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Tribune De Pascal Salin Dans Le Figaro


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Dans un pays, la France, où tous les impôts imaginables existent et, le plus souvent, avec des taux parmi les plus élevés du monde, les possibilités de réforme fiscale sont presque illimitées. Ainsi, chaque année, on voit fleurir des propositions visant à réduire tel ou tel impôt, à introduire telle ou telle exemption, à modifier telle ou telle technique fiscale. Après l'ISF l'an dernier, les droits de succession sont maintenant à l'ordre du jour.

La suppression des droits de succession pour un conjoint survivant a d'abord été présentée comme la mesure-phare dans ce domaine, avant que Bercy ne fasse savoir que rien n'avait été décidé. Cette proposition est inspirée par un souci de justice, car il apparaît anormal de taxer deux fois le patrimoine accumulé au cours de leur vie commune par deux conjoints, à la mort de l'un, puis à la mort de l'autre. Bien entendu, la gauche, adepte du conservatisme fiscal, a poussé des cris devant la prétendue injustice que constituerait ce «cadeau fait aux riches». Et malheureusement, le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Pierre Méhaignerie, a repris cet argument en déclarant : «Faut-il prendre le risque de subir jusqu'à l'élection présidentielle le slogan «Tout pour les riches ?» Je ne crois pas.» Ce faisant, il donne un exemple supplémentaire de la peur panique qui saisit bien des hommes politiques de droite dès lors qu'une mesure pourrait être contestée par la gauche.

Comme d'habitude, le débat sur la fiscalité, fortement marqué par des préoccupations d'opportunité politique, se focalise sur des mesures de bricolage fiscal au lieu de reposer sur des principes économiques et éthiques. On ne peut en effet pas considérer comme légitime l'idée constamment invoquée selon laquelle il serait juste de prendre relativement plus à ceux qui ont beaucoup, ce qui implique que les taux des droits de succession, comme ceux de l'impôt sur le revenu, soient progressifs.

En réalité, ce qui serait juste serait de respecter les droits de propriété légitimes des citoyens. Avec une telle volonté, qui correspond à la réalité humaine et aux enseignements de la science économique, les prescriptions seraient bien éloignées des affirmations habituelles. Ainsi, on prétend souvent qu'il n'est pas «juste» que certains héritent de biens qu'ils ont acquis sans efforts ou mérites particuliers. Mais ce qui est en cause dans l'héritage, ce sont d'abord les droits de propriété du défunt. Si quelqu'un a fait l'effort, toute sa vie, d'accumuler un patrimoine non sans avoir payé au passage des montants d'impôts impressionnants, au nom de quel principe peut-on le priver du droit de léguer à ses enfants, à des amis, à une oeuvre charitable ou culturelle, l'ensemble de ce qui lui appartenait ? En quoi la mort pourrait-elle autoriser l'État à s'emparer d'une grande partie du patrimoine en question ?

L'être humain a cette caractéristique formidable de pouvoir se projeter dans le temps, ce qui le conduit à agir en fonction de ce qui peut se passer au-delà de sa propre vie. De ce point de vue, on devrait considérer comme un devoir moral incontournable de respecter la liberté de quiconque riche ou pauvre de transmettre comme il le souhaite ce qu'il aura légitimement accumulé pendant sa vie. C'est pourquoi, en ce qui concerne les droits de succession, il n'y a pas d'autre réforme digne d'intérêt que de les supprimer.

Certains hommes politiques français, parmi lesquels Nicolas Sarkozy, semblent commencer à le comprendre, ce qui est heureux. Il leur reste maintenant à convaincre l'opinion des justifications non seulement économiques mais morales d'un tel projet. Ainsi, l'idée selon laquelle la suppression des droits de succession constituerait un «cadeau fait aux riches» dérive évidemment du fait que les droits de succession sont progressifs. Mais la progressivité de l'impôt, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou des droits de succession, n'a aucune justification. Elle résulte seulement d'un processus politique par lequel une majorité brime une minorité et porte une grave atteinte à ses droits de propriété légitimes, sous prétexte qu'elle est plus ou moins riche.

Présenter une diminution d'impôt ou une suppression d'impôt comme un «cadeau fiscal», c'est supposer implicitement que les richesses taxées appartiennent à l'État et que celui-ci accepte d'en céder une partie à ceux qui devraient en fait être considérés comme leurs propriétaires légitimes. Une telle conception est celle d'un pays de type communiste. Mais elle est totalement dénuée de sens dans un pays de liberté et de propriété privée. S'il n'existe pas de cadeau fiscal, il n'existe évidemment pas non plus de «cadeau fait aux riches» : le prétendu cadeau paraît d'autant plus important que la spoliation est plus grande. Mais la suppression d'une spoliation n'est qu'un acte de justice et non un cadeau généreux.

La proposition consistant à supprimer les droits de succession pour un conjoint survivant irait donc dans le bon sens puisqu'elle permettrait d'atténuer une injustice. Mais elle n'est qu'un tout petit pas vers un objectif qui mériterait d'être atteint immédiatement et définitivement : la suppression de tous les droits de succession. Ce qui est choquant n'est donc pas que l'on puisse diminuer ou supprimer les droits de succession dans certains cas étroitement définis, mais que M. Méhaignerie et ses semblables n'aient pas encore adhéré au Parti socialiste.

* Professeur à l'Université Paris-Dauphine.

Source: Le Figaro

Un petit peu de bon sens? :icon_up:

AL a une position sur les droits de succession sinon?

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"Mais elle n'est qu'un tout petit pas vers un objectif qui mériterait d'être atteint immédiatement et définitivement : la suppression de tous les droits de succession"

Voilà, tout est dit.

L'impôt sur la succession me fait penser à chaque fois au système dans "Matrix" où les êtres humains sont maintenus en vie uniquement dans le but de les utiliser à la fin de celle-ci (toutes proportions gardées bien sûr)

Quand à l'argument "pour les riches" c'est d'une rare stupidité, ce sont bien les plus pauvres qui verront, après les efforts d'une vie, ruiner leurs espoirs d'améliorer la situation de leur progéniture.

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Ne dites plus "droits de succession". Dites simplement "impôts sur la mort". Restons factuels. Halte à la novlangue.

Posté
"Mais elle n'est qu'un tout petit pas vers un objectif qui mériterait d'être atteint immédiatement et définitivement : la suppression de tous les droits de succession"

Voilà, tout est dit.

L'impôt sur la succession me fait penser à chaque fois au système dans "Matrix" où les êtres humains sont maintenus en vie uniquement dans le but de les utiliser à la fin de celle-ci (toutes proportions gardées bien sûr)

Quand à l'argument "pour les riches" c'est d'une rare stupidité, ce sont bien les plus pauvres qui verront, après les efforts d'une vie, ruiner leurs espoirs d'améliorer la situation de leur progéniture.

il y a des plafonds d'éxonérations sur les impôts sur les successions.

en ligne direct : parents -> enfants, tu éxonères 50 000 euros + 50 000 par enfant.

Ensuite, pour chaque type de filiation, tu as des règles de calcul différentes.

Du fait qu'il y a des éxonérations, ceux qui ont un patrimoine inférieur au montant des éxonérations ne paye pas d'impôt sur la succession.

Admettons qu'une personne possède un appartement moyen valant 200 000 euros et qu'il a 3 enfants, du fait, il n'y aura pas d'impôt sur la succession.

donc il y a forcément une notion de pauvres et de riches dans cette législation qui vise à éxonérer les pauvres et à faire payer les riches. Le montant de l'éxonération correspond au montant admis par le législateur pour définir ce qu'est un patrimoine de riche (>20000 euros dans le cas présent avec 3 enfants).

Au delà de cela, on peut critiquer que le législateur fasse une distinction sur le montant de l'éxonération (et même du taux de l'impôt sur la succession qui peut atteindre jusqu'à 50% en tranche marginale) en fonction du bénéficiaire. L'enfant est privilégié par rapport à tout autre bénéficiaire.

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Désolé mais je ne vois là qu'une tonne de paperasserie, employant une tonne de personne à rechercher une définition de ce qu'est la pauvreté et la richesse, puis décider d'un montant de prélèvement pour redistribution.

Les gens ne sont-ils donc pas assez grands pour transmettre leur patrimoine comme bon leurs semblent? Et par quelle légitimité ferait-on un cadeau à certains et pas à d'autres? Le fait de ne pas avoir de biens à la fin de sa vie constitue une vertu?

J'ai la rancoeur tenace vis à vis de ce vol qu'est l'impôt sur la succession parceque j'ai vu deux personnes auxquelles je tenais beaucoup se faire intégralement plumer après leur décès parcequ'elles n'avaient pas de descendance directe.

C'est une honte absolue.

Posté
J'ai la rancoeur tenace vis à vis de ce vol qu'est l'impôt sur la succession parceque j'ai vu deux personnes auxquelles je tenais beaucoup se faire intégralement plumer après leur décès parcequ'elles n'avaient pas de descendance directe.

Et même en descendance directe, on se fait joyeusement tarauder l'anus par l'état avec une chignolle de 12.

C'est une honte absolue.

Bienvenue dans un pays communiste.

Posté

Je pense que ce que souligne surtout cet article, c'est le manque de clarté fiscal en France. Comme il le dit si bien, notre système fiscal ne repose pas sur des principes économiques ou éthiques, mais sur des mesures de bricolage.

Le problème en France, c'est qu'on a l'impression qu'il faut faire payer plein de fois les riches pour apporter une certaine "justice". L'impôt sur le revenu par tranches a bien été calculé en fonction du niveau de revenu du contribuable, logiquement une fois payé l'impôt sur le revenu, on devrait se dire que "tout est rentré dans l'ordre". Eh beh non! Il faut qu'on rajoute aussi l'ISF, les droits de succession, sans parler de toutes ces aides les plus diverses pour soutenir les plus modestes, etc. Du coup, toutes ces mesures remettent en cause la raison d'être de l'impôt sur le revenu par tranche, car si on multiplie toutes ces mesures, ça sous-entend donc que l'impôt sur le revenu est inefficace (puisqu'on se se sent obligé de retaxé d'autres fois).

Je suis bien d'accord avec Salin, il faut absolument qu'on remette la morale dans l'action politique et qu'on en finisse une bonne fois pour toute avec la technocratie abusive!

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Au sujet de l'article de Salin, un post d'Alexandre Delaigue sur Éconoclaste : Piketty-Salin : le match continue.

Ils ne s'apprécient guère. Et le font savoir par éditoriaux de presse interposés. Leur sujet de discorde permanente? L'impact de la fiscalité. Tout a commencé il y a des années,lorsque Salin, dégainant le premier, avait traité Piketty d'obscurantiste, de pragmatique approximatif, et d'incohérent. Piketty avait alors répliqué en traitant Salin d'idéologue qui ne lit pas. Ce n'était que le début… Lors de la récente querelle autour du jury de "l'agrégation" du supérieur en économie, durant laquelle le jury 2004, présidé par Salin, avait été attaqué, Piketty avait indirectement déclaré que la place de Salin relevait du fonctionnement mandarinal de l'université française, et pas de ses compétences. Ce qui était vrai, mais l'était tout autant pour les jurys précédents, présidés par d'autres que Salin.

Et donc, cette semaine, la querelle reprend. A peine Piketty publie-t-il un article dans Libération indiquant qu'il n'y a "aucune justification économique solide pour supprimer l'impôt sur les successions" que Salin rétorque dans le Figaro "concernant les droits de succession, il n'y a pas d'autre réforme digne d'intérêt que de les supprimer". Ces deux-là, décidément, s'adorent.

La différence essentielle entre Piketty et Salin ne peut pas être résumée à une querelle entre le savant et l'idéologue, concluant à la supériorité logique du premier sur le second. S'il est certain que Salin a une idéologie très marquée - le libertarianisme - Piketty a, lui aussi, un point de vue politique, de centre-gauche, qu'il ne cache pas. Ses sujets de prédilection - l'impôt, les inégalités, ses choix en matière de fiscalité, sont influencés par ce point de vue. La différence entre les deux se situe à un autre niveau.

Piketty, lorsqu'il produit des travaux de recherche, ou lorsqu'il justifie ses prises de position par les travaux d'autres auteurs, soumet son travail à la critique de ses pairs économistes, dont certains ont des positions politiques différentes des siennes, mais qui ont tous des critères d'évaluation communs; à ce titre, non seulement les travaux de Piketty, ou ceux qu'il cite, sont publiés et disponibles pour quiconque voudrait y déceler des points contestables, mais en plus, ils ont été évalués par les meilleurs spécialistes de leur domaine. C'est un processus qui n'est pas sans défauts, qui ne rend pas la vie très facile pour les non-conformistes, mais on sait depuis Thomas Kuhn que c'est uniquement comme cela que la science avance. Ce verdict de la communauté scientifique, Salin ne s'y soumet pas, en tout cas pas au même niveau. De ce fait, les positions de Piketty sont forcément nuancées (baisser l'impôt sur le revenu n'est guère utile, baisser les cotisations sociales sur les bas salaires est utile), ce qui le conduit souvent à devoir prendre des distances avec le parti socialiste, dont il est proche.

A l'inverse, Salin fait preuve d'une très grande cohérence : on ne le verra jamais trouver des vertus à quelque impôt que ce soit. Il considérera toujours que tout impôt, qui est foncièrement un esclavage, doit être supprimé. C'est un point de vue parfaitement cohérent, dès lors qu'on se place dans l'éthique propriétariste des libertariens, faisant du droit de propriété le fondement inviolable des droits humains. C'est un point de vue qu'il est facile de caricaturer - nous nous sommes livrés nous-mêmes à l'exercice. Mais on aurait tort de prendre cette cohérence à la légère, car sur ce type de sujet, en France, ce sont les idéologies qui font les politiques. Les idées ont des conséquences. A ce titre, il n'est en aucun cas absurde que les idées libertariennes d'un Salin participent au débat, d'autant plus sur des questions de fiscalité et de distribution des revenus qui ne sauraient se limiter à de simples aspects d'efficacité.

On peut détester la réponse de Salin - tout impôt est une spoliation, donc, toute suppression d'impôt est bonne - mais il faut reconnaître qu'elle constitue un élément de discussion qu'on ne peut pas laisser de côté en disant "c'est idéologique". Car la question de l'impôt sur les successions est éthique avant d'être économique : cet impôt, après tout, représente une très faible part des recettes publiques. En cela, dire qu'il donnerait corps à l'idée d'un "hypercapitalisme qui ne s'accomode même pas des impôts du XIXème siècle" comme le fait Piketty est non seulement faux - le poids des dépenses publiques dans le PIB était de l'ordre de 10% au 19ème siècle, contre 50% aujourd'hui, ce qui conduit à relativiser l'influence de l'impôt sur les successions - mais ne constitue pas un argument audible. Dire qu'il serait préférable de baisser les cotisations sociales sur les bas salaires, mais que cela ne peut pas se faire dans des proportions suffisantes étant donné l'état des finances publiques, est vrai, mais c'est encore plus inaudible.

On ne trouvera jamais, en France, un seul individu déclarer devant les caméras de télévision "je ne suis plus au chômage grâce aux allègements de charges sociales". On trouvera par contre facilement des gens pour dire "à cause de l'Etat spoliateur, je ne peux pas donner les biens que j'ai patiemment accumulés durant toute une vie de dur labeur à mes enfants chéris". Le fait qu'en réalité, les premiers soient beaucoup plus nombreux que les seconds ne change rien à l'affaire.

C'est pourquoi, dans la bisbille entre Piketty et Salin, ce n'est pas parce que le premier a le pragmatisme et la science économique avec lui qu'il l'emportera; les idéologies, bien qu'elles soient inadaptées à la complexité du monde, ont un avantage qu'on peut déplorer, mais qu'on aurait tort de négliger.

Posté

La manière dont Alexandre Delaigue - que j'apprécie par ailleurs - affecte être au-dessus de l'idéologie m'amuse beaucoup. Piketty n'a pas le "pragmatisme et la science économique derrière lui" - il défend l'idéologie dominante, charitablement qualifiée de "complexité du monde" et pourra donc compter sur le soutien des "pragmatiques" et des "économistes" qui ont intérêt à ce que la spoliation fiscale se poursuive.

Salin ne parle pas en effet de science économique, il attaque l'impôt sur la mort sur des bases exclusivement morales. Si Delaigue fait mine de ne pas s'en apercevoir, c'est je suppose parce qu'il n'a rien à dire sur ce plan.

Posté

entre Piketty et Salin je ne pense pas qu'il faille voir une oppositions méthodologique entre le scientifique et l'idéologue. Sur ce point Piketty ne me parait pas être le meilleur représentant de la méthode orthodoxe qu'il est je crois censé soutenir. Dans son texte il s'interroge sur les justifications économiques de la suppression des droits de succession. La seule chose qu'il a le droit de faire c'est de présenter les résultats d'une analyse économique qui décrirait:

-une situation A sans droit de succession

-une situation B avec droit de succession

La comparaison entre ces deux états étant le fruit d'un jugement de valeur qui n'a rien de scientifique. En choisissant la situation B il applique ses valeurs d'homme de gauche. Salin fait la même choses sauf qu'il n'a pas besoin d'étudier les conséquences des situations A et B puisque la situation B est en soi contraire aux principes de sa philosophie.

Posté
La manière dont Alexandre Delaigue - que j'apprécie par ailleurs - affecte être au-dessus de l'idéologie m'amuse beaucoup. Piketty n'a pas le "pragmatisme et la science économique derrière lui" - il défend l'idéologie dominante, charitablement qualifiée de "complexité du monde" et pourra donc compter sur le soutien des "pragmatiques" et des "économistes" qui ont intérêt à ce que la spoliation fiscale se poursuive.

Salin ne parle pas en effet de science économique, il attaque l'impôt sur la mort sur des bases exclusivement morales. Si Delaigue fait mine de ne pas s'en apercevoir, c'est je suppose parce qu'il n'a rien à dire sur ce plan.

Euh… il me semble justement que A. Delaigue souligne bien que l'argumentation de Salin se fonde sur le plan éthique (il parle d' "éthique propriétariste" à un moment). C'est justement là qu'est le problème : Salin et Piketty ne parlent pas de la même chose et n'utilisent pas le même langage.

L'un adopte la démarche de la théorie économique standard et, dans une optique utilitariste, s'intéresse aux conséquences économiques d'une baisse d'impôt (en se servant d'enquêtes empiriques). Salin dénonce l'impôt sur le plan moral (je pense que Delaigue le voit très bien). Par contre, sur le plan strictement "économique" (dans le sens économie néoclassique puisque c'est le paradigme dominant qui définit ce qu'est la science économique), l'argumentation de Salin est creuse dans le sens où il se contente d'appliquer le raisonnement axiomatique et déductif autrichien sans prendre la peine de vérifier si les conclusions auxquelles il parvient correspondent aux faits (c'est très clair dans les articles mis en lien sur le site des éconoclastes).

Au sens du paradigme dominant, Piketty fait de la "science", Salin ferait plutôt de la philosophie morale. Tout le problème est là… Si l'on part du principe que l'impôt c'est du vol, tout ce que peut faire Piketty ou la science économique n'a aucun intérêt. Si par contre on rejette cette prémisse (l'impôt c'est du vol), la prose de Salin ne sera jamais écoutée.

entre Piketty et Salin je ne pense pas qu'il faille voir une oppositions méthodologique entre le scientifique et l'idéologue. Sur ce point Piketty ne me parait pas être le meilleur représentant de la méthode orthodoxe qu'il est je crois censé soutenir. Dans son texte il s'interroge sur les justifications économiques de la suppression des droits de succession. La seule chose qu'il a le droit de faire c'est de présenter les résultats d'une analyse économique qui décrirait:

-une situation A sans droit de succession

-une situation B avec droit de succession

La comparaison entre ces deux états étant le fruit d'un jugement de valeur qui n'a rien de scientifique. En choisissant la situation B il applique ses valeurs d'homme de gauche. Salin fait la même choses sauf qu'il n'a pas besoin d'étudier les conséquences des situations A et B puisque la situation B est en soi contraire aux principes de sa philosophie.

En même temps, à partir du moment où Piketty écrit dans la presse (Libé en plus), il ne parle pas seulement en tant qu'économiste. On voit bien, il me semble, qu'il donne son avis personnel et que cet avis n'est pas lié de manière absolu avec les résutats théoriques et empiriques auxquels il parvient. Bon, le problème c'est que la frontière entre le "politique et le savant" est toujours floue…

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Euh… il me semble justement que A. Delaigue souligne bien que l'argumentation de Salin se fonde sur le plan éthique (il parle d' "éthique propriétariste" à un moment). C'est justement là qu'est le problème : Salin et Piketty ne parlent pas de la même chose et n'utilisent pas le même langage.

L'un adopte la démarche de la théorie économique standard et, dans une optique utilitariste, s'intéresse aux conséquences économiques d'une baisse d'impôt (en se servant d'enquêtes empiriques). Salin dénonce l'impôt sur le plan moral (je pense que Delaigue le voit très bien). Par contre, sur le plan strictement "économique" (dans le sens économie néoclassique puisque c'est le paradigme dominant qui définit ce qu'est la science économique), l'argumentation de Salin est creuse dans le sens où il se contente d'appliquer le raisonnement axiomatique et déductif autrichien sans prendre la peine de vérifier si les conclusions auxquelles il parvient correspondent aux faits (c'est très clair dans les articles mis en lien sur le site des éconoclastes).

Au sens du paradigme dominant, Piketty fait de la "science", Salin ferait plutôt de la philosophie morale. Tout le problème est là… Si l'on part du principe que l'impôt c'est du vol, tout ce que peut faire Piketty ou la science économique n'a aucun intérêt. Si par contre on rejette cette prémisse (l'impôt c'est du vol), la prose de Salin ne sera jamais écoutée.

je vois pas où est l'analyse économique dans le papier de Piketty? Elle est à peine suggérée par l'idée que la baisse prioritaire est sur les charges pesant sur le travail, mais on ne sait pas en quoi cette baisse est préférable, par rapport à quel critère, est ce que le choix de ce critère est scientifique? plus scientifique que le critère du respect du droit naturel?

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Bon, le problème c'est que la frontière entre le "politique et le savant" est toujours floue…

Correction, que certains s'ingénient à la rendre floue pour couper court à toute discussion.

Le sujet n'a rien d'économique; il est purement politique. Partant le dernier paragraphe du texte de Delaigue est totalement à côté de la plaque et tendancieux.

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je vois pas où est l'analyse économique dans le papier de Piketty? Elle est à peine suggérée par l'idée que la baisse prioritaire est sur les charges pesant sur le travail, mais on ne sait pas en quoi cette baisse est préférable, par rapport à quel critère, est ce que le choix de ce critère est scientifique? plus scientifique que le critère du respect du droit naturel?

Le papier de Piketty est un article de presse. Mais derrière, il y a tous ses traveuax universitaires que n'importe qui peut consulter. Et de manière générale, je parle pas seulement de "l'impôt sur la mort", mais de toute la controverse entre Piketty et Salin.

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Le papier de Piketty est un article de presse. Mais derrière, il y a tous ses traveuax universitaires que n'importe qui peut consulter. Et de manière générale, je parle pas seulement de "l'impôt sur la mort", mais de toute la controverse entre Piketty et Salin.

Ses travaux n'ont aucune importance dès lors qu'il s'agit d'un choix des fins et non des moyens. La fin - la spoliation fiscale - est une donnée pour Piketty, et il se garde bien de la justifier.

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Le papier de Piketty est un article de presse. Mais derrière, il y a tous ses traveuax universitaires que n'importe qui peut consulter. Et de manière générale, je parle pas seulement de "l'impôt sur la mort", mais de toute la controverse entre Piketty et Salin.

je ne connais pas les antécédents du débat Piketty-Salin, mais en tout cas ce papier de libé ne peut pas être vu comme un prolongement de ses travaux scientifiques.

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Ses travaux n'ont aucune importance dès lors qu'il s'agit d'un choix des fins et non des moyens. La fin - la spoliation fiscale - est une donnée pour Piketty, et il se garde bien de la justifier.

Parce qu'il part du principe que l'impôt n'est pas du vol. Sur le plan strictement économique, il considère (en tout cas c'est comme ça que raisonne tout économiste néoclassique) que la question du statut moral de l'impôt ne relève pas de son domaine. Là où ça peut devenir criticable, c'est qu'effectivement dans son article Piketty va plus loin que le simple constat "scientifique" de l'effet d'une baisse d'impôt. Il donne son opinion et, implicitement, il porte un jugement moral sur l'impôt. Et c'est vrai qu'il ne le justifie pas… mais Libé est un journal d'opinion ( :icon_up: ) et les lecteurs de ce journal ne pensent certainement pas que l'impôt c'est du vol.

Enfin bon, je cherche pas à défendre Piketty, juste à montrer que Piketty et Salin peuvent se battre pendant des siècles, ça ne changera rien puisqu'ils ne parlent pas le même langage.

je ne connais pas les antécédents du débat Piketty-Salin, mais en tout cas ce papier de libé ne peut pas être vu comme un prolongement de ses travaux scientifiques.

Bah je pense quand même que lorsque Piketty écrit un article dans la presse, il n'oublie pas juste pour l'occasion tout ce que ses travaux universitaires lui ont permis de trouver. Idem pour Salin d'ailleurs… Derrière l'opinion de Piketty ou de Salin, il y a quand même leurs travaux scientifiques qui doivent jouer sur leur vision des choses.

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La question n'est même pas là.

On peut contester l'impôt sur la mort tout en acceptant la nécessité de l'impôt en tant que tel; c'est une question purement politique. L'effet de cette baisse est un chose, la manière de l'apprécier en est une autre.

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Parce qu'il part du principe que l'impôt n'est pas du vol. Sur le plan strictement économique, il considère (en tout cas c'est comme ça que raisonne tout économiste néoclassique) que la question du statut moral de l'impôt ne relève pas de son domaine. Là où ça peut devenir criticable, c'est qu'effectivement dans son article Piketty va plus loin que le simple constat "scientifique" de l'effet d'une baisse d'impôt. Il donne son opinion et, implicitement, il porte un jugement moral sur l'impôt. Et c'est vrai qu'il ne le justifie pas… mais Libé est un journal d'opinion ( :icon_up: ) et les lecteurs de ce journal ne pensent certainement pas que l'impôt c'est du vol.

Enfin bon, je cherche pas à défendre Piketty, juste à montrer que Piketty et Salin peuvent se battre pendant des siècles, ça ne changera rien puisqu'ils ne parlent pas le même langage.

J'imagine que Salin a quand même du faire des travaux étudiant les conséquences du libéralisme non? je pense qu'on pourrait les faire débattre sur l'effet désincitatif ou non de l'impot, des choses comme ça, mais forcément ils ne partiraient pas à armes égales sur ce terrain.

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Ne dites plus "droits de succession". Dites simplement "impôts sur la mort". Restons factuels. Halte à la novlangue.

C'est important en effet.

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J'ai posté un commentaire sur Econoclaste.

Je me demande s'il sera publié.

Apparemment non. Qu'avais-tu écrit?

Posté
Parce qu'il part du principe que l'impôt n'est pas du vol. Sur le plan strictement économique, il considère (en tout cas c'est comme ça que raisonne tout économiste néoclassique) que la question du statut moral de l'impôt ne relève pas de son domaine.

Le problème c'est que justement les gens comme pykety le prennent pas en compte non plus d'un point de vue scientifique.

Si tel était le cas ils devraient avoir présent à l'esprit que la réalité d'ou ils tirent leurs statistiques est une réalité faussée par l'intervention politique. (les quantités et les structures de consommation et de production sont faussées par l'ingérence politique). Il n'y a donc pas de statistiques portant sur une réalité économique pure. Il s'ensuit qu'on n'a pas de référent économique véritable. Quand on estime que cette réalité est insatisfaisante a quoi fait on référence ? A un effet émergent non prévu mais purement économique ou a un effet pervers résultant des innombrables réglements et prélèvements étatiques ? A un mixte des deux, mais dans quelles proportions ?

A ma connaissance les économistes sont dans l'incapacité de faire la part entre les deux quand il s'agit de l'économie prise dans son ensemble. A quelle norme se réfère donc la prétendue régulation étatique ?

Mais pour ce qui est des seules successions ou se situe la nécessité économique d'un prélèvement ? Nulle part ! On ne peut en aucun cas soutenir que cela équilibre d'une façon quelconque l'économie. Il ne s'agit que d'un prétexte de plus à prélèvement. L'impôt sur les successions n'a pas plus de nécessité que le défunt impôt sur les portes et fenêtres. Et comme l'a souligné quelqu'un il s'agit d'ajouter un prélèvement supplémentaire à un patrimoine ayant déjà été estimé "équitablement" taxé par les étatistes du vivant de son propriétaire.

Ne serait ce que de ce point de vue là on est bien en présence d'une donnée éthique. Mais celui ci est plus vaste car la fiscalité n'est qu'un unique et gigantesque impôt sur la vie.

Posté

Je vais redire ce qui a déja été dit, mais de façon plus coupante.

1) Salin et Piketty ne se rencontreront pas , parce que l'un a une vision axiomatique de l'économie et l'autre une vision économétrique.

2) Quand Salin [respectivement Piketty] s'exprime dans le Figaro [respectivement Libération], ils ne s'expriment pas en tant que scientifiques, mais en tant qu'idéologues.

Quant aux droits de succession, étant très en dessous des seuils, permettez-moi de m'en foutre totalement.

Posté

Ouaip, d'accord avec toi Liberus. Mais je crois que c'est justement ce genre de discours qui peut passer chez les Français (dont moi-même, surtout moi-même lol). Personnellement j'avoue ne pas trop m'y connaître en sciences économiques, en revanche l'explication morale, elle, est accessible à tout le monde! Tout ce qui est purement technique n'a pas trop besoin d'être partagé car en soi ça n'a pas trop de sens, en revanche des explications d'ordre moral pour justifier une action me semble très important, car c'est tout ce qu'on va en retenir.

Posté
Ouaip, d'accord avec toi Liberus. Mais je crois que c'est justement ce genre de discours qui peut passer chez les Français (dont moi-même, surtout moi-même lol). Personnellement j'avoue ne pas trop m'y connaître en sciences économiques, en revanche l'explication morale, elle, est accessible à tout le monde! Tout ce qui est purement technique n'a pas trop besoin d'être partagé car en soi ça n'a pas trop de sens, en revanche des explications d'ordre moral pour justifier une action me semble très important, car c'est tout ce qu'on va en retenir.

La morale n'est pas un jouet à mettre entre toutes les mains. Le rôle des économistes n'est pas de convaincre avec des principes moraux "accessible à tout le monde". Et si les journaux leur servent de défouloir idéologique, je ne veux pas faire les poubelles de leur pensée. Ce mélange des genres ne provoque chez moi que mépris.

La vraie morale se moque des "explications moralisatrices" d'économistes en manque de normativité.

Posté
Je vais redire ce qui a déja été dit, mais de façon plus coupante.

1) Salin et Piketti ne se rencontreront pas , parce que l'un a une vision axiomatique de l'économie et l'autre une vision économétrique.

2) Quand Salin [respectivement Piketti] s'exprime dans le Figaro [respectivement Libération], ils ne s'expriment pas en tant que scientifiques, mais en tant qu'idéologues.

Quant aux droits de succession, étant très en dessous des seuils, permettez-moi de m'en foutre totalement.

1) Ce que je viens de dire c'est qu'une discipline appelée "économétrie" n'existe pas. On pourrait lui attribuer le nom de "confusiométrie", "amalgamométrie" ou tout autre dénomination ne donnant pas mensongérement à penser qu'on mesure une activité économique pure.

2) Salin ne demande in fine qu'une chose c'est qu'un producteur de richesse touche l'intégralité de la richesse qu'il a créée. Son adversaire à besoin lui, pour justifier sa position, d'un arsenal idéologique autrement plus conséquent. Il lui faut d'abord nier l'individu c.a.d bâtir une vision collective des choses puis inventer des normes qui n'existent pas et enfin prétendre que l'usage de la force est l'outil indispensable permettant d'atteindre ces normes.

Si nous n'étions pas conditionnés aussi lourdement à accepter les absurdités étatiques il nous serait aisé de distinguer dans quel camp se situe l'idéologie.

Posté

Salin n'est pas un débile, il connaît très bien les "faiblesses "de ce genre de papier. Son objectif, c'est de faire progresser dans l'opinion l'idée que le libéralisme n'est pas souhaitable uniquement de par son efficacité mais qu'il l'est aussi par sa supériorité morale. Il pense d'ailleurs que l'argument moral surpasse celui de l'efficacité. Si vous avez suivi ses dernières sorties, elles étaient dans la même veine et tout ça est purement intentionnel.

Posté
Salin n'est pas un débile, il connaît très bien les "faiblesses "de ce genre de papier. Son objectif, c'est de faire progresser dans l'opinion l'idée que le libéralisme n'est pas souhaitable uniquement de par son efficacité mais qu'il l'est aussi par sa supériorité morale. Il pense d'ailleurs que l'argument moral surpasse celui de l'efficacité. Si vous avez suivi ses dernières sorties, elles étaient dans la même veine et tout ça est purement intentionnel.

Écrire un papier soit disant économique, se fondant sur des principes moraux, pour remplir un objectif "politique"…. C'est pire que ce que j'imaginais.

Posté
Écrire un papier soit disant économique, se fondant sur des principes moraux, pour remplir un objectif "politique"…. C'est pire que ce que j'imaginais.

Qui a dit qu'il s'agissait d'un article "économique" ? Il défend moralement l'abolition de l'impôt sur la mort, point. Et il ne va pas exposer Rothbard, Hoppe ou Den Uyl & Rasmussen dans les pages débat du Figaro.

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