçonnés par Scotland Yard de chantage, de possession d'armes et de vols qualifiés. (1) En fait, la Mafia Albanaise sévit dans six principaux secteurs d'activités : la drogue (principalement l'héroïne, dont l'acheminement passe par la « route des Balkans », à partir de la Turquie) ; la contrebande, qui a connu un essor considérable grâce à l'embargo contre la Yougoslavie depuis près de huit ans (principalement le trafic de cigarettes); la prostitution (les mineures sont enlevées dans les camps de réfugiés kossovars par leur compatriotes, en Albanie ou bien récupérées de force une fois acheminées clandestinement en Europe de l'Ouest), le trafic d'armes (stocks pillés durant l'insurrection de Tirana en 1997, approvisionnement en Allemagne de l'Est ou encore auprès des mafias russe et italiennes implantées en Suisse, en Belgique et en Italie) ; le racket (principalement au détriment des réfugiés kossovars et des diasporas albanaises de l'Ouest ; enfin, l'acheminement d'immigrants vers l'Union européenne. (2) Prostitution Les Albanais dirigeraient la traite des femmes pour toute la Grande-Bretagne à destination du marché de la prostitution. Scotland Yard, le service de police britannique, estime que les gangs albanais contrôlent près de 75 % de la prostitution à Soho, à Londres. Les personnes impliquées dans ces réseaux sont pour la plupart des femmes et des enfants victimes de formes modernes d'esclavage, enlevées et manipulées par leurs patrons. À leur arrivée à Soho, les Albanais ont fait main basse sur le réseau de prostitution sans crier gare. Rien que pour Soho, chaque année, plus de 18 M€ , fruits de l'exploitation de près de mille prostituées, retournent en Albanie . Les grandes villes d'Europe occidentale sont les premières destinations du trafic de femmes, car ces villes constituent les places principales de l'industrie du sexe. Les femmes arrivent du monde entier, même si un grand nombre proviennent des pays d'Europe de l'Est » : voilà comment Interpol résume sobrement le boom du « business » de la prostitution sur le Vieux Continent. Depuis les années 90, l'arrivée de prostituées de la République tchèque, de Bulgarie ou d'Albanie n'a cessé d'augmenter. Selon l'Organisation internationale pour les migrations, 300 000 femmes venues de l'Est se prostituent en Europe occidentale. En France, où il y aurait entre 15 000 et 18 000 prostituées, les femmes venues des pays de l'Est en représentent environ un quart. Ces nouveaux réseaux de prostitution, notamment ceux contrôlés par la mafia albanaise, sont d'une violence inouïe. Les rares prostituées qui osent parler décrivent une nouvelle forme d'esclavage, en plein coeur de l'Europe. (1) « Des femmes achetées et violées collectivement dans des camps » « Les réseaux de prostitution albanais constituent la forme de "voyoucratie" la plus primaire. Il existe des camps de soumission, où les femmes sont achetées et violées collectivement avant d'être acheminées vers les grandes villes européennes »(3) A Bruxelles, la moitié des prostituées seraient de nationalité albanaise. Pour la justice belge les « centres de formation » sont situés en Albanie : les jeunes femmes y sont vendues pour aller « travailler » à Londres, Hambourg ou Paris. « Selon leur beauté, leurs dons pour les langues étrangères et leurs aptitudes professionnelles, leur prix de vente à la fin 1999 allait de 10 000 à 15 000 francs » (4) A Milan, il existerait un véritable « marché aux femmes », où les différents réseaux passent commande. Une fois en activité en Europe de l'Ouest, les prostituées sont soumises à une forte pression de la part de leurs proxénètes. Au Kosovo les maisons closes ont « poussé comme des champignons » avec l'afflux des 50 000 soldats de la KFOR, des employés de la Mission des Nations unies au Kosovo (MNUK) et des personnels des organisations non gouvernementales. Originaires surtout de Moldavie, d'Ukraine, de Roumanie et de Bulgarie, les femmes sont vendues aux enchères entre 1 000 et 2 500 dollars (de 1 084 à 2 709 euros) aux proxénètes kosovars Stupéfiants Si pour Scotland Yard, c'est l'argent de la drogue qui a permis à la mafia Albanaise de prendre le contrôle de la prostitution à Soho, d'autres observateurs estiment généralement qu'elle s'est spécialisée au début dans la prostitution pour pouvoir investir ses gains dans le trafic de drogue. (5) Le criminologue Xavier Raufer estime que le Kosovo est devenu le paradis des trafiquants de drogue. Il accuse l'OTAN d'avoir ouvert la boîte de Pandore en toute connaissance de cause. (4) " Pour lui, La guerre du Kosovo a déclenché un cataclysme criminel énorme " En l'année 2000, les spécialistes Italiens de la lutte antimafia traquaient les liens financiers entre les trafiquants de drogue proches d'Al Quaïda et les caïds siciliens ; ils affirmaient qu'une fois la cargaison d'héroïne arrivée en Italie « c'est la mafia albanaise alliée avec la Cosa Nostra sicilienne qui se chargeait d'alimenter les marchés européens et américains » (6) Concernant la drogue dure, les clans Albano-kossovars semblent avoir acquis une position dominante, parfois monopolistique, dans le trafic international d'héroïne, celui de la cocaïne étant partagé avec les « leaders » mondiaux que sont les « Cartels » mexicains et surtout colombiens. Depuis le début des années 90, en effet, le système criminel en vigueur en Italie et en Europe de l'Ouest a considérablement évolué. Les Turcs ont conservé le monopole du marché en gros de l'héroïne, mais ont cédé aux Albanais, principalement kossovars, le contrôle de l'acheminement vers l'Ouest. Cette nouvelle configuration nécessite des centres de stockage, situés principalement en Hongrie, mais également en République Tchèque et en Bulgarie, principales plaques tournantes de la mafia albanaise à l'Est. D'après un rapport d'Interpol daté de novembre 1997, «les Albanais du Kosovo détiennent la plus grande part du marché de d'héroïne en Suisse, en Autriche, en Allemagne, en Hongrie, en Tchéquie, en Norvège, en Suède, en Pologne et en Belgique », et ils représenteraient à eux seul près de 15 % des arrestations d'Interpol pour le trafic de drogue. En avril 1999, les brigades anti-mafia de Bulgarie signalaient une véritable explosion du trafic d'héroïne depuis le début de la guerre du Kossovo. Les policiers des stups et les experts d'Interpol sont-ils impresionnés des quantités phénoménales de drogue saisies auprès des réseaux albanais. Pour Xavier Raufer, c'est bien « la preuve que la mafia albano-kossovare joue désormais un rôle central dans le narco-trafic européen et que la guerre du Kossovo a bel et bien déclenché un cataclysme criminel énorme dont les Balkans souffrent déjà et dont l'Europe, occidentale comme orientale, ressent maintenant les premiers effet ». La Suisse, qui accueille environ 200 000 réfugiés albanais (deuxième communauté immigrée du pays), est l'une des principales plaques tournantes du trafic de drogues et d'armes vers l'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie et la République tchèque, où la police soupçonne les nombreux vendeurs et fabriquants albanais de bijoux en or de procéder au blanchiment de l'argent du trafic. Le 10 décembre 1998, le quotidien londonien The Independant révélait que les mafieux albanais contrôlaient 70 % du marché suisse de l'héroïne. Ce sont d'ailleurs près de 2000 Albanais du Kossovo qui croupissent actuellement dans les geôles helvétiques pour trafic de stupéfiants. La Scandinavie est devenue une zone de refuge pour les criminels albanais. Plusieurs trafics de drogue dirigés par de jeunes Kossovars ont été démantelés au cours de l'année 1999. Arrêté le 23 février 1999 par la police tchèque, le « parrain » kossovar Princ Dobroshi avouera, selon un rapport du BIS (service de sécurité tchèque) publié le 12 mars dans les journaux praguois, que « le trafic servait à financer des achats d'armes. livrées à l'Armée de Libération du Kossovo ». (2) De fait, d'après un Rapport de 24 pages des services de renseignement de l'Otan révélé par le Washington Times du 5 juin 1999, les liens entre la mafia albano-kossovare, l'UCK et l'actuel boom de l'héroïne en Occident ne fait plus aucun doute. D'après ce rapport, « de nombreux membres de l'UCK sont plus ou moins impliqués dans le marché juteux de l'héroïne. La route des Balkans générerait plusieurs dizaines de millions de dollars par an » Frank Furet http://www.bancpublic.be/PAGES/130MafiaAlbanaise1.htm
Barem Posté 5 août 2010 Signaler Posté 5 août 2010 Je cherche des articles sérieux Des livres également ? Sinon, pour les articles, j'ai trouvé ça : - http://www.scienceshumaines.com/la-mafia-c…e_fr_14963.html - http://www.persee.fr/web/revues/home/presc…5_num_8_30_2066 - www.ciroc.nl/presentaties/20070221%20paoli.ppt ( power point ) - http://www.bancpublic.be/PAGES/130MafiaAlbanaise1.htm - http://www.contre-feux.com/international/m…coeur-de-le.php …
artemis Posté 5 août 2010 Signaler Posté 5 août 2010 Au début les mafias italiennes (je parle surtout pour la calabraise les autres je ne sais pas) n'avaient rien de criminelles on appelait ça la "mafia d'onore". C'était un réseau avec un code d'honneur et qui défendaient les terres des plus offrants et les plus faibles (c'était une réalité du moins dans les années 20 et je suppose avant et pas un mythe pour se donner une bonne image contrairement à ce qu'on raconte). Ils ont même eu le soutient du Vatican pour lutter contre l'Etat italien naissant et s'assurer que personne ne collabore avec les fonctionnaires notemment les policiers. C'est d'ailleurs à cause de cet anti-étatisme que le régime fasciste par ses persécutions a poussé à l'exil vers les USA et à la création des mafias italo-américaines. C'est durant l'après guerre que les activités sont devenues réellement criminelles et violentes avant ce n'était que du traffic d'alcool, de la protection (souvent demandée par des immigrés en situation irrégulière qui ne pouvait s'offrir le luxe d'appeler au secours la police locale à cause des expulsions) et des jeux de hasard clandestins pour échapper aux taxes et aux réglementations. PS : d'après ta définition il me semble que la Camorra ne peut être considéré comme une mafia car elle n'a pas de structure hiérarchique stable.
ShoTo Posté 6 août 2010 Signaler Posté 6 août 2010 Oui sauf que comme on le voit très bien dans les Sopranos, la mafia italo américaine n'existe plus
free jazz Posté 24 août 2010 Auteur Signaler Posté 24 août 2010 PS : d'après ta définition il me semble que la Camorra ne peut être considéré comme une mafia car elle n'a pas de structure hiérarchique stable. Dans le dernier numéro de L'Express il y a un dossier sur les mafias abordant cette organisation décentralisée qui fait leur force : une structure clanique horizontale proliférant par capillarité doublée d'une structure politique verticale instituée en tribunal arbitral, gardienne des codes et de la tradition. Il n'y a pas de gouvernement, mais des "juges", au demeurant élus. Cela confirme ma comparaison de la structure mafieuse avec la structure syndicale, sans toutefois atteindre le degré d'intégration politique d'une corporation. D'autre part l'organisation discrète en société secrète avec ses rites demeure prégnante. Pour LEXPRESS.fr, Giuseppe Baldessarro, journaliste de la Repubblica à Reggio de Calabre et au Quotidiano della Calabria, décrypte la portée de ces opérations. En février, il a reçu cet avertissement par la poste "Ne va pas plus loin" , agrémenté de projectiles. En mai, il a reçu le prix Giuseppe Fava, du nom du journaliste assassiné par Cosa Nostra, pour ses articles. La maxi opération du 13 juillet menée contre la 'Ndrangheta, cette mafia décrite jusqu'alors comme "horizontale", composée d'une myriade de clans familiaux, est considérée comme de très haute importance. Pourquoi? Elle confirme le fait que la 'Ndrangheta est une unique organisation criminelle, présente de manière capillaire dans toute l'Italie et le monde entier. Et elle démontre que partout où opèrent ces familles, celles-ci restent reliées à un unique centre qui se trouve à Reggio de Calabre. C'est en Calabre que bat le coeur de la 'Ndrangheta, même si les clans continuent de jouir d'une grande autonomie opérationnelle. On a donc découvert qu'au sommet de la 'Ndrangheta, il y a une structure appelée "Provincia" ou "Crimine"… C'est une sorte de "Coupole", élue chaque année: c'est l'organe politique (et non exécutif) de la 'Ndrangheta, le gardien des règles, en somme, qui a le pouvoir de décider des chefs dans les territoires éloignés de la Calabre quand il n'y a pas d'accord entre les familles, qui établit les clans que l'organisation reconnaît formellement et ceux qu'elle ne reconnaît pas, qui est appelé à trancher sur les litiges entre les clans, et qui a aussi un tribunal pour juger ceux qui commettent une faute… La 'Ndrangheta reste une organisation horizontale sur le plan exécutif, verticale sur le plan politique. La 'Ndrangheta reste une organisation horizontale sur le plan exécutif, verticale sur le plan politique. Pour faire une comparaison, ce "Crimine" est une sorte de "cour constitutionnelle". Si un clan veut faire des affaires sur un territoire qui n'est pas le sien, il doit en informer le clan de l'autre territoire pour trouver un accord. Le Crimine intervient dans le cas où il n'y a pas d'accord entre les deux. Vous dites qu'il n'a aucun pouvoir exécutif? Non, dans le sens où il n'intervient sur les affaires, seulement quand il n'y a pas d'accord entre les clans. Exemple: la faida [vendetta qui dure sur des années] de San Luca, qui a conduit au massacre de Duisbourg, au coeur de l'Allemagne, le 15 août 2007, a été arrêtée par la volonté du Crimine. Il ne décide pas quelles affaires on doit faire mais comment, en imposant l'harmonie entre les clans. A la tête de ce Crimine, la 'Ndrangheta avait donc un boss des boss? Mais qui est ce Domenico Oppedisano, 80 ans? Il était inconnu, jusqu'alors! Chef d'une structure réélue chaque année, qui a le devoir de garantir les règles internes, il est donc le gardien de la tradition mafieuse. Ce rôle revient aux "sages" de la 'Ndrangheta, pas aux opérationnels. Pour cette raison, Oppedisano est un inconnu de nos chroniques. Il est un garant, non un chef opérationnel. Quand a-t-il été choisi et comment? Il a été choisi après une négociation conclue le 19 août 2009 après un sommet tenu dans la Locride [une région de Calabre], lors du mariage de la fille de Giuseppe Pelle, chef indiscuté d'un des clans les plus puissants de San Luca [village de l'Aspromonte, maison-mère de la 'Ndrangheta]. Son élection a été ratifiée le 2 septembre 2009, lors de la traditionnelle fête de la madone de Polsi à San Luca. Comment a-t-il été identifié par les enquêteurs? Son nom affleurait dans diverses interceptations téléphoniques. Puis les carabiniers ont placé des micros dans sa maison et son jardin, et il a été filmé à Polsi. C'est ce Crimine qui a décidé de la mort du boss "indépendantiste", Carmelo Novella, à Milan, à l'été 2008? Il voulait prendre ses distances avec la maison-mère… Oui. Il y a des écoutes avant l'homicide dans lesquelles on comprend la désapprobation du Crimine par rapport au projet sécessionniste de Novella. Et d'autres dans lesquelles on apprend que «Novella a été licencié». Peu après, il est tué. Comment est composé ce «gouvernement» de la 'Ndrangheta? La 'Ndrangheta a une structure très complexe. Avec des rôles précis et des grades. Le Crimine avait comme "Capo Crimine" Oppedisano, qui réprésentait le "mandamento" (district) de la zone tyrrhénienne, en Calabre. Puis il y avait un "Capo societa", Antonino Latella, pour le "mandamento" de la ville de Reggio. Et un "Mastro generale", Bruno Gioffre, pour le "mandamento" de la côte ionique, la Locride. A ces trois, s'ajoutait le "Mastro di Giornata", Rocco Morabito du village d'Africo et un "contabile" (comptable) de Plati, non identifié. Chacun ayant un rôle bien défini dans le Crimine. Et ce modèle hiérarchisé est reproduit en cascade en descendant vers la base: on retrouve ces rôles dans chaque "locale" de 'Ndrangheta (première structure organisative de cette mafia) qui detient le pouvoir sur son territoire. Et tout en bas de la hiérarchie, il y a différents grades, les "picciotti", les "sgarristi"… Tout ça peut apparaître comme du folklore mais ce n'en est pas: c'est ce qui garantit une efficacité à l'organisation et une capillarité extraordinaire. C'est pour ça que la 'Ndrangheta est devenue l'une des criminalités organisées les plus puissantes au monde. L'enquête du 13 juillet a aussi touché la "zone grise", " la bourgeoisie mafieuse" de cette mafia à Milan: le directeur du département sanitaire de la ville de Pavie qui achetait des votes pour un boss… L'appui de la 'Ndrangheta est fondamental pour la politique: elle déplace des milliers et des milliers de votes… et choisit en échange des marchés publics pour ses clans. Ça a toujours été comme ça. Mais aujourd'hui, la 'Ndrangheta ne s'en contente plus, elle place ses hommes dans des postes-clés de l'administration publique: des maires, des conseillers régionaux, des parlementaires, qui rendent directement des comptes aux boss. http://www.lexpress.fr/actualite/monde/eur…que_907115.html Le même dossier explique aussi que l'activité des mafias italiennes se concentre désormais davantage sur la finance, l'industrie et la corruption. Elle s'est embourgeoisée, recrute surtout des cols blancs et étend ses ramifications dans la sphère politique… jusqu'au Venezuela de Chavez. Francesco Forgione a présidé la commission parlementaire anti-Mafia en Italie. Dans un livre qui sort en France chez Actes Sud (1er septembre), il démonte les ramifications européennes de ces organisations criminelles. Il explique ici comment elles infiltrent nos économies.Cette colonisation n'aurait pu se faire sans l'aide de "zones grises", d'une "bourgeoisie mafieuse".C'est tout le problème. Si, dans le passé, le souci des organisations criminelles était d'accumuler de l'argent, aujourd'hui, elles doivent le blanchir car elles en ont trop! Et ce ne sont pas les paysans qui peuvent le réinvestir dans l'économie légale, mais une strate d'avocats experts en droit international, de directeurs de banques, de fonctionnaires et de politiques. En effet, s'il peut exister une politique sans mafia, il ne peut exister de mafia sans politique: c'est un système de pouvoir qui entre en relation avec un autre système de pouvoir. Des exemples de "zone grise"? Le souci actuel des organisations criminelles, c'est le blanchiment Quand le puissant clan De Stefano de la 'Ndrangheta gère un casino près de Nice, dans les années 1990, c'est qu'il a fréquenté des milieux économiques. Quand, en 2008, on arrête en Espagne, dans un restaurant renommé de la Costa Brava, Patrizio Bosti, un gros boss de la Camorra, il dîne avec les entrepreneurs locaux, avec 24 000 euros en poche… En 2008, on arrête à Madrid un autre camorriste, Vincenzo Scarpa, le gérant d'une société d'import-export alimentaire. Quand il s'agissait d'organiser un banquet, l'ambassade italienne comptait parmi ses bons clients… Sept ans plus tôt, la police espagnole avait interpellé Leon van Kleef, un avocat d'Amsterdam, qui s'avère être celui de la reine des Pays-Bas! D'après les écoutes des enquêteurs, des négociations portant sur des centaines de kilos de coke s'étaient tenues dans son cabinet, entre des mafieux italiens et des narcos colombiens… Depuis, l'avocat a été acquitté, pour insuffisance de preuves. Les procès se terminent souvent ainsi: ces gens n'étaient pas conscients du degré criminel des mafieux… Et c'est là-dessus aussi que s'est construite l'hypocrisie du pouvoir, jusqu'à la collusion, parfois. Pour administrer son trésor, Vito Ciancimino, l'ex-maire mafieux de Palerme - en fait le prête-nom du parrain Provenzano - avait fait appel à deux avocats italiens de premier plan: Giorgio Ghiron, dont le cabinet est représenté jusqu'à New York, et Gianni Lapis. Ils ont été condamnés en première instance à cinq ans et quatre mois de prison, et ils attendent l'appel. C'est ça, la zone grise… Vous décrivez d'immenses pans de l'économie légale infiltrés… Secteur classique: la distribution alimentaire, qui permet de se créer un réseau, avec les grossistes, les restaurants, qui permettent, eux, d'entrer en rapport avec la population, de se forger une acceptabilité sociale. Il y a aussi l'immobilier. Dès les années 1970, les mafieux ont investi sur la Côte d'Azur. Ensuite, sur la Costa del Sol, que les Espagnols appellent "Costa Nostra". Après, il y a des secteurs élastiques… On a vu un agent de la puissante famille Piromalli de la 'Ndrangheta vendre un vaccin infantile, pour le compte d'une multinationale américaine, et pour des millions de dollars, aux gouvernements de Chavez, au Venezuela, et de Lula, au Brésil. (…)Cette mafia calabraise est devenue la plus puissante (44 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel) et la plus dangereuse des mafias italiennes… Oui. Pendant des décennies, elle n'a pas été combattue. Au moment où Cosa Nostra s'enfermait dans une politique de confrontation sanglante avec l'Etat en assassinant les juges Falcone et Borsellino en 1992, donc dans une dimension nationale, la 'Ndrangheta, elle, a "cueilli" l'explosion de la globalisation, prête à réinvestir son trésor accumulé sur les séquestres de riches industriels. C'est comme ça, par exemple, qu'on voyait partir pour l'Australie, du village miséreux de Plati, au fin fond de la Calabre, des millions d'euros des rançons! La 'Ndrangheta est la première mafia globale: organisée en 155 familles de sang structurées comme des entreprises, elle a des colonies sur les cinq continents. Où qu'ils soient, à Milan, Duisburg, Toronto ou en Australie, où a été découvert un livret de serments, les clans Alvaro, Nirta ou Piromalli reproduisent le même modèle culturel, les mêmes rites. Une structure "horizontale", donc, à la tête de laquelle on a découvert un boss - Dome-nico Oppedisano, 80 ans - lors de l'opération du 13 juillet. La surprise totale! Oui, la 'Ndrangheta s'était dotée d'un "capo", une sorte d'"autorité morale" élue chaque année, à la tête d'un sommet appelé "crimine", qui ratifie l'élection des chefs de cette mafia au nord de l'Italie, en Allemagne, au Canada ou en Australie, qui tranche les litiges, garantit l'unité… Ainsi, quand, en 2008, le boss sécessionniste Carmello Novella a voulu fonder "sa" 'Ndrangheta à Milan, il a été éliminé. Si les clans conservent une grande autonomie opérationnelle, ils restent reliés au cordon ombilical en Calabre, où la 'Ndrangheta contrôle notamment le port de Gioia Tauro, le premier port de transit de Méditerranée, 3 millions de conteneurs chaque année… Complément Arte consacre un Thema à la mafia. Il est disponible en ligne: - "Un business pas très propre" - "Entretien avec Roberto Scarpinato" - "La mafia, organisation parasite" http://www.lexpress.fr/actualite/societe/c…hit_913447.html
Luciole Posté 25 août 2010 Signaler Posté 25 août 2010 En parlant de l'express, leur dernière édition est consacrée aux mafias dans le Monde, plus précisément en Europe et en France. A lire.
xavdr Posté 3 septembre 2010 Signaler Posté 3 septembre 2010 Du coté de Clio, qui regroupe une association et une agence de voyage dédiées à l'histoire, on trouve des conférences et articles produits par des universitaires spécialistes de ce sujet. http://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/la_mafia_s…le_du_crime.asp Au passage j'ai trouvé la référence à un ouvrage qui a l'air intéressant, sur le site des clionautes qui à ma connaissance est sans rapport avec le site Clio. http://www.clio-cr.clionautes.org/spip.php?article2697
Chitah Posté 16 octobre 2010 Signaler Posté 16 octobre 2010 Un article qui devrait t'intéresser free jazz : http://www.slate.com/id/2271186/
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