Aller au contenu

Libéraux, conservateurs et transcendance


Messages recommandés

Posté
Eh bien, je pense que ne pas faire de distinction entre les religions révélées, et les pratiques spirituelles de toute sorte est une erreur.

C'est surtout plus confortable intellectuellement.

Posté
Non. Si tu regardes l'humanité tu te rends compte que les religions révélées ont eu un impact sur les hommes que les autres n'ont pas eu. Le bouddhisme est un peu à part. Mais, on ne peut pas mettre sur un même plan l'ensemble des autres croyances.

Jugement historique et donc contingent à mon sens. Les monothéismes (en dehors du judaïsme limité à une communauté) possèdent dans leur configuration doctrinale l'idée que leur dieu est actif dans l'histoire, que sa vérité révélée est unique, que le prosélytisme fait partie des devoirs du croyant, etc. Pour un profane, c'est une belle "machine de guerre" mémétique : si je crois, ma croyance est universelle et il me faut en convaincre tous les autres. Je pense qu'un hindouiste, un confucéen, un shintoïste ou un ancien païen n'avait / n'a évidemment pas la même disposition. Il suffit de voir comment les anciens Grecs ou Romains regardaient avec une certaine indifférence les croyances de leurs voisins, cf par exemple les Histoire d'Hérodote narrant de manière dépassionnée les coutumes des autres peuples.

D'un point de vue conservateur, l'idée qu'une foi née et développée quelque part doivent s'imposer à d'autres fois nées et développées ailleurs est d'ailleurs étrange. Un conservateur du IIe siècle de notre ère aurait dit : laissons tous les peuples dans les croyances qu'ils se donnent, car tels sont les usages. Non ? Mais il est vrai que la dimension "révolutionnaire" du christianisme primitif a été maintes fois revendiquée, y compris par les réformateurs modernes. Cela dit, le christianisme contemporain a bien changé. Mais qu'en est-il au juste du rapport aux autres fois dans les textes doctrinaux du XXe siècle ? Je l'ignore.

Posté
C'est une définition restrictive, je remplacerai au minimum dieu par "agent surnaturel", ce qui permet d'inclure des croyances locales, et nombreuses, en des esprits et âmes, des animaux fantastiques, des ancêtres mythiques, etc. Il me semble que dans son traité classique, Eliade voyait l'animisme ou le chamanisme comme des formes religieuses par excellence. Voir aussi Pascal Boyer.

C'est une distinction entre Dieu, puissance absolue, et entités dotées de certains pouvoirs, demi-dieux. Ne confondons pas tout.

Mircea Eliade traite des mythes.

Non, cela signifie plutôt que tous sont aussi crédibles pour les croyants concernés - et aussi, cf. ci-dessus, que dieu n'est pas un élément nécessaire pour définir un religion, même si les religions majoritaires croient en un dieu. Quand tu regardes cela de l'extérieur et sans aucun souci prosélyte, tu en déduis simplement que l'expérience religieuse de l'humanité revêt des formes très différentes selon les époques et les lieux.

Aucune religion monothéiste ne se préoccupe de définir son Dieu (autrement que par l'être absolu créateur), mais le coran, ce n'est pas l'Evangile, la parole d'Allah n'est pas celle de Jesus.

Ensuite, vous dîtes que les religions revêtent des formes différentes (sublime constatation!). Pas seulement, aussi de contenu.

Enfin, pour en revenir au raisonnement un peu bébête, ce n'est pas parce qu'il y a des religions différentes que toutes sont aussi crédibles pour chaque croyant, et qu'il devrait choisir la sienne comme on lance un dé. Ahmed connaît le Coran et a lu la Bible: ce qu'il en a lu et son expérience de foi personnelle l'améne à Allah, parce qu'il croit que Jésus était l'un des prophètes et pas Dieu, et qu'il n'a pas ressuscité. Les historiens des religions et des corpus religieux distinguent les différents dogmes, et ne s'amusent jamais, par ignorance, à cataloguer les différentes religions comme équivalentes, équiprobables, indistinctes. A la source d'une telle attitude, il y a toujours la même chose: le relativisme.

Votre niveau rhétorique baisse singulièrement, cher ami.

Posté
D'un point de vue conservateur, l'idée qu'une foi née et développée quelque part doivent s'imposer à d'autres fois nées et développées ailleurs est d'ailleurs étrange. Un conservateur du IIe siècle de notre ère aurait dit : laissons tous les peuples dans les croyances qu'ils se donnent, car tels sont les usages. Non ? Mais il est vrai que la dimension "révolutionnaire" du christianisme primitif a été maintes fois revendiquée, y compris par les réformateurs modernes. Cela dit, le christianisme contemporain a bien changé. Mais qu'en est-il au juste du rapport aux autres fois dans les textes doctrinaux du XXe siècle ? Je l'ignore.

Vous persistez à ne pas comprendre que le conservatisme est une réaction politique aux bouleversements de la modernité.

Plus essentiellement, le christianisme n'avait pas vocation à étiqueté politiquement, mais vu qu'il fut la principale cible des Modernes (et en particulier des Lumières), il a de facto été le moteur intellectuel et spirituel du conservatisme. Le terme de "conservateur" n'a de sens qu'après le XVIIIe siècle, mettons, mais il n'en a aucun au XIIe siècle, par exemple.

Posté
Non. Si tu regardes l'humanité tu te rends compte que les religions révélées ont eu un impact sur les hommes que les autres n'ont pas eu. Le bouddhisme est un peu à part. Mais, on ne peut pas mettre sur un même plan l'ensemble des autres croyances.

C'est fort possible, mais ce n'est pas la question.

La question c'est:

est-que la proposition "il vaut vivre et pratiquer une discipline pour pouvoir en parler" ne s'applique qu'aux religions révélées?

Et la réponse est non.

Posté
(…)

Mircea Eliade traite des mythes.

C'est pour cela que son oeuvre classique et monumentale chez Payot s'appelle Traité d'histoire des religions. Allons, arrêtez quand même de dire n'importe quoi et de créer des divisions ad hoc n'existant que dans votre esprit.

Aucune religion monothéiste ne se préoccupe de définir son Dieu (autrement que par l'être absolu créateur), mais le coran, ce n'est pas l'Evangile, la parole d'Allah n'est pas celle de Jesus.

Comme vous le dites si bien : sublime constatation!

Enfin, pour en revenir au raisonnement un peu bébête, ce n'est pas parce qu'il y a des religions différentes que toutes sont aussi crédibles pour chaque croyant, et qu'il devrait choisir la sienne comme on lance un dé. Ahmed connaît le Coran et a lu la Bible: ce qu'il en a lu et son expérience de foi personnelle l'améne à Allah, parce qu'il croit que Jésus était l'un des prophètes et pas Dieu, et qu'il n'a pas ressuscité.

Je n'ai jamais demandé à un croyant de choisir sa religion en jetant un dé. En revanche, je préfère qu'un croyant n'emmerde pas un autre croyant sous prétexte qu'ils n'ont pas la même foi. Prenez votre bâton de pélerin et allez expliquer cela dans le si pacifique, si harmonieux, si exemplaire Moyen Orient où se retrouvent trois monothéismes…

Les historiens des religions et des corpus religieux distinguent les différents dogmes, et ne s'amusent jamais, par ignorance, à cataloguer les différentes religions comme équivalentes, équiprobables, indistinctes. A la source d'une telle attitude, il y a toujours la même chose: le relativisme.

(…)

Cela ne m'intéresse pas de lire un historien des religions qui commence par dire que certaines religions valent mieux que d'autres. Il existe des phénomènes qualifiables de religieux par leurs traits communs : on les étudie, point barre. Ce qu'ont fait des auteurs déjà cités (Eliade, Boyer pour ceux que j'ai lus dans des approches générales sur la religion, il y en a bien sûr plein d'autres).

Posté
C'est HS ici, mais cela fait partie des points que j'aimerais bien creuser. La notion de "comportement rationnel" me semble discutable au sens où il y a toujours des degrés de rationalité dans un comportement, une variation continue plutôt qu'une séparation claire entre ce qui serait rationnel et ce qui ne le serait pas. Je pense que depuis les marginalites, la dimension subjective (éventuellement pas rationnelle du tout) de l'utilité est intégrée dans l'analyse, mais cela m'intéresserait de savoir comment au juste, et ce que cela permet comme prédiction.

[HS] Très rapidement et grossièrement, la rationalité en économie est définie comme la simple capacité pour un individu d'ordonner ses préférences selon au pré-ordre complet au sens mathématique du terme (en particulier les préférences doivent être transitives).

Un comportement est rationnel dans la mesure où les choix opérés par l'individu sont cohérents avec l'ordre de ses préférences, relativement à des moyens matériels donnés et des connaissances (généralement très imparfaites) données.

Effectivement, les préférences sont conçues comme purement subjectives. Il n'est supposé à aucun moment que les choix humains soient pleinement autonomes ni pleinement éclairés, ni que les choix effectués aient des conséquences conformes aux aspirations initiales qui les ont motivés.

Sur le dernier point, je peux ouvrir un fil "l'économie est-elle une science ou un aimable bavardage" dans lequel les quelques prédictions effectivement permises par la théorie seront versées au crédit de la discipline.[/HS]

Posté
Vous persistez à ne pas comprendre que le conservatisme est une réaction politique aux bouleversements de la modernité.

Plus essentiellement, le christianisme n'avait pas vocation à étiqueté politiquement, mais vu qu'il fut la principale cible des Modernes (et en particulier des Lumières), il a de facto été le moteur intellectuel et spirituel du conservatisme. Le terme de "conservateur" n'a de sens qu'après le XVIIIe siècle, mettons, mais il n'en a aucun au XIIe siècle, par exemple.

Je fais l'hypothèse que le conservatisme largo sensu est une disposition psychologique existant de tout temps. Qui peut prendre la forme politique stricto sensu d'un refus de la modernité aujourd'hui (ou d'un simple malaise face à elle).

Vous pensez que l'on doit être conservateur et chrétien par nécessité logique et évidence historique, mais ici même d'autres conservateurs se disent non chrétiens et refusent la référence nécessaire à la transcendance.

Posté
Je fais l'hypothèse que le conservatisme largo sensu est une disposition psychologique existant de tout temps. Qui peut prendre la forme politique stricto sensu d'un refus de la modernité aujourd'hui (ou d'un simple malaise face à elle).

Vous pensez que l'on doit être conservateur et chrétien par nécessité logique et évidence historique, mais ici même d'autres conservateurs se disent non chrétiens et refusent la référence nécessaire à la transcendance.

Qu'ils soient chrétiens ou non, ils sont conservateurs parce qu'ils réagissent à des questions posées aujourd'hui et pas il y a quatre siècles.

Posté
Qu'ils soient chrétiens ou non, ils sont conservateurs parce qu'ils réagissent à des questions posées aujourd'hui et pas il y a quatre siècles.

Dans l'incidente ayant donné lieu à ceté change, je me plaçais au IIe siècle. Tu crois donc qu'un Ancien Romain ne pouvait pas être conservateur et tenir des discours du genre : "la religion de mes pères s'est noyée dans un fatras de cultes orientaux, l'Empereur lui-même n'est plus respecté, la vigueur et la frugalité des fondateurs de ma Ville est perdue dans la mollesse et la facilité" etc. Tu ne conçois pas que ce Romain aurait pu être antichrétien par conservatisme, justement ?

Bref, dès lors quil y a un changement historique, cela développe à mon sens des discours conservateurs et les discours peuvent vouloir conserver des choses différentes.

Posté
C'est pour cela que son oeuvre classique et monumentale chez Payot s'appelle Traité d'histoire des religions. Allons, arrêtez quand même de dire n'importe quoi et de créer des divisions ad hoc n'existant que dans votre esprit.

Eliade a surtout étudié les religions primitives,les mythes et les mystiques, revoyez la liste de ses oeuvres.

Je n'ai jamais demandé à un croyant de choisir sa religion en jetant un dé. En revanche, je préfère qu'un croyant n'emmerde pas un autre croyant sous prétexte qu'ils n'ont pas la même foi. Prenez votre bâton de pélerin et allez expliquer cela dans le si pacifique, si harmonieux, si exemplaire Moyen Orient où se retrouvent trois monothéismes…

Je vous rappelle à ce que vous disiez: il y a tellement de religions qu'il est problématique de dire que la sienne est la seule vraie. Je vous ai expliqué pourquoi c'est idiot. Maintenant, vous passez aux tensions entre religions, ce qui est autre chose. Où voulez-vous en venir (en dehors de répondre à côté), qu'il faudrait abolir les différences de contenu doctrinal pour éviter les antagonismes, ou bien abolir la religion pour éviter les guerres?

Cela ne m'intéresse pas de lire un historien des religions qui commence par dire que certaines religions valent mieux que d'autres. Il existe des phénomènes qualifiables de religieux par leurs traits communs : on les étudie, point barre. Ce qu'ont fait des auteurs déjà cités (Eliade, Boyer pour ceux que j'ai lus dans des approches générales sur la religion, il y en a bien sûr plein d'autres).

Ne le lisez pas, alors. Lisez les historiens qui utulisent la méthode scientifique pour décrire les religions dans l'histoire, et vous remarquerez qu'ils utilisent ce qu'on appelle la distinction, la différentiation et n'aboutissent pas à dire que c'est du pareil au même. Il y a des points communs? :icon_up: Oui, d'abord ce sont des religions, et si on s'intéresse aux trois principales religions monothéistes, ce sont des religions de la Révélation. Points communs n'exclut pas différences, essayez de l'intégrer.

Vous me semblez maintenant bien agité.

Posté
Dans l'incidente ayant donné lieu à ceté change, je me plaçais au IIe siècle. Tu crois donc qu'un Ancien Romain ne pouvait pas être conservateur et tenir des discours du genre : "la religion de mes pères s'est noyée dans un fatras de cultes orientaux, l'Empereur lui-même n'est plus respecté, la vigueur et la frugalité des fondateurs de ma Ville est perdue dans la mollesse et la facilité" etc. Tu ne conçois pas que ce Romain aurait pu être antichrétien par conservatisme, justement ?

Bref, dès lors quil y a un changement historique, cela développe à mon sens des discours conservateurs et les discours peuvent vouloir conserver des choses différentes.

Vous sous-entendiez surtout qu'il était paradoxal pour un chrétien d'être conservateur. Je vous en ai expliqué les raisons, ni plus ni moins.

En tout cas, je persiste à penser le progressisme et le néopaganisme sont du primitivisme.

Posté
Il suffit de voir comment les anciens Grecs ou Romains regardaient avec une certaine indifférence les croyances de leurs voisins, cf par exemple les Histoire d'Hérodote narrant de manière dépassionnée les coutumes des autres peuples.

La narration des voyages d'Ibn Fadhlan à travers la Russie, la Serbie et les pays baltes, au XIIème siècle, est faite sur le même mode.

Posté
D'un point de vue conservateur, l'idée qu'une foi née et développée quelque part doivent s'imposer à d'autres fois nées et développées ailleurs est d'ailleurs étrange. Un conservateur du IIe siècle de notre ère aurait dit : laissons tous les peuples dans les croyances qu'ils se donnent, car tels sont les usages. Non ? Mais il est vrai que la dimension "révolutionnaire" du christianisme primitif a été maintes fois revendiquée, y compris par les réformateurs modernes. Cela dit, le christianisme contemporain a bien changé. Mais qu'en est-il au juste du rapport aux autres fois dans les textes doctrinaux du XXe siècle ? Je l'ignore.

Révolutionnaire, c'est il me semble un bien grand mot qui ne peut que séduire les révolutionnaires actuels se réclamant de la théologie de la libération. Jusqu'en 150 ap JC, les chrétiens se réunissaient dans les synagogues et étaient perçus et se percevaient en tant que juifs. Ce qui a réellement changé la donne, c'est l'adoption du christianisme en tant que religion officielle de l'empire et la lente adoption d'une structure hiérarchique héritée de cet empire.

Posté
Eliade a surtout étudié les religions primitives,les mythes et les mystiques, revoyez la liste de ses oeuvres.

Relisez celle dont je parle au lieu de me parler des autres. Et à nouveau, si vous n'êtes pas d'accord avec les choix d'Eliade dans son traité, vous pouvez expliquer pourquoi il a tort de qualifier ceci ou cela de religion.

Je vous rappelle à ce que vous disiez: il y a tellement de religions qu'il est problématique de dire que la sienne est la seule vraie.

Je vous répondais lorsque vous disiez vous-même : les ignorants seuls parlent de la religion, sans regarder toutes les différences. Sinon, penser que son groupe a la seule, unique et intangible vérité, surtout lorsque celle-ci procède d'une révélation, c'est en effet une disposition d'esprit que je ne partage pas et que je tolère mal lorsqu'elle sort de sa sphère privée (Et ne me parlez pas de la vérité scientifique : elle n'est pas révélée, elle se construit par discussion ouverte, elle fonctionne par contradiction et réfutation, elle accepte d'être provisoire et révisable, elle entend expliquer sans prescrire, etc.)

Maintenant, vous passez aux tensions entre religions, ce qui est autre chose. Où voulez-vous en venir (en dehors de répondre à côté), qu'il faudrait abolir les différences de contenu doctrinal pour éviter les antagonismes, ou bien abolir la religion pour éviter les guerres?

Abolir les religions pour éviter les guerres, cela n'a aucun sens : les hommes trouveront toujours des motifs à cela. Mais ne pas jeter d'huile sur le feu, ce peut être utile en effet. Je vois mal cependant comment les "contenus doctrinaux" des monothéismes peuvent intégrer un pluralisme complet qui serait contradictoire avec le fondement de leur foi, à savoir la vérité révélée dans leurs différents livres sacrés, le caractère unique de dieu, etc. Néanmoins, les autorités religieuses peuvent orienter le comportement des croyants dans le sens d'une plus grande tolérance, ce que certaines ont déjà largement fait (Vatican II par exemple).

Ne le lisez pas, alors. Lisez les historiens qui utulisent la méthode scientifique pour décrire les religions dans l'histoire, et vous remarquerez qu'ils utilisent ce qu'on appelle la distinction, la différentiation et n'aboutissent pas à dire que c'est du pareil au même. Il y a des points communs? :icon_up: Oui, d'abord ce sont des religions, et si on s'intéresse aux trois principales religions monothéistes, ce sont des religions de la Révélation. Points communs n'exclut pas différences, essayez de l'intégrer.

Non, on parle des religions en général. Les trois religions monothéistes sont par définition distinctes et ont ceci de particulier qu'elles se réfèrent au même Livre, au moins pour le récit fondateur sur la création du monde. Cela seul permet aisément de les différencier sur la base d'une ascendance commune. Pour autant, affirmer que les différentes variantes de l'animisme, de l'hindouisme, du bouddhisme et de quelques dizaines d'autres cultes ou sagesses à base métaphysique existants dans le monde ne sont pas des religions serait à mes yeux aberrant, digne des discours ethnocentristes que l'on croyait pouvoir tenir quand on colonisait des sauvages. Depuis six siècles et la conquête du monde par l'Occident, on est quand même sorti de cette logique d'infériorisation fondée sur le mépris, l'ignorance ou le fanatisme.

Posté
Révolutionnaire, c'est il me semble un bien grand mot qui ne peut que séduire les révolutionnaires actuels se réclamant de la théologie de la libération. Jusqu'en 150 ap JC, les chrétiens se réunissaient dans les synagogues et étaient perçus et se percevaient en tant que juifs. Ce qui a réellement changé la donne, c'est l'adoption du christianisme en tant que religion officielle de l'empire et la lente adoption d'une structure hiérarchique héritée de cet empire.

Je mettais des guillemets. Mais lisez le Discours véritable de Celse, notamment sa partie plutôt sociale et politique, vous verrez comment un lettré de l'époque regardait les premiers Chrétiens : des agitateurs dangereux, refusant le service militaire, refusant la fidélité à l'institution impériale et l'Empereur lui-même, croyant de manière fanatique à la seule vérité de leur doctrine et supportant mal la co-existence des autres, des citoyens instables et non fiables… Evidemment, il n'y eut pas l'équivalent de la Révolution française, la christianisation a été étalée sur des siècles.

Plus généralement, il paraît assez évident que les institutions humaines ne sont pas éternelles et que leur déclin local s'accompagne toujours d'une attitude conservatrice chez certains, attitude tendant à désigner (de manière exacte ou inexacte) telle ou telle cause au déclin observé. Le coup de tonnerre de 1789 a permis au conservatisme moderne de désigner immédiatement son ennemi, comme Burke le fit. Mais, et nous l'évoquions à propos de Dumézil, il me semble qu'un conservateur de 2008 pourrait aussi bien voir dans le capitalisme un agent de dissolution des moeurs et de déclin des institutions. Car les vieux-républicains athées comme ennemi principal, c'est franchement daté, à part certains francs-macons il n'y en a plus guère. Non ?

Posté
Relisez celle dont je parle au lieu de me parler des autres. Et à nouveau, si vous n'êtes pas d'accord avec les choix d'Eliade dans son traité, vous pouvez expliquer pourquoi il a tort de qualifier ceci ou cela de religion.

On ne discute pas d'Eliade, mais relisez la liste de ses oeuvres et vous verrez qu'il a surtout écrit sur le Sacré en général.

Je vous répondais lorsque vous disiez vous-même : les ignorants seuls parlent de la religion, sans regarder toutes les différences. Sinon, penser que son groupe a la seule, unique et intangible vérité, surtout lorsque celle-ci procède d'une révélation, c'est en effet une disposition d'esprit que je ne partage pas et que je tolère mal lorsqu'elle sort de sa sphère privée (Et ne me parlez pas de la vérité scientifique : elle n'est pas révélée, elle se construit par discussion ouverte, elle fonctionne par contradiction et réfutation, elle accepte d'être provisoire et révisable, elle entend expliquer sans prescrire, etc.)

Oui, les ignorants ne font pas de différences entre les relgions, et confondent culte de Mithra, boudhisme et relgion révèlée.

Pour le reste, vous nous faîtes part de vos sentiments, ce qui n'est pas vraiment le sujet, mais on commence à avoir l'habitude.

Abolir les religions pour éviter les guerres, cela n'a aucun sens : les hommes trouveront toujours des motifs à cela. Mais ne pas jeter d'huile sur le feu, ce peut être utile en effet. Je vois mal cependant comment les "contenus doctrinaux" des monothéismes peuvent intégrer un pluralisme complet qui serait contradictoire avec le fondement de leur foi, à savoir la vérité révélée dans leurs différents livres sacrés, le caractère unique de dieu, etc. Néanmoins, les autorités religieuses peuvent orienter le comportement des croyants dans le sens d'une plus grande tolérance, ce que certaines ont déjà largement fait (Vatican II par exemple).

Les divergences doctrinales sont irréductibles, renseignez-vous de plus près, ne restez pas à ce stade d'observateur lointain. Je vous signale en particulier que ce travail d'examen interreligieux s'effectue déjà (merci tout de même pour l'idée!) Maintenant, si vous en avez à remontrer sur les différences que les théologiens, savants musulmans, et rabbins constatent sur leurs doctrines…

Non, on parle des religions en général. Les trois religions monothéistes sont par définition distinctes et ont ceci de particulier qu'elles se réfèrent au même Livre, au moins pour le récit fondateur sur la création du monde. Cela seul permet aisément de les différencier sur la base d'une ascendance commune. Pour autant, affirmer que les différentes variantes de l'animisme, de l'hindouisme, du bouddhisme et de quelques dizaines d'autres cultes ou sagesses à base métaphysique existants dans le monde ne sont pas des religions serait à mes yeux aberrant, digne des discours ethnocentristes que l'on croyait pouvoir tenir quand on colonisait des sauvages. Depuis six siècles et la conquête du monde par l'Occident, on est quand même sorti de cette logique d'infériorisation fondée sur le mépris, l'ignorance ou le fanatisme.

Saissisez-vous une différence de nature entre relgions primitives, mythique, mystiques et religions révélèes, au moins?

Pour le reste, vous délirez et vous mettez au niveau d'un débat sur skyblog…

Posté

A propos de Celse dont je parlais avec Harald, je l'ai trouvé en ligne (hélas très mal présenté). Voici un extrait amusant, et typiquement conservateur à mon sens (il s'adresse à l'époque aux Chrétiens, nous sommes au IIe siècle) :

"S'il était possible que tous les peuples qui habitent l'Europe, l'Asie, l'Afrique, tant Grecs que Barbares, jusqu'aux extrémités du monde, fussent unis par la communauté d'une même foi, peut-être une tentative du genre de la vôtre aurait-elle chance de réussite; mais cela est pure chimère, étant donnée la diversité des populations et de leurs coutumes. Qui se met pareil dessein en tête témoigne par cela même qu'il est aveugle. Soutenez l'empereur de toutes vos forces, partagez avec lui la défense du droit; combattez pour lui, si les circonstances l'exigent; aidez-le dans le commandement de ses armées. Pour cela, cessez de vous dérober aux devoirs civils et au service militaire; prenez votre part des fonctions publiques, s'il le faut, pour le salut des lois et la cause de la piété."

http://www.cgagne.org/celse.htm

Posté
!Tu as déjà tout le PS et une partie de l'UMP.

Outre que je ne pensais pas uniquement à la France, je doute que les admonestations des politiciens aient la moindre influence notable sur les comportements. Franchement, vous estimez à combien la proportion de jeunes gens qui entrent en transe laïque et se découvrent une vocation athée en écoutant Hollande, Emmanuelli ou Delanoë ? Par ailleurs, la question religieuse occupe une place minime dans les débats par rapport aux débuts de la république.

(…)

Pour le reste, vous délirez et vous mettez au niveau d'un débat sur skyblog…

Lol

(commentaire skyblogien sur l'à-propos de votre jugement)

Posté
Mais, et nous l'évoquions à propos de Dumézil, il me semble qu'un conservateur de 2008 pourrait aussi bien voir dans le capitalisme un agent de dissolution des mœurs et de déclin des institutions. Car les vieux-républicains athées comme ennemi principal, c'est franchement daté, à part certains francs-macons il n'y en a plus guère. Non ?

Ce n'est pas faux. Un certain capitalisme, je pense là au capitalisme boursier, participe effectivement à ce déclin. Ceci dit, comme l'a rappelé Walter, la laïcité républicaine tient une part non négligeable dans le discours de l'UMPS.

Posté
Qu'ils soient chrétiens ou non, ils sont conservateurs parce qu'ils réagissent à des questions posées aujourd'hui et pas il y a quatre siècles.

Maritain considère d'ailleurs que la modernité est une perversion du christianisme, une hérésie qui a marché.

D’une mécompréhension de la bonne nouvelle, à savoir que nous sommes les « images de Dieu » et que « Dieu s’est fait homme ». Pour faire bref : quand l’apôtre dit « devenez participants de la nature divine » (II Pierre 1,4), l’homme moderne entend susurrer le serpent : « vous serez comme des dieux » (Gen. 3,4). Il s’auto divinise au lieu de se déifier. Il se figure que la liberté des enfants de Dieu consiste à se donner à soi même les lois de son existence (les fameuses « valeurs » que chacun se choisit). Mais pour le faire, il n’a plus de référence. Car ni la nature –réduite au désir animal- ni la grâce –trop lointaine- ne lui dictent plus rien.

Cette double destruction, la modernité l’a opérée progressivement : elle a commencé par déconsidérer la nature humaine au nom d’une grâce tyrannique (Luther), si bien que lorsqu’elle a rejeté cette grâce extérieure, elle s’est rabattue sur une nature réduite à l’animalité (Rousseau). Le résidu, c’est l’homo democraticus, revendiquant chaque jour les nouveaux objets de sa pride.

Posté
A ma connaissance il n'existe pas "d'économie du sexe" qui semble une invention de l'auteur.

Si, si.

On en revient à mon sens à ce que j'avais souligné dans un post un peu perdu au milieu de la présente discussion, et à partir du texte de Russell Kirk posté par Harald : il faudrait creuser du côté des états d'esprits et des psychologies, pas seulement des contenus propositionnels. […]

C'est une idée que je suis depuis un bout de temps, maintenant.

C'est HS ici, mais cela fait partie des points que j'aimerais bien creuser. La notion de "comportement rationnel" me semble discutable au sens où il y a toujours des degrés de rationalité dans un comportement, une variation continue plutôt qu'une séparation claire entre ce qui serait rationnel et ce qui ne le serait pas. Je pense que depuis les marginalites, la dimension subjective (éventuellement pas rationnelle du tout) de l'utilité est intégrée dans l'analyse, mais cela m'intéresserait de savoir comment au juste, et ce que cela permet comme prédiction.

Au sens subjectiviste de la rationalité faible, "avoir un comportement rationnel" signifie en gros "avoir des raisons d'avoir ce comportement".

Pour plus de détails sur Mises, ses oeuvres sont disponibles sur le Net en Anglais, et la plupart y sont aussi traduites en Français.

Posté
Depuis six siècles et la conquête du monde par l'Occident, on est quand même sorti de cette logique d'infériorisation fondée sur le mépris, l'ignorance ou le fanatisme.

Ce n'est pas l'impression que j'ai en vous lisant.

Invité Arn0
Posté
Tu raisonnes comme s'il fallait rejeter en bloc l'Ancien Régime ("les crimes institutionnels de l'Ancien Régime", c'est d'ailleurs un peu nébuleux comme accusation), au même titre qu'un système totalitaire - et tu voudrais en gros que je critique comme tel l'Ancien Régime, puisque tu me reproches de cibler mes critiques sur tel ou tel monarque. Par là, tu prouves que tu raisonnes de façon binaire, alors qu'il n'y a pas de symétrie possible.

Mais non c'est tout le contraire justement : ce que je te reproches c'est de défendre en bloc l'Ancien Régime. Le préférer à l'actuelle gloutonnerie étatique c'est une chose, en minimiser ou en relativiser systématiquement les tares* c'en est une autre.

*par tares de l'Ancien régime je parle évidement de ce qui a fait système pendant une longue période (le servage ou la traite des noirs par exemple) et non de ce que l'on peut peut attribuer à tel ou tel personne à un moment donné.

Posté
[HS] (…)

Sur le dernier point, je peux ouvrir un fil "l'économie est-elle une science ou un aimable bavardage" dans lequel les quelques prédictions effectivement permises par la théorie seront versées au crédit de la discipline.[/HS]

Oui, ce serait intéressant.

Ce n'est pas l'impression que j'ai en vous lisant.

Et vice-versa : j'ai l'impression que si l'on creuse un peu les pensées des uns et des autres, on aboutira vite à l'idée que les monothéismes sont la seule vraie foi "sérieuse", le reste étant un bric à brac plus ou moins mystique destiné à disparaître un jour dans les poubelles de l'histoire.

Posté
Maritain considère d'ailleurs que la modernité est une perversion du christianisme, une hérésie qui a marché :

l’homme moderne (…) se figure que la liberté des enfants de Dieu consiste à se donner à soi même les lois de son existence (les fameuses « valeurs » que chacun se choisit). Mais pour le faire, il n’a plus de référence.

Maritain n'est pas le seul : Nietzsche, sur l'autre bord, voit la même chose, sauf qu'il en appelle à purger la modernité de ses derniers résidus chrétiens laïcisés.

Sur le propos en gras : si être conservateur, c'est l'idée que l'homme doit subir les lois de l'existence et ne pas choisir ses valeurs de vie, on comprend tout de même que la modernité ait connu un beau succès, pas seulement à cause d'une méchante Révolution athée. Même si l'on considère les humains modernes comme un troupeau de veaux manipulés par leur Etat, la perspective d'en faire un troupeau de veaux manipulés par une Eglise n'a évidemment rien d'enthousiasmant…

Posté
Mais non c'est tout le contraire justement : ce que je te reproches c'est de défendre en bloc l'Ancien Régime. Le préférer à l'actuelle gloutonnerie étatique c'est une chose, en minimiser ou en relativiser systématiquement les tares* c'en est une autre.

*par tares de l'Ancien régime je parle évidement de ce qui a fait système pendant une longue période (le servage ou la traite des noirs par exemple) et non de ce que l'on peut peut attribuer à tel ou tel personne à un moment donné.

Je crois surtout que tu me fais un beau procès d'intention pour essayer de te rattraper. Tu n'acceptes surtout pas d'avoir été pris en défaut d'ignorance sur certains sujets (au hasard, les cathares…).

Et vice-versa : j'ai l'impression que si l'on creuse un peu les pensées des uns et des autres, on aboutira vite à l'idée que les monothéismes sont la seule vraie foi "sérieuse", le reste étant un bric à brac plus ou moins mystique destiné à disparaître un jour dans les poubelles de l'histoire.

Ne pas adhérer à une conception syncrétiste de la foi n'a rien de fanatique, c'est une simple question de bon sens. De même, il est logique qu'un athée soit athée complètement, et pas en plus un petit peu catholique, bouddhiste ou sunnite.

Donc, quand je parlais de votre fanatisme et de votre mépris, je me référais simplement à votre condescendance de prétendu experts qui, du haut de sa présumée supériorité intellectuelle, va expliquer aux croyants comment ils fonctionnent.

Invité Arn0
Posté
Je crois surtout que tu me fais un beau procès d'intention pour essayer de te rattraper. Tu n'acceptes surtout pas d'avoir été pris en défaut d'ignorance sur certains sujets (au hasard, les cathares…).
De mémoire sur les cathares je te reprochais de minimiser le crime que fut la croisade sous prétexte qu'eux-mêmes étaient blâmables (comme si c'était une excuse) ; je ne vois donc pas trop où j'ai fait preuve d'ignorance (d'autant j'évite les détails historiques avec toi car je ne suis pas idiot : je sais que tu es bien meilleur en histoire que moi et que tu vas profiter de mes erreurs et imprécisions pour discréditer mes propos, comme tu le fais là).
Posté
Ne pas adhérer à une conception syncrétiste de la foi n'a rien de fanatique, c'est une simple question de bon sens. De même, il est logique qu'un athée soit athée complètement, et pas en plus un petit peu catholique, bouddhiste ou sunnite.

(…)

Je suis athée et j'accepte les croyances tant qu'elles ne prétendent imposer leur règles de force, aucun syncrétisme de ma part et aucune exigence de syncrétisme de la part des autres.

Vous ne faits pas la différence entre avoir une religion n'ayant aucun avis particulier sur les autres religions, et avoir une religion prétendant dans ses textes fondateurs que toutes les autres sont fausses ? Vous avez déjà croisé des hindouistes ou des shintoistes ou des confucéens essayant de vous convertir parce que leurs textes affirment qu'ils doivent vous éclairer de leur vraie foi et que la votre est une superstition ? Puisque vous êtes fort en histoire, en dehors du christianisme et l'islam, donc les deux grands monothéismes de masse, quelles sont les autres religions ayant posé pied sur tous les continents, souvent avec des armées, dans la ferme intention de convertir de gré ou de force des populations locales, ayant fait de cela toute leur raison d'être historique ? A part le bouddhisme, dont l'éthique est non-violente et la diffusion surtout asiatique, je n'en connais pas. Il y eut Rome, mais c'était un pouvoir politique plus que religieux, assez respectueux des us, coutumes et croyances locales. Il y eut de grandes invasions, mais elles visaient à piller plus qu'autre chose. Et idéologiquement, il y eut le communisme, dont j'ai déjà signalé que je le considérais comme un avatar tardif, athée et raté des anciennes mentalités judéo-chrétiennes.

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...