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L'inquiétant avènement de la victime


Chitah

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Invité jabial
Posté

Dans ce cas-là, les expulsions contre les palestiniens qui vivaient en Israël sont prescrites depuis longtemps.

Désolé mais pour moi, la seule durée naturelle de prescription, c'est 120 ans - parce qu'on est sûr que le coupable est mort.

Posté
Dans ce cas-là, les expulsions contre les palestiniens qui vivaient en Israël sont prescrites depuis longtemps.

En matière de prescription acquisitoire, il faut que la jouissance soit "paisible". Tu admettras que ce n'est pas le cas. :icon_up:

Blague à part, il est évident que le temps joue; là où on aurait pu proposer sérieusement le retour des Palestiniens en Israël en 1950, en 2007 ça n'a plus grand sens et la seule question qui se pose est celle de l'indemnisation. Mais bon, de toute manière, c'est un problème qui est avant tout politique et on parle de droit pénal.

Je remarque à ce propos que tu ne sembles pas attacher d'importance aux objections concrètes qui te sont faites.

Posté
Pour une fois je suis de l'avis de Kassad. La prescription force par ailleurs les autorités à soumettre leurs accusations au juge en temps utile.

Toutes ces règles n'ont pas pour but de protéger les coupables, mais les innocents.

+1

D'ailleurs ces messieurs savent se montrer extrêmement pointilleux (avec raison, il est bon de le souligner) quant au respect des procédures lorsqu'il s'agit des pièces fournies par les forces de l'ordre (procès-verbaux, …) mais ont souvent du mal à appliquer pour eux-mêmes la rigueur qu'ils exigent.

Posté
La prescription n'est pas qu'une question technique. C'est aussi l'expression du fait qu'un moment donné il faut tourner la page si on veut vivre ensemble. Sinon ça peut vite tourner à la vendetta corse qui s'étend sur des siècles.

Lever la prescription ne signifie pas que la vengeance va s'établir sur une échelle intergénérationelle ou "pendant des siècles". La Vendetta existe en Corse, Sardaigne, et Sicile, parce que dans ces régions la famille a une signification très forte (quasi-clanique), mais pour un crime de droit commun en France, on parle d'un individu. Si demain la prescription est abolie, on ne va pas pousuivre les petits-enfants d'un meurtrier pour ce qu'a fait leur grand père. Déjà que le taux de crimes prémédités élucidés ne doit pas atteindre 15%, je trouve assez maladroit de rajouter en plus des règles de prescription aussi laxistes.

Posté
Pourquoi toujours pousser une réflexion dans ses derniers retranchements ? Ca peut être pas mal quand on échaffaude une théorie (mathématique) dont on veut prouver la consistance mais dans la vie de tous les jours ? Je ne trouve rien de plus dommageable que de se limiter à ce réflexe Pavlo-Kantien.

Moi aussi je pourrais caricaturer l'approche "je ne pardonnerais jamais" avec des vengeances qui s'auto-entretiennent sur des générations et la paix impossible à retrouver. Au nom de la pureté de la justice il faudrait endurer la guerre permanente de tous contre tous ? La vengeance illimité ronge l'âme comme les vers la chair des cadavres.

Concrètement tu fais quoi en afrique du sud ? tu fais quoi au Rwanda, en Irlande du Nord ? Parce que je vais te paraître cru mais la question elle se pose comme ça : tu mets tout le monde en prison, tu les condamne tous à mort, tu passes 90% du PIB à juger qui a fait quoi comment, quand pourquoi ? Et pour les ex pays de l'est : je pense aux pays où un pourcentage non négligeable de la population a coopéré avec les services secrets (Roumanie, Pologne, RDA etc.). Parce que si dans le tas il y avait d'authentiques salauds tu avais aussi le cas de ceux qu'on menaçait de déportation, dont on menaçait la famille et toute la masse des veaux entre les deux. Alors quoi ? On chasse les sorcières jusqu'à la fin des temps ? Et tu mets 20% de la population de plus de 40 ans derrières les barreaux.

Si tu as une méthode qui permette le retour à la paix civile garanti sur facture j'achète. Les tribunaux de la mémoire en AFS sont un pas dans la bonne direction. Mais voilà avec une approche immaculée, une approche pour laquelle la notion prescription n'a pas droit de citer, une telle chose est impensable. Pour ce genre de choses je n'ai pas de théorie permettant de trancher entre l'acceptable, l'inacceptable, le pardonable, l'impardonable et le reste. Tout ce que je sais est qu'un moment donné il faut arrêter les conneries et que la prescription c'est exactement ça.

Ca c'est du hors-sujet de chez hors-sujet. Je note d'ailleurs qu'en suivant ta logique - qui est également celle de Georges Pompidou - Touvier ou Papon n'auraient jamais eu à rendre de comptes. Mais bon. De toute manière ce n'est pas de ça qu'il était question, mais des crimes de droit commun. Je ne vois pas en quoi le fait de ne pas classer l'affaire Doucé (par exemple) ou de rouvrir ponctuellement le dossier Bruay en Artois peut susciter des "vengeances qui s'auto-entretiennent sur des générations". Au pire c'est de l'argent dépensé pour rien - mais je connais des dépenses beaucoup plus scandaleuses - au mieux ça empêche un salaud de s'endormir tranquillement le soir. Pour moi c'est tout bénéf. J'ajouterai qu'il y a plusieurs pays qui ne connaissent pas la prescription pour meurtre et ne semblent pas s'en porter beaucoup plus mal.

Mais bon, je souffre d'un réflexe pavlo-kantien - ce qui est d'autant plus ironique que je n'ai jamais lu Kant…

Posté
Ca c'est du hors-sujet de chez hors-sujet. Je note d'ailleurs qu'en suivant ta logique - qui est également celle de Georges Pompidou - Touvier ou Papon n'auraient jamais eu à rendre de comptes. Mais bon. De toute manière ce n'est pas de ça qu'il était question, mais des crimes de droit commun. Je ne vois pas en quoi le fait de ne pas classer l'affaire Doucé (par exemple) ou de rouvrir ponctuellement le dossier Bruay en Artois peut susciter des "vengeances qui s'auto-entretiennent sur des générations". Au pire c'est de l'argent dépensé pour rien - mais je connais des dépenses beaucoup plus scandaleuses - au mieux ça empêche un salaud de s'endormir tranquillement le soir. Pour moi c'est tout bénéf. J'ajouterai qu'il y a plusieurs pays qui ne connaissent pas la prescription pour meurtre et ne semblent pas s'en porter beaucoup plus mal.

Mais bon, je souffre d'un réflexe pavlo-kantien - ce qui est d'autant plus ironique que je n'ai jamais lu Kant…

Pas plus hors sujet que ta manière de ramener le débat au niveau du fait divers. Il s'agit bien de la même chose pourtant : je parle du mécanisme de la prescription et de pourquoi ce mécanisme se doit d'exister à mon avis. Pour faire un parallèle, je trouve que les arguments que tu m'opposes sont un peu comme si tu me disais que la présomption d'innocence c'est ridicule parce que le meurtrier de madame Michu il avait les mains pleines de sang et que tout le monde l'a bien vu la poignarder.

La justice qu'on a sur terre est imparfaite il faut l'accepter. Il faut encore plus accepter que ce qui compte est que la procédure soit suivie car c'est uniquement sur cette dernière qu'on peut avoir un contrôle quelconque.

Moi ce que je retiens de vos critique n'est pas que la prescription est inutile (je n'ai pas vraiment vu d'arguments autre que celui de la vengeance illimitée) mais que la justice des hommes (pas celle de Rorschach hein) devrait mieux faire son boulot (et ainsi le problème de la prescription ne se poserait plus). Demandez une police plus efficace, une justice plus rapide, je suis d'accord avec vous. Mais sur le fond la prescription, tourner la page n'est pas vain (regardez ce que Sarko fait en Algérie) et non ce n'est pas non plus donner une carte blanche aux criminels. Qu'on ne s'y méprenne pas je suis pour une justice et une police bien plus efficace qu'aujourd'hui mais le principe de prescription me semble aussi central que la présomption d'innocence pour un système judiciaire qui ait des chances d'être qualifié de libéral.

Pour Kant il s'agit de la fameuse citation "Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle de la nature." Qui fait que dès qu'on propose un truc humain qui ne cadre pas 100% avec une théorie bien polie on se prend le cas d'espèce dans la figure (du type ben si c'est pour laisser tous les criminels dans la nature…).

Posté
Moi ce que je retiens de vos critique n'est pas que la prescription est inutile (je n'ai pas vraiment vu d'arguments autre que celui de la vengeance illimitée)

Il n'est pas question de vengeance, mais de justice. L'écoulement d'une durée arbitraire de temps ne doit pas interdire la justice. Par contre, on peut parfaitement tenir compte du temps écoulé depuis un crime, et du fait que le criminel n'est désormais plus la même personne, pour prononcer des peines plus légères, voire symboliques. Mais je trouve cela malsain que d'ériger en principe fondamental du droit pénal le fait de tourner la page au bout d'une durée X. On le fait au nom du "pardon nécessaire de la société", mais il n'appartient pas à la société de pardonner quoique ce soit. La société c'est personne. Je n'ai jamais déjeuné avec la société.

mais que la justice des hommes (pas celle de Rorschach hein) devrait mieux faire son boulot (et ainsi le problème de la prescription ne se poserait plus). Demandez une police plus efficace, une justice plus rapide, je suis d'accord avec vous. Mais sur le fond la prescription, tourner la page n'est pas vain (regardez ce que Sarko fait en Algérie) et non ce n'est pas non plus donner une carte blanche aux criminels. Qu'on ne s'y méprenne pas je suis pour une justice et une police bien plus efficace qu'aujourd'hui mais le principe de prescription me semble aussi central que la présomption d'innocence pour un système judiciaire qui ait des chances d'être qualifié de libéral.

Au contraire je pense qu'un système libéral se doit d'être intraitable sur la question de la responsabilité humaine.

Posté

Il me semble qu'il y a une dichotomie (une de plus !) dans l'approche de la justice ici. Il y a des maximalistes pour qui le plus important est que rien n'échappe au courroux divin du juge, quitte à faire des dommages collatéraux. Les autres sont minimalistes et pour qui l'important est de ne jamais commettre d'erreur judiciaire, quitte à laisser passer des criminels.

Mais on est tous bien d'accord que si on vivait un monde de perfection les deux approches seraient confondues…

Ce qui me frappe chez les maximalistes est qu'ils doivent forcément penser la justice comme parfaite : vu les moyens illimités qu'ils sont prêts à lui conférer pour traquer le criminel et la présentation des choses qu'ils font (où ils savent qu'untel est coupable et qu'il ne faut pas le laisser partir). En tous cas si elle n'est pas parfaite c'est plutôt flippant. Mais si cette justice est si parfaite pourquoi laisserait elle passer entre les mailles de ses filets magiques un criminel qui pourrait attendre la prescription ? Dès lors pourquoi s'élever contre ce principe qui de toute manière ne s'appliquerait jamais vu l'efficacité sans failles de notre système.

Je remarque aussi qu'on est au centre du sujet du fil : "l'avènement de la victime". L'approche maximaliste cadre bien avec cette philosophie car s'il y a une victime, il y a un coupable et il doit y avoir un procès.

Invité jabial
Posté

Tu as une vision complètement faussée de ceux que tu appelles les maximalistes. Je suis le premier à réclamer plus de difficulté pour condamner quelqu'un, moins de détention préventive, moins de possibilité de perquisitionner, etc. Mais ça, c'est avant la détermination de la peine. On ne peut tout simplement pas concevoir un système de peines en partant du principe qu'on va condamner des innocents. Avec ce genre de raisonnement, on se condamne à l'inaction face au crime.

La justice n'a rien de magique et elle est tout à fait imparfaite - c'est pour ça que la condamnation doit être difficile, et c'est pour ça aussi que des peines lourdes sont nécessaires. C'est parce que la justice est imparfaite, lente, qu'on peut tomber sur des preuves inattendues de façon totalement accidentelle que la prescription est une grave erreur. D'ailleurs, il ne viendrait pas à l'idée des partisans de la prescription d'appliquer leur logique aux preuves qui innocentent un homme emprisonné depuis longtemps. Doit-on donc, si on trouve l'ADN du coupable, libérer l'innocent mais laisser le coupable courir? Je ne pense pas.

Une société libérale doit être une société de responsabilité. Il n'y a pas de "pardon" autre que celui accordé par les victimes. Quant à la paix sociale, elle ne peut exister que dans la justice, et certainement pas dans un pardon universel accordé par qui n'a lui-même subi aucun tort. En croyant disposer de la légitimité de pardonner le mal fait à autrui, ce sont les "minimalistes" qui se prennent pour Dieu.

Posté
Tu as une vision complètement faussée de ceux que tu appelles les maximalistes. Je suis le premier à réclamer plus de difficulté pour condamner quelqu'un, moins de détention préventive, moins de possibilité de perquisitionner, etc. Mais ça, c'est avant la détermination de la peine. On ne peut tout simplement pas concevoir un système de peines en partant du principe qu'on va condamner des innocents. Avec ce genre de raisonnement, on se condamne à l'inaction face au crime.

Je ne comprend pas ton message : s'il n'y a pas eu procès tu ne peux pas dire qu'il y a un coupable (toi même tu dis être le premier à défendre la présemption d'innocence). On ne se condamne pas à l'inaction mais on dit par avance qu'on se donne x années pour décider l'établissement de la vérité sur un sujet donné. Si on n'y arrive pas c'est dommage mais c'est comme ça et on passe à autre chose histoire d'être plus efficace. Je ne vois pas où se situe l'inaction. Je vois plutôt le signe d'une action efficace (on évite de courir après des chimères pendant des siècles).

Posté
Lever la prescription ne signifie pas que la vengeance va s'établir sur une échelle intergénérationelle ou "pendant des siècles". La Vendetta existe en Corse, Sardaigne, et Sicile, parce que dans ces régions la famille a une signification très forte (quasi-clanique),

Je crois que tu confonds cause et effet.

Il me semble qu'il y a une dichotomie (une de plus !) dans l'approche de la justice ici. Il y a des maximalistes pour qui le plus important est que rien n'échappe au courroux divin du juge, quitte à faire des dommages collatéraux. Les autres sont minimalistes et pour qui l'important est de ne jamais commettre d'erreur judiciaire, quitte à laisser passer des criminels.

C'est tout à fait ça. Je trouve qu'on frôle l'hérésie. :icon_up:

A la réflexion, si l'être humain possède réellement un instinct religieux, il est dangereux de le refouler parce qu'il va réapparaître là où il n'a rien à chercher, dans la divinisation de phénomènes purement humains, comme ici la justice. C'est cela je crois, que devrait être la laïcité: un équilibre, et non une suppression.

Invité jabial
Posté

Qu'au bout d'un certain temps on ne consacre plus activement de ressources à la recherche d'un coupable, c'est une affaire de police qui concerne le contrat d'assurance de la victime ou de la copropriété ou le crime a été commis. La prescription n'a rien à voir avec ça. La prescription, c'est que si par hasard on tombe sur un élément nouveau et qu'on trouve qui c'est, on ne peut plus faire de procès.

En plus de ça, la prescription est fondamentalement injuste, car elle ne court pas pendant la même durée pour tout le monde. En effet, ce n'est pas le délai après le crime, mais après le dernier acte de procédure. Ca veut dire que si un procureur souhaite éviter la prescription d'une affaire qui lui tient à coeur, il peut la faire traîner indéfiniment, alors que le meurtre d'un autre sera prescrit après trente en un ans.

C'est tout à fait ça.

Non, précisément, ce n'est pas ça. Personne ici ne prône la pendaison des voleurs de pommes dans le doute du jury.

Posté
Il me semble qu'il y a une dichotomie (une de plus !) dans l'approche de la justice ici. Il y a des maximalistes pour qui le plus important est que rien n'échappe au courroux divin du juge, quitte à faire des dommages collatéraux. Les autres sont minimalistes et pour qui l'important est de ne jamais commettre d'erreur judiciaire, quitte à laisser passer des criminels.

Tel que tu décris les choses, je ne me sens pas maximaliste pour un sou. Au contraire je me suis toujours considéré comme un dangereux gauchiste en la matière: je crois par exemple que tout le monde a une seconde chance et que la première peine prononcée à l'encontre d'un individu ne doit pas l'empêcher d'avoir cette seconde chance. Je crois à la réinsertion. Je crois que les criminels sont des êtres humains comme tout le monde et qu'ils méritent d'être traité en tant que tel, même si leurs crimes sont particulièrement atroces. Je trouve aussi que la plupart des peines prononcées par les juges français en matière criminelle, bien que parmi les plus légères au monde, sont justes et ne doivent pas être alourdies sauf pour les cas de récidives.

Mais on est tous bien d'accord que si on vivait un monde de perfection les deux approches seraient confondues…

Le fait que la justice ne sera jamais parfaite dans son application ne signifie pas que l'on doit renoncer à la pourvoir de principes justes.

Ce qui me frappe chez les maximalistes est qu'ils doivent forcément penser la justice comme parfaite : vu les moyens illimités qu'ils sont prêts à lui conférer pour traquer le criminel et la présentation des choses qu'ils font (où ils savent qu'untel est coupable et qu'il ne faut pas le laisser partir). En tous cas si elle n'est pas parfaite c'est plutôt flippant. Mais si cette justice est si parfaite pourquoi laisserait elle passer entre les mailles de ses filets magiques un criminel qui pourrait attendre la prescription ? Dès lors pourquoi s'élever contre ce principe qui de toute manière ne s'appliquerait jamais vu l'efficacité sans failles de notre système.

D'abord je ne crois pas que, finalement, la prescription soit un principe. C'est plutôt une exception à un principe, qui est que les coupables de crimes doivent être jugés. Mettre la prescription sur le même plan que les grands fondements du droit pénal comme la présomption d'innocence, ne produit guère de sens à mon avis: elle est elle-même une atteinte à un fondement. Elle accorde un droit créance: le droit à ne pas être jugé si "ça fait longtemps". Mettre ce principe au centre d'un système pénal revient à autoriser la collectivité à se substituer à la victime ou à un ayant droit pour accorder le pardon. C'est une erreur sur la nature même du pardon, qui ne peut venir que de ceux qui ont subi le crime et eu à en souffrir, et pas des spectateurs.

Je remarque aussi qu'on est au centre du sujet du fil : "l'avènement de la victime". L'approche maximaliste cadre bien avec cette philosophie car s'il y a une victime, il y a un coupable et il doit y avoir un procès.

Grand Dieu, oui!…

Je crois que tu confonds cause et effet.

Peut être, je réexaminerai la question lors de mon prochain voyage sur place.

Posté
D'abord je ne crois pas que, finalement, la prescription soit un principe. C'est plutôt une exception à un principe, qui est que les coupables de crimes doivent être jugés. Mettre la prescription sur le même plan que les grands fondements du droit pénal comme la présomption d'innocence, ne produit guère de sens à mon avis: elle est elle-même une atteinte à un fondement. Elle accorde un droit créance: le droit à ne pas être jugé si "ça fait longtemps". Mettre ce principe au centre d'un système pénal revient à autoriser la collectivité à se substituer à la victime ou à un ayant droit pour accorder le pardon. C'est une erreur sur la nature même du pardon, qui ne peut venir que de ceux qui ont subi le crime et eu à en souffrir, et pas des spectateurs.

Je crois que le problème vient précisément de là. La prescription n'est ni un droit créance, ni le pardon, ni l'oubli. C'est la formalisation (il faut bien fixer une limite) d'une technique en vue de rendre la vie en société possible. Tu t'identifies au fraudeur et tu vois un délais de prescription comme une sorte de course contre la montre. Je rappelle d'une part qu'il est actuellement de 30 ans au civil et au pénal et que d'autre part si tu as été jugé par contumace la prescription n'entre pas en ligne de compte (et donc le présenter comme un droit de fuite avalisé au bout d'un certain temps n'est pas correct).

Par contre ce qui est central est d'éviter qu'un beau matin un mec se décide d'en poursuivre un autre pour d'obscurs motifs datants de plus x ans. Il y a un moment où on dit stop, ce moment c'est la prescription. Parce que vous me sortez des problèmes grandiloquants (le meurtre, le viol etc.) mais le quotidien de la justice c'est la haie mal taillée entre deux voisins qui ne peuvent pas se blairer.

C'est marrant je n'ai vu personne s'offusquer du fait que la prescription pour les contrôles fiscaux est de seulement trois ans. Vous voulez leur donner plus, que le contrôleur fiscal vous poursuive et vous demande des justifications pour votre moindre dépense en liquide sur les 30 dernières années ?

Invité jabial
Posté

C'est parce que pour la plupart d'entre nous, la fraude fiscale n'est pas légitimement réprimable. Tu utilises ici le sophisme de la question complexe.

Posté
C'est parce que pour la plupart d'entre nous, la fraude fiscale n'est pas légitimement réprimable. Tu utilises ici le sophisme de la question complexe.

Collector !

Invité jabial
Posté

Bah oui désolé, on n'est pas sur le forum de l'UMP ici. Pour un nombre très important d'habitués du forum, l'impôt est illégitime. C'est comme si tu nous demandais pourquoi on ne disait rien sur la prescription concernant les esclaves en fuite.

Posté
Je crois que le problème vient précisément de là. La prescription n'est ni un droit créance, ni le pardon, ni l'oubli. C'est la formalisation (il faut bien fixer une limite) d'une technique en vue de rendre la vie en société possible. Tu t'identifies au fraudeur et tu vois un délais de prescription comme une sorte de course contre la montre. Je rappelle d'une part qu'il est actuellement de 30 ans au civil et au pénal et que d'autre part si tu as été jugé par contumace la prescription n'entre pas en ligne de compte.

La condamnation par contumace ne vaut que si on peut identifier le coupable et la victime, et donc mener un procès. Selon les statistiques officielles de la police, on a en moyenne 450 meurtres par an en France. Le taux d'élucidation est très faible surtout si tu rajoutes les disparitions non élucidées qui sont quasiment tout le temps des meurtres sans que l'on soit obligé de prononcer les mots coupables et victimes. Le taux d'élucidation des crimes prémédités est extraordinairement bas, c'est la réalité. Si en plus on les prescrit…

(et donc le présenter comme un droit de fuite avalisé au bout d'un certain temps n'est pas correct).

Je ne vois pas les choses comme ça. Dans la réalité vraie, en effet si on n'attrape pas un meurtrier après 30ans, on ne l'attrapera vraissemblablement pas après 50 ou 60 ans, c'est sûr. Ce qui est gênant dans la prescription des meurtres c'est ce côté "pardon de la société": tu dis qu'il ne s'agit pas de cela mais je trouve que si. D'ailleurs ta propre définition "formalisation d'une technique en vue de rendre la vie en société possible" va bien dans ce sens là même si tu t'en défend.

D'autre part la justice est le parent pauvre de toutes les régimes soc-dem, met en perspective le budget de la justice avec celui de l'armée (ou même des anciens combattant) tu verras que la justice ça ne coute pas très cher, et qu'une meilleure justice n'implique pas de faire des folies financières.

Par contre ce qui est central est d'éviter qu'un beau matin un mec se décide d'en poursuivre un autre pour d'obscurs motifs datants de plus x ans. Il y a un moment où on dit stop, ce moment c'est la prescription. Parce que vous me sortez des problèmes grandiloquants (le meurtre, le viol etc.) mais le quotidien de la justice c'est la haie mal taillée entre deux voisins qui ne peuvent pas se blairer.

C'est marrant je n'ai vu personne s'offusquer du fait que la prescription pour les contrôles fiscaux est de seulement trois ans. Vous voulez leur donner plus, que le contrôleur fiscal vous poursuive et vous demande des justifications pour votre moindre dépense en liquide sur les 30 dernières années ?

Le sujet du débat c'est la prescription en matière de meurtre (page 4 les interventions de Walter et Taranne). Après on peut parler du reste: effectivement en matière délictuelle et contraventionnelle la prescription permet d'éviter que la justice soit détournée dans le but de nuire à autrui. Cette règle n'est donc pas forcément injuste, mais il faut lui poser des limites: par exemple la victime doit avoir conscience du dommage qui lui a été commis (ce qui ne va pas de soit en matière d'atteinte aux biens). Vu sous cette angle là, il s'agit d'un délai de saisine.

Posté
A la réflexion, si l'être humain possède réellement un instinct religieux, il est dangereux de le refouler parce qu'il va réapparaître là où il n'a rien à chercher, dans la divinisation de phénomènes purement humains, comme ici la justice. C'est cela je crois, que devrait être la laïcité: un équilibre, et non une suppression.

+ 1

Posté
Dans notre système cela a beaucoup moins de sens vu que dans ces affaires c'est déjà un juge (d'instruction) qui décide ou non si il doit y avoir procès, après une longue instruction (et il est toujours possible de faire appel de sa décision). Ensuite ce n'est pas les juges qui décident de l'internement d'office mais les préfets. Le procès (ou ce qui en tiendrait lieu) serait un peu une coquille vide.

Plus précisément, le juge d'instruction se contente d'instruire l'affaire à charge et théoriquement à décharge. Ensuite il remet ses conclusions au parquet et c'est le procureur qui indique dans son réquisitoire si l'on doit se diriger vers une relaxe ou pas.

Posté
Plus précisément, le juge d'instruction se contente d'instruire l'affaire à charge et théoriquement à décharge. Ensuite il remet ses conclusions au parquet et c'est le procureur qui indique dans son réquisitoire si l'on doit se diriger vers une relaxe ou pas.

Schizophrénie quand tu nous tiens…

Invité jabial
Posté

Serait-ce mieux si un juge d'instruction était chargé d'instruire à charge, et l'autre d'instruire à décharge?

Posté
Serait-ce mieux si un juge d'instruction était chargé d'instruire à charge, et l'autre d'instruire à décharge?

Ce qui serait mieux serait d'abandonner la procédure inquisitoire et d'adopter la procédure accusatoire où deux parties via leur avocats s'affrontent, le juge tranchant entre les deux.

Posté
Ce qui serait mieux serait d'abandonner la procédure inquisitoire et d'adopter la procédure accusatoire où deux parties via leur avocats s'affrontent, le juge tranchant entre les deux.

Tout à fait. C'était d'ailleurs une réforme que défendait le libéral Prévost-Paradol au XIXe siècle.

Posté

Est-il imaginable de panacher les deux systèmes, avec par exemple un caractère accusatoire pour la justice civile et commerciale, et inquisitoire pour le pénal ?

Posté
Est-il imaginable de panacher les deux systèmes, avec par exemple un caractère accusatoire pour la justice civile et commerciale, et inquisitoire pour le pénal ?

La question reste : pourquoi faudrait-il que le prévenu avoue quoi que ce soit ?

Posté
Plus précisément, le juge d'instruction se contente d'instruire l'affaire à charge et théoriquement à décharge. Ensuite il remet ses conclusions au parquet et c'est le procureur qui indique dans son réquisitoire si l'on doit se diriger vers une relaxe ou pas.

Je pensais que c'était le juge d'instruction qui décidait du non lieu psychiatrique ? Il me me semble que la relaxe et l'acquittement impliquent un procès préalable et ne sont donc pas concernés par les propositions de Sarkozy, non?

Posté
Je pensais que c'était le juge d'instruction qui décidait du non lieu psychiatrique ? Il me me semble que la relaxe et l'acquittement implique un procès préalable et ne sont donc pas concerné par les proposition de Sarkozy, non?

La relaxe a été proposée pour Sarkozy ?

C'est scandaleux !

  • 3 weeks later...
Posté
Je suis d'accord en partie, mais une fois que la victimme a été soulagée par le procès, il faut protéger le reste de la société.

(…)

Non il ne faut pas de procès pénal pour un irresponsable et un incapable, ce qui ne veut pas dire que le juge ne puisse pas le condanner à être enfermé dans un asile bien souvent pour le reste de ses jours.

De toute façon, dans la plupart des cas de dérangés qui commettent des crimes ce n'est pas la philosophie qui régit le procès pénal qui est à remettre en question c'est simplement qu'il n'y a pas assez de place en asile et pas assez d'infrastructures; du coup on relache les gens et arrive ce qui arrive.

Voilà, et qu'un assassin soit déclaré irresponsable pour des raisons pychiatriques et soit envoyé en HP duquel il ressortira au bout de quelques mois, ledit crime n'étant (je crois) pas inscit dans son casier.

Mais bon, j'ai déjà à plusieurs reprises expliqué pourquoi nombre de psys remettent en cause cette loi pouvant déclarer irresponsable, ne serait-ce que dans l'intérêt même du "malade".

Posté
Va falloir que vous réalisiez que le crime est un acte qui transforme le criminel. Sans parler d'âme immortelle, l'esprit humain se façonne par engagement - pour ceux qui connaissent un peu les dernières théories en psycho cognitive. Ca veut dire concrètement qu'en commettant quelque chose d'horrible, on devient effectivement mauvais. A chaque mal qu'on commet, on devient pire. Au final, on se retrouve devant des êtres humains, certes, mais des êtres humains objectivement mauvais dont il est du devoir de ceux qui en ont le pouvoir de protéger leurs frères innocents. Reculer devant cette responsabilité au nom d'un prétendu pardon universel après l'exécution d'une peine à durée limitée, c'est mettre en danger ses semblables.

D'ailleurs d'autres expériences tendent à montrer que ça peut fonctionner aussi dans l'autre sens.*

(*) Non seulement sur soi mais aussi sur les autres. Effet boule de neige. Rendre un service, par exemple, tend à créer une période où la probabilité pour la personne aidée d'aider à son tour va augmenter.

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