L'affreux Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 D'une certaine manière, on peut considérer les idées de Jean-Claude Michéa comme une bonne introduction pour celles de Charles Taylor. Le premier se focalise sur la mise en relief de problèmes, le deuxième définit l'idéal d'authenticité comme l'idéal individualiste à atteindre, puis raisonne méthodiquement et montre des issues. Il est possible de retracer quelques portions du chemin parcouru par la civilisation occidentale moderne. L'idéal moral contemporain en Occident est de nature individualiste, Charles Taylor reprend le terme « idéal d'authenticité » pour désigner l'idéal selon lequel chacun devrait pouvoir s'accomplir pleinement en fonction de ses propres choix. Selon lui, un tel idéal aurait été enfanté avec le temps, jusqu'à être théorisé au cours du XVIIIè siècle. Fustel de Coulanges suggérait en son temps que la graine était déjà présente dans la religion chrétienne… Quoi qu'il en soit, sur cet idéal se développe le progressisme, projet moderne de l'Occident. Le projet progressiste marque une rupture profonde avec les sociétés précédentes. Dans son essai « L'empire du moindre mal », Jean-Claude Michéa avance que ce projet a débuté au XVIIè siècle. Il aurait été, selon lui, façonné par la conjonction de deux facteurs notables : les avancées des sciences expérimentales d'un côté, et de l'autre, le traumatisme historique provoqué par les guerres civiles qui précèdent le XVIIè siècle.Les avancées scientifiques ont rendu possible l'idée de progrès, c'est à dire la conception de l'histoire sous forme de successions : la modernité a commencé dès lors que l'étape civilisationnelle en cours a été perçue comme l'étape moderne du moment. La conception du temps comme une évolution est à l'opposé de celle du monde communautaire. Le temps occidental est une flèche, le futur est devant, le passé derrière. Bien souvent en Afrique, le temps serait mieux représenté par une boucle. En parcourant la boucle, un être humain ne fait que passer, il a la charge de répéter des gestes anciens. Outre l'avènement de la modernité, les avancées des sciences expérimentales ont simultanément donné du crédit à la croyance dans une « physique sociale », laquelle fonctionnerait toute seule à la manière des mécanismes de poids et de contre-poids du monde physique. La civilisation occidentale, depuis le XVIIè siècle, est perçue comme un monde qui progresse et gouverné par la raison. Les ravages des guerres civiles idéologiques, et en particulier ceux des guerres de religions, vont progressivement faire considérer ces guerres comme « le plus grand des maux ». La cause est la morale. En effet, deux interprétations différentes de ce qui est bien et de ce qui est mal sont nécessairement conflictuelles. Le conflit pour imposer une morale plutôt qu'une autre dégénère trop souvent en une tentative d'éradiquer par la force les morales concurrentes. En réaction, les progressistes se font les promoteurs de la « vie tranquille » de chacun dans son coin, de l'égoïsme plutôt que de l'altruisme. Pour une société sans élévation spirituelle, sans vertu, car la vertu est de nature morale. Puisque la volonté de faire triompher le Bien conduit au pire, il paraît nécessaire d'être réaliste et de choisir un moindre mal. Dans le projet moderne, la paix civile passe par la séparation de l'Église et de l'État, la morale est bannie de la vie publique. Les morales – et en particulier celles des religions – sont vues comme une affaire privée, personnelle, propre à chacun. L'éviction de la morale de la vie publique était cependant conditionnée à un bouleversement d'ordre philosophique. De valeurs communes, partagées, gravées dans les croyances et les traditions héritées du passé, la perception de ce qui est bien et de ce qui est mal a dû être réinterprétée comme un sentiment plus instinctif, personnel, qui provient de l'intérieur de chacun. Ce basculement dans la conception de la morale est situé au XVIIIè siècle par Charles Taylor. Les avancées scientifiques et le traumatisme des guerres civiles idéologiques ont alors débouché, selon Jean-Claude Michéa, sur le projet d'une société qui se considère en progression, gouvernée par la raison et dont la morale est du domaine privé. Tel est le projet progressiste. Deux variantes notables ont été développées : des tentatives socialistes avec une planification du progrès par une centralisation politique, des tentatives libérales fondées sur une décentralisation politique et la liberté des individus. Les « social-démocraties » contemporaines sont des compromis entre la planification politique des socialistes et la liberté individuelle des libéraux. L'opposé du progressisme est le conservatisme L'attitude conservatrice s'oppose au progressisme. Les conservateurs persistent à utiliser leur morale pour juger autrui, ils préfèrent la sagesse des enseignements du passé à la fuite en avant, ils se défient de la croyance immodérée en d'hypothétiques futures innovations pour résoudre des problématiques contemporaines. Les conservateurs pivilégient un fonctionnement communautaire, ils cherchent à faire perdurer leur communauté et leur morale au travers du maintien de la cohésion des membres de leur famille, de leur entourage. Peut-être que, contrairement à la direction prise par le projet progressiste, il conviendrait de revenir en partie sur des logiques conservatrices. Plus humaines. Plus morales. Un être humain peut mourir pour défendre sa morale – et ceci participe à tant de guerres civiles… Mais il lui manque jusqu'à la motivation pour voter, lorsque disparaît l'idée de ce qui est bien. Le progressisme pur n'est pas humain, il finit par se retourner contre l'idéal individualiste d'accomplissement de chacun et cela conduit au « malaise de la modernité », titre de l'essai de Charles Taylor. http://www.laisseznousvivre.com/civilisati…rogressiste.htm
Ash Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 ils se défient de la croyance immodérée en d'hypothétiques futures innovations pour résoudre des problématiques contemporaines Comment dans ce cas expliquer l'actuelle course au catastrophisme écologique ? Simple mode électorale ?
José Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Texte très fécond… Pour preuve, un échantillon : L'opposé du progressisme est le conservatisme. Les conservateurs persistent à utiliser leur morale pour juger autrui… Etc. Comme disait Librekom…
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Pour preuve, un échantillon : Etc. Comme disait Librekom… J'ai du mal à percevoir le comique de la chose. De surcroît, laffreuxthomas a consacré du temps et de l'effort à rédiger ce billet. Se contenter de ricaner comme ça ne me paraît pas très constructif.
Ash Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Le terme "opposé" est faux ou du moins mal employé. Le conservatisme ne reprend pas les méthodes progs à son propre compte. Les conservateurs sont les adversaires des progressistes, mais en aucun cas sa variante (sauf cas particuliers).
L'affreux Posté 18 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 18 novembre 2007 Lucilio si tu veux participer, essaye de faire un effort, prends le temps d'expliquer ta position. Comment dans ce cas expliquer l'actuelle course au catastrophisme écologique ? Simple mode électorale ? Je verrais les écologistes catastrophistes comme plutôt conservateurs. Ils ne rejettent pas tous le progrès, mais la course au progrès, si. Un exemple : le nucléaire. On peut décider que nos déchets contemporains seront du combustible futur, mais c'est un pari, une fuite en avant.
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Le terme "opposé" est faux ou du moins mal employé. Le conservatisme ne reprend pas les méthodes progs à son propre compte. Les conservateurs sont les adversaires des progressistes, mais en aucun cas sa variante (sauf cas particuliers). Evidemment, encore qu'il y ait de notables exceptions (des cas particuliers, comme tu l'écris)… Joseph de Maistre est un cas intéressant à cet égard. Bref, que ce soit inexact est une chose, mais de là à provoquer une subite hilarité…
L'affreux Posté 18 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 18 novembre 2007 Le terme "opposé" est faux ou du moins mal employé. Le conservatisme ne reprend pas les méthodes progs à son propre compte. Les conservateurs sont les adversaires des progressistes, mais en aucun cas sa variante (sauf cas particuliers). J'ai peut-être repris un peu vite ce terme. Comment définir le conservatisme ? EDIT: Wikipédia oppose aussi les deux termes. Les attitudes consistant à progresser et à conserver ne s'opposent-t-elles pas ?
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 J'ai peut-être repris un peu vite ce terme. Comment définir le conservatisme ? L'attachement aux us et coutumes ayant fait leurs preuves, une certaine humilité devant le principe de réalité, le sens des limites, la défiance envers les idoles (sociales, politiques, mythiques, etc.), l'attachement à la dignité humaine et aux valeurs morales qui la garantissent. Autant de critères qui constituent, notons-le, une base solide pour refuser le constructivisme et tout projet d' "homme nouveau" (fût-il libéralement correct).
L'affreux Posté 18 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 18 novembre 2007 L'attachement aux us et coutumes ayant fait leurs preuves, une certaine humilité devant le principe de réalité, le sens des limites, la défiance envers les idoles (sociales, politiques, mythiques, etc.), l'attachement à la dignité humaine et aux valeurs morales qui la garantissent. Autant de critères qui constituent, notons-le, une base solide pour refuser le constructivisme et tout projet d' "homme nouveau" (fût-il libéralement correct). Mais alors en quoi est-ce que cette attitude ne s'opposerait pas, par nature, au progressisme ? Est-ce que l'on ne pourrait pas positionner les comportements sur un axe progressisme/conservatisme ?
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Mais alors en quoi est-ce que cette attitude ne s'opposerait pas, par nature, au progressisme ? Je crois que ce qu'Ash relevait était simplement que le conservatisme n'était pas le symétrique du progressisme. Cela dit, la question des relations conservatisme/progressisme n'a pu se poser qu'à partir du moment où des gugusses empreints d'esprit de sérieux (marque de fabrique très prog') ont voulu faire table rase du passé. Le conservatisme n'a pu se constituer en idéologie politique qu'au contact d'une idéologie qui a prétendu détruire un monde qui semblait aller de soi. En outre, un Maistre - fer de lance du combat contre-révolutionnaire - fut tellement fasciné par l'objet de sa répulsion (la Révolution française) qu'il finit par en mimer certains traits (défense inflexible d'une souveraineté politique au point de réécrire l'Histoire de France à travers ce prisme, passion pour la violence "salutaire", etc.) En cela, il n'est pas très représentatif du courant conservateur, même s'il a inspiré quelques disciples plus ou moins illustres, dois-je le préciser.
L'affreux Posté 18 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 18 novembre 2007 OK. Je remplace par "L'attitude conservatrice s'oppose au progressisme". Merci
Ash Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Lucilio si tu veux participer, essaye de faire un effort, prends le temps d'expliquer ta position.Je verrais les écologistes catastrophistes comme plutôt conservateurs. Ils ne rejettent pas tous le progrès, mais la course au progrès, si. Un exemple : le nucléaire. On peut décider que nos déchets contemporains seront du combustible futur, mais c'est un pari, une fuite en avant. On peut ramener tout ça à la confiance dans l'économie en fait. Mais est-ce juste de dire qu'ils sont "conservateurs" ? Evidemment, encore qu'il y ait de notables exceptions (des cas particuliers, comme tu l'écris)… Joseph de Maistre est un cas intéressant à cet égard.Bref, que ce soit inexact est une chose, mais de là à provoquer une subite hilarité… Arrange toi avec Lucilio
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 On peut ramener tout ça à la confiance dans l'économie en fait. Mais est-ce juste de dire qu'ils sont "conservateurs" ? Un conservateur aussi affirmé que Roger Scruton estime qu'il y a des points de contact entre une philosophie conservatrice assumée et un certain souci pour l'environnement et le monde que nous laisserons à nos descendants. Le conservatisme refuse tant la tabula rasa que le slogan "après moi, le déluge".
Ash Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Mais qui aujourd'hui tient ce discours en matière d'écologie ? On assiste de tous les côtés à une véritable surenchère. Et comme je considère plutôt faire confiance à l'économie, la prospérité et le respect des propriétés pour régler ces problèmes, dans quel "camp" je me retrouve alors ?
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Mais qui aujourd'hui tient ce discours en matière d'écologie ? On assiste de tous les côtés à une véritable surenchère.Et comme je considère plutôt faire confiance à l'économie, la prospérité et le respect des propriétés pour régler ces problèmes, dans quel "camp" je me retrouve alors ? Les optimistes ?
L'affreux Posté 18 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 18 novembre 2007 Mais qui aujourd'hui tient ce discours en matière d'écologie ? On assiste de tous les côtés à une véritable surenchère.Et comme je considère plutôt faire confiance à l'économie, la prospérité et le respect des propriétés pour régler ces problèmes, dans quel "camp" je me retrouve alors ? Plutôt progressiste je pense. De même qu'on peut se sentir libéral mais ne pas concevoir un total retrait de l'Etat dans l'éducation. La position d'un individu n'est pas nécessairement extrémiste. Il y a beaucoup de monde chez les écolos, mais prenons ceux dont la motivation est la conservation de l'espère humaine. C'est le cas de certains décroissants. Pour que l'espèce humaine survive, la prudence s'impose quant à l'utilisation de l'environnement. Ils me paraissent conservateurs : * Leur communauté est toute l'espèce humaine * Ils sont clairement dans un but de conservation de la communauté * Les solutions vers lesquelles s'orientent les décroissants sont la cohésion sociale et un certain retour à des valeurs traditionnelles Il n'y a pas que la confiance dans l'économie. Il y a la confiance dans un avenir qui ne ressemble pas au passé. Par exemple, qu'est-ce qui prouve que les innovations qu'il faut seront trouvées suffisamment tôt ? Que le marché les trouve, c'est une chose. Que le marché les trouve à temps en est une autre. La position des alarmistes est qu'il vaudrait mieux éviter de se mettre déraisonnablement en danger. En tout cas le point que tu soulèves est pile dans le sujet. Les problèmes environnementaux sont évoqués (bien que non-développés) par Taylor comme par Michéa.
Ronnie Hayek Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Plutôt progressiste je pense. De même qu'on peut se sentir libéral mais ne pas concevoir un total retrait de l'Etat dans l'éducation. La position d'un individu n'est pas nécessairement extrémiste.Il y a beaucoup de monde chez les écolos, mais prenons ceux dont la motivation est la conservation de l'espère humaine. C'est le cas de certains décroissants. Pour que l'espèce humaine survive, la prudence s'impose quant à l'utilisation de l'environnement. Ils me paraissent conservateurs : * Leur communauté est toute l'espèce humaine * Ils sont clairement dans un but de conservation de la communauté * Les solutions vers lesquelles s'orientent les décroissants sont la cohésion sociale et un certain retour à des valeurs traditionnelles Il n'y a pas que la confiance dans l'économie. Il y a la confiance dans un avenir qui ne ressemble pas au passé. Par exemple, qu'est-ce qui prouve que les innovations qu'il faut seront trouvées suffisamment tôt ? Que le marché les trouve, c'est une chose. Que le marché les trouve à temps en est une autre. La position des alarmistes est qu'il vaudrait mieux éviter de se mettre déraisonnablement en danger. En tout cas le point que tu soulèves est pile dans le sujet. Les problèmes environnementaux sont évoqués (bien que non-développés) par Taylor comme par Michéa. Un élément de réflexion que j'aimerais apporter : les libéraux vont généralement se montrer méfiants dans les pouvoirs de la raison sur le plan politique, mais résolument optimistes dans le domaine des découvertes scientifiques et techniques. En revanche, nombre d'écologistes seront très pessimistes pour les questions techno-scientifiques, mais souvent enclins à voir dans l'action politique le domaine où s'épanouit avec profit la raison. Les conservateurs, pour leur part, se méfient d'une rationalité démiurgique, quelle qu'en soit le champ d'application.
roubachov Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 L'attachement aux us et coutumes ayant fait leurs preuves, une certaine humilité devant le principe de réalité, le sens des limites, la défiance envers les idoles (sociales, politiques, mythiques, etc.), l'attachement à la dignité humaine et aux valeurs morales qui la garantissent. Autant de critères qui constituent, notons-le, une base solide pour refuser le constructivisme et tout projet d' "homme nouveau" (fût-il libéralement correct). Ce seraient les principes à mettre en liminaire du programme d'un beau grand parti libéral-conservateur, ça ! Un élément de réflexion que j'aimerais apporter : les libéraux vont généralement se montrer méfiants dans les pouvoirs de la raison sur le plan politique, mais résolument optimistes dans le domaine des découvertes scientifiques et techniques. En revanche, nombre d'écologistes seront très pessimistes pour les questions techno-scientifiques, mais souvent enclins à voir dans l'action politique le domaine où s'épanouit avec profit la raison. Les conservateurs, pour leur part, se méfient d'une rationalité démiurgique, quelle qu'en soit le champ d'application. C'est vraiment un résumé concis et clair; bien joué, RH
0100011 Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Un élément de réflexion que j'aimerais apporter : les libéraux vont généralement se montrer méfiants dans les pouvoirs de la raison sur le plan politique, mais résolument optimistes dans le domaine des découvertes scientifiques et techniques. En revanche, nombre d'écologistes seront très pessimistes pour les questions techno-scientifiques, mais souvent enclins à voir dans l'action politique le domaine où s'épanouit avec profit la raison. Les conservateurs, pour leur part, se méfient d'une rationalité démiurgique, quelle qu'en soit le champ d'application. Je pense qu'il y a un paradoxe entre les libéraux qui ne font pas confiance aux individus (le pouvoir corrompt et on ne peut imposer un style de vie sans dommages collatéraux) mais plus en l'interaction des individus et les écolos sur ce point. Ces derniers pensent qu'on peut individuellement trouver (eux par exemple savent, ou bien un dirigeant clairvoyant), voire supposer l'existence d'une "bonne manière de faire". Ce paradoxe est amusant : les libéraux pronent plus de liberté individuelle en supposant que les interactions vont limiter les dérives alors que les constructivistes privilégient l'action positive (donc décidée par une personne et individuelle) pour le bien de tous. Finalement je dirais que les conservateurs sont surtout des hémiplégiques de l'imagination : ils privilégient le pire quand ils ne savent pas (et par voie de conséquence privilégie toujours en premier lieu ce qu'ils connaissent), ce n'est pas tout à fait similaire ni à l'humilité ni au pessimisme même si on n'en est pas loin.
Boz Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Un conservateur aussi affirmé que Roger Scruton estime qu'il y a des points de contact entre une philosophie conservatrice assumée et un certain souci pour l'environnement et le monde que nous laisserons à nos descendants. Le conservatisme refuse tant la tabula rasa que le slogan "après moi, le déluge". Un exemple qui me vient à l'esprit : Tolkien. Un élément de réflexion que j'aimerais apporter : les libéraux vont généralement se montrer méfiants dans les pouvoirs de la raison sur le plan politique, mais résolument optimistes dans le domaine des découvertes scientifiques et techniques. En revanche, nombre d'écologistes seront très pessimistes pour les questions techno-scientifiques, mais souvent enclins à voir dans l'action politique le domaine où s'épanouit avec profit la raison. Les conservateurs, pour leur part, se méfient d'une rationalité démiurgique, quelle qu'en soit le champ d'application. Formulation parfaite !
Ash Posté 18 novembre 2007 Signaler Posté 18 novembre 2007 Je serais écologiquement progressiste J'ai l'impression qu'on joue avec les mots plus qu'autre chose. Ce que j'ai évoqué est la seule attitude politique à avoir sur ces sujets et c'est par ailleurs les positions défendues par les Conservateurs en politique. Selon moi chez les non libéraux il y a d'une part la vision progressiste de la société et un héritage de raisonnement marxiste pour l'économie (et par ricochet les problèmes écologiques). Il n'est pas question de dualité progressisme/conservatisme.
Ronnie Hayek Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 Je serais écologiquement progressiste J'ai l'impression qu'on joue avec les mots plus qu'autre chose. Ce que j'ai évoqué est la seule attitude politique à avoir sur ces sujets et c'est par ailleurs les positions défendues par les Conservateurs en politique. Selon moi chez les non libéraux il y a d'une part la vision progressiste de la société et un héritage de raisonnement marxiste pour l'économie (et par ricochet les problèmes écologiques). Il n'est pas question de dualité progressisme/conservatisme. Tu oublies, en l'occurrence, que les non-libéraux comprennent des tas de gens aux options politiques très différentes. Ensuite, je t'ai expliqué que certains conservateurs estimaient - à mon avis, à juste titre - que se cantonner à répéter que "l'environnement souffre surtout d'un manque de droits de propriété", c'est un peu court et ne convaincra pas grand monde. Pour ma part, je ne suis pas convaincu par le catastrophisme environnementaliste, mais je dois avouer que l'optimisme de nombreux libéraux ne me satisfait guère plus, voire me laisse de plus en plus perplexe. J'ai même tendance à y voir une sorte d'application de la méthode Coué.
L'affreux Posté 19 novembre 2007 Auteur Signaler Posté 19 novembre 2007 Ce que j'ai évoqué est la seule attitude politique à avoir sur ces sujets et c'est par ailleurs les positions défendues par les Conservateurs en politique. Pour ma part, je n'ai pas cette attitude politique et je m'en porte bien. Cette idée de nécessité, que le seul choix possible serait le marché car il représente le moindre mal, est un comportement relevé par Jean-Claude Michéa comme caractéristique du progressiste. On ne joue pas sur les mots ; on met un sens dessus. Selon moi chez les non libéraux il y a d'une part la vision progressiste de la société (…) Chez plusieurs libéraux d'ici aussi. Le progressisme n'est pas par nature interventionniste. Pour ma part, il y a quelques années, avant et quand je me suis découvert libéral, j'étais clairement progressiste. Le Tchad, les SDF et les décroissants m'ont changé. Il n'est pas question de dualité progressisme/conservatisme. Alors comment définis-tu le progressisme et le conservatisme ? Un élément de réflexion que j'aimerais apporter : les libéraux vont généralement se montrer méfiants dans les pouvoirs de la raison sur le plan politique, mais résolument optimistes dans le domaine des découvertes scientifiques et techniques. En revanche, nombre d'écologistes seront très pessimistes pour les questions techno-scientifiques, mais souvent enclins à voir dans l'action politique le domaine où s'épanouit avec profit la raison. Les conservateurs, pour leur part, se méfient d'une rationalité démiurgique, quelle qu'en soit le champ d'application. Il faut faire attention à un détail : tu pourrais faire coller ce que tu dis des écologistes, sur quasiment tous les mouvements politisés qui existent. Simplement car les libéraux sont minoritaires partout. Cela n'empêche pas qu'on puisse être non-interventionniste et écologiste. C'est à dire, exprimer les doutes écologistes mais ne pas considérer l'Etat comme un moyen valable de les résoudre. Les écologistes des villes, Nicolas Hulot et compagnie, correspondent à ton explication. Le mouvement des décroissants, ceux qui se sont repliés dans les campagnes, par choix, s'intéressent à la politique surtout locale, et sont ouverts à de nouvelles techniques d'agriculture sans polluants (par exemple, la vague actuelle du BRF). Les écolos des villes et ceux des campagnes ne sont pas les mêmes. (…) répéter que "l'environnement souffre surtout d'un manque de droits de propriété", c'est un peu court et ne convaincra pas grand monde. Tout à fait.
phantom_opera Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 Merci beaucoup laffreux pour ce texte. C'est un texte qui résume bien je pense les nombreux débats passés du forum. Mais encore une fois je pense qu'un libéral authentique ne choisit pas d'être progressiste ou conservateur, il est catégorié selon les valeurs de son époque et le thème abordé, c'est l'évolution du monde qui fait qu'un libéral est soit plus progressiste ou plus conservateur. Pour moi le clivage progressiste/conservateur est un clivage qui n'a plus trop de sens, en tout cas pour un libéral. Le clivage qui a une vraie pertinence est le clivage entre socialistes et libéraux, il ne faut pas se compliquer la vie.
Ronnie Hayek Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 Pour moi le clivage progressiste/conservateur est un clivage qui n'a plus trop de sens, en tout cas pour un libéral. Le clivage qui a une vraie pertinence est le clivage entre socialistes et libéraux, il ne faut pas se compliquer la vie. Ce clivage binaire, en plus d'être faux, est propice à l'exacerbation du fanatisme.
José Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 J'ai du mal à percevoir le comique de la chose. De surcroît, laffreuxthomas a consacré du temps et de l'effort à rédiger ce billet. Se contenter de ricaner comme ça ne me paraît pas très constructif. Je préfère, en effet, rire. Parce que notre affreux ami est un interlocuteur honnête. Et je préfère rire d'une mauvaise compréhension de sa part que de croire que c'est la pire malhonnêteté qui le pousse à dire que les conservateurs "persistent à utiliser leur morale pour juger autrui". Dire cela, c'est passer complètement à côté du fondement de la pensée conservatrice, mais également de toute pensée qui se fonde sur le Droit naturel. En effet, les conservateurs ou les iusnaturalistes ne jugent pas avec leur morale. Ils jugent selon la morale. Ils ne se fondent pas sur leurs préjugés qu'ils estimeraient seuls légitimes, mais partent de l'idée qu'une morale universelle et objective peut être déduite de la Loi naturelle. Par contre, ce sont très précisément les progressistes, en ne fondant pas leur réflexion sur la Loi naturelle mais sur la "société" et la "raison", qui, dans les faits, "persistent à utiliser leur morale pour juger autrui".
Ronnie Hayek Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 Je préfère, en effet, rire. Parce que notre affreux ami est un interlocuteur honnête. Et je préfère rire d'une mauvaise compréhension de sa part que de croire que c'est la pire malhonnêteté qui le pousse à dire que les conservateurs "persistent à utiliser leur morale pour juger autrui". Dire cela, c'est passer complètement à côté du fondement de la pensée conservatrice, mais également de toute pensée qui se fonde sur le Droit naturel. En effet, les conservateurs ou les iusnaturalistes ne jugent pas avec leur morale. Ils jugent selon la morale. Ils ne se fondent pas sur leurs préjugés qu'ils estimeraient seuls légitimes, mais partent de l'idée qu'une morale universelle et objective peut être déduite de la Loi naturelle. Par contre, ce sont très précisément les progressistes qui "persistent à utiliser leur morale pour juger autrui". Je crois que c'était surtout une maladresse de style (qui ne justifiait, encore une fois, aucun ricanement). Sinon, le rôle des préjugés (comme l'a souligné par ailleurs jabial) est très important dans la pensée conservatrice (mais cela n'en fait pas son fondement ultime). Seulement, les conservateurs ont généralement l'honnêteté d'en parler et de le reconnaître, à la différence d'autres catégories politiques qui font mine de croire que l'on peut s'en passer. Du reste, il faut préciser que tous les conservateurs ne sont pas nécessairement iusnaturalistes. Par ailleurs, du côté progressiste, la notion de morale est généralement réservée à la sphère privée (c'est sans doute à cela que laffreux pensait a contrario), si bien que les progressistes en arrivent finalement à défendre le positivisme juridique et un utilitarisme exacerbé. La contradiction est que leur "neutralité axiologique" constitue une position morale (fausse, bien entendu)… Notons d'ailleurs l'absurdité qu'il y a à réserver la morale à la sphère privée, puisque la morale est forcément en relation avec une vie sociale. En gros, il s'agit pour les partisans du progressisme de justifier tout et n'importe quoi à l'instant même où ils opèrent leur choix (d'où le "c'est ma morale, et tu n'as rien à y redire" - phrase caractérisant en vérité le refus de tout jugement moral).
José Posté 19 novembre 2007 Signaler Posté 19 novembre 2007 …les conservateurs ont généralement l'honnêteté d'en parler et de le reconnaître… Je crois que tu te trompes, simplement. Prenons le cas de l'Église catholique dont la position est très claire à ce sujet dans l'encyclique Veritatis splendor : la morale repose sur la vérité et la connaissance de la Loi naturelle.
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