Aller au contenu

Social-libéralisme et libéralisme classique : où est la différence ?


Messages recommandés

Invité jabial
Posté
Je me suis mal expliqué. Pour moi, redistribution des richesses au nom d'un certain idéal égalitaire = socialisme, et ce n'est pas soluble dans le libéralisme. Mais aide financière ponctuelle et mesurée de dernier recours au nom de l'humanisme, ça ça n'est pas nécessairement du socialisme, et ça me paraît soluble dans un certain libéralisme. En fait, je crois que l'égalitarisme matériel contredit de plein fouet l'isonomie, car ça veut dire que tout le monde aura la même chose quel que soit ses efforts, ses capacités, etc. ce qui est injuste. Mais donner juste ce qu'il faut à quelqu'un pour qu'il puisse après s'autonomiser, et se prendre en charge lui-même, même si ça n'est pas 100% du pur libéralisme, et même si ça peut dans une certaine mesure s'opposer à du libéralisme pur jus, je crois que ça reste largement compatible avec un certain libéralisme modéré qu'on pourrait donc qualifier de "social-libéralisme".

Mouais. Tu es dans la logique d'un niveau de socialisme tolérable, en balance avec un niveau d'inhumanité tolérable. Mais on peut l'habiller comme on veut, ce n'est pas "du libéralisme" que X force Y à aider Z. Si X veut vraiment aider Z, il doit le faire lui-même. Ceci dit, je suis comme toi : j'ai du mal à comprendre qu'on laisse son prochain claquer la gueule ouverte.

Le libéralisme n'est pas une morale chrétienne. Ce n'est pas plus libéral de donner du poisson que d'apprendre à pêcher, et dans la réalité les deux ont un coût. C'est objectivement bien d'aider son prochain. Il faut juste le faire en regroupant des moyens volontaires, et pas en commettant des violations des droits d'autrui tout en se disant que c'est un mal pour un bien. On n'a jamais le droit de sacrifier que ce qui est de soi.

Maintenant, est-ce que fonctionnariser la charité la rend plus efficace ? Je pense que la réponse est dans la question. Donc à long terme, les aidés aussi ont intérêt à ce que le système d'aide se privatise, même si je comprends parfaitement qu'ils soient en demande de la garantie "absolue" que les institutions étatiques semblent apporter.

Bref, pour le dire de manière imagée : donner un poisson tous les jours à un pauvre, ce n'est pas libéral ; lui apprendre à pêcher, oui.

Pour répondre sur la même image, il y a des gens qui n'apprendront jamais à pêcher, parce qu'ils refusent la réalité du monde tel qu'il est, d'autres qui ne savent pas pêcher parce qu'ils n'ont pas appris, et d'autres encore qui sont de toute façon incapables d'y arriver. L'aide qu'on peut apporter aux seconds et aux troisièmes est très différente. Quant aux premiers, il n'y a pas vraiment de solution libérale : dans un monde autoritaire de gauche on leur donne du poisson gratuit, dans un monde autoritaire de droite on les force à pêcher, mais dans un monde libéral, ils sont livrés à eux-mêmes.

J'ai beau être libertarien et donc refuser le principe théorique de toute aide financée par l'impôt, il n'empêche qu'en pratique je n'irai pas me battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés. Il y a plus prioritaire, franchement. Là où je suis cohérent, c'est que je n'irai pas me battre pour la défendre ou la renforcer non plus, parce que je reconnais le droit des autres de ne pas aider. Le monde n'est pas réservé aux gens bien. Et puis le moyen le plus sûr de se débarrasser d'une fonction de l'État, c'est encore de la rendre obsolète en s'y substituant.

Je pense que les mouvements libéraux sont très en retard là-dessus, et même si je comprend qu'on n'aie pas envie de rendre publiques ses bonnes œuvres, il y a moyen de faire ça discrètement.

Posté
Mouais. Tu es dans la logique d'un niveau de socialisme tolérable, en balance avec un niveau d'inhumanité tolérable. Mais on peut l'habiller comme on veut, ce n'est pas "du libéralisme" que X force Y à aider Z. Si X veut vraiment aider Z, il doit le faire lui-même.

Alors il n'y a que les anarcaps qui sont libéraux, car à partir du moment où tu as un État, si minimal soit-il et si minimal soit son rôle, il faut bien le financer, donc prélever un impôt. Cela dit, il y a un aspect de ma "théorie" qui t'a échappé et qui me semble constituer un bon compromis : je suis pour une sorte de privatisation et de mise en concurrence de l'État lui-même. Comme pour une association, la condition de citoyen d'un État devrait faire l'objet d'une adhésion volontaire et révocable, et plusieurs États pourraient cohabiter sur un même territoire. Après tout, même les plus communistes ne sont pas pour que les japonais paient des impôts à la France ou soient contraints de devenir français… La coexistence sur un même territoire ne change formellement rien à l'affaire.

Ceci dit, je suis comme toi : j'ai du mal à comprendre qu'on laisse son prochain claquer la gueule ouverte.

Le libéralisme n'est pas une morale chrétienne.

Je connais des chrétiens libéraux qui te diront que le Christianisme fonde le libéralisme…

Ce n'est pas plus libéral de donner du poisson que d'apprendre à pêcher, et dans la réalité les deux ont un coût. C'est objectivement bien d'aider son prochain. Il faut juste le faire en regroupant des moyens volontaires, et pas en commettant des violations des droits d'autrui tout en se disant que c'est un mal pour un bien. On n'a jamais le droit de sacrifier que ce qui est de soi.

Maintenant, est-ce que fonctionnariser la charité la rend plus efficace ? Je pense que la réponse est dans la question. Donc à long terme, les aidés aussi ont intérêt à ce que le système d'aide se privatise, même si je comprends parfaitement qu'ils soient en demande de la garantie "absolue" que les institutions étatiques semblent apporter.

Je suis d'accord. En fait, dans le monde actuel, la "charité" est essentiellement publique, mais peut être complétée par les initiatives privées. Dans mon monde idéal, ça serait exactement l'inverse : la charité serait essentiellement le fait d'initiatives privées, mais pourrait si besoin être complétée par le public. Prenons l'exemple de la santé : actuellement, il y a la Sécu qui prend en charge l'essentiel des remboursements, puis ce sont des mutuelles ou des assurances privées qui fournissent la part dite complémentaire. Dans mon monde alternatif la Sécu pourrait continuer d'exister, mais ça serait elle qui fournirait la part complémentaire, au cas où les mutuelles et assurances ne suffiraient pas. Son rôle serait donc repoussé en ultime périphérie.

Pour répondre sur la même image, il y a des gens qui n'apprendront jamais à pêcher, parce qu'ils refusent la réalité du monde tel qu'il est, d'autres qui ne savent pas pêcher parce qu'ils n'ont pas appris, et d'autres encore qui sont de toute façon incapables d'y arriver. L'aide qu'on peut apporter aux seconds et aux troisièmes est très différente. Quant aux premiers, il n'y a pas vraiment de solution libérale : dans un monde autoritaire de gauche on leur donne du poisson gratuit, dans un monde autoritaire de droite on les force à pêcher, mais dans un monde libéral, ils sont livrés à eux-mêmes.

Je suis d'accord. Ne doivent être aidés que les gens qui s'aident eux-mêmes, pas les passifs qui s'enferment volontairement dans un dénis de la réalité.

J'ai beau être libertarien et donc refuser le principe théorique de toute aide financée par l'impôt, il n'empêche qu'en pratique je n'irai pas me battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés. Il y a plus prioritaire, franchement. Là où je suis cohérent, c'est que je n'irai pas me battre pour la défendre ou la renforcer non plus, parce que je reconnais le droit des autres de ne pas aider. Le monde n'est pas réservé aux gens bien. Et puis le moyen le plus sûr de se débarrasser d'une fonction de l'État, c'est encore de la rendre obsolète en s'y substituant.

+1

En plus, se battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés, c'est pas vraiment la meilleure solution (pédagogiquement parlant) pour rendre populaire le libéralisme…

Posté
On n'a jamais le droit de sacrifier que ce qui est de soi.

J'ai coupé le reste, ça se suffit <–<

Invité jabial
Posté
Alors il n'y a que les anarcaps qui sont libéraux, car à partir du moment où tu as un État, si minimal soit-il et si minimal soit son rôle, il faut bien le financer, donc prélever un impôt.

Les anarcaps ne sont évidemment pas les seuls libéraux, ça n'aurait aucun sens d'un point de vue historique. Par contre, les libertariens (une partie des minarchistes compris) sont les seuls libéraux cohérents. Ça ne me choque pas : l'être humain l'est rarement. Un impôt peut parfaitement se justifier d'un point de vue libéral, lorsque les conseilleurs sont les payeurs, comme dans une copropriété.

Cela dit, il y a un aspect de ma "théorie" qui t'a échappé et qui me semble constituer un bon compromis : je suis pour une sorte de privatisation et de mise en concurrence de l'État lui-même. Comme pour une association, la condition de citoyen d'un État devrait faire l'objet d'une adhésion volontaire et révocable, et plusieurs États pourraient cohabiter sur un même territoire. Après tout, même les plus communistes ne sont pas pour que les japonais paient des impôts à la France ou soient contraints de devenir français… La coexistence sur un même territoire ne change formellement rien à l'affaire.

Ça me semble bien plus irréalisable encore que l'anarcapie. Il existe des "monopoles naturels" à l'échelle d'une unité d'espace. On n'imagine pas plusieurs syndics dans un même immeuble. X est au syndic A, Y est au syndic B, qui paie les charges d'ascenseur ?

Je connais des chrétiens libéraux qui te diront que le Christianisme fonde le libéralisme…

Je ne me prononcerai pas sur le fait qu'ils aient raison ou tort, car cette théorie, bien qu'elle me laisse dubitatif, a des éléments en sa faveur. Néanmoins, même en acceptant que le christianisme ait engendré le libéralisme, le fils ne ressemble pas au père.

Je suis d'accord. En fait, dans le monde actuel, la "charité" est essentiellement publique, mais peut être complétée par les initiatives privées. Dans mon monde idéal, ça serait exactement l'inverse : la charité serait essentiellement le fait d'initiatives privées, mais pourrait si besoin être complétée par le public. Prenons l'exemple de la santé : actuellement, il y a la Sécu qui prend en charge l'essentiel des remboursements, puis ce sont des mutuelles ou des assurances privées qui fournissent la part dite complémentaire. Dans mon monde alternatif la Sécu pourrait continuer d'exister, mais ça serait elle qui fournirait la part complémentaire, au cas où les mutuelles et assurances ne suffiraient pas. Son rôle serait donc repoussé en ultime périphérie.

Passager clandestin, toussa. Dès l'instant où il existe un pot commun, on crée mécaniquement des entraves à l'immigration. Le nationalisme et le socialisme sont des frères ennemis qui se nourrissent l'un de l'autre. Qui accepterait de verser dans une tontine où quiconque peut venir se servir ? Le but ultime doit être de supprimer le pot commun. L'aide doit être de proximité, et le moins possible garantie ou organisée.

Je suis d'accord. Ne doivent être aidés que les gens qui s'aident eux-mêmes, pas les passifs qui s'enferment volontairement dans un dénis de la réalité.

Surtout, il faut éviter de créer des dépendances.

En plus, se battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés, c'est pas vraiment la meilleure solution (pédagogiquement parlant) pour rendre populaire le libéralisme…

Ça à la limite ça passe au second plan. Le libéralisme n'a pas besoin de popularité ; à la limite, même une contre-publicité est toujours de la publicité. C'est plutôt une question de priorités et de méthode. Encore une fois, il n'y a aucun incitant négatif : personne n'est handicapé volontairement. Donc, les aider ne leur nuit pas.

Posté
Je suis d'accord. En fait, dans le monde actuel, la "charité" est essentiellement publique, mais peut être complétée par les initiatives privées. Dans mon monde idéal, ça serait exactement l'inverse : la charité serait essentiellement le fait d'initiatives privées, mais pourrait si besoin être complétée par le public.

Sauf que dans la réalité c'est l'inverse, la question est pourquoi? Parce que lorsqu'un Etat commence à réaliser une tâche, il désincite et exclut les autres alternatives. En effet, si l'Etat peut assumer les pauvres, pourquoi irai-je monter ma propre association, ou à la limite pourquoi ne demanderai-je pas une subvention de sa part? A partir de quel niveau de pauvreté considère-t-on que l'Etat se doit d'agir? Et ainsi de suite, et comme le dit Chitah, tu te retrouves comme en France 50 ans plus tard.

En plus, se battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés, c'est pas vraiment la meilleure solution (pédagogiquement parlant) pour rendre populaire le libéralisme…

Une bonne transition par exemple serait de redonner la moitié du budget de l'Etat et des collectivités locales en matière d'aides sociales, aux associations et aux fondations´s'occupant des pauvres et des handicapés, l'autre moitié allant à la réduction d'impôt permettant à chacun (pauvres et riches) de reprendre ce qui lui appartient et de faire ce qui lui plait avec.

Pour les handicapés, on peut déjà s'employer à leur rendre la vie plus facile: facilité d'accès aux bâtiments publics, aménagement de la voirie pour leur permettre de se promener plus facilement.

Ce serait insuffisant mais par exemple une autre mesure, dans le cadre du passage à la retraite par capitalisation et la fin du monopole de la sécu, les entreprises devraient reverser le salaire complet (Brut+cotisations patronales) au salarié. Ce serait une base de départ, la liberté de se mettre d'accord sur un salaire reprendrait ses droits par la suite.

Posté
Les libertariens et les libéraux classiques sont tout à fait prêts à reconnaître que l'éducation peut être un bien public

Et bien ils se tromperaient. L'éducation n'est pas un bien public au sens de la théorie économique (les "public goods" de la littérature auxquels F. mas semble se référer, à moins qu'il ne donne à cette notion un sens personnel).

Posté
1/ Alors il n'y a que les anarcaps qui sont libéraux, car à partir du moment où tu as un État, si minimal soit-il et si minimal soit son rôle, il faut bien le financer, donc prélever un impôt. (…)

2/ Je connais des chrétiens libéraux qui te diront que le Christianisme fonde le libéralisme…

3/ En fait, dans le monde actuel, la "charité" est essentiellement publique, mais peut être complétée par les initiatives privées.

4/ En plus, se battre pour que l'État cesse l'aide aux handicapés, c'est pas vraiment la meilleure solution (pédagogiquement parlant) pour rendre populaire le libéralisme…

1/ En général, les libéraux (néo) classiques justifient l'Etat et un minimum par une théorie des biens publics, comme le font par exemple James Buchanan ou David Gauthier. Certains services ne peuvent être produit par le marché (l'échange volontaire entre individus rationnels est sous optimum), donc, par souci d'efficacité et pour l'avantage de tous (la coopération entre individus est remplacée par une agence décidant pour tous), les individus adoptent une constitution et un minimum de services (police justice armée). D'autres remarquent qu'en cas de disparition de l'Etat, un autre émergerait surement, encore moins sympa que le précédent (Holcombe). Evidemment, le transfert forcé demeure problématique, et le souci d'efficacité pour justifier la disparition de la coopération demeure l'angle mort essentiel de ce type de théories (Buchanan propose par exemple de contraindre la démocratie par des principes de loi, notamment celui de traiter tout les cas de la même manière pour éviter le freeriding et autres marchandages entre coalitions). J'ai parlé de néoclassiques plus que de libéraux classiques, parce les premiers proposent une synthèse théorique là ou les seconds proposent une synthèse historique.

2/ GK Chesterton disait que le monde moderne était envahi de vieilles vertus chrétiennes devenues folles, ce qui ne veut pas dire que tout ce qui ressemble à une religion séculière peut se prévaloir des Évangiles. Certaines mêmes, dans leur volonté de construire des contre-Eglises, sont pour le moins douteuses au regard du croyant.

3/ Il y a un malentendu sur le sens de charité : celle-ci présuppose la liberté d'agir (et donc l'intention de donner sans retour). Une fois que des individus transferts les biens d'autres personnes sans leur demander leur avis, elle n'existe plus. La charité, c'est quand Saint martin partage son manteau avec un pauvre. Si un supérieur lui avait ordonné de le faire, il n'aurait pas fait acte de charité, mais obéi à une injonction sans valeur morale pour lui.

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...