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L'économie, une science très discutée


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L'économie, une science très discutée

Le « Prix Nobel » d'économie n'existe pas ! Il n'a jamais été dans l'intention d'Alfred Nobel de célébrer les économistes. La récompense attribuée le 15 octobre dernier à Leonid Hurwicz, Eric Maskin et Roger Myerson a été créée très récemment, en 1969 pour être précis. L'initiative de sa création revient à la Banque de Suède, la banque centrale suédoise. La concomitance de la remise du prix en économie avec ceux du Nobel conduit à lui décerner le titre de « prix Nobel d'économie », couronnant ainsi les économistes d'un prestige et d'une aura de scientificité déniés aux autres sciences sociales.

Peter Nobel, héritier de la famille, a déjà exprimé plusieurs fois son agacement de cette confusion pour rappeler que « la Banque royale de Suède a déposé son oeuf dans le nid d'un autre oiseau, très respectable, et enfreint ainsi la «marque déposée Nobel» ».

L'économiste québécois Gilles Dostaler, qui a retracé l'histoire de cette « tromperie », conclut son travail en soulignant qu'« il y a sans doute trop d'intérêts en jeu et de droits acquis pour qu'on puisse espérer l'abolition pure et simple du prix de la Banque de Suède. Mais la Fondation Nobel et l'Académie royale des sciences de Suède devraient reconnaître qu'elles ont été flouées et cesser d'administrer ce prix. »

D'autant que les économistes ne sont pas dupes. Il y a quelques jours, le professeur André Babeau écrivait dans ces colonnes (« Les Echos », 9 octobre) : « On n'est déjà pas certain que toute subjectivité soit absente des sciences exactes ; s'agissant des sciences sociales et de l'économie en particulier, on est en revanche sûr que l'idéologie, d'où qu'elle vienne, est au point de départ de beaucoup de travaux, même parmi les plus célébrés. » Même son de cloche chez un économiste comme l'Américain Dani Rodrik, qui n'hésite pas à affirmer que « les différences entre économistes sur la mondialisation ne sont pas le produit de modèles économiques différents ou de lectures différentes des informations empiriques ». Elles proviennent, explique-t-il, « de leurs différents rapports à l'éthique et de leurs préférences politiques ». Et gageons que le commentaire ne s'applique pas qu'à la mondialisation…

Les économistes sont utiles. Bien qu'ils n'aient jamais réussi à établir de lois scientifiques incontestables (voir à ce sujet le tout récent livre de Bernard Guerrien, « L'Illusion économique »), leurs raisonnements servent souvent à mieux comprendre la réalité économique. Cela n'en fait pas pour autant de purs scientifiques. Comme l'écrivaient déjà au début du XXe siècle les professeurs d'économie Charles Gide et Charles Rist, « les croyances religieuses ou morales, les convictions politiques et sociales, les sentiments et les préférences individuelles, jusqu'aux expériences et aux intérêts personnels, jouent ici leur rôle et contribuent à déterminer l'orientation de chacun ».

CHRISTIAN CHAVAGNEUX est rédacteur en chef adjoint du mensuel « Alternatives économiques ».

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Ces pleurnicheries ne cachent que très mal le fait qu'il y a belle lurette que le keynésianisme est scientifiquement mort et enterré. Les gauchistes ne discutaient pas ce prix quant ils pouvaient encore faire illusion et récolter quelques lauriers. Maintenant, c'est bien fini.

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D'autant que les types qu'il cite à l'appui de sa thèse sont des inconnus au bataillon, pourtant je m'intéresse pas mal à l'économie (dans le contexte français notamment) depuis quelques années….

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D'autant que les types qu'il cite à l'appui de sa thèse sont des inconnus au bataillon, pourtant je m'intéresse pas mal à l'économie (dans le contexte français notamment) depuis quelques années….

Dostaler est un très bon connaisseur de Keynes et de Hayek. Un chercheur respectable.

Gide et Rist ont rédigé une fameuse histoire des doctrines économiques.

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Dan Rodrik est un économiste de Harvard, et son blog est de très grande qualité. A noter que Chavagneux fait une apparition dans les commentaires de ce billet où il nous livre une sorte de brouillon de son article:

As you know there is no such thing as a "Nobel Prize in Economics". Alfed Nobel never intented to celebrate economists ! The Bank of Sweden adopted a cuckoo in the nest strategy to capture the Nobel image and make everybody think that all economists are pure scientists. Something Alfred Nobel's family is still furious about.

But as you wrote yourself on May 09, "The differences among economists on globalization cannot be the product of different economic models or different readings of the empirical evidence,…, Instead, these differences seem to be grounded in differences in ethical valuations and political predilections".

I guess it is not only true for globalization but for many other issues as well. And there is also the Carlos Diaz-Alejandro rule (by the way where does it come from?): For almost any particular conclusion you want to arrive at, there is some economic model that will take you there.

Which makes your radical support for the neoclassical technique all the most surprising. Unless, maybe, yes, I understand: aren't you interested by the Bank of Sweden Prize in economics in memory of Alfred Nobel?

Posted by: Christian | October 08, 2007 at 09:04 AM

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Gide et Rist ont rédigé une fameuse histoire des doctrines économiques.

Que j'ai d'ailleurs vue dans ta valise. Elle pèse son poids. :icon_up:

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Dostaler est un très bon connaisseur de Keynes et de Hayek. Un chercheur respectable.

Gide et Rist ont rédigé une fameuse histoire des doctrines économiques.

Ah d'ac, désolé. :icon_up:

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Ah d'ac, désolé. :icon_up:

Tu connais sûrement plus d'économistes réputées que moi… mais tes connaissances sont sûrement axées sur l'économie financière, voilà tout. Les auteurs que j'ai citées sont spécialisés sur des auteurs et des courants de pensée.

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Ces pleurnicheries ne cachent que très mal le fait qu'il y a belle lurette que le keynésianisme est scientifiquement mort et enterré. Les gauchistes ne discutaient pas ce prix quant ils pouvaient encore faire illusion et récolter quelques lauriers. Maintenant, c'est bien fini.

Je ne pense pas que le keynésianisme soit mort. Entre stimulation de la demande ou celle de l'offre le débat reste d'actualité. Il est certain que les representations de chacun jouent ici un gand rôle.

J'ai eu un cours d'économie l'autre jour: Le prof nous disait que c'était la consommation qui était à la base de toute économie. Que cette affirmation était une regle élémetaire de toute économie. Or, il me semble que "consommer" est un acte de déstruction de la rarété et donc par conséquent s'interesser au processus que l'homme utilise pour sortir de la rarété, à savoir l'acte de création, reste pertinent.

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J'ai eu un cours d'économie l'autre jour: Le prof nous disait que c'était la consommation qui était à la base de toute économie. Que cette affirmation était une regle élémetaire de toute économie.

Mises ne dit pas autre chose. Les keynesiens n'insistent pas sur la consommation en elle-même mais la consommation présente opposée à la consommation future.

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Le problème du keynésianisme est qu'il a été érigé en une science économique parallèle et mystique, capable de tout apréhender, de tout expliquer. Alors qu'au fond, ce ne sont que des mécanismes qui font partie des modèles standards depuis le 19ème. Je pense d'ailleurs que Keynes doit se retourner dans sa tombe si il entend ce que l'on crie en son nom.

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Je ne pense pas que le keynésianisme soit mort.

J'ai précisé scientifiquement mort, tous ses modèles et prédictions ayant échoué lamentablement. Le niveau des océans montera de 50 mètres avant qu'un keynésien pur laine gagne un Nobel.

D'ailleurs Keynes est toujours enseigné dans les universités américaines.

Les théories marxistes, également. Mais aucune de ces professeurs n'aura de Nobel.

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J'ai précisé scientifiquement mort, tous ses modèles et prédictions ayant échoué lamentablement. Le niveau des océans montera de 50 mètres avant qu'un keynésien pur laine gagne un Nobel.

Disons que le décalage entre la faillite intellectuelle du keyésianisme et sa postérité politique démontre que la vérité constitue une arme politique peu puissante.

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Disons que le décalage entre la faillite intellectuelle du keyésianisme et sa postérité politique démontre que la vérité constitue une arme politique peu puissante.

Tout à fait d'accord avec toi. Mais mon propos visait à expliquer pourquoi, à mon sens, la gauche tape dur aujourd'hui sur le prix Nobel d'économie : parce qu'elle ne l'aura plus jamais.

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Pour Keynes, le point central n'est pas la consommation mais l'investissement (la variation de l'investissement plus précisément).

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A la décharge de Keynes, on notera par ailleurs que l'on réalise toujours le volet A (investissements publics dans l'économie lorsqu'elle est flagada) mais jamais le volet B (désinvestissements publics dans l'économie lorsqu'elle fait de la température).

Je ne sais pas si ça marcherait (je crains que non) mais en tout cas ça signifie que les politiques "keynésiennes" ne le sont peut-être pas tant que cela.

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Pour Keynes, le point central n'est pas la consommation mais l'investissement (la variation de l'investissement plus précisément).

Oui…il me semble que la differenece avec la pensée d'Hayek étant sans doute qu'Hayek et l'économie libérale stipule que l'investissement ne peut être que le fruit d'une épargne préalable, épargne isssue non d'une création ex-nihilo mais representant l'accumulation d'effort de l'investisseur. Pour Keynes il s'agit de stimuler cet investissement notamment par des politiques monétaites de baisse des taux.

Maintenant il est certain que dans un modèle d'économie ouverte, non fermée, il s'avère que le keynésianisme basique se heurte à la contraine exterieure.

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Tout à fait d'accord avec toi. Mais mon propos visait à expliquer pourquoi, à mon sens, la gauche tape dur aujourd'hui sur le prix Nobel d'économie : parce qu'elle ne l'aura plus jamais.

La majorité des économistes, même mainstream, sont de gauche…

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La majorité des économistes, même mainstream, sont de gauche…

Yep. On trouve aux USA environ 3 économistes "démocrates" pour un économiste "républicain". Mais 30 ethnologues "démocrates" pour 1 ethnologue "républicain".

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Dostaler est un très bon connaisseur de Keynes et de Hayek. Un chercheur respectable.

Gide et Rist ont rédigé une fameuse histoire des doctrines économiques.

Charles Gide est celui qui importe en France les idées de l'École Historique allemande après la l'institution officielle de chaises d'économie politique dans les université françaises par le gouvernement au début de la 3ième République dans le but (réussi) d'éliminer l'influence de l'École libérale française et sa plaidoirie intransigeante en faveur de laissez faire.

Gide est en fait le chef de file de l'École historique en France, un mouvement éclectique qui comptait plutôt des légistes (incliné vers la réglementation et l'intervention de l'Etat) que des économistes, comme lui-même fut aussi à la base.

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Charles Gide est celui qui importe en France les idées de l'École Historique allemande après la l'institution officielle de chaises d'économie politique dans les université françaises par le gouvernement au début de la 3ième République dans le but (réussi) d'éliminer l'influence de l'École libérale française et sa plaidoirie intransigeante en faveur de laissez faire.

Gide est en fait le chef de file de l'École historique en France, un mouvement éclectique qui comptait plutôt des légistes (incliné vers la réglementation et l'intervention de l'Etat) que des économistes, comme lui-même fut aussi à la base.

Je connais surtout Gide pour avoir développé l'associationnisme. Je n'ai guère remarqué une tendance à l'historicisme dans les écrits que je connais. Mais c'est possible.

Quant à la perte d'influence de l'école libérale française, elle est parfaitement liée au mutations universitaires survenues à la IIIè République… Mais elle me semble aussi correspondre à une incontestable régression de la pensée libérale française. Il est significatif que l'économiste libéral le plus connu après 1870 soit le très dispensable Leroy-Beaulieu.

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