glouglou Posté 27 décembre 2005 Signaler Posté 27 décembre 2005 Je vous soumets ce texte afin que vous me disiez votre opinion sur le sujet. J'ai tenté une approche économique du problème. Je compte d'ailleurs probablement écrire d'autres textes sur ce thème et sa littérature dérivée en économie sur un blog pour l'instant vide… (alea.hautetfort.com) Il s'agit d'une réflexion que je me suis fait en achetant des cadeaux pour noël. Avez-vous remarqué que le prix moyen des disques récents hors prix verts est de 23 euros, soit plus de 150 francs? On entend souvent dire que face à la concurrence des peer to peer, les maisons de disques devraient baisser leurs prix. Cette réponse est trop simple. Voici ma modeste théorie. Il est possible de dispatcher les consommateurs sur deux axes: le premier mesurant la valorisation de la musique par les individus (c'est-à-dire le prix maximal qu'ils consentiraient à payer si le piratage était impossible), et le second le coût généralisé de la copie, qui synthétise le temps de recherche, l'attente, les connaissances en informatique, la peur des représailles judiciaires et le respect des artistes. Par coût de la copie, je n'entends donc pas seulement le prix des CD-vierges ou celui d'un disque dur, qui ne coûte quasiment rien si on le divise par le nombre de CD que l'on peut enregistrer dessus. Quatre groupes peuvent donc être identifiés: - ceux qui ont une valorisation élevée et un coût de la copie élevé. - ceux qui ont une valorisation élevée et un coût de la copie faible. - ceux qui ont une valorisation faible et un coût de la copie élevé. - ceux qui ont une valorisation faible et un coût de la copie faible. Les prix fixés par les maisons de disques dépendent de la corrélation entre ces deux variables, c'est-à-dire de la répartition des consommateurs entre ces quatre groupes. Un étudiant pour qui le piratage a un coût nul n'ira pas acheter des disques à 15 euros au lieu de 23. En revanche, un individu qui travaille et qui n'envisage pas de se servir d'un peer to peer continuera d'acheter des disques quelque soit leur prix. Il est tout à fait possible de supposer pour ces raisons que la demande est (partiellement) inélastique à une baisse des prix. Pire, il est également possible de penser que la meilleure réponse de l'industrie musicale est d'augmenter les prix, au moins pour certains artistes ou certains styles musicaux. L'industrie musicale tenait déjà compte avant le développement du peer to peer des valorisations différentes des consommateurs pour choisir un prix optimisant le profit, ou le chiffre d'affaires puisque les coûts marginaux sont négligeables. De là découle la formation du prix moyen des disques. C'est ainsi que certains consommateurs étaient prêts à payer davantage pour acquérir leurs disques tandis que d'autres les achetaient juste au prix au delà duquel ils ne les auraient pas achetés. Si cette dernière catégorie de consommateurs préfère maintenant pirater les disques, il s'ensuit que les consommateurs restants, moins enclins à télécharger sur un peer to peer, ont une valorisation moyenne plus élevée qu'auparavant. Bref, pour simplifier, s'il ne reste que la catégorie "haute" des consommateurs, la meilleure stratégie est d'élever le prix. Celà dit, tout dépend de la répartition des consommateurs sur les deux axes valorisation / coût de la copie. Des théories concurrentes existent à ce sujet. On peut notamment observer que les individus qui téléchargent de la musique sur internet continuent parfois d'acheter des CD en grande quantité (par le même principe que le fan qui en plus d'acheter les albums officiels cherche à acquérir les bootlegs). A ce propos, une analyse de qui en France achète et écoute quoi serait éclairante (je remercie d'avance ceux qui me dirigeront vers une telle étude) car elle permettrait une évaluation pour chaque style musical des conséquences économiques du peer to peer.
h16 Posté 28 décembre 2005 Signaler Posté 28 décembre 2005 Une remarque cependant : plus vous augmentez le prix du CD, plus l'illégal devient rentable (par différence, et aussi parce que peut s'instaurer un marché parallèle). En outre, si on pousse le raisonnement à son terme, on a des prix astronomiques, des tirages très faibles, et des consommateurs sélectionnés par leur richesse. Bilan : on est retournés au mécénat…
wapiti Posté 28 décembre 2005 Signaler Posté 28 décembre 2005 Je n'ai pas spécialement d'avis sur ton texte, en tous cas, pour moi il est clair qu'internet et le p2p profitent aux artistes peu connus (en leur offrant une possible notoriété sans frais), mais nuit aux artistes "commerciaux", c'est à dire ceux dont les acheteurs sont composés pour une bonne part de "suiveurs" et non d'amateurs.
labbekak Posté 29 décembre 2005 Signaler Posté 29 décembre 2005 Un étudiant pour qui le piratage a un coût nul n'ira pas acheter des disques à 15 euros au lieu de 23. En revanche, un individu qui travaille et qui n'envisage pas de se servir d'un peer to peer continuera d'acheter des disques quelque soit leur prix. Il est tout à fait possible de supposer pour ces raisons que la demande est (partiellement) inélastique à une baisse des prix. C'est faux ! J'ai à peu près 700 disques achetés dans le commerce, avant que les prix n'aient explosés consécutivement à l'apparition du P2P. Le fait que j'aie objectivement les moyens de continuer à acheter aux nouveaux prix m'a malgré tout fait arrêter, car s'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est qu'on me prenne pour un con ! Depuis lors, je loue et je copie, sauf si le disque m'est proposé à un prix décent !
pankkake Posté 29 décembre 2005 Signaler Posté 29 décembre 2005 Et pendant ce temps-là, côté prix, certains s'en tirent pas mal : http://adipocere.nexenservices.com/listeprodate.php http://adipocere.nexenservices.com/prosel.php?voir=promo
glouglou Posté 30 décembre 2005 Auteur Signaler Posté 30 décembre 2005 A H16: Ce que vous dites est vrai. Je fais en fait l'hypothèse que les individus comparent le prix des disques sur le marché et le prix subjectif du téléchargement, que j'appelle coût de la copie. Tous n'ont pas les mêmes incitations à télécharger sur internet. Si les prix sont trop chers, les individus ont plus tendance à se tourner vers un peer to peer, d'où un accroissement de l'offre sur le réseau (puisque tout demandeur est aussi un offreur) et une utilité accrue des téléchargements, c'est à dire une diminution du coût de la copie. Ce phénomène peut être qualifié d'externalités de réseaux. La désutilité de la copie décroît depuis des années et les réseaux sont aujourd'hui très efficaces et structurés. Il n'est plus difficile de trouver ce que l'on recherche, et l'on peut y trouver beaucoup d'albums et de films qui ne sont plus vendus dans les circuits traditionnels (un exemple qui me vient: que pensez-vous de la médiocrité de l'offre des vidéo-clubs alors qu'il est possible de trouver la plupart des palmes d'or sur emule?) Un petit tour sur soulseek dans les fichiers des utilisateurs donne des suggestions nourries d'albums à écouter alors que les vendeurs de la fnac n'ont aucun avis sur la question. Pour en revenir à mon exposé, il faut bien reconnaître que les prix ont tendance à diminuer. Des chiffres peuvent être trouvés sur internet qui mesurent l'évolution des ventes en volume et en valeur. Je ne dis pas que tous les disques vont augmenter, je dis juste qu'il est possible que certains prix augmentent. En fait, je crois que les stratégies futures devront se fonder sur la discrimination des prix. Le prix moyen des disques semble faire l'objet d'un statu quo: un artiste inconnu est distribué quasiment au même prix qu'un artiste renommé, alors qu'il s'agit de deux produits différents. Il ne me semble pourtant pas que les disques soient réglementés par une loi analogue à celle du prix unique du livre. Prenons l'exemple du secteur aérien qui lui aussi est caractérisé par des coûts marginaux très faibles: depuis des années les prix d'un vol à l'autre sont très variables, souvent proposés moins chers pour des distances plus longues, et pouvant varier considérablement pour des passagers d'un même vol. A côté, les prix dans le secteur de la musique sont rigides. Une exception cependant: les prix varient dans le temps. D'abord proposés avec une décote - le prix vert - ils remontent ensuite puis décroissent. Les prix devraient maintenant varier selon l'artiste, le style musical en fonction des caractéristiques des clients. Les prix moyens des disques de house, de rap, de variété française, de métal n'ont aucune raison de coïncider puisque ce ne sont pas les mêmes personnes qui les écoutent. Et comme je le disais, les individus se différencient par la valeur qu'ils attribuent à la musique et par leur attitude en terme de téléchargements. A Wapiti: Justement, il serait intéressant de connaître l'impact de la piraterie sur les différents types d'artistes. On entend beaucoup plus souvent les majors vociférer que les labels indépendants. A Labekkak: Vous faites de mon propos une généralité. Or, comme je le dis, les individus sont différents. Ce qui est valable pour vous n'est peut-être pas valable pour votre voisin. Les jeunes qui écoutent du métal semblent souvent acheter beaucoup de disques. Est-ce le cas pour le rap? pour la techno? Je n'en sais rien à priori mais il serait intéressant de le savoir.
Fredo Posté 30 décembre 2005 Signaler Posté 30 décembre 2005 En effet, Labbekak ne constitue qu'une exemple et l'on ne peut en inférer quoi que ce soit au niveau de la population. Ce qui n'empêche pas pour autant d'envisager son attitude comme une autre stratégie de comportement possible. Glouglou, tu as déduis ton raisonnement d'un certain nombre d'hypothèses de départ sur le comportement décisionnel des gens. S'ils se passe ci, ils feront ça etc. Mais en es-tu vraiment sûr ? Plutôt que de s'embarquer dans une parenthèse stérile, autant la refermer tout de suite et reprendre avec une nouvelle donne. En effet, j'en ai parlé sur le fil concernant la "légalisation" du P2P, de l'échange et du téléchargement, une étude récente a montré que les comportements d'achat, d'une part, et de "piratage", de l'autre sont indépendants. De plus, cela pourra t'intéresser, ces chercheurs ont mesuré les diverses "valeurs perçues". http://news.tf1.fr/news/multimedia/0,,3274276,00.html Droits d'auteur : Copieur, qui es-tu ?Par David STRAUS Une étude, décrivant les pratiques du copiage des internautes en France, estime que "l'intensité du copiage toutes techniques confondues est indépendante du niveau des achats de CD et DVD". Quant au pirate, il n'a pas vraiment de profil. Aujourd'hui, près de neuf internautes français sur dix possèdent de la musique copiée et deux tiers d'entre eux des films. Alors, à quoi ressemble-t-il, ce pirate ? L'Université de Paris XI et l'organisation de défense des consommateurs, UFC-Que Choisir, ont publié mardi une étude, financée par le ministère de la recherche, décrivant les pratiques du copiage des internautes en France (1). Les résultats "tordent le cou à un certain nombres de poncifs et d'idées fausses", a estimé mardi Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir. * Monsieur tout-le-monde Premier constat, l'échange de copie par tous les moyens est une pratique très répandue qui concerne quasiment toutes les catégories sociales. "Les copieurs ne peuvent pas uniquement être assimilés à des jeunes irresponsables ou à des resquilleurs", écrivent les auteurs. La variable la plus pertinente serait l'âge, avec des nuances. Les jeunes de moins de 25 ans sont plus nombreux (39%) mais ils représentent moins de la moitié des copieurs. Pour le peer-to-peer (P2P), la proportion des moins de 25 ans tombe à 29,80%. Elle est de 23% pour les 25-30 mais aussi pour les 31-40 ans. Le copieur est plutôt un homme. * Un phénomène social Pourquoi passent-ils à l'acte ? Parce qu'ils font comme tout le monde. Il y a, disent les auteurs, "un effet d'imitation et de contagion sociale entre amis, collègues ou au sein de la famille". Le cercle des connaissances est aussi très important dans la diffusion de la copie. L'étude tend à démontrer que le réseau Internet n'est qu'une variable. Si la moitié des internautes s'approvisionnent régulièrement via Internet, seuls 2 à 4% se fournissent en musique par le P2P exclusivement. "Cela a des incidences importantes en matière de politique à mener", notent les auteurs. * Le prix et la découverte Ensuite, vient - difficile de le nier - la volonté, pour 97% des copieurs, d'éviter de payer un "prix perçu" comme trop élevé pour les CD originaux. Le prix est également en tête des raisons invoquées pour la copie de films (66%). Neuf copieurs sur dix estiment que cette pratique leur permet de découvrir de nouveaux artistes ou d'acquérir des morceaux à l'unité. Deux tiers assurent que cela leur permet d'acheter d'autres biens. Plus étonnant, 46% des copieurs n'évoquent pas comme raison de leur acte le manque de diversité dans les magasins et sur les sites internet. * Quels liens avec l'achat de CD ? L'étude montre que "le fait d'acheter des CD et des DVD augmente la probabilité d'être copieur". En clair, s'il copie, c'est parce qu'il s'intéresse déjà la musique. En revanche, "l'intensité du copiage toutes techniques confondues ou sur les réseaux P2P est indépendante du niveau des achats de CD et DVD", insistent les auteurs. Par ailleurs, "l'intensité du copiage (hors et en ligne) augmente avec le désir d'accéder à une plus grande diversité de titres et de découvrir de nouveaux artistes". Cette constatation paraît d'autant plus vraie pour le téléchargement de films en P2P. * Juge fais-moi peur ! Si 60% des copieurs ont largement conscience du risque juridique, ils sont peu nombreux à restreindre leur pratique pour autant. Ce qui tend à démontrer que les procès à répétition et leur médiatisation n'ont pas d'effet. Ils considèrent qu'en copiant, ils nuisent aux auteurs (54%) mais pas aux œuvres (seuls 44% le pensent)… et encore moins aux majors (seuls un tiers le pensent). Cette "préoccupation éthique diminue la propension à copier", constatent les auteurs qui en concluent que les campagnes de prévention devraient être privilégiées. * Prêt à débourser Les internautes attribuent "une valeur économique aux contenus qu'ils échangent" et sont prêts à débourser 6,66 euros par mois pour télécharger librement de la musique, en plus d'un abonnement de 20 euros à un fournisseur d'accès. Pour les films, ils donneraient 8,44 euros. 12,62 euros pour films et musique. * La technique est un frein Et pourquoi certains ne copient-ils pas ? Un quart parce qu'ils ne s'intéressent pas à la musique, un tiers parce qu'ils craignent les poursuites judiciaires mais, surtout, parce que "c'est trop compliqué" (45%), "cela prend trop de temps" (56%) et "les copies ne sont pas de bonne qualité" (56%). Cette dernière opinion est d'autant plus vraie pour le téléchargement de films. (1) étude réalisée auprès de 4000 personnes, financée par le ministère de la Recherche, et menée par Fabrice Rochelandet et Fabrice Le Guel, du centre de recherche ADIS (Analyse des dynamiques industrielles et sociales)
Calembredaine Posté 30 décembre 2005 Signaler Posté 30 décembre 2005 C'est faux !J'ai à peu près 700 disques achetés dans le commerce, avant que les prix n'aient explosés consécutivement à l'apparition du P2P. Le fait que j'aie objectivement les moyens de continuer à acheter aux nouveaux prix m'a malgré tout fait arrêter, car s'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est qu'on me prenne pour un con ! Depuis lors, je loue et je copie, sauf si le disque m'est proposé à un prix décent ! Je partage votre point de vue. A une époque, j'achetais quasiment un CD par jour. Aujourd'hui, j'ai des revenus bien supérieurs et je n'achète plus rien si ce n'est une ou deux raretés au format SACD par an. Par contre, le téléchargement ne m'intéresse pas, la qualité étant trop basse. Le téléchargement légal style iTunes est très intéressant pour récupérer rapidement des morceaux à la qualité correcte pour assurer la sonorisation d'une soirée par exemple.
pankkake Posté 30 décembre 2005 Signaler Posté 30 décembre 2005 Justement, il serait intéressant de connaître l'impact de la piraterie sur les différents types d'artistes. On entend beaucoup plus souvent les majors vociférer que les labels indépendants. Je vois pas mal de groupes/labels qui sortent des CD en éditions limités à 1000 (ou 666… ) exemplaires. Donc visiblement, ceux-là s'en foutent ! Il y a aussi pas mal d'artistes qui diffusent quelques mp3 sur leurs sites, et parfois des albums entiers (et je m'en rends compte quand je vais sur leur site après avoir téléchargé l'album… par p2p). Et sinon, le p2p ne profite pas qu'aux artistes : http://en.wikipedia.org/wiki/Ideepthroat
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