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Liberté de faire / liberté d'être


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Posté

(Pardon pour le décalage dans la discussion, j'écris de chez moi et je passe sur Internet pour poster et relever les nouvelles)

J'ai un raisonnement à vous soumettre.

1) L'individualisme, au sens d'un idéal d'accomplissement de chacun, défend la liberté d'être. L'accomplissement personnel implique un entourage qui juge et pèse moins, c'est à dire une morale moins forte.

Le progressisme défend la progression de la société, ce qui équivaut à la remise en cause permanente de l'ordre établi. La fin de l'ordre établi, c'est l'ouverture à toute nouveauté et à tout étranger, c'est la fin de la morale locale de la société. Défendre la progression de la société, c'est en fait un moyen de défendre l'individu contre la société.

Il est donc cohérent d'être progressiste et individualiste : le progressisme est un moyen de défendre l'idéal individualiste.

2) Le libéralisme défend la liberté d'agir.

Dans les sociétés occidentales contemporaines, des administrations (assurances et services publiques) prennent en charge notamment les vieux, les sans-emplois et les malades. Lorsque les cotisations à ces administrations sont obligatoires, elles réduisent la liberté d'agir. Cependant elles augmentent simultanément la liberté d'être en libérant l'individu contribuable du poids de ses proches.

On peut donc en déduire que, en Occident, au moins en ce qui concerne la prise en charge administrative des personnes en difficulté, la liberté d'être serait réduite par une augmentation de la liberté d'agir. Un passage au libéralisme (la liberté d'agir) réduirait l'individualisme (la liberté d'être).

Il est donc incohérent d'être libéral et individualiste en Occident.

3) Conclusion : la position du progressiste libéral devient difficile à justifier : serait-il un progressiste non-individualiste ? Mais alors, pour quelle raison être progressiste ? Il est plus probable que les libéraux progressistes soient en fait aussi des individualistes : ils défendent une position incohérente.

Cette conclusion est-elle vraie ? La question que je (re)pose est, le libéralisme est-il cantonné à la seule défense de la liberté d'agir ? Ou bien la liberté d'être est-elle aussi défendue ?

Et quelqu'un sait quelle nature de liberté est défendue par les socialistes/communistes ?

Posté
(Pardon pour le décalage dans la discussion, j'écris de chez moi et je passe sur Internet pour poster et relever les nouvelles)

J'ai un raisonnement à vous soumettre.

1) L'individualisme, au sens d'un idéal d'accomplissement de chacun, défend la liberté d'être. L'accomplissement personnel implique un entourage qui juge et pèse moins, c'est à dire une morale moins forte.

Le progressisme défend la progression de la société, ce qui équivaut à la remise en cause permanente de l'ordre établi. La fin de l'ordre établi, c'est l'ouverture à toute nouveauté et à tout étranger, c'est la fin de la morale locale de la société. Défendre la progression de la société, c'est en fait un moyen de défendre l'individu contre la société.

Il est donc cohérent d'être progressiste et individualiste : le progressisme est un moyen de défendre l'idéal individualiste.

2) Le libéralisme défend la liberté d'agir.

Dans les sociétés occidentales contemporaines, des administrations (assurances et services publiques) prennent en charge notamment les vieux, les sans-emplois et les malades. Lorsque les cotisations à ces administrations sont obligatoires, elles réduisent la liberté d'agir. Cependant elles augmentent simultanément la liberté d'être en libérant l'individu contribuable du poids de ses proches.

On peut donc en déduire que, en Occident, au moins en ce qui concerne la prise en charge administrative des personnes en difficulté, la liberté d'être serait réduite par une augmentation de la liberté d'agir. Un passage au libéralisme (la liberté d'agir) réduirait l'individualisme (la liberté d'être).

Il est donc incohérent d'être libéral et individualiste en Occident.

3) Conclusion : la position du progressiste libéral devient difficile à justifier : serait-il un progressiste non-individualiste ? Mais alors, pour quelle raison être progressiste ? Il est plus probable que les libéraux progressistes soient en fait aussi des individualistes : ils défendent une position incohérente.

Cette conclusion est-elle vraie ? La question que je (re)pose est, le libéralisme est-il cantonné à la seule défense de la liberté d'agir ? Ou bien la liberté d'être est-elle aussi défendue ?

Et quelqu'un sait quelle nature de liberté est défendue par les socialistes/communistes ?

Ton approche rejoint certains de mes questionnements actuels, je dois avouer. Je vois pour ma part deux formes d'individualisme : l'individualisme discipliné et éthique, sans lequel une société libérale est impossible et ne peut se maintenir; et un individualisme hédoniste et amoral, celui que tu nommes "liberté d'être". Dans nos sociétés, le Léviathan se fonde en partie sur une idéologie de l'émancipation : en gros, l'individu doit être délivré de ses soucis et tracas pour "s'épanouir", de sorte que l'Etat prend tout en main. Dans cette optique, c'est d'ailleurs plus le Brave New World que 1984. L'émancipation idéologisée, la délivrance des contingences, n'est pas la vraie liberté en d'autres termes.

Posté

@RH: OK, deux "individualismes", on se rejoint peut-être effectivement. Sauf que je ne parle pas de l'égoïsme, qui est une constante. Il faut peut-être d'ailleurs que je renomme. Pour moi la "liberté d'être" est limitée par des contraintes "personnelles". Contrairement à la "liberté d'agir" qui est limitée par des contraintes impersonnelles, c'est à dire des contraintes qui ne s'adressent pas en particulier à l'individu qui les subit. Peut-être que ces deux notions seraient mieux désignées par "liberté personnelle" (liberté d'être) et "liberté impersonnelle" (liberté d'agir).

@POE: La liberté d'être (faible en Afrique) est entravée par des sentiments d'être plus ou moins légitime à sortir de la place qu'on a par la coutume (ie. par des habitudes). Ces entraves sont les mêmes que celles qu'on supporte en Europe lorsqu'on a une famille « possessive » ou rigide. On n'est pas sur le même plan que le droit libéral. Même si les sanctions communautaires (familiales) peuvent parfois être illégales.

@Largo Winch: La grande liberté d'être dans la civilisation occidentale, est entretenue de force par des administrations : les malades, les vieux, les sans-emploi ne sont plus pris en charge par les familles. C'est ce qui permet de desserrer les liens familiaux. C'est ce qui permet à chacun d'être libre de devenir « lui-même ». Par contre, ça passe par une moindre liberté d'agir car il faut financer ces organismes. Libérer les secteurs de la santé, des retraites, du chômage, cela mènerait mécaniquement à plus de soutien familial, donc moins de liberté d'être, moins d'individualisme. Ensuite, la liberté d'être, c'est aussi la liberté de penser sans être jugé. Penser moins librement, c'est moins innover. Mécaniquement aussi.

Posté
Ce n'est pas L'État qui empêche d' « être soi », mais l'entourage.

Si l'état m'empêche de mettre du colza dans mon véhicule, qu'il m'empêche de vendre mon super livre sur les bienfaits de l'ortie et qu'il condamne l'association qui me vend les graines que j'utilise (tout ça par volonté individuelle de protéger l'environnement) il m'empêche d'être moi, de vivre comme je l'ai décidé.

Du point de vue de l'accomplissement personnel (visé par la liberté d'être), les interdictions de faire, si elles s'appliquent à tous également, ne sont pas forcément destructrices. Elles sont assimilées à des impossibilités physiques comme, par exemple, l'incapacité d'aller sur Saturne.

Justement, une bonne partie des interdictions sont arbitraires, certains obtiennent des dérogations, d'autres non.

Il y a aussi les interdictions type numérus clausus.

Je propose de les distinguer. J'ai mon idée sur pourquoi nulle-part on a les deux.

Tu penses que cette distinction est valable pour les autres continents ?

Je me dis aussi que cette distinction est pertinente (outre pour l'Afrique/l'Europe) lorsque certains ici affirment qu'au moyen âge on était « plus libre » que maintenant. Il s'agissait en fait juste de liberté de faire. Des individualistes qui regrettent aujourd'hui cette ancienne liberté, sont en fait dans une illusion rétrospective. L'absence de liberté d'être leur ferait préférer la civilisation occidentale contemporaine, moins libre de faire, mais plus libre d'être.

Encore une fois, si tu n'es pas libre de faire ce qui te semble bon pour toi (selon tes convictions, ta foi…) comment peux-tu penser être libre "d'être" (puisque tu ne peux pas agir selon toi) ?

Invité jabial
Posté

Laffreuxthomas, ce que tu appelles "liberté d'être" ne relève pas de la liberté, c'est du pouvoir.

Posté
Je pense qu'on peut opposer la liberté de faire à la liberté d'être.

  • Ce qui bride la liberté de faire est la législation. Le libéralisme défend la liberté de faire et s'oppose à la législation.
  • Ce qui limite la liberté d'être est la morale. L'individualisme comme idéal d'accomplissement personnel, et surtout le projet progressiste, promeut la liberté d'être et entre souvent en conflit avec la morale.

Cependant, dans une certaine mesure, être qui l'on veut est un préalable à faire ce que l'on veut. Par exemple la liberté dans les échanges (liberté de faire), est largement limitée lorsque la morale est forte : les proches influencent les choix de la personne qui échange, selon ce qu'ils jugent être bien ou mal.

De plus, Charles Taylor souligne qu'une personne se construit grâce au regard de son entourage, des « autres qui comptent », donc de leur morale. La liberté d'être implique un minimum de morale. la liberté d'être ne peut donc pas devenir totale.

En Afrique, milieu communautaire, on a une grande liberté de faire (qui n'est pas limitée par l'État) mais une liberté d'être plutôt réduite. Dans les sociétés étatisées d'Occident, on a une grande liberté d'être mais une faible liberté de faire.

La séparation liberté de faire / liberté d'être est-elle pertinente ?

L'affirmation de Taylor est selon moi assez juste. C'est d'ailleurs un des fantasmes de l'éducateur spécialisé à savoir construire une personne comme on voudrait qu'elle soit. Dans ce sens l'entourage, l'environnement peut-être un frein à ce que tu nommes la "liberté d'être". En effet si l'individu tient trop compte des differentes manières d'être, penser et sentir de son entourage il devient prisonnier de celui-ci et ne peut donc construire cette liberté d'être.

Dans certains cas si l'entourage remarque que l'individu n'agit pas selon sa logique, selon ses volontés qu'il voudrait que l'individu soit, une certaine frustration du groupe, de l'entourage peut naître d'où des comportements qui peuvent se rapprocher de la maltraitance. La difficulté d'un entourage étant sans doute de traiter l'autre comme un égal.

Lorsque un entourage croit quelque chose vrai, cette chose vrai ne l'est que dans ses conséquences. Pour une liberté d'être, pour s'émanciper d'un entourage, il s'agit sans doute, pour l'individu, de faire en sorte que cette chose ne devienne pas vrai.

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