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le che, martyr et ange de la mort


Sarvok

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Le Che, martyr et ange de la mort

[ 07/09/07 ]

Le Robin des Bois argentin était un stalinien tropical pur jus.

Quarante années se sont écoulées depuis la mort, le 9 octobre 1967, du Che, achevé par un sergent saoul de l'armée bolivienne. L'URSS s'est effondrée. Le Mur est tombé. La Chine a tiré sur ses étudiants place Tien An Men et s'est convertie au marché. L'imposture castriste a été dénoncée par les combattants historiques de la révolution, Huber Matos, « Benigno », Carlos Franqui…(voir « A lire »). Dans ce vaste champ de ruines, seule la figure angélique du Che, saint et martyr, semble insubmersible. L'homme au visage le plus imprimé sur les tee-shirts de la planète continue à être l'icône des militants de tous poils, à l'extrême gauche, bien sûr, mais aussi dans les groupuscules de l'extrême droite « identitaire ». Et on entend toujours à la radio « Hasta siempre comandante », paroles et musique de Carlos Puebla. Comment expliquer ce miracle ? Ou cet aveuglement ?

Régis Debray, qui fréquenta les rangs de la guérilla bolivienne, rencontra le Che, théorisa sur son combat (*), et qui est revenu de tout cela, a sans doute fait le point, une fois pour toutes. « A Cuba, au sein de la direction, il ne penchait pas du côté des indulgents - et dans les dilemmes brutaux de la «justice révolutionnaire» (exécution ou pas, arrestation des suspects ou pas), tranchait plus du côté de Robespierre que de Danton, et certainement pas de Fabre d'Eglantine. A l'inverse de Fidel. Mais la légende a distribué autrement les rôles et on ne peut rien contre les mythes. Son assassinat l'a transfiguré en archange, le glaive en moins, la longévité de Fidel le fait ressembler à un vieux dictateur inamovible. Il faut savoir terminer une épopée : il n'y a pas de héros à vie. » (« Les Masques », éd. Gallimard, 1987).

Mais les mots ne font pas le poids face au « choc » des photos. Le mythe du Che se nourrit de deux images : celle - l'une des plus célèbres au monde - prise et retravaillée par Alberto Korda en 1960, d'un jeune ténébreux légèrement barbu coiffé du béret à l'étoile solitaire. Et celle, de Marc Hutten, pour l'AFP : le Che en gisant christique, torse nu, allongé sur une civière posée dans le lavoir de Vallegrande, en Bolivie. Guevara fut assassiné dans des conditions sordides. Une image demeure, celle d'un martyr désarmé, aux dépens de toutes les autres. Y compris celle du « boucher de la Cabana », présente à l'esprit de nombreux Cubains.

Piqûre de rappel

Entre 1956 et 1958, dans la Sierra Maestra, le Che, l'un des commandants de la révolution cubaine en marche, multiplie les exécutions des « traîtres ». Une seule fois, il se montre sentimental : quand il faut étrangler un chiot qui menace de faire repérer la colonne de guérilleros. Après l'entrée victorieuse à La Havane, Guevara poursuit son travail dans la forteresse la Cabana, une prison construite par les Espagnols à l'époque coloniale. Il vient à l'improviste, monte sur le mur par un escalier, s'y couche sur le dos, fume un havane et assiste aux exécutions, parfois en compagnie d'invités. On l'y voit dans « Adieu Cuba », le beau film d'Andy Garcia, sorti fugitivement, hélas, l'été dernier. « Ne faites pas traîner les procès, disait le Che. Ceci est une révolution. N'utilisez pas les méthodes légales bourgeoises, les preuves sont secondaires. »

Jacobo Machover évoque ces scènes dans « La Face cachée du Che », qui sera en librairie jeudi prochain. Ce n'est pas une biographie de plus, mais un récit, fondé sur les faits et des témoignages : 200 pages, la bonne distance pour une démonstration efficace. « La Face cachée du Che », c'est une piqûre de rappel, à lire et à offrir, surtout à ses amis de la gauche bien-pensante. Machover n'est ni un agent de la CIA, ni un nostalgique de la dictature de Fulgencio Batista. Il est professeur, il enseigne la civilisation ibérique à l'université d'Avignon. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont un très bon « Cuba, totalitarisme tropical » (réédité en 10/18). Il est né à Cuba, il a quitté l'île avec ses parents en 1963, l'année de ses neuf ans. Son père, à qui le livre est dédié (« A Moisès Machover, qui avait cru en cette histoire avant d'être broyé par elle »), était un Juif polonais marxiste, qui a travaillé avec le Che.

Pulsion de mort

Longtemps, le jeune Jacobo a cru au discours officiel : Che Guevara « s'était sacrifié pour ses idées en vue d'un monde meilleur, [il] avait été poussé vers son ultime combat à la suite de désaccords insurmontables avec Fidel Castro ». La lecture des écrits du Che - il faut du courage -, sema le trouble en lui. « Rien de plus dogmatique que ces textes où la plus grande orthodoxie politique le dispute à une pulsion effrénée de la mort, envers lui-même et envers les autres. » A la figure du rebelle, du héros romantique, se substitue petit à petit « un personnage qui prétendait, à l'orée d'une mort qu'il pressentait proche, justifier l'injustifiable ». L'idée force : le Che a entraîné dans sa chute des idéalistes convaincus de suivre un nouveau Libertador, un José San Martin (1778-1850) ou un Bolivar (1783-1830). Ils finiront leur course avec une réincarnation de Lope de Aguirre (1518-1561), ce conquistador devenu fou dans sa recherche de l'Eldorado, interprété par le génial Klaus Kinski dans « Aguirre, la colère de Dieu », de Werner Herzog.

Le Che aime avant toute chose l'odeur de la poudre et du sang. « La guerre… La guerre… Nous sommes toujours contre la guerre, mais quand nous l'avons faite, nous ne pouvons vivre sans elle. A tout instant, nous voulons y retourner », disait-il. Politiquement, il n'a pas « toujours » été marxiste-léniniste, comme il l'a affirmé. Dans sa jeunesse, Juan Peron lui est sympathique, puis antipathique. Il penche pour le communisme le plus stalinien, mais il hésite à entrer au Parti, car il a « une envie folle de faire un voyage en Europe ».

Faute d'un grand tour sur le Vieux Continent, il se barde de certitudes et de lubies. Il croit dur comme fer en la rédemption par le travail. Tous les ennemis de la révolution cubaine - homosexuels, catholiques, adeptes de la « santeria » (le vaudou cubain), fans des Beatles - sont invités - ils n'ont pas le choix - à faire un passage par les Unités militaires d'aide à la production. Le Che inaugure, rayonnant, les premières Umap, abréviation du goulag tropical.

Les intellectuels français ont leur part de responsabilité dans l'édification du mythe du Che. « Je pense que cet homme n'a pas été seulement un intellectuel mais l'homme le plus complet de son époque », déclare Jean-Paul Sartre, qui s'est toujours trompé en politique, mais qui a été beaucoup écouté. Heureusement, quelques artistes étrangers sauvent l'honneur. Le poète beatnik Allen Ginsberg, par exemple. Juif, homosexuel et bouddhiste, il a tout pour déplaire à La Havane. Invité à participer à un jury littéraire, il déclare tout à trac que Castro devrait cesser de fusiller des gens. Premier crime de lèse-majesté. Puis, il laisse entendre que Raul Castro, le frère de Fidel, est « gay ». Il ajoute que le Che est « mignon ». Il est expulsé.

« Che Guevara et Fidel Castro sont les deux faces d'une même monnaie : celle d'une sanglante utopie, conclut Jacobo Machover. Leur pouvoir de séduction ne tient qu'à l'infinie capacité d'aveuglement de leurs innombrables sympathisants, qui n'ont jamais voulu se pencher de trop près sur les cadavres abandonnés sur leur route par ces révolutionnaires implacables. »

EMMANUEL HECHT

Source

Ici, tout le monde est bien sur au courant. Mais si quelqu'un cherche une lecture simpa ou quelques fait objectifs sur le Che … J'ai trouvé ça honnête de la part de Les Echos de paraître une critique sur ce livre. En France c'est quand même pas très politiquement correcte. Dommage que ça reste dans Les Echos … le publique a qui se livre s'adresse répondra que c'est "la manipulation bourgeoise de l'histoire"…. pitoyable …

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Le poète beatnik Allen Ginsberg, par exemple. Juif, homosexuel et bouddhiste, il a tout pour déplaire à La Havane. Invité à participer à un jury littéraire, il déclare tout à trac que Castro devrait cesser de fusiller des gens. Premier crime de lèse-majesté. Puis, il laisse entendre que Raul Castro, le frère de Fidel, est « gay ». Il ajoute que le Che est « mignon ». Il est expulsé.

:icon_up:

Pas mal de voir ça dans un magazine français à grand tirage :doigt:

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:icon_up:

Pas mal de voir ça dans un magazine français à grand tirage :doigt:

C'est clair ! J'ai jamais compris pourquoi le Che faisait l'objet d'une telle idolatrie, car au fond sur le plan politique il aura tout raté, manipulé par Castro, de ses tentatives de révolution en Afrique à l'aventure finale en Amérique du Sud.

En revanche je recommande le film "Carnet de Voyage" sur un épisode de la vie du Che, qui n'a rien à voir avec la politique, ce film est vraiment très bon.

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Wow, j'avais jamais lu de description deu Che, il est encore pire que je l'imaginais. :icon_up:

Alors ce site est pour toi.

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