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Un collège peut-il porter le nom d'un écrivain réactionnaire ?


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Un collège peut-il porter le nom d'un écrivain réactionnaire ?

L'écrivain Kléber Haedens aura un collège à son nom à la Garenne-Colombes dans les Hauts-de-Seine (92). Le conseil général, à majorité UMP, a voté pour ce choix de Philippe Juvin, maire UMP de la ville.

Verts, PS et PC se sont prononcé contre, en accord avec le MoDem qui a condamné la décision, qualifiant Haedens d'auteur de « la mouvance maurrassienne, nationaliste et royaliste ».

Kléber Haedens était-il un de ces affreux qui, comme Céline, ne mérite pas de voir son nom sur une plaque ? Il est d'abord un écrivain oublié.

A juste 30 ans, Kléber Haedens publie une érudite « Histoire de la littérature française », commandée par l'éditeur René Julliard. Le jeune critique littéraire publie son oeuvre majeure en 1943. En 1988, Le Quotidien de Paris salue sa réédition, préfacée par l'académicien Michel Déon :

« Kléber Haedens n'a exclu personne, même pas les vieux auteurs grincheux et ennuyeux, de la fête à laquelle il nous convie. Il réussit à faire revivre les morts en les revêtant du corps glorieux de leurs brillantes années. »

Philippe Juvin, maire de la Garennes-Colombes, en a fait son livre de chevet: « C'est une histoire subjective écrite par un anarchiste littéraire. Il avait des passions littéraires. »

Kléber Haedens : « bougrement, joyeusement » réactionnaire

L'un de ses projets pour le futur collège est de le faire figurer en bonne place dans le programme scolaire. Ce qui lui a valu les foudres du MoDem :

« Cet ouvrage met notamment en cause la pensée des philosophes des Lumières, qui ont inspiré la Révolution et les fondements de notre République. Philippe Juvin, qui décrit sur son blog cette « Histoire de la littérature française » comme « le premier des tous les livres », souhaiterait d'ailleurs que cet ouvrage soit distribué à tous les enfants entrant en sixième pour 'développer leur esprit critique' ! »

Une attaque qui agace le maire amoureux des lettres : « Mais sur le plan politique, il n'y a rien, il n'a jamais rien écrit de politique. » Et de défier ses adversaires de trouver un passage qui pose problème. « J'ai cherché, fait des enquêtes. Il n'y a rien. Ils n'ont jamais lu Kléber Headens. » (Ecouter le son)

Réac, Kléber Haedens? « Bougrement. Et joyeusement. Réactionnaire de tempérament, d'instinct, par refus d'être dupe (…) Haedens, à l'image de Daudet [Léon, écrivain et polémiste d'extrême-droite, ndlr] s'impose comme un lyrique mais d'un lyrisme distinct du polémiste, plus en retrait, boudant au fracas politique », écrit Eric Vatre, spécialiste des figures maurrassiennes, dans le « Quotidien de Paris » en 1986.

Maurras, « l'amant de la beauté pleine et entière »

Maurrassien, Kléber Haedens ? Copain de Maurice Blanchot, de Drieu la Rochelle et d'autres écrivains de droite, il était proche de Charles Maurras, a collaboré à plusieurs publications d'extrême-droite, notamment à L'Action française où il tenait la rubrique culturelle. Kléber Haedens écrit du chef de file des nationalistes et monarchistes de l'époque:

« Maurras n'est pas seulement le défenseur de l'intelligence et de la raison, l'ennemi intrépide de la bêtise, il est aussi l'amant de la beauté pleine et entière. »

Philippe Juvin, sur la défensive,assure que pendant la guerre, Haedens a servi de « boîte aux lettres » à Pierre de Bénouville, écrivain, homme politique et résistant (ex de L'Action française). Ajoute qu'à la Libération, le chroniqueur littéraire, fou de rugby, jouait au tennis avec Jacques Chaban-Delmas :

« Vous imaginez Chaban-Delmas, général de la Libération, jouer au tennis avec un type qui aurait fait des choses horribles pendant la guerre? Tout ça est décalé. »

Certes, Kléber Haedens avait de mauvaises fréquentations, mais jamais il ne s'était attiré de telles foudres de son vivant. Il a obtenu le prix Interallié pour « L'été finit sous les tilleuls » et le prix de l'Académie française pour « Adios ». Dans les années 80, un prix Kléber-Haedens avait été fondé par la fondation Mumm. Parmi les lauréats, Antoine Blondin.

Un mastodonte hédoniste, cultivé, provincial

Ses livres, romans et recueils d'articles ou de pensées, ont étés réedités après sa mort, et certains sont encore disponible à la vente. Son « Histoire de la littérature française », érudite et indocile, éreinte quelques monuments. De Victor Hugo, Kléber Haedens écrit :

« Son théâtre, construit sur l'indigente pensée qu'il est urgent de marier le grotesque et le terrible, le bouffon et le sublime, semble avoir été inventé par un spadassin de mélodrame en délire. On l'excuse en disant que les vers sont beaux. Ce n'est pas vrai. » :icon_up:

Plus loin, il célèbre Gérard de Nerval, Max Jacob, Corneille, Malraux, Théophile de Viau et témoigne ainsi de son grand amour de la lecture. Qu'il transmet merveilleusement au lecteur.

Ses portraits parus dans la presse ou dans la biographie qui lui a été consacrée par Etienne de Montety - directeur du Figaro littéraire - racontent un mastodonte hédoniste, cultivé, provincial, fou de rugby, d'écriture et de dîners avec ses copains.

Peut-on avoir été un mastodonte hédoniste, cultivé etc. et avoir été monarchiste et nationaliste ? Oui. Peut-on avoir été brillant et d'extrême-droite ? Oui. Et les écrivains Georges Bernanos, Maurice Blanchot et Maurice Barrès ont bien des établissements scolaires à leur noms.

http://www.rue89.com/2008/10/23/un-college-peut-il-porter-le-nom-dun-ecrivain-reactionnaire

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L'évènement dans cette histoire, c'est la confirmation de ce dont on se doutait depuis un petit moment: le MoDem est un parti de gauche, ou qui cherche à nouer des liens avec la gauche. Pour le reste, le dernier paragraphe résume admirablement la question, et la liste pourrait du reste être allongée.

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J'y vois aussi (et surtout) une polémique lamentable qui témoigne de l'orgueil des édiles… J'aime cet écrivain, on mettra donc son nom au fronton d'une école; j'aime pas ses idées, pouf, aux oubliettes de la République.

Invité rogermila
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  climax a dit :
J'y vois aussi (et surtout) une polémique lamentable qui témoigne de l'orgueil des édiles… J'aime cet écrivain, on mettra donc son nom au fronton d'une école; j'aime pas ses idées, pouf, aux oubliettes de la République.

Le PCF ne se prive pas dans les villes où il a le pouvoir d'utiliser des noms qui créent la polémique. Collèges ou gymnases Salvador Allende, boulevard de Stalingrad, rue Maurice Thorez etc…

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  rogermila a dit :
Le PCF ne se prive pas dans les villes où il a le pouvoir d'utiliser des noms qui créent la polémique. Collèges ou gymnases Salvador Allende, boulevard de Stalingrad, rue Maurice Thorez etc…

Un connaisseur de Guyancourt ?

Si oui, tu a certainement oublié le collège Robespierre, a deux pas de la halte garderie Allende et proche du square des martyrs de Soweto (je n’exagère pas…)

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Il y a bien des collèges et des lycées Charles de Gaulle.

Et si Charles n'est plus considéré comme un réactionnaire par la gauche mais ou va-t-on.

Invité rogermila
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  neuneu2k a dit :
Un connaisseur de Guyancourt ?

Non je ne parlais pas de cette ville que je ne connais que de nom .

Ce qui prouve bien qu'il y en a partout, dans des dizaines de communes dirigées par le PCF !

Dans ma commune la Droite, revenue au pouvoir, a effacé une rue portant l'appelation rue de Stalingrad ….pour lui donner un nom de fleur !

De surcroit, il y a un phénomène psychologique: Pour les agences immobilières un appart situé dans une rue de Stalingrad se vendra toujours moins bien qu'un autre situé rue de de la Reine Victoria ou rue de Genève ou avenue Victor Hugo.

idem pour les écoles, un collège Salvador Allende attirera une méfiance des parents.

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  Taranne a dit :
L'évènement dans cette histoire, c'est la confirmation de ce dont on se doutait depuis un petit moment: le MoDem est un parti de gauche, ou qui cherche à nouer des liens avec la gauche. Pour le reste, le dernier paragraphe résume admirablement la question, et la liste pourrait du reste être allongée.

C'est un parti de droite en trahison permanente.

  john_ross a dit :
Et si Charles n'est plus considéré comme un réactionnaire par la gauche mais ou va-t-on.

Bah c'est le cas. Je me demande qui traiterait De Gaulle de réactionnaire.

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  Apollon a dit :
C'est représentatif de la gauche ?

Pas pour vous?

Vous connaissez beaucoup de gens de gauche qui ne considèrent pas un militaire comme un réactionnaire?

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  john_ross a dit :
Vous connaissez beaucoup de gens de gauche qui ne considèrent pas un militaire comme un réactionnaire?

Oui.

Invité rogermila
Posté
  john_ross a dit :
Vous connaissez beaucoup de gens de gauche qui ne considèrent pas un militaire comme un réactionnaire?

non.

Posté
  john_ross a dit :
Vous connaissez beaucoup de gens de gauche qui ne considèrent pas un militaire comme un réactionnaire?

Oui

Posté
  john_ross a dit :
Vous connaissez beaucoup de gens de gauche qui ne considèrent pas un militaire comme un réactionnaire?

Au hasard : Ségolène Royal ?

EDIT : devancé par Le Santon !

Et Chavez ?

Posté
  Taranne a dit :
L'évènement dans cette histoire, c'est la confirmation de ce dont on se doutait depuis un petit moment: le MoDem est un parti de gauche, ou qui cherche à nouer des liens avec la gauche. Pour le reste, le dernier paragraphe résume admirablement la question, et la liste pourrait du reste être allongée.

Peut-on être brillant et d'extrême droite ? Je dirais oui.

Peut-on être brillant, d'extrême droite et avoir un bon jugement politique ? Je réponds non.

Posté
  neuneu2k a dit :
Un connaisseur de Guyancourt ?

Si oui, tu a certainement oublié le collège Robespierre, a deux pas de la halte garderie Allende et proche du square des martyrs de Soweto (je n’exagère pas…)

Euh, enfin à Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux (92), villes censées être de droite, il y a un quai de Stalingrad des deux côtés de la Seine.

Jackpot!

Posté
  Normous a dit :
Euh, enfin à Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux (92), villes censées être de droite, il y a un quai de Stalingrad des deux côtés de la Seine.

Jackpot!

Certes, mais Stalingrad, c'est "une victoire alliée" tout ça… pour beaucoup, ce n'est pas connoté bolcho…

Posté

Sans surprise, l'existence d'avenues Maurice Thorez un peu partout ou du stade Lénine à Alfortville ne semble pas donner lieu à de telles polémiques.

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  roubachov a dit :
Peut-on être brillant et d'extrême droite ? Je dirais oui.

Peut-on être brillant, d'extrême droite et avoir un bon jugement politique ? Je réponds non.

C'est quoi "un bon jugement politique" ?

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Haedens est un excellent romancier. Cette cabale débile orchestrée par les couilles molles du modem ne mérite pas une heure d'attention. Par contre, il y a des coups de pied au cul qui se perdent.

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Il faut noter que l'armée est une de ces notions qui a circulé entre la gauche et la droite.

  xara a dit :
Sans surprise, l'existence d'avenues Maurice Thorez un peu partout ou du stade Lénine à Alfortville ne semble pas donner lieu à de telles polémiques.

Des baptêmes récents ?

Invité rogermila
Posté
  neuneu2k a dit :
Certes, mais Stalingrad, c'est "une victoire alliée" tout ça… pour beaucoup, ce n'est pas connoté bolcho…

Pourtant à Paris, la rue de Léningrad qui partait de Saint Lazare jusqu'à la Place Clichy est redevenue rue de Saint-Petersbourg sous Chirac ou Tibéri .

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  rogermila a dit :
Pourtant à Paris, la rue de Léningrad qui partait de Saint Lazare jusqu'à la Place Clichy est redevenue rue de Saint-Petersbourg sous Chirac ou Tibéri .

Il y a deux Stalingrad: la ville, et l'évènement historique.

La ville a changé de nom ou plutôt retrouvé le sien, à savoir Volvograd. Mais on ne peut pas débaptiser un évènement historique.

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  Taranne a dit :
La ville a changé de nom ou plutôt retrouvé le sien, à savoir Volvograd.

Non, Volvograd c'est la ville où se fabrique la voiture.

:icon_up:

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  Normous a dit :
Euh, enfin à Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux (92), villes censées être de droite, il y a un quai de Stalingrad des deux côtés de la Seine.

Jackpot!

Enfin, Issy a été un ville communiste pendant très longtemps, jusqu'à l'élection de Dédé Santini. C'était une ville ouvrière et populaire il y a encore 30 ans de cela. Si, si je vous jure

Après, une rue de Stalingrad ne me choque pas trop, car cette victoire a été essentielle pour vaincre le nazisme… Par contre les square Maurice Thorez ou les parcs Lénine devraient disparaître, la cause est entendue

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  Lucilio a dit :
Non, l'ancien nom était Tsaritsine. Et c'est Volgograd.

Comment dit-on "Nobody's perfect" en russe?

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