CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 (…) Tu pourras te mêler de ce type de discussions quand tu auras un peu lu l'historique et que tu connaîtras les arguments des uns et des autres, histoire d'éviter de les répéter.Notez au passage que si vous espérez mettre tout le monde d'accord par le principe démocratique, vous ne convaincrez qu'une petite partie des membres du forum - beaucoup d'entre nous ne sont plus démocrates. (…) Sur le premier point, certes, mais dans tout forum à la fois ouvert et fourni, on sait que la tâche est quasi-impossible pour le nouveau-venu : personne ne lit 3000 messages étalés sur 3 ans et 300 discussions avant de poster sa réaction. Sur le second point, je ne veux pas mettre tout le monde d'accord, vu que les désirs et les intérêts n'ont aucune raison de s'accorder durablement. Mais en général, j'aime bien aller à la racine des désaccords (à ses noyaux affectifs ou cognitifs).
Roniberal Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 @Cmuller: je suis désolé mais si le Larousse médical se risque à définir l'embryon comme étant un être humain, c'est bien qu'il y a une certitude à ce sujet, je ne crois pas que cette encyclopédie soit une livre idéologique écrit par des pro life militants. Pour le reste de votre position, désolé de vous contredire mais il s'agit tout simplement d'un être humain en développement et qui se trouve au premier stade de sa vie. Ni plus, ni moins. Et vu que certains zozos considèrent que les grands malades ne sont plus des êtres humains, vous comprendrez ma réticence à les suivre dans leurs définitions de plus en plus restrictives de l'être humain.
CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 (…)C'est là que, selon moi, une fissure s'est créée pour devenir un gouffre, certains refusant d'accepter qu'on ne peut sacrifier la liberté d'une personne à la vie d'une autre, mettant ainsi en balance ce qui appartient à deux êtres humains différents, alors que chaque homme ne peut appliquer ses valeurs qu'à ses propres moyens. De là, on en est arrivé à la relativité des droits naturels, qui ne constitueraient plus la loi naturelle mais seraient subordonnés à celle-ci, cette dernière étant un principe collectif - j'oserais presque dire un principe de répartition des droits. "Si le libéralisme conduit à ça, alors merde au libéralisme" ; ça a été pensé, puis écrit ici à plusieurs reprises. (…) Histoire que j'apprenne assez vite, y a-t-il une discussion (ou une référence internet) où les notions de "droit naturel" et de "loi naturelle" telles que vous les employez ici sont précisées. Je connais un peu le jusnaturalisme, mais je soupçonne que vos termes renvoient à quelque chose de différent, ou de plus précis, et que cette chose fait consensus ici puisque l'on ne vous reprend pas à ce sujet (sauf une citation de Lemmenicier, mais cette citation elle-même ne répondait pas vraiment à la question). En tant que "non-initié", je trouve bien sûr aberrant de se référer ex abrupto à une loi ou un droit dits "naturel(le)", mais ce doit être parce que je mésinterprète la naturalité en question.
CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 @Cmuller: je suis désolé mais si le Larousse médical se risque à définir l'embryon comme étant un être humain, c'est bien qu'il y a une certitude à ce sujet, je ne crois pas que cette encyclopédie soit une livre idéologique écrit par des pro life militants.(…) Le Larousse médical n'est qu'une source parmi bien d'autres, n'ayant pas d'autorité particulière. Pourquoi voulez-vous donc qu'un dictionnaire règle la question une fois pour toutes ? Et d'où tenez-vous qu'il existe des "certitudes" immuables en science ? Si vous prenez le Larousse médical lui-même dans ses éditions de 1926, 1966 et 2006, vous constaterez que nombre de définitions changent. Ce point est vide de sens, un embryon est un stade de développement de l'oeuf fécondé, une définition scientifique ou médicale consensuelle n'ira pas au-delà. C'est fou, tout de même, ce fétichisme de la définition unique et indiscutable. Les Modernes ne se sont pas détachés de la Bible pour vénérer le Larousse, tout de même.
Invité jabial Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 Histoire que j'apprenne assez vite, y a-t-il une discussion (ou une référence internet) où les notions de "droit naturel" et de "loi naturelle" telles que vous les employez ici sont précisées. Je connais un peu le jusnaturalisme, mais je soupçonne que vos termes renvoient à quelque chose de différent, ou de plus précis, et que cette chose fait consensus ici puisque l'on ne vous reprend pas à ce sujet (sauf une citation de Lemmenicier, mais cette citation elle-même ne répondait pas vraiment à la question). En tant que "non-initié", je trouve bien sûr aberrant de se référer ex abrupto à une loi ou un droit dits "naturel(le)", mais ce doit être parce que je mésinterprète la naturalité en question. Il y a précisément d'énormes désaccord ici concernant la notion de Droit Naturel et de Loi Naturelle. Et j'avoue que ce serait dur de résumer ça en quelques mots. Disons que ma vision du DN est celle de Rothbard, alors que celle de Ronnie Hayek par exemple est celle de Saint Thomas d'Aquin.
CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 Il y a précisément d'énormes désaccord ici concernant la notion de Droit Naturel et de Loi Naturelle. Et j'avoue que ce serait dur de résumer ça en quelques mots. Disons que ma vision du DN est celle de Rothbard, alors que celle de Ronnie Hayek par exemple est celle de Saint Thomas d'Aquin. Aïe, cela ne m'aide guère. Mais cela m'intéresse, je pense que je suis en désaccord avec l'une comme l'autre position, désaccord portant sur la qualification de la nature humaine et le rôle de la raison. Si je prends ce propos de Rothbard (chap 3, Ethique liberté) : If, then, the natural law is discovered by reason from “the basic inclinations of human nature . . . absolute, immutable, and of universal validity for all times and places,” it follows that the natural law provides an objective set of ethical norms by which to gauge human actions at any time or place. Je vois tout de suite mon désaccord : il n'y a à peu près rien d'aboslu, d'immuable et d'universel dans les traits humains. La première erreur des Modernes a consisté à nier l'existence d'une nature humaine. Mais la seconde erreur consiste à se raccrocher à une certaine définition de cette nature, généralement celle produite par la science comme activité la plus objective, sans tenir compte du fait que la science ne cesse de progresser dans son exploration, que l'homme est un objet difficile à modéliser, et que la nature humaine telle qu'on la voyait en 1900 (dans les cercles scientifiques) n'est pas celle de 1950 ni encore celle de 2000. Pour être plus précis et sur un exemple donné, une fois que j'ai dit que la colère est une émotion primaire universelle, je n'ai rien dit. D'abord, les humains se distribuent de manière gaussienne dans ce trait (de gens peu colériques à des gens très colériques) et le fait d'être plus ou moins colérique n'est pas indifférent à la perception / rationalisation de notre milieu. Ensuite, la colère n'est jamais fixé dans son objet : un Ache sera en colère parce qu'un membre de sa tribu est parti à la chasse sans les autres, colère perçue comme légitime dans son groupe et conduisant à rouer de coup cet égoïste ; un observateur de l'Ache sera peut-être en colère de voir un comportement aussi grégaire et violent, et il sera légitime dans son groupe à lui de le condamner. L'idée de "nature humaine" ne m'aide pas à dire si l'Ache ou l'observateur de l'Ache est fondé dans ses actes, je constate simplement la variabilité de cette nature. Pour reprendre les termes de Rothbard, je vois que les actions humaines prennent des motivations et des justifications différentes en chaque temps et en chaque lieu. Quant à la raison, supposée être au-dessus des émotions, je ne vois pas en quoi elle échappe à ce genre de réflexion. En plus, je ne sais pas trop ce qu'est la raison comme propriété du cerveau. Dans mon exemple, l'Ache et l'observateur de l'Ache n'ont sans doute pas la même "raison" (en vrac, ils n'ont pas la même intelligence fluide ou cristallisée, pas la même mémoire individudelle ou collective, pas les mêmes catégories ontologiques de classification de leur environnement, à commencer par la définition de ce qu'est un homme, etc.).
Invité jabial Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 Je vois tout de suite mon désaccord : il n'y a à peu près rien d'aboslu, d'immuable et d'universel dans les traits humains. Position relativiste, donc… Je ne dirai pas ce que j'en pense, je n'ai pas envie qu'on se fâche si tôt La première erreur des Modernes a consisté à nier l'existence d'une nature humaine. Mais la seconde erreur consiste à se raccrocher à une certaine définition de cette nature, généralement celle produite par la science comme activité la plus objective, sans tenir compte du fait que la science ne cesse de progresser dans son exploration, que l'homme est un objet difficile à modéliser, et que la nature humaine telle qu'on la voyait en 1900 (dans les cercles scientifiques) n'est pas celle de 1950 ni encore celle de 2000. La science progresse, bien sûr, mais ça ne signifie pas pour autant qu'on ne peut rien connaître. Un sophisme typique consiste à dire ceci : "Ptolémée a été démenti par Newton et Newton par Einstein ; par conséquent, la seule chose que l'histoire nous apprend sur la science est que la théorie actuelle est toujours fausse". Or, il se trouve que chacune de ces théories apporte quelque chose à la compréhension de l'univers, par rapport à celle qui la précède. Ce n'est pas parce que notre connaissance de la nature humaine n'est pas - ne peut pas - être parfaite qu'on ne peut tirer de conclusions de ce qu'on en sait déjà, et faire de notre mieux avec ce qu'on a. Pour être plus précis et sur un exemple donné, une fois que j'ai dit que la colère est une émotion primaire universelle, je n'ai rien dit. Certes, vu que le droit a pour rôle de séparer le juste de l'injuste, alors que la colère peut être aussi bien l'une que l'autre. un Ache sera en colère parce qu'un membre de sa tribu est parti à la chasse sans les autres, colère perçue comme légitime dans son groupe et conduisant à rouer de coup cet égoïste Et quel est le rapport avec la raison? Où y a-t-il ici une démarche de découverte de la justice naturelle? un observateur de l'Ache sera peut-être en colère de voir un comportement aussi grégaire et violent, et il sera légitime dans son groupe à lui de le condamner Donc pour vous, il n'y a rien d'universellement illégitime dans le fait de torturer des enfants pour le plaisir, par exemple? L'idée de "nature humaine" ne m'aide pas à dire si l'Ache ou l'observateur de l'Ache est fondé dans ses actes, je constate simplement la variabilité de cette nature. Vous ne faites que constater que des comportements injustes existent. Quelle découverte ! Pour reprendre les termes de Rothbard, je vois que les actions humaines prennent des motivations et des justifications différentes en chaque temps et en chaque lieu. Certes, mais ce qui est universellement injuste (les violations des droits fondamentaux des êtres humains) ne varie ni en fonction du temps ni du lieu. Quant à la raison, supposée être au-dessus des émotions, je ne vois pas en quoi elle échappe à ce genre de réflexion. En plus, je ne sais pas trop ce qu'est la raison comme propriété du cerveau. Vous en usez pourtant en ce moment ; c'est un vol de concept caractérisé. Au voleur! Dans mon exemple, l'Ache et l'observateur de l'Ache n'ont sans doute pas la même "raison" (en vrac, ils n'ont pas la même intelligence fluide ou cristallisée, pas la même mémoire individudelle ou collective, pas les mêmes catégories ontologiques de classification de leur environnement, à commencer par la définition de ce qu'est un homme, etc.). Ce qui n'empêche que l'un a raison quand l'autre a tort.
CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 (…)La science progresse, bien sûr, mais ça ne signifie pas pour autant qu'on ne peut rien connaître. Un sophisme typique consiste à dire ceci : "Ptolémée a été démenti par Newton et Newton par Einstein ; par conséquent, la seule chose que l'histoire nous apprend sur la science est que la théorie actuelle est toujours fausse". Or, il se trouve que chacune de ces théories apporte quelque chose à la compréhension de l'univers, par rapport à celle qui la précède. Entièrement d'accord, mais dire que la science actuelle nous apporte des choses "solides" sur la nature humaine, c'est très abusif. En science, il y a sélection progressive des hypothèses / des modèles à partir des observations. Or, les hypothèses / modèles comme les observations concernant l'espèce humaine sont finalement en phase très rudimentaire, en biologie et surtout en psychologie. Si vous êtes lecteur de ces travaux, vous ne l'ignorez pas. (J'aime beaucoup la psychologie évolutionniste, par exemple, mais je serai le premier à dire qu'elle est loin d'apporter un nombre satisfaisant d'éléments probants sur l'ensemble de ses assertions, ni même qu'elle délimite de manière assez précise son champ de pertinence). Ce n'est pas parce que notre connaissance de la nature humaine n'est pas - ne peut pas - être parfaite qu'on ne peut tirer de conclusions de ce qu'on en sait déjà, et faire de notre mieux avec ce qu'on a. Certes. Mais que sait-on déjà avec fermeté sur la nature humaine, et plus particulièrement sur la manière dont les cerveaux humains produisent les catégories du juste et de l'injuste ? Pour ma part, ce que j'ai retiré de la science actuelle m'incite à considérer ce que vous appelez "relativisme" comme le régime normal de l'expérience morale humaine. Donc pour vous, il n'y a rien d'universellement illégitime dans le fait de torturer des enfants pour le plaisir, par exemple?(…) Certes, mais ce qui est universellement injuste (les violations des droits fondamentaux des êtres humains) ne varie ni en fonction du temps ni du lieu. Je l'ai dit plus haut, on trouve sans doute quelques évidences dans le répertoire de base de l'espèce humaine. mais cela ne change pas grand chose : aucune morale traditionnelle ou rationnelle ne va à l'encontre de ces évidences, donc aucune ne peut s'estimer plus représentative d'elles. Connaissez-vous une morale en particulier qui enjoint de torturer des enfants pour le plaisir ? Je remarque que vous prenez un exemple dans un répertoire très émotif et je suggère que ce n'est pas un hasard. Pourriez-vous choisir un dilemme moins caricatural, et m'assurer avec la même évidence que les humains le résolvent universellement de la même façon ? Ce qui n'empêche que l'un a raison quand l'autre a tort. Pas forcément, on a raison ou tort de manière exclusive dans une certaine catégorie de jugement. Et ce n'est pas indifférent à la morale si celle-ci possède une composante émotive (où l'on a pas "tort" ni "raison" d'éprouver des émotions différentes, c'est ainsi).
CMuller Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 Post scriptum : dire qu'une certaine morale finira par être adoptée par la majorité de l'humanité au terme d'un processus historique d'essai-et-erreur (sélection et adaptation au sens darwinien, mais appliquées aux idées) ne me dérange pas, je serai plutôt d'accord avec une telle approche. Mais c'est bien sûr très différent que de construire ex nihilo une doctrine morale à partir d'axiomes issus de la nature humaine. Et le fait que la morale en question sera adoptée majoritairement ne dira pas si elle est bonne en soi, ou si elle est simplement la mieux adaptée à des humains donnés dans un milieu donné.
Roniberal Posté 29 avril 2008 Signaler Posté 29 avril 2008 @Cmuller: c'est comme ça, il y a des définitions qui font autorité. Une autre pièce intéressante provient du N°130 de Sciences et Avenir: "Il n'y a pas de doute qu'un embryon humain dès sa formation (fécondation), dès la première cellule, est humain ("être humain")" (Anne Fagot-Largeault, Professeur au Collège de France, Chaire de Philosophie des Sciences biologiques et médicales). Je précise pourtant que l'auteur(e) était extrêmement prudente dans ses raisonnements. De toute façon, c'est à ceux qui estiment que l'embryon n'est pas un être humain qu'il revient de démontrer cette thèse aberrante. S'il n'est pas humain, qu'est-il? Une grenouille? Une chaise?
Etienne Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Je l'ai dit plus haut, on trouve sans doute quelques évidences dans le répertoire de base de l'espèce humaine. mais cela ne change pas grand chose : aucune morale traditionnelle ou rationnelle ne va à l'encontre de ces évidences, donc aucune ne peut s'estimer plus représentative d'elles. Connaissez-vous une morale en particulier qui enjoint de torturer des enfants pour le plaisir ? Justement, il y a toutes les chances que ces évidences partagées par toutes les conceptions morales ne soient pas que des coïncidences. Si elles ne le sont pas, il doit pas y avoir un sens un peu plus profond à découvrir, qui pourra, d'ailleurs, servir de critère par la suite.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Justement, il y a toutes les chances que ces évidences partagées par toutes les conceptions morales ne soient pas que des coïncidences. Si elles ne le sont pas, il doit pas y avoir un sens un peu plus profond à découvrir, qui pourra, d'ailleurs, servir de critère par la suite. Nous sommes d'accord sur ce point. Mais je crains que l'on n'en déduise pas grand chose, c'est-à-dire que les "critères" en question soient si généraux qu'ils ne contribuent pas tellement à fonder les jugements moraux, ni surtout à justifier le partage de ces jugements (leur universalisation). On peut aussi prendre les choses à l'envers : puisque les hommes partagent tous quelques inclinaisons infra-morales (émotives, cognitives) conditionnant leur morale, la contraignant dans certaines limites, pourquoi voudrait-on à tout prix qu'une seule morale finisse par s'imposer ? Cela suppose que, parmi les morales existantes, il y en aurait de bonnes et de mauvaises ; mais sur quoi ce jugement méta-moral se fonde-t-il, puisque toutes les morales en question procèdent des mêmes traits basiques de la nature humaine ? On introduit donc un critère de jugement supplémentaire… mais ce critère ne fait plus partie de la "loi naturelle", plutôt un certain choix historique (ou psychologique) parmi les potentialités de la nature humaine.
Invité jabial Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Attention à ne pas confondre droit et morale. Il n'est évidemment pas question d'avoir une morale pour l'ensemble de l'humanité, seulement de garantir le respect des droits fondamentaux.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Attention à ne pas confondre droit et morale. Il n'est évidemment pas question d'avoir une morale pour l'ensemble de l'humanité, seulement de garantir le respect des droits fondamentaux. Je pense en effet que certaines ambiguités viennent de là. Mais pour le coup, je ne sais pas trop comment le droit et la morale s'articulent. Peut-on avoir un droit qui soit exempt de toute inspiration morale ? Ou même, les deux domaines peuvent-ils rester imperméables ? Par exemple, le fait d'accorder des droits à l'individu contre sa communauté d'appartenance est-il compatible avec les morales exigeant la soumission de l'individu à sa communauté ? Et dans ce qui cas, qui tranche (en dehors du rapport de force) ? Ces questions ne sont évidemment pas étrangères à notre actualité.
Invité jabial Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Je pense en effet que certaines ambiguités viennent de là. Mais pour le coup, je ne sais pas trop comment le droit et la morale s'articulent. Peut-on avoir un droit qui soit exempt de toute inspiration morale ? Le fait que le droit ne doive pas être confondu avec la morale ne signifie nullement qu'il dût (ou même puisse) ne pas être moral. Seulement, si la morale est un océan dont tous savent globalement où il est mais dont il est fort difficile de définir des frontières précises, le droit est une goutte d'eau. A l'échelle moléculaire, ça reste énorme, mais il es évident que le droit (et surtout, les droits universels, qui en sont encore une petite partie) a des propriétés que la morale générale, en raison de sa subjectivité, ne peut posséder.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 (…) il es évident que le droit (et surtout, les droits universels, qui en sont encore une petite partie) a des propriétés que la morale générale, en raison de sa subjectivité, ne peut posséder. Certes, mais lesquelles ? J'ai l'impression que l'on revient au même problème, la source d'un droit objectif, non ? Un corpus de droit peut certainement se juger selon sa cohérence interne, du point de vue formel, mais après cela, il y a tout de même quelques choix initiaux substantiels.
Invité jabial Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Il serait peut-être bon que vous lisiez
Etienne Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Nous sommes d'accord sur ce point. Mais je crains que l'on n'en déduise pas grand chose, c'est-à-dire que les "critères" en question soient si généraux qu'ils ne contribuent pas tellement à fonder les jugements moraux, ni surtout à justifier le partage de ces jugements (leur universalisation). De toute façon, si on n'essaie pas, on est certain de ne pas trouver. Et, entre nous, dire que les hommes adoptent des systèmes moraux pour s'adapter à leur environnement social (entre autres) du moment ne nous donne pas beaucoup d'information pour répondre à ces questions. Au contraire, ça ne fait que déplacer le problème puisque ce qui importe vraiment, c'est de savoir pourquoi ces systèmes moraux sont adaptés et pourquoi certaines positions morales sont adaptées dans n'importe quelle situation. (Il s'agit d'une reformulation dans les termes de ta théorie du même problème de fond.) Cela suppose que, parmi les morales existantes, il y en aurait de bonnes et de mauvaises ; mais sur quoi ce jugement méta-moral se fonde-t-il, puisque toutes les morales en question procèdent des mêmes traits basiques de la nature humaine ? On introduit donc un critère de jugement supplémentaire… mais ce critère ne fait plus partie de la "loi naturelle", plutôt un certain choix historique (ou psychologique) parmi les potentialités de la nature humaine. Il est clair qu'il y a une question de choix quelque part et il n'est pas du tout sûr que les critères de moralité (ou de justice, parce que la démarche est la même, même si l'objet est différent) ainsi découverts soient compatibles avec au plus un système moral existant ! Néanmoins, on peut toujours essayer d'analyser le concept, d'expliquer pourquoi certaines positions sont partagées, selon quels critères, voir en quoi ces critères sont compatibles ou non avec d'autres positions morales non consensuels, si non, pourquoi, etc.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Il serait peut-être bon que vous lisiez Mais, je l'ai presque achevé, j'en parle dans l'autre discussion sur le droit naturel (surtout les cinq ou six premiers chapitres).
Invité jabial Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Et quels sont les choix initiaux dans l'EdL?
Pan Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Ce point a été traité par les anarcaps dans le cadre des compagnies de sécurité. Christian Michel a aussi écrit trois mots sur le sujet. Quelques éléments intéressants comme base de réflexion, sans avoir la prétention d'examiner le sujet en profondeur.
Invité Arn0 Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Pour ma part j'ai toujours trouvé ce texte de Christian Michel très mauvais…
Pan Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Pour ma part j'ai toujours trouvé ce texte de Christian Michel très mauvais… Vous êtes sévère. Je le trouve pour ma part plus intéressant par les questions qu'il pose que par les essais de réponse qu'il propose, mais "très mauvais", c'est vraiment dur.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 De toute façon, si on n'essaie pas, on est certain de ne pas trouver. Et, entre nous, dire que les hommes adoptent des systèmes moraux pour s'adapter à leur environnement social (entre autres) du moment ne nous donne pas beaucoup d'information pour répondre à ces questions. Au contraire, ça ne fait que déplacer le problème puisque ce qui importe vraiment, c'est de savoir pourquoi ces systèmes moraux sont adaptés et pourquoi certaines positions morales sont adaptées dans n'importe quelle situation. (Il s'agit d'une reformulation dans les termes de ta théorie du même problème de fond.)(…) Il est clair qu'il y a une question de choix quelque part et il n'est pas du tout sûr que les critères de moralité (ou de justice, parce que la démarche est la même, même si l'objet est différent) ainsi découverts soient compatibles avec au plus un système moral existant ! Néanmoins, on peut toujours essayer d'analyser le concept, d'expliquer pourquoi certaines positions sont partagées, selon quels critères, voir en quoi ces critères sont compatibles ou non avec d'autres positions morales non consensuels, si non, pourquoi, etc. Nous sommes entièrement d'accord sur la nécessité de creuser la question - ce qui entre parenthèses signale que la question n'est pas assez creusée, raison pour laquelle je regarde avec le plus grand scepticisme toute construction philosophique trop ostensiblement appuyée sur la notion de nature humaine. La question de la morale rapportée à la nature (à l'évolution en fait, je n'aime pas le mot nature) se pose à mon sens d'au moins deux manières : pourquoi et comment elle émerge chez un animal social doté de la conscience et de langage (ce que vous signalez), quelles sont les différences interindividuelles dans l'expression des traits moraux (et d'où proviennent ces différences). Le premier point a donné lieu à un début de littérature scientifique depuis une vingtaine d'années (plus bien sûr si l'on considère la question de l'altruisme ou les travaux d'anthropologie descriptive des moeurs et coutumes si diverses des humains), le second point est encore très peu défriché. Bien sûr, je trouve légitimes et intéressants aussi les nombreux débats en philosophie morale, même si j'ai le sentiment que l'on se heurte un peu à des limites dans cet exercice. C'est pourquoi une réflexion méta-morale inspirée par les avancées de la science me semble une voie plutôt prometteuse pour ne pas trop tourner en rond sur la question de la justification, et essayer de repenser la problématique à nouveaux frais.
Invité Arn0 Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Vous êtes sévère. Je le trouve pour ma part plus intéressant par les questions qu'il pose que par les essais de réponse qu'il propose, mais "très mauvais", c'est vraiment dur.Oui mais justement les questions qu'il pose sont très classiques. Ces réponses par contre ne le sont pas assez .(Cela dit j'apprécie habituellement les textes de Christian Michel.)
Pan Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Oui mais justement les questions qu'il pose sont très classiques. Ces réponses par contre ne le sont pas assez .(Cela dit j'apprécie habituellement les textes de Christian Michel.) Pas tant que cela à mon avis et c'est ce qui m'a plu. Mais bon. Ce n'est pas le sujet et c'était seulement pour proposer un exemple de questionnement sur le thème du droit pénal à CMuller. Rien d'autre (je trouve aussi que C. Michel est le plus souvent très intéressant).
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Pas tant que cela à mon avis et c'est ce qui m'a plu. Mais bon. Ce n'est pas le sujet et c'était seulement pour proposer un exemple de questionnement sur le thème du droit pénal à CMuller. Rien d'autre (je trouve aussi que C. Michel est le plus souvent très intéressant). Je l'ai lu. Je rencontre un problème que j'ai souvent avec les textes libéraux, libertariens en fait, à savoir une vision très cohérente, parfaitement logique, mais totalement déconnectée de la réalité. Avec beaucoup de conditionnels, le système est parfait : si tous les hommes étaient rationnels, si tous les hommes raisonnaient par intérêt et non aussi par valeurs, symboles, croyances, désirs, émotions, pulsions… si les individus étaient tous autonomes au lieu de goûter parfois le confort physique et mental de l'hétéronomie, etc., alors ce système serait le plus juste et plus libre. Mais à moins de modifier la nature humaine - ce qui est un ordre du jour possible des décennies à venir -, je ne vois pas que ce système soit vraiment adapté aux humains version 1. (Enfin… Homo sapiens est plutôt la version 7, 8 ou 9, les palélontologues ne sont pas d'accord sur le nombre d'espèces humaines antérieures).
LaFéeC Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Je l'ai lu. Je rencontre un problème que j'ai souvent avec les textes libéraux, libertariens en fait, à savoir une vision très cohérente, parfaitement logique, mais totalement déconnectée de la réalité. Avec beaucoup de conditionnels, le système est parfait : si tous les hommes étaient rationnels, si tous les hommes raisonnaient par intérêt et non aussi par valeurs, symboles, croyances, si les individus étaient tous autonomes au lieu de goûter parfois le confort physique et mental de l'hétéronomie, etc., alors ce système serait le plus juste et plus libre. Tout comme on utilise le "toutes choses égales par ailleurs" dans certaines sciences, sachant que c'est rare. Mais à moins de modifier la nature humaine - ce qui est un ordre de jour possible des décennies à venir -, je ne vois pas que ce système soit vraiment adapté aux humains version 1. (Enfin… Homo sapiens est plutôt la version 7, 8 ou 9, les palélontologues ne sont pas d'accord sur le nombre d'espèces humaines antérieures). Moi j'ai l'impression que c'est le système le mieux adapté pour demain, quand cohabiteront humains, clones, mutants …
Invité Arn0 Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Je l'ai lu. Je rencontre un problème que j'ai souvent avec les textes libéraux, libertariens en fait, à savoir une vision très cohérente, parfaitement logique, mais totalement déconnectée de la réalité.Je ne trouve pas le texte tellement cohérent. Si vraiment le but de la sanction est uniquement le dédommagement alors il n'y a pas de problème à ce qu'un criminel échappe à son jugement car la victime n'existe plus et qu'elle n'a pas d'héritier, pas besoin de s'échiner à trouver malgré tout un mécanisme (quel intérêt de dédommager absolument quelqu'un d'extérieur à l'affaire?). Bien sur l'enjeu c'est la protection des victimes isolées mais alors on rentre dans une logique de justice protectrice (et donc pénale) et plus seulement réparatrice.Et si on rentre dans un système pénal classique je ne suis pas du tout convaincu que la logique assurantielle suffise.
CMuller Posté 30 avril 2008 Signaler Posté 30 avril 2008 Tout comme on utilise le "toutes choses égales par ailleurs" dans certaines sciences, sachant que c'est rare.(…) Moi j'ai l'impression que c'est le système le mieux adapté pour demain, quand cohabiteront humains, clones, mutants … Certes pour le premier point, mais la science ne prétend pas réformer la société : le "toutes choses égales par ailleurs" désigne des paramètres que l'on juge non-pertinents pour une expérience donnée. Si l'homme est un paramère non-pertinent pour l'expérience libertarienne, il suffit de le préciser au départ. Sur le second point, tout dépend ce que vous appelez le "monde de demain" : par définition, le monde de demain sera une évolution du monde actuel, et si demain désigne une ou deux générations, je crains fort que cela ne suffise pas à liquider l'Etat (ni les penchants que l'Etat flatte). Mais le fait est que l'on tend pour le moment vers la privatisation et l'individualisation. Et que certaines évolutions inattendues, comme Internet, contribuent à remodeler les imaginaires en habituant peu à peu les mentalités à l'idée que "la société" est en fait constituée de multiples réseaux d'individus reliés par des affinités électives, qu'il est bien agréable de faire société ainsi et que cette même logique pourrait s'étendre à d'autres domaines.
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