Aller au contenu

Le "mérite Subjectif"


Messages recommandés

Posté

Bonjour! Je voulais prolonger le débat sur le "mérite subjectif" que j'ai entamé sur le fil "les HLM de Paris". Ce sont des termes utilisés par Hayek dans "la route de la servitude" (je ne me souviens plus dans quel chapître, il me semble que c'était dans "planisme et démocratie").

En fait, on se rend compte que nos politiques et aussi malheureusement la société civile, en France, tiennent beaucoup compte de ce "mérite subjectif". A première vue, on pourrait croirer que ce "mérite subjectif" est une dérive du libéralisme économique, mais apparemment, ce serait plus une dérive du socialisme qu'autre chose, comme l'a souligné Hayek.

Le "mérite subjectif", c'est croire de manière plus ou moins arbitraire qu'une activité mérite un certain revenu. Dans l'exemple d'Hayek (que j'ai cité dans l'autre topic, mais que je vais répéter ici), il cite l'exemple typique d'un travailleur bien rémunéré (et qui donc par sa rémunération acquierait un certain prestige) qui devient du jour au lendemain victime d'un progrès technique (une nouvelle machine pour effectuer sa tâche, par exemple), et qui donc de fait voit ses revenus diminuer de manière significative. La société civile, choquée que ce travailleur qui jadis avait un statut prestigieux touche moins que d'autres professions dévalorisées, veut donc qu'on règlemente le cas de ce pauvre travailleur, et on voit évidemment le risque économique qui suivrait…

Repensons maintenant à la société française. En plus de l'exemple des HLM de Paris (cité dans l'autre fil), ne trouvez-vous pas que ce "mérite subjectif" domine malheureusement la France?

Quelques exemples:

- Sur les footballeurs, ils touchent "des milliards" pour taper dans une pastèque, ils touchent trop par rapport aux "vrais" travailleurs. L'exemple le plus banal du "mérite subjectif".

- Très récemment, la remédiatisation du problème des chirurgiens du privé en France (un vieux problème), qui se plaignent du salaire réglementé qu'ils ont (jusqu'ici rien de choquand pour un libéral), ce salaire réglementé font qu'ils touchent largement moins qu'en GB par exemple ou ailleurs. Cependant, en laissant ce problème (qui mériterait un fil aussi), ce qui me choque ce sont les déclarations qu'on peut voir sur les sites web des chirurgiens. L'un d'entre eux, se permet par exemple de comparer ses 15 ans d'étude pour ne toucher "que" 9000 euros par mois, contre un pompier de New-York qui touche 40.000 euros par mois. La comparaison m'a beaucoup choqué, car c'est limite si elle ne dit pas "être pompier c'est de la merde, on est meilleur qu'eux". Ici le "mérite subjectif" est un problème d'amour propre.

- La notion étrange de "revalorisation" des salaires dans le secteur public, par exemple, toujours dans le secteur médical, la grève des infirmières il y a environ 2 ans, des infirmières qui voulait d'une part une augmentation de leur salaire et une revalorisation de leur diplôme à Bac+3 (et non à +ou- 2 et demi comme aujourd'hui). Ca aussi ça m'a interpelé, d'une part pour la valeur absurde du diplôme en France en général au détriment de l'expérience, et surtout sur le fait qu'elles aient associés l'idée cachée d'un revenu qui doit être justifié par rapport au diplôme.

Ca c'était des exemple sociétaux, maintenant regardons l'Etat:

- Une multiplication des SMIC en fonction des catégories socio-professionnelles et des diplômes. Je trouve ça vraiment très scandaleux, car si un revenu minimum il devait y avoir, il ne devrait en avoir qu'un pour tout le monde, on ne peut pas multiplier les cas de pauvreté juridique, c'est absurde! Par exemple en GB, je trouve l'idée d'un salaire de chômeur égal pour tous (300 euros, alors certes on peut toujours critiquer la valeur…) qu'on soit un chômeur d'un petit boulot ou d'un cadre. La pauvreté, si on la définit, doit être universelle et non répartit sur une échelle de "mérite subjectif".

- Et évidemment le nombre incroyable de statut d'aide (à l'embauche, à la réinsertion, etc.) qui ne donne pratiquement pas les mêmes chances selon la catégorie sociale.

Le passage sur la critique du "mérite subjectif" presqu'anodine d'Hayek qui semble d'une redoutable logique, n'est pourtant pas naturelle dans notre société. A priori, comme je l'ai dit plus haut, on pourrait penser que ce "mérite subjectif" est une conséquence du libéralisme économique, mais j'ai bien l'impression que le socialisme est là pour nous le rappeler tout le temps… Qu'en pensez-vous?

Posté

Je suis bien entendu d'accord avec toi phantom_opera sur tout ce que tu dis, sauf concernant l'allocation chômage.

Imaginons que l'on en accepte le principe (la vraie solution c'est l'assurance privée, mais bon). Alors il n'est pas question de mérite relatif, mais simplement de maintien du niveau de vie pendant un temps intermédiaire nécessaire à la reprise du travail. Car c'est bien à cela que servent les allocation chômage : à permettre à la personne qui s'y retrouve de continuer à subvenir à ses besoins (et nous savons tous qu'ils ne sont pas égaux mais dépendent en grande partie du revenu quand on est employé). Ainsi ici il n'est pas question de mérite du tout. D'autre part tu ne peux pas lancer ça sans parler de la contrepartie, à savoir que ceux qui touchent le plus sont ceux qui paient le plus pour l'assurance des autres…

Posté

Je pense que le mérite subjectif est tout sauf libéral. C'est même un concept anti-libéral en ce qu'il vient concurrencer une "hiérarchie des valeurs" objectives que créent spontanément le marché.

Je pense que toute société à besoin de se créer ce type de hiérarchie en dehors du marché. C'est aussi le signe que les individus regroupés en sociétés se créent par divers canaux des références communes, des valeurs nationales, en bref, une conscience collective. C'est d'ailleurs, selon moi, l'argument le plus profond et le plus implacable, qu'on peut nous opposer quant à la faisabilité du libéralisme économique total (qui suppose une refonte totale de cette conscience collective…).

Posté
Ca aussi ça m'a interpelé, d'une part pour la valeur absurde du diplôme en France en général au détriment de l'expérience, et surtout sur le fait qu'elles aient associés l'idée cachée d'un revenu qui doit être justifié par rapport au diplôme.

On peut formuler ça en d'autres termes.

Est ce qu'on rémunère la personne ou le service rendu ?

C'est bien évidemment ce dernier cas qui doit prévaloir. Ce qui implique qu'il y ait un client laissé libre d'apprécier le service qui lui est rendu.

Mais tous les "clients" de la politique, au sens large c'est à dire en incluant le social, veulent naturellement baser le revenu sur la personne.

D'ou :

les lamentations de diplômés ne trouvant pas d'emploi corrrespondant à leur niveau d'études.

des primes d'ancienneté déconnectées du service rendu

l'argument bateau et bidon des médecins : après 15 ans d'études je devrais toucher plus.

des indemnités pour familles nombreuses pour les fonctionnaires

Et d'une façon générale tous les emplois publics dont la rémunération est totalement déconnectée du service rendu. (et pour cause car pour beaucoup d'entre eux le service est non seulement nul mais négatif).

Posté

Bonjour à tous!

@Molinari

Oui je sais, c'est très surprenant, mais le salaire des pompiers de New-York est très élevé. Dans le site du chirurgien, il parlait de 40.000 euros, mais dans un reportage consacré aux pompiers de New-York (juste après l'attaque du 11 septembre) montrait que la FDNY était un vrai corps héritier d'une très longue tradition, ces pompiers touchant plus de 40.000$ par mois! Le métier de pompier de New-York est purement cooptatif, le corps se renouvelle essentiellement dans un cercle fermé. J'avoue avoir été un peu surpris par ce corporatisme dans la cité de la Stutue de la Liberté, un décalage d'image étrange, en tout cas le reportage était vraiment très instructif!

@ricotrutt

Le principe de salaire de revenu de chômeur pour conserver un niveau de vie le temps de la reprise est un principe qui est juste dans un système de répartition où celui qui touche le plus cotise aussi le plus. Evidemment dans le système français ce système là est juste. Mais je faisais une allusion au système britannique où il n'y a pas de répartition, le revenu du chômeur n'est pas un revenu qui vient d'une caisse d'assurance chômage, c'est de l'argent qui vient directement du budget de l'autorité public. Pour en avoir plus, l'assurance privée s'impose évidemment!

Je ne suis pas tout à fait favorable au laissez-faire total pour être honnête, je trouve l'idée britannique plutôt astucieuse, car le revenu à 300 euros par mois a le mérite d'être un vrai revenu universel pour tous et qui sert véritablement de palliatif en cas de pépin. Tu dis que le maintien d'un revenu un peu près équivalent à l'ancien est tout à fait juste pour garder un certain équilibre avant de trouver un nouveau job. Mais qui te dit que le nouveau job sera équivalent ou meilleur que l'ancien? Et qui te dit que tu l'auras très rapidement? En maintenant un revenu un peu près équivalent à l'ancien, tu ne fais que maintenir une barre haute pour la recherche du nouvel emploi, et donc entretenir ce temps de latence qui coûte de l'argent aux contribuables. Et si par exemple un cadre perdait son emploi, pourquoi ne pas devenir caissier en attendant d'avoir un nouveau job qui par exemple traverse un mauvaise conjoncture temporaire? Evidemment une telle mentalité est impossible en France, car un cadre ne pourrait pas vraiment être accepté pour être caissier, à cause de ce mal absurde qu'est la "surqualification"…

Je trouve l'idée des 300 euros juste, si par exemple on a envie d'une couverture plus élevée (car j'avoue 300 euros c'est pas beaucoup), l'assurance privée supplémentaire ou une meilleure épargne s'impose. Sinon, les 300 euros par mois tant qu'on justifie qu'on recherche un emploi, avec la suppression de ces 300 euros en cas de refus du 3e emploi proposé (même si c'est un boulot de balayeur pour un cadre). Evidemment, sur le coup ça a l'air vache, mais rien d'utopique ou d'irréalisable, ça se fait outre-Manche. Moi je trouve le système vraiment juste et humain!

@antietat

Tout à fait, c'était l'idée sous-entendue dans mon post d'origine… Moi je pense que ce "mérite subjectif" est un problème assez important en France, et est probablement à l'origine de beaucoup de maux et de tensions. J'ai l'impression que presque tous les problèmes sociaux ont plus ou moins directement pour origine ce problème du "mérite subjectif"…

Posté
Bonjour à tous!

@Molinari

Oui je sais, c'est très surprenant, mais le salaire des pompiers de New-York est très élevé. Dans le site du chirurgien, il parlait de 40.000 euros, mais dans un reportage consacré aux pompiers de New-York (juste après l'attaque du 11 septembre) montrait que la FDNY était un vrai corps héritier d'une très longue tradition, ces pompiers touchant plus de 40.000$ par mois!

Par an. C'est d'ailleurs un salaire courant pour les fonctionnaires de terrain aux USA (policiers, fédéraux, pompiers, médecins, etc.)

Posté

Ah oui merde, désolé pour l'erreur, ce n'est pas 40.000 euros par mois. J'avais entendu le chiffre 40.000 sur les pompiers dans le reportage, ça devait être francs et non euros. Je viens de relire le manifeste d'un des chirurgiens, c'est 40.000 francs par mois et non par an. Désolé. Je me disais aussi, je trouvais ça un peu étrange…

Posté
@ricotrutt

Le principe de salaire de revenu de chômeur pour conserver un niveau de vie le temps de la reprise est un principe qui est juste dans un système de répartition où celui qui touche le plus cotise aussi le plus. Evidemment dans le système français ce système là est juste. Mais je faisais une allusion au système britannique où il n'y a pas de répartition, le revenu du chômeur n'est pas un revenu qui vient d'une caisse d'assurance chômage, c'est de l'argent qui vient directement du budget de l'autorité public. Pour en avoir plus, l'assurance privée s'impose évidemment!

exact je raisonnais dans le cadre français, l'assurance privée est la solution la plus libérale évidemment.
Je ne suis pas tout à fait favorable au laissez-faire total pour être honnête, je trouve l'idée britannique plutôt astucieuse, car le revenu à 300 euros par mois a le mérite d'être un vrai revenu universel pour tous et qui sert véritablement de palliatif en cas de pépin. Tu dis que le maintien d'un revenu un peu près équivalent à l'ancien est tout à fait juste pour garder un certain équilibre avant de trouver un nouveau job. Mais qui te dit que le nouveau job sera équivalent ou meilleur que l'ancien? Et qui te dit que tu l'auras très rapidement? En maintenant un revenu un peu près équivalent à l'ancien, tu ne fais que maintenir une barre haute pour la recherche du nouvel emploi, et donc entretenir ce temps de latence qui coûte de l'argent aux contribuables. Et si par exemple un cadre perdait son emploi, pourquoi ne pas devenir caissier en attendant d'avoir un nouveau job qui par exemple traverse un mauvaise conjoncture temporaire? Evidemment une telle mentalité est impossible en France, car un cadre ne pourrait pas vraiment être accepté pour être caissier, à cause de ce mal absurde qu'est la "surqualification"…

Je trouve l'idée des 300 euros juste, si par exemple on a envie d'une couverture plus élevée (car j'avoue 300 euros c'est pas beaucoup), l'assurance privée supplémentaire ou une meilleure épargne s'impose. Sinon, les 300 euros par mois tant qu'on justifie qu'on recherche un emploi, avec la suppression de ces 300 euros en cas de refus du 3e emploi proposé (même si c'est un boulot de balayeur pour un cadre). Evidemment, sur le coup ça a l'air vache, mais rien d'utopique ou d'irréalisable, ça se fait outre-Manche. Moi je trouve le système vraiment juste et humain!

le système du revenu minimum est certes attrayant, parce que nous vivons depuis toujours dans une république socialiste et que nous finissons, nous même libéraux, par croire qu'il faut toujours un peu de socialisme et d'étatisme pour résoudre nos problèmes. Seulement, c'est anti-libéral.

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...