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Cantona et les banques


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Cantona et les banques

Article écrit par Nicolas le 6 décembre 2010 à 19 h 18 min

Je n’avais pas beaucoup envie de parler d’Éric Cantona. D’abord parce que son histoire de retrait d’argent n’a pas grand sens, ensuite parce qu’il m’est, je ne sais pas pourquoi, vaguement sympathique. Disons plus que la moyenne des joueurs de soccer. Un bête préjugé, sans doute.

Aussi, lorsqu’un aimable lecteur à nom de chaton nous a envoyé sur la boîte d’Ilys un extrait de la prose des tireurs de buts et d’argent, mon premier mouvement a été de chercher en P2P un album fait par Greg voilà quelques années, plus ou moins commandité par une gande banque française, et qui s’appelait Achille Talon et l’archipel de Sanzunron. On y voit Hilarion Lefuneste se mettre à détester l’argent et prôner un sain retour à la vie sans banques ni billets dans un paradis tropical du nom de Sanzunrons, où il entraîne son voisin Talon. Le paradis s’avère bien entendu un enfer et d’aventure en aventure la moralité de l’histoire est que chacun des personnages venus là pour fuir l’argent et la banque les réinvente naturellement et nécessairement au cours de ses activités quotidiennes.

Il s’agit donc de s’en aller retirer demain 7 décembre tout son argent de sa banque. C’est idiot. D’abord parce que la banque sera fondée à refuser, il est rare qu’on puisse retirer de grosses sommes d’un coup sans prévenir à l’avance. Les comptables de Mme Bettencourt en savent quelque chose. Alors vous pensez que Mme Michu, hein… Ensuite c’est absurde parce qu’il suffirait, pour que ce soit possible, que la banque centrale imprime quelques dizaines de milliards. Elle le fait chaque jour – ou plutôt elle fait quelque chose qui y est équivalent sans avoir à imprimer physiquement les billets – pour racheter en sous-main des emprunts d’État de pays dits périphériques de la zone euro. Alors pourquoi pas pour les copains de Cantona ? De plus c’est parfaitement irresponsable : combien de gens se feraient délester dans la rue avec toutes leurs économies dans leur cabas ? Combien de grand-mères se feraient piquer leurs biffetons cachés sous le matelas ou entre les paires de draps ?

Néanmoins l’inculture économique est telle qu’il faut bien aller voir les arguments de ces gens. (Comme nous irons un jour voir les arguments du nouveau programme de la fille Le Pen avec ses histoires simplistes et idiotes de Pompidou et d’emprunt.)

Je ne sais pas d’où vient le texte, j’espère que notre aimable correspondant nous éclairera s’il est besoin.

Or donc, écoutons :

(…)

Nous, les citoyens du 21ème siècle, héritiers des générations qui se sont sacrifiées pour que nous soyons et demeurions des citoyens libres et dignes, nous exigeons la création d’une BANQUE CITOYENNE, au service des CITOYENS, une banque qui mettrait notre argent à l’abri des fièvres spéculatives, à l’abri des bulles financières toutes condamnées à exploser un jour, à l’abri des opérations qui transforment nos emprunts en actifs et se servent de nos dettes pour acheter d’autres richesses.

Nous voulons des banques qui ne prêtent que les richesses qu’elles possèdent. Des banques qui aident les petites et moyennes entreprises à relocaliser l’emploi, des banques qui prêtent à taux zéro. (*) Des banques qui soutiennent les projets qui profitent aux citoyens plutôt qu’aux « marchés » Des banques où déposer notre argent tout en ayant la conscience tranquille. Des banques dont nous n’aurons plus à nous méfier. Des banques dont le succès sonnera le glas des marchands de morts, de maladies et d’esclaves. Sur les ruines de l’ancien système, nous voulons construire un système bancaire qui ne sacrifiera plus la dignité humaine sur l’autel du profit.

(…)

(*) Ce que les banques islamiques accomplissent avec succès en refusant la pratique de l’usure pour des motifs religieux, nous pouvons l’accomplir pour des raisons citoyennes. »

Passons d’abord sur ce qui va exciter les excités : la mention de la finance islamique. Il est bien évident que les banques islamiques, qui n’existent pas par charité chrétienne, ne prêtent pas à « taux zéro » : elles ne pratiquent pas le taux d’intérêt, autrefois dénommé usure, mais pratiquent des opérations qui y équivalent. Sans entrer dans les détails, une banque islamique ne prête pas à intérêt, mais deux stratégies principales la rémunèrent :

■Elle peut prendre des parts dans des sociétés dont elle partage alors les bénéfices pour se rémunérer, souvent avec des clauses qui limitent ses pertes possibles. Le tout revient bien à donner de l’argent et à en reprendre le même montant plus une rémunération.

■Elle peut acheter un bien et le revendre aussitôt plus cher (ce qui représente l’intérêt qu’aurait pris une banque non-islamique) à quelqu’un qui paiera en paiements franctionnés. On a donc bien là aussi une rémunération de l’argent prêté.

Autrement dit nos bons amis cantonesques confondent l’interdiction d’une pratique (l’usure) et l’interdiction de ce à quoi elle sert (la rémunération de l’argent prêté). Résumons : sur ce point ils sont simplement mal informés et un peu naïfs.

Reprenons donc dans l’ordre une fois ce point évacué :

Nous, les citoyens du 21ème siècle, héritiers des générations qui se sont sacrifiées pour que nous soyons et demeurions des citoyens libres et dignes, nous exigeons la création d’une BANQUE CITOYENNE, au service des CITOYENS,

Bla bla bla. En quoi cela change-t-il le fait qu’un plus un fasse deux et pas quarante-trois, et que s’il n’y a pas d’intérêt à créer, posséder, exploiter des banques, il n’y aura pas de banques ? À moins que nos bons amis ne pensent à une sorte de service public de la banque ? Il faudra donc payer pour assurer ce service via les impôts plutôt que via les tarfications bancaires commerciales. Avec ce que cela veut dire de manque de concurrence dont on sait qu’il tire les prix vers le haut et les services vers le bas. Quant à la responsabilité supérieure dans un tel système, il suffit de se demander combien d’inspecteurs des finances ont été emprisonnés en France depuis un demi-siècle après qu’on ait recherché leur responsabilité personnelle dans des erreurs ou imprudences…

une banque qui mettrait notre argent à l’abri des fièvres spéculatives, à l’abri des bulles financières toutes condamnées à exploser un jour, à l’abri des opérations qui transforment nos emprunts en actifs et se servent de nos dettes pour acheter d’autres richesses.

Précisément. Si elle ne faisait rien de cela, ce ne serait pas une banque. Ou plutôt : une banque qui ne fait rien de ce qui est ici énuméré, ça s’appelle un tupperware et on l’enterre au fond du jardin.

En outre l’argument, en plus d’être absurde au fondement, serait faux s’il avait un commencement de réalité : fièvres spéculatives et bulles financières n’existent que parce que le marché ne fonctionne pas librement. À preuve la « crise » actuelle, qui n’a été possible que parce que les banques centrales, étatiques et monopolistiques, ont maintenu artificiellement des taux bas, incitant États, entreprises et particuliers à s’endetter de manière invraisemblable pendant des années et même des décennies. Elles continuent d’ailleurs à maintenir ces taux artificiellement bas. Le déclencheur conjoncturel de cette « crise » a lui été le secteur des prêts hypothécaires américains, c’est à dire le secteur le plus contrôlé et réglementé de l’économie américaine ; ce qu’on appelle maintenant Freddy Mae avec une ironie contractée, c’étaient deux entreprises géantes en fait gérées par le trésor américain, et qui n’étaient plus des entreprises commerciales et indépendantes que de nom. Que ce soient les banques centrales ou le trésor américain, pourquoi ont-ils agi ainsi ? justement pour prétendre faire ce que réclament les cantoniens : une finance meilleure, plus juste, plus humaine, qui prête aux pauvres et patin et couffin. La régulation n’est jamais une solution : elle est toujours le problème, car elle ne peut tout prévoir, elle rigidifie, elle permet à des situations anormales de se perpétuer et d’enfler jusqu’au point où leur absurdité explose en provoquant des dégâts énormes.

Nous voulons des banques qui ne prêtent que les richesses qu’elles possèdent. (…)Des banques où déposer notre argent tout en ayant la conscience tranquille.

Bref ils veulent tout et son contraire, comme d’hab. Soit la banque prête et il y a un risque, soit elle ne prête pas, et il n’y a pas de banque. Encore une fois : une telle banque, c’est un tupperware rempli d’or et enterré au fond du jardin. Mais pour avoir une carte bleue, vous pouvez vous brosser chers amis.

Des banques qui aident les petites et moyennes entreprises à relocaliser l’emploi,

Traduisons : des banques qui détruisent de la richesse au lieu d’en créer. Parce que pour produire dans le Loir-et-Cher plutôt qu’à Vientiane, il faut payer la différence, consistant non pas tant en salaires qu’en charges sociales. Mais avec l’argent de qui faire ça ? qui acceptera de mettre son argent dans une banque qui lui rendra seulement 20% de ce qu’il aura déposé en expliquant que le reste a été utilisé pour « relocaliser des emplois » ? Pas nos bons cantoniens, qui veulent une banque où déposer leur argent en laquelle ils puissent avoir confiance.

Des banques qui soutiennent les projets qui profitent aux citoyens plutôt qu’aux « marchés ». Des banques dont nous n’aurons plus à nous méfier. Des banques dont le succès sonnera le glas des marchands de morts, de maladies et d’esclaves. Sur les ruines de l’ancien système, nous voulons construire un système bancaire qui ne sacrifiera plus la dignité humaine sur l’autel du profit.

D’abord sans les grands méchants marchés financiers, il y a longtemps que nos sociales-démocraties européennes citoyennes, humanistes, éthiques, écoquitables et tout le toutim auraient fait faillite puisqu’elles vivent à crédit depuis des décennies. Ensuite sans les marchés, comment les entreprises se financeraient-elles ? Comment arriveraient-elles à couvrir les risques sur leurs matières premières sans les contrats à terme et autres produits dérivés ?

Les pays où il y a peu de marchés financiers, il en existe dans le monde. Par exemple le marché financier du Somaliland est assez étique, ce qui le rend probablement aussi très éthique aux yeux de nos bons apôtres. Reste à savoir si les habitants de cette joyeuse contrée ne préféreraient pas avoir un peu plus accès aux grands méchants marchés financiers. Il faudrait leur demander ce qu’ils pensent de leur dignité du côté de Mogadiscio. Et s’ils seraient prêts à la sacrifier pour avoir accès aux crédits et à la consommation pour s’acheter à bouffer, des iPad et avoir des téléphones Samsung gratos (qui sont gratos chez nous parce que les entreprises de télécommunications peuvent emprunter un peu plus chaque fois qu’un client s’engage sur 24 mois). Ce serait instructif d’avoir l’avis des Somalilandais.

À défaut, on recommandera aux amis de M. Cantona de tenter l’expérience inverse et d’aller s’installer là bas, contrée de lait et de miel où règnent, c’est bien connu, la concorde, la dignité humaine et la prospérité puisque le système financier y est réduit à sa plus simple expression, que ses méfaits insignes y sont réduits par la force des choses.

On le voit, ces propositions (à peine des propositions… ces vagues velléités mal attifées de morale dévoyée) n’ont pas de sens, elles sont contradictoires et relèvent d’abominables utopies qui, en général, quant elles arrivent à trouver un début d’application, finissent dans des charnier bourdonnants de mouches à viande.

Heureusement donc que demain M. Cantona ne mettra rien à mal. Sauf peut-être quelques automates distributeurs de billets. Et encore.

Les conseils qu’on peut donner aux gens à propos de leur banque sont bien plus simples que ces contes pour grands enfants un peu retardés et autres fadas de la citoyenneté suractivée :

■D’abord ne soyez pas à découvert. Ça coûte horriblement cher.

■Pour ne pas être à découvert, ou le moins possible, commencer à mettre un peu d’argent de côté chaque mois, même si ce n’est que vingt euros, sur un compte épargne.

■Choisissez votre banque. HSBC avec ses tarifs chers et pléthore de services en échange, en avez-vous besoin ? Si vous n’utilisez que trois services différents dans l’année, allez plutôt à la Banque postale.

■Investissez votre argent, ne le laissez pas dormir : ce n’est pas très compliqué, ça peut même être amusant, et il y a des produits peu risqués à condition de se renseigner un minimum sans se laisser dicter aveuglément ce qu’on fait par l’un ou l’autre.

■N’achetez jamais un produit d’épargne en fonction de l’avantage fiscal qui y est provisoirement attaché (sauf si vous êtes très riche, mais là votre conseiller en gestion et optimisation de patrimoine le fera pour vous).

Évidemment si Éric Cantona disait cela, les journalistes n’en parleraient peut-être pas…

Évidemment aussi ça ne vous protègera pas d’une catastrophe monétaire qu’on sent monter, on y reviendra, ce n’est pas le but ici. Mais ça vous permettra de ne pas nourrir contre votre banquier un ressentiment inutile qui pourrait vous jeter dans les bras de pareils démagogues.

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Cantona et les banques

Article écrit par Nicolas le 6 décembre 2010 à 19 h 18 min

Je n’avais pas beaucoup envie de parler d’Éric Cantona. D’abord parce que son histoire de retrait d’argent n’a pas grand sens, ensuite parce qu’il m’est, je ne sais pas pourquoi, vaguement sympathique. Disons plus que la moyenne des joueurs de soccer. Un bête préjugé, sans doute.

Aussi, lorsqu’un aimable lecteur à nom de chaton nous a envoyé sur la boîte d’Ilys un extrait de la prose des tireurs de buts et d’argent, mon premier mouvement a été de chercher en P2P un album fait par Greg voilà quelques années, plus ou moins commandité par une gande banque française, et qui s’appelait Achille Talon et l’archipel de Sanzunron. On y voit Hilarion Lefuneste se mettre à détester l’argent et prôner un sain retour à la vie sans banques ni billets dans un paradis tropical du nom de Sanzunrons, où il entraîne son voisin Talon. Le paradis s’avère bien entendu un enfer et d’aventure en aventure la moralité de l’histoire est que chacun des personnages venus là pour fuir l’argent et la banque les réinvente naturellement et nécessairement au cours de ses activités quotidiennes.

Il s’agit donc de s’en aller retirer demain 7 décembre tout son argent de sa banque. C’est idiot. D’abord parce que la banque sera fondée à refuser, il est rare qu’on puisse retirer de grosses sommes d’un coup sans prévenir à l’avance. Les comptables de Mme Bettencourt en savent quelque chose. Alors vous pensez que Mme Michu, hein… Ensuite c’est absurde parce qu’il suffirait, pour que ce soit possible, que la banque centrale imprime quelques dizaines de milliards. Elle le fait chaque jour – ou plutôt elle fait quelque chose qui y est équivalent sans avoir à imprimer physiquement les billets – pour racheter en sous-main des emprunts d’État de pays dits périphériques de la zone euro. Alors pourquoi pas pour les copains de Cantona ? De plus c’est parfaitement irresponsable : combien de gens se feraient délester dans la rue avec toutes leurs économies dans leur cabas ? Combien de grand-mères se feraient piquer leurs biffetons cachés sous le matelas ou entre les paires de draps ?

Néanmoins l’inculture économique est telle qu’il faut bien aller voir les arguments de ces gens. (Comme nous irons un jour voir les arguments du nouveau programme de la fille Le Pen avec ses histoires simplistes et idiotes de Pompidou et d’emprunt.)

Je ne sais pas d’où vient le texte, j’espère que notre aimable correspondant nous éclairera s’il est besoin.

Or donc, écoutons :

(…)

Nous, les citoyens du 21ème siècle, héritiers des générations qui se sont sacrifiées pour que nous soyons et demeurions des citoyens libres et dignes, nous exigeons la création d’une BANQUE CITOYENNE, au service des CITOYENS, une banque qui mettrait notre argent à l’abri des fièvres spéculatives, à l’abri des bulles financières toutes condamnées à exploser un jour, à l’abri des opérations qui transforment nos emprunts en actifs et se servent de nos dettes pour acheter d’autres richesses.

Nous voulons des banques qui ne prêtent que les richesses qu’elles possèdent. Des banques qui aident les petites et moyennes entreprises à relocaliser l’emploi, des banques qui prêtent à taux zéro. (*) Des banques qui soutiennent les projets qui profitent aux citoyens plutôt qu’aux « marchés » Des banques où déposer notre argent tout en ayant la conscience tranquille. Des banques dont nous n’aurons plus à nous méfier. Des banques dont le succès sonnera le glas des marchands de morts, de maladies et d’esclaves. Sur les ruines de l’ancien système, nous voulons construire un système bancaire qui ne sacrifiera plus la dignité humaine sur l’autel du profit.

(…)

(*) Ce que les banques islamiques accomplissent avec succès en refusant la pratique de l’usure pour des motifs religieux, nous pouvons l’accomplir pour des raisons citoyennes. »

Passons d’abord sur ce qui va exciter les excités : la mention de la finance islamique. Il est bien évident que les banques islamiques, qui n’existent pas par charité chrétienne, ne prêtent pas à « taux zéro » : elles ne pratiquent pas le taux d’intérêt, autrefois dénommé usure, mais pratiquent des opérations qui y équivalent. Sans entrer dans les détails, une banque islamique ne prête pas à intérêt, mais deux stratégies principales la rémunèrent :

■Elle peut prendre des parts dans des sociétés dont elle partage alors les bénéfices pour se rémunérer, souvent avec des clauses qui limitent ses pertes possibles. Le tout revient bien à donner de l’argent et à en reprendre le même montant plus une rémunération.

■Elle peut acheter un bien et le revendre aussitôt plus cher (ce qui représente l’intérêt qu’aurait pris une banque non-islamique) à quelqu’un qui paiera en paiements franctionnés. On a donc bien là aussi une rémunération de l’argent prêté.

Autrement dit nos bons amis cantonesques confondent l’interdiction d’une pratique (l’usure) et l’interdiction de ce à quoi elle sert (la rémunération de l’argent prêté). Résumons : sur ce point ils sont simplement mal informés et un peu naïfs.

Reprenons donc dans l’ordre une fois ce point évacué :

Nous, les citoyens du 21ème siècle, héritiers des générations qui se sont sacrifiées pour que nous soyons et demeurions des citoyens libres et dignes, nous exigeons la création d’une BANQUE CITOYENNE, au service des CITOYENS,

Bla bla bla. En quoi cela change-t-il le fait qu’un plus un fasse deux et pas quarante-trois, et que s’il n’y a pas d’intérêt à créer, posséder, exploiter des banques, il n’y aura pas de banques ? À moins que nos bons amis ne pensent à une sorte de service public de la banque ? Il faudra donc payer pour assurer ce service via les impôts plutôt que via les tarfications bancaires commerciales. Avec ce que cela veut dire de manque de concurrence dont on sait qu’il tire les prix vers le haut et les services vers le bas. Quant à la responsabilité supérieure dans un tel système, il suffit de se demander combien d’inspecteurs des finances ont été emprisonnés en France depuis un demi-siècle après qu’on ait recherché leur responsabilité personnelle dans des erreurs ou imprudences…

une banque qui mettrait notre argent à l’abri des fièvres spéculatives, à l’abri des bulles financières toutes condamnées à exploser un jour, à l’abri des opérations qui transforment nos emprunts en actifs et se servent de nos dettes pour acheter d’autres richesses.

Précisément. Si elle ne faisait rien de cela, ce ne serait pas une banque. Ou plutôt : une banque qui ne fait rien de ce qui est ici énuméré, ça s’appelle un tupperware et on l’enterre au fond du jardin.

En outre l’argument, en plus d’être absurde au fondement, serait faux s’il avait un commencement de réalité : fièvres spéculatives et bulles financières n’existent que parce que le marché ne fonctionne pas librement. À preuve la « crise » actuelle, qui n’a été possible que parce que les banques centrales, étatiques et monopolistiques, ont maintenu artificiellement des taux bas, incitant États, entreprises et particuliers à s’endetter de manière invraisemblable pendant des années et même des décennies. Elles continuent d’ailleurs à maintenir ces taux artificiellement bas. Le déclencheur conjoncturel de cette « crise » a lui été le secteur des prêts hypothécaires américains, c’est à dire le secteur le plus contrôlé et réglementé de l’économie américaine ; ce qu’on appelle maintenant Freddy Mae avec une ironie contractée, c’étaient deux entreprises géantes en fait gérées par le trésor américain, et qui n’étaient plus des entreprises commerciales et indépendantes que de nom. Que ce soient les banques centrales ou le trésor américain, pourquoi ont-ils agi ainsi ? justement pour prétendre faire ce que réclament les cantoniens : une finance meilleure, plus juste, plus humaine, qui prête aux pauvres et patin et couffin. La régulation n’est jamais une solution : elle est toujours le problème, car elle ne peut tout prévoir, elle rigidifie, elle permet à des situations anormales de se perpétuer et d’enfler jusqu’au point où leur absurdité explose en provoquant des dégâts énormes.

Nous voulons des banques qui ne prêtent que les richesses qu’elles possèdent. (…)Des banques où déposer notre argent tout en ayant la conscience tranquille.

Bref ils veulent tout et son contraire, comme d’hab. Soit la banque prête et il y a un risque, soit elle ne prête pas, et il n’y a pas de banque. Encore une fois : une telle banque, c’est un tupperware rempli d’or et enterré au fond du jardin. Mais pour avoir une carte bleue, vous pouvez vous brosser chers amis.

Des banques qui aident les petites et moyennes entreprises à relocaliser l’emploi,

Traduisons : des banques qui détruisent de la richesse au lieu d’en créer. Parce que pour produire dans le Loir-et-Cher plutôt qu’à Vientiane, il faut payer la différence, consistant non pas tant en salaires qu’en charges sociales. Mais avec l’argent de qui faire ça ? qui acceptera de mettre son argent dans une banque qui lui rendra seulement 20% de ce qu’il aura déposé en expliquant que le reste a été utilisé pour « relocaliser des emplois » ? Pas nos bons cantoniens, qui veulent une banque où déposer leur argent en laquelle ils puissent avoir confiance.

Des banques qui soutiennent les projets qui profitent aux citoyens plutôt qu’aux « marchés ». Des banques dont nous n’aurons plus à nous méfier. Des banques dont le succès sonnera le glas des marchands de morts, de maladies et d’esclaves. Sur les ruines de l’ancien système, nous voulons construire un système bancaire qui ne sacrifiera plus la dignité humaine sur l’autel du profit.

D’abord sans les grands méchants marchés financiers, il y a longtemps que nos sociales-démocraties européennes citoyennes, humanistes, éthiques, écoquitables et tout le toutim auraient fait faillite puisqu’elles vivent à crédit depuis des décennies. Ensuite sans les marchés, comment les entreprises se financeraient-elles ? Comment arriveraient-elles à couvrir les risques sur leurs matières premières sans les contrats à terme et autres produits dérivés ?

Les pays où il y a peu de marchés financiers, il en existe dans le monde. Par exemple le marché financier du Somaliland est assez étique, ce qui le rend probablement aussi très éthique aux yeux de nos bons apôtres. Reste à savoir si les habitants de cette joyeuse contrée ne préféreraient pas avoir un peu plus accès aux grands méchants marchés financiers. Il faudrait leur demander ce qu’ils pensent de leur dignité du côté de Mogadiscio. Et s’ils seraient prêts à la sacrifier pour avoir accès aux crédits et à la consommation pour s’acheter à bouffer, des iPad et avoir des téléphones Samsung gratos (qui sont gratos chez nous parce que les entreprises de télécommunications peuvent emprunter un peu plus chaque fois qu’un client s’engage sur 24 mois). Ce serait instructif d’avoir l’avis des Somalilandais.

À défaut, on recommandera aux amis de M. Cantona de tenter l’expérience inverse et d’aller s’installer là bas, contrée de lait et de miel où règnent, c’est bien connu, la concorde, la dignité humaine et la prospérité puisque le système financier y est réduit à sa plus simple expression, que ses méfaits insignes y sont réduits par la force des choses.

On le voit, ces propositions (à peine des propositions… ces vagues velléités mal attifées de morale dévoyée) n’ont pas de sens, elles sont contradictoires et relèvent d’abominables utopies qui, en général, quant elles arrivent à trouver un début d’application, finissent dans des charnier bourdonnants de mouches à viande.

Heureusement donc que demain M. Cantona ne mettra rien à mal. Sauf peut-être quelques automates distributeurs de billets. Et encore.

Les conseils qu’on peut donner aux gens à propos de leur banque sont bien plus simples que ces contes pour grands enfants un peu retardés et autres fadas de la citoyenneté suractivée :

■D’abord ne soyez pas à découvert. Ça coûte horriblement cher.

■Pour ne pas être à découvert, ou le moins possible, commencer à mettre un peu d’argent de côté chaque mois, même si ce n’est que vingt euros, sur un compte épargne.

■Choisissez votre banque. HSBC avec ses tarifs chers et pléthore de services en échange, en avez-vous besoin ? Si vous n’utilisez que trois services différents dans l’année, allez plutôt à la Banque postale.

■Investissez votre argent, ne le laissez pas dormir : ce n’est pas très compliqué, ça peut même être amusant, et il y a des produits peu risqués à condition de se renseigner un minimum sans se laisser dicter aveuglément ce qu’on fait par l’un ou l’autre.

■N’achetez jamais un produit d’épargne en fonction de l’avantage fiscal qui y est provisoirement attaché (sauf si vous êtes très riche, mais là votre conseiller en gestion et optimisation de patrimoine le fera pour vous).

Évidemment si Éric Cantona disait cela, les journalistes n’en parleraient peut-être pas…

Évidemment aussi ça ne vous protègera pas d’une catastrophe monétaire qu’on sent monter, on y reviendra, ce n’est pas le but ici. Mais ça vous permettra de ne pas nourrir contre votre banquier un ressentiment inutile qui pourrait vous jeter dans les bras de pareils démagogues.

C'est comme même bizarre que les gens trouvent normal que la banque utilise ton fric pour se faire de l'argent, et qu'elle ne te donne pas grand chose en retour.

Et en plus, si elle se plante vraiment, l'Etat injecte et te met la dette sur ton dos.

C'est ton fric, mais les bénéfs pour elle, et les pertes pour toi.

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L'épouse de Cantona fait de la pub pour la banque LCL

Eric Cantona a appelé les Français à vider leurs comptes bancaires ce mardi. Son épouse, l'actrice Rachida Brakni, a tourné dans une campagne publicitaire pour le groupe bancaire en avril dernier.

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Voici une publicité dont se passerait sûrement Eric Cantona, en ce mardi 7 décembre, jour de sa fameuse «révolution». L'ancien footballeur a lancé un appel à vider en masse les comptes en banque dans une video diffusée le 7 octobre, qui a suscité un buzz relayé dans plusieurs pays d'Europe. Un appel qui intervient seulement quelques mois après la participation de l'épouse d'Eric Cantona, l'actrice Rachida Brakni, à une campagne publicitaire pour la banque LCL. Ce spot télévisé a été diffusé du 4 au 25 avril dernier et vantait l'engagement de l'établissement bancaire sur le prêt immobilier.

«Chacun fait ses choix dans le couple Cantona. Si l'épouse d'Eric Cantona a prêté son image à une publicité pour LCL, c'est son histoire», commente-t-on chez LCL. La banque n'a toutefois pas souhaité commenter l'appel de l'ancien footballeur à déstabiliser le système bancaire en vidant les comptes des établissements. Suite à la video d'Eric Cantona, les banques françaises ont longtemps restées silencieuses. Mais la semaine dernière, la Société Générale et BNP Paribas ont toutes deux fini par réagir.

Un appel «insécuritaire»

«Retirer son argent des banques, c'est extrêmement dangereux à la fois pour soi (…) et ce serait aussi dramatique pour l'ensemble du système», a déclaré vendredi Jean-François Sammarcelli, directeur général délégué de la Société générale, lors d'une conférence de presse. Il a par ailleurs estimé que le contexte de crise «devrait inciter tout le monde à être sérieux et prudent». La veille, Baudoin Prot, le directeur général de BNP Paribas, avait jugé que l'appel d'Eric Cantona était «typiquement mal fondé», «totalement insécuritaire», et «complètement contraire à ce qui peut assurer le fonctionnement de l'économie».

Pour le président du Syndicat national des banques (SNB), Régis Dos Santos, le «bank run» d'Eric Cantona est une «fausse bonne idée, potentiellement dangereuse». Mais cette idée a «le mérite de poser les bonnes questions», observe-t-il dans un entretien au Parisien/Aujourd'hui en France. «Toutefois, si un mouvement de panique se produisait et si tout le monde se précipitait dans les banques, alors celles-ci ne pourraient plus jouer leur rôle d'irrigation de l'économie», ajoute-t-il. Selon le patron du SNB, «les entreprises, les PME et les particuliers seraient les premiers pénalisés».

«Un but contre son camp»

La «révolution» Cantona fait l'unanimité au sein de la classe politique qui, ce mardi, a pris ses distances avec l'ex star du football. «A l'évidence sa réponse n'est pas la bonne, je dirais même qu'il marquerait vraiment un but contre son camp, contre la France, contre nous tous en réalisant cela», a dit Martine Aubry, premier secrétaire du Parti socialiste, sur France Inter. Pour la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, «ce sont les Français les plus modestes qui morfleraient». «On voit bien ce qui se passe actuellement en Irlande, si c'est ça dont on a envie, et bien moi j'en veux pas», a-t-elle ajouté sur France Info.

Selon Marine Le Pen, candidate à la succession de son père à la tête du Front national, «monsieur Cantona est le porte-parole des Français qui sont indignés de la manière dont les banques et les marchés financiers internationaux se comportent». «Il est aussi le révélateur de l'incapacité de l'Etat de mettre les banques au pas», a-t-elle dit sur Radio Classique, tout en précisant qu'elle n'appelait pas à retirer son argent des banques. Eric Cantona «met les pieds dans le plat sur un vrai sujet», a dit la secrétaire nationale des Verts, Cécile Duflot. «Il exprime ce ras-le-bol vis-à-vis des banques, vis-à-vis du double jeu des banques qui ont été sauvées par les Etats», a-t-elle ajouté sur RMC.

http://www.surlering.com/article/article.p…r-la-banque-lcl

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