Serge Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Les artistes français jouissent d’un système qui associe les bienfaits du libéralisme à un système d’aides publiques.Par PHILIPPE TESSON, journaliste. QUOTIDIEN : vendredi 20 juillet 2007 Heureux pays, que celui-ci où, au prix de difficultés et de sacrifices souvent douloureux, mais qui donnent un sens à la création, des centaines d’artistes voient, au-delà de leur liberté de s’exprimer, leur production introduite sur le marché. On ne peut à la fois déplorer la pléthore des objets culturels et les entraves à leur production, revendiquer la liberté et ne pas se réjouir de l’élargissement de son champ, défendre l’égalité des chances et accepter que l’exercice en soit limité. Les artistes français jouissent du privilège inouï, qu’ils n’apprécient pas toujours à sa juste mesure, de disposer de débouchés d’une ampleur incomparable, par le jeu d’un système qui associe les bienfaits du libéralisme à un généreux système d’aides publiques. Il y a peu d’autres pays au monde où un romancier débutant est aussi aisément édité et où la pièce d’un jeune auteur a autant de chances d’être assistée pour être portée à la scène. Dans les limites du possible, et même au-delà de la sagesse financière, les conditions optimales de la liberté de créer et de diffuser sont réunies dans notre pays, quoi qu’on en dise. Et l’on s’en plaindrait ? On se plaint en effet ici et là de cette abondance, tantôt sous le prétexte qu’elle banalise la création - argument culturel -, tantôt sous le prétexte qu’elle soumet l’œuvre d’art aux lois du marché (prix, concurrence, distribution, etc.), la transformant de ce fait en bien de consommation ordinaire et lui ôtant ce caractère d’exception qui fut longtemps le sien - argument idéologique qui renvoie au vieux débat sur la confusion entre loisirs et culture. Soyons réalistes. Le système qui régit dans notre pays la consommation des produits culturels a fait ses preuves. Il a ses faiblesses - par exemple, les charges excessives qui pèsent sur le théâtre privé, le laxisme de la gestion de certains théâtres publics, le coût de la diffusion du livre, etc. Mais il a l’immense vertu de maintenir une offre abondante, et par là même de favoriser la création. Que celle-ci ne se situe pas toujours au degré d’exigence et de qualité souhaitable, c’est un autre problème, celui de l’art et de l’artiste, celui du rapport entre l’artiste et son temps, entre l’artiste et la société, celui de la résistance de l’artiste à la société de son temps. Mais c’est du marché qu’ici nous parlons, de l’offre. Or celle-ci, dans les conditions présentes, est en France de nature à satisfaire de manière différenciée à la fois le public averti et la société de masse. Laissons donc le marché faire sa besogne. N’en demandons pas davantage à l’Etat qui n’est pas là pour le diriger. Veut-on que l’Etat impose à la culture ses quotas de production ? Pourquoi pas ses normes de création ? Le marché dispose de ses propres instruments de régulation, et une société a le marché qu’elle mérite. Le nôtre est loin d’être le pire des modèles, dans le cadre du régime libéral tempéré qui nous gouverne. On ne produira jamais assez de biens culturels. Plutôt que de déplorer leur prolifération, pourquoi ne pas s’interroger sur de vrais problèmes : leur qualité par exemple, leur diffusion, ou l’éducation du public, ou encore la paresse de celui-ci à les consommer ? Vastes questions. Un peu contradictoire, tout ça …
José Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Les artistes français jouissent d’un système… Les "artistes", sans aucun doute. L'art et la culture, par contre…
Cochon Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Les "artistes", sans aucun doute. L'art et la culture, par contre… Tu n'est qu'un beauf élitiste néoréactionnaire… Je m'en vais faire une chronique assassine dans Libé ou les Inrocks qui va faire jaser dans les soirées hype.
José Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Tu n'est qu'un beauf élitiste néoréactionnaire… Pire : convaincu que la civilisation est une production aristocratique.
WALDGANGER Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 celui de la résistance de l’artiste à la société de son temps Je pense que ce point est vraiment un mythe.
Hobbart Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Et si la qualité ou la reconnaissance des oeuvres artistiques (par le public) étaient liées à leur financement (par le public), qu'en penseraient certains abonnés aux subventions (publiques) ?
José Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Et si la qualité ou la reconnaissance des oeuvres artistiques (par le public) étaient liées à leur financement (par le public)… Ça existe déjà : c'est le libre marché.
Fredo Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Philippe Tesson (dont j'ai souvent du mal à me rappeler le nom) fait partie des premiers "libéraux" à avoir fait son coming out à la télé. Bon, après hein, je ne sais pas quelle est vraiment se tendance mais j'ai été quelquefois agréablement surpris par des propos tenus lors de certaines émissions.
phantom_opera Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Ce qui est sûr c'est qu'on a vraiment le choix pour l'art subventionné, en tout cas à Paris c'est sûr. Il y a le théâtre mais aussi les cours de l'ADAC par exemple, ça coûtait très cher à la ville de Paris et on avait prévu une réforme de l'institution. Elle existe toujours (il y a un site internet), mais je me demande si elle a été réformée. Il y avait du dessin, des instruments de musique et récemment de la création numérique. Pas cher du tout, mais bon, le contribuable a déjà payé une grande partie… Je crois qu'on ne pourra jamais supprimer l'art subventionné, ça fait partie de la vie d'une cité, c'est la même chose dans les grandes villes américaines. Ca ne m'a jamais semblé évident, je veux dire par là qu'il y a des problèmes plus urgents que l'art et pourtant l'art subventionné est universel.
Hakill Posted July 20, 2007 Report Posted July 20, 2007 Philippe Tesson (dont j'ai souvent du mal à me rappeler le nom) fait partie des premiers "libéraux" à avoir fait son coming out à la télé. Bon, après hein, je ne sais pas quelle est vraiment se tendance mais j'ai été quelquefois agréablement surpris par des propos tenus lors de certaines émissions. Idem, mais je viens de comprendre ce qu'il faisait chez Libé aujourd'hui: http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/…_de_droite.html
Taranne Posted July 21, 2007 Report Posted July 21, 2007 Idem, mais je viens de comprendre ce qu'il faisait chez Libé aujourd'hui: http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/…_de_droite.html Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour récupérer quelques lecteurs… Et qu'est-ce que d'autres ne feraient pas pour se faire bien voir de la gauche… Mais je suis prêt à faire un geste pour Libération, moi aussi:
observateur Posted July 21, 2007 Report Posted July 21, 2007 "Veut-on que l’Etat impose à la culture ses quotas de production ? Pourquoi pas ses normes de création ?" Pour la seconde question, c'est déjà fait. Le grand manitou s'appelle Jack Lang. Il a réinventé l'art officiel. A Taranne : + 1. Pire : convaincu que la civilisation est une production aristocratique. Encore ++++ 1 Mais prends garde Lucilio, la guillotine n'est pas loin !
Cochon Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Et si la qualité ou la reconnaissance des oeuvres artistiques (par le public) étaient liées à leur financement (par le public), qu'en penseraient certains abonnés aux subventions (publiques) ? Voyons, c'est trop médiocre! Nos zélites culturelles ne se s'abaissent pas à satisfaire le public, de toute façon elles n'en ont pas.
José Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Nos zélites culturelles ne se s'abaissent pas à satisfaire le public, de toute façon elles n'en ont pas. Oui, mais le problème c'est plutôt que l'État démocratique moderne veut faire croire que l'art concerne tout le monde, est accessible à tout le monde.
Bellegarrigue Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Oui, mais le problème c'est plutôt que l'État démocratique moderne veut faire croire que l'art concerne tout le monde, est accessible à tout le monde. Je pense plutôt que le problème c'est que les hommes de l'Etat prétendent juger de ce qui est ou n'est pas de l'"art" en subventionnant certains "artistes" ou "oeuvres" de préférence à d'autres. Après, on peut très bien penser qu'il faille un long apprentissage pour apprécier Raphaël ou Bach mais on peut tout aussi bien penser qu'il est possible de goûter à la Transfiguration ou à La Passion même si on ne connaît pas ses écritures sur le bout des doigts. La notion d'aristocratie (les "meilleurs" ? désignés par qui ?) suppose un tiers qui juge de ce qui est mieux, et ce qui me gêne (autant que me gêne le fonctionnaire de la DRAC) c'est que ce tiers juge pour les autres.
Cochon Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Oui, mais le problème c'est plutôt que l'État démocratique moderne veut faire croire que l'art concerne tout le monde, est accessible à tout le monde. L'art concerne effectivement tout le monde -ou pourrait- mais l'Etat n'a pas à s'en mêler. De toute façon le seul résultat visible de l'intervention étatique est de couper encore plus les "créateurs" subventionnés et le public potentiel.
younglib Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 La notion d'aristocratie (les "meilleurs" ? désignés par qui ?)… Désignés par toi par exemple. …suppose un tiers qui juge de ce qui est mieux, et ce qui me gêne (autant que me gêne le fonctionnaire de la DRAC) c'est que ce tiers juge pour les autres. Où est la mal à juger que 2 et 2 = 4 ?
Bellegarrigue Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Désignés par toi par exemple. Je crois que tu n'as pas très bien compris le sens de ma remarque. Je ne conteste pas le droit évident de chacun de désigner ce qui est de l'art mais que certains, sous couvert de la notion oiseuse d'aristocratie, tranchent pour les autres. Où est le mal à juger que 2 et 2 = 4 ? Rien de mal, mais ça n'a rien à voir avec ce que j'ai écrit. Que certains s'arrogent le droit de désigner ce qui est ou n'est pas de l'art ce n'est pas du tout du "2 + 2 = 4". L'analogie exacte serait plutôt "nous, ci-dessous désignés les "meilleurs", avons décidé de ce qui était ou n'était pas du calcul".
José Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 La notion d'aristocratie […] suppose un tiers qui juge de ce qui est mieux… Absolument pas. Tu peux parfaitement estimer que tu es supérieur à quelqu'un d'autre sur tel ou tel point.
Guest Arn0 Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Absolument pas. Tu peux parfaitement estimer que tu es supérieur à quelqu'un d'autre sur tel ou tel point.Tu peux même estimer que quelqu'un d'autre est supérieur à toi sur tel ou tel point.
José Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Tu peux même estimer que quelqu'un d'autre est supérieur à toi sur tel ou tel point. Farpaitement. C'est là la marque d'une sensibilité aristocratique.
Bellegarrigue Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Absolument pas. Tu peux parfaitement estimer que tu es supérieur à quelqu'un d'autre sur tel ou tel point. Avec la définition que tu proposes, quel est donc le sens de la phrase : "convaincu que la civilisation est une production aristocratique." La production de tous ceux qui s'estiment (ou qui en estiment d'autres) eux-mêmes supérieurs à d'autres sur tel ou tel point ? Quand je parle de la nécessité d'un tiers pour que la notion soit valide, c'est qu'une aristocratie doit (si tant est qu'on en éprouve le besoin) être "instituée" et "reconnue" sinon cela se borne à une succession et une juxtaposition de jugements de valeur individuels.
pankkake Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Tu peux même estimer que quelqu'un d'autre est supérieur à toi sur tel ou tel point. Does not compute.
Ronnie Hayek Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 La notion d'aristocratie (les "meilleurs" ? désignés par qui ?) suppose un tiers qui juge de ce qui est mieux, et ce qui me gêne (autant que me gêne le fonctionnaire de la DRAC) c'est que ce tiers juge pour les autres. Dans toute société, il y a des élites - et c'est normal. Le problème dans nos sociétés égalitaristes est que nos "élites" sont, en règle générale, purement artificielles, de simples créatures à la solde de l'idéologie de l'heure. C'est le même problème qu'avec les notions de hiérarchie et d'autorité: elles sont indispensables à l'existence de la vie en société, mais elles sont usurpées de fait tout en étant niées dans les esprits.
José Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Avec la définition que tu proposes, quel est donc le sens de la phrase :"convaincu que la civilisation est une production aristocratique." Simplement qu'une civilisation est fondée et progresse grâce à une élite (sociale, économique, intellectuelle, etc. - c'est-à-dire grâce à des types comme Bach, Rockefeller ou César, Shakespeare, Marco Polo ou Churchill, Michel-Ange, Zénobe Gramme ou Colomb). Je me souviendrais toujours du propos que l'on prête à Marconi, enfant : "Je ne veux pas être un âne !"
Guest Arn0 Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Simplement qu'une civilisation est fondée et progresse grâce à une élite (sociale, économique, intellectuelle, etc. - c'est-à-dire grâce à des types comme Bach, Rockefeller ou César).César qui fait progresser la civilisation… j'ai comme un doute.
Ronnie Hayek Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 César qui fait progresser la civilisation… j'ai comme un doute. Il pensait peut-être au héros de Pagnol ?
José Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 César qui fait progresser la civilisation… j'ai comme un doute. Sans César, le monde où tu vis n'existerait simplement pas.
Bellegarrigue Posted July 22, 2007 Report Posted July 22, 2007 Simplement qu'une civilisation est fondée et progresse grâce à une élite (sociale, économique, intellectuelle, etc. - c'est-à-dire grâce à des types comme Bach, Rockefeller ou César). (Et à Ronnie aussi) Loin de moi l'intention de nier le rôle d'une élite (mouvante, circulante, floue, etc.) dans chaque parcelle du savoir et de l'action humains. C'est une évidence que le cours des évènements historiques (politiques, culturelles, économiques) est le plus souvent influencé par un petit nombre d'individus. C'est son auto-institution que je conteste et aussi l'idée que les productions de ces (le pluriel me semble plus juste) élites ne seraient pas accessibles au plus grand nombre.
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