free jazz Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Je n'ai pas généralisé en disant que l'idée que le mal provient de l'ignorance représente tout la pensée antique, je dit que cette idée, largement dépassée, était une pensée antique.C'est vraiment caricaturer la deux fois millénaire pensée chrétienne. Et ce qu'il y avait de bon dans la pensée hellénistique a parfaitement été intégré dans la pensée chrétienne, où, clairement, domine Aristote plus que Platon (de fait, ce sont plutôt les hérésies qui privilégiaient Platon). Disons que c'est un énorme raccourci effectivement, qui appelle des nuances. Il est vrai que les pères de l'Eglise étaient imprégnés de stoïcisme romain, puis ensuite c'est le néo-platonisme qui domina avec Saint Augustin. En revanche Aristote ne fut introduit que beaucoup plus tardivement au moyen-âge, pour la bonne raison que ses écrits étaient perdus en Europe et qu'ils ne furent redécouverts que par l'intermédiaire des philosophes arabes. Tout cela appelle une discussion qui m'intéresse et je voudrais ouvrir un topic sur ce sujet autour duquel on a beaucoup tourné dans nos débats: Y a-t-il une philosophie chrétienne?
José Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Y a-t-il une philosophie chrétienne? Sans aucun doute. Mais évolutive et multiforme (2.000 ans, c'est long).
Kimon Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Pour comprendre l'affirmation initiale de Lucilio sur le rapport entre le mal et l'ignorance dans la pensée chrétienne vs antique, il faut lire l'article intitulé "Passion, perfection et âme matérielle dans l'utopie stoïcienne et chez saint Augustin" de l'ouvrage suivant :
Ronnie Hayek Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Si cette analyse devait se révéler correcte, cela montrerait que, encore une fois, les idéologies modernes sont bien des pensées en recul par rapport à la pensée chrétienne car la relation "le mal provient de l'ignorance" relève de l'archaïque pensée des philosophes grecs anciens. Oui, c'est exactement mon propos (que j'ai déjà développé dans d'autres topics) : le progressisme, au sens de conception du monde propre à la modernité, est un primitivisme.
POE Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Je n'ai pas généralisé en disant que l'idée que le mal provient de l'ignorance représente tout la pensée antique, je dit que cette idée, largement dépassée, était une pensée antique. Pas spécifiquement antique. Pour le bouddisme également, l'ignorance est une des racines du mal. Pour les chrétiens également dailleurs. Conclusion : il ne s'agit pas du tout d'une idée dépassée, bien au contraire, c'est une sorte de constante de toutes les formes de spiritualité.
Polydamas Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 En revanche Aristote ne fut introduit que beaucoup plus tardivement au moyen-âge, pour la bonne raison que ses écrits étaient perdus en Europe et qu'ils ne furent redécouverts que par l'intermédiaire des philosophes arabes. Je digresse mais tu aurais des sources à ce sujet ? Y a-t-il vraiment eu rupture totale entre l'héritage grec antique et l'Europe chrétienne du haut Moyen Age ? Après l'effondrement définitif de l'Empire romain, les rares manuscrits d'Aristote ou de Galien subsistant dans des monastères n'avaient-ils réellement plus aucun lecteur capable de les déchiffrer ? Non, réplique Sylvain Gouguenheim. Même devenus ténus et rares, les liens avec Byzance ne furent jamais rompus : des manuscrits grecs circulaient, avec des hommes en mesure de les lire. Durant les prétendus "âges sombres", ces connaisseurs du grec n'ont jamais fait défaut, répartis dans quelques foyers qu'on a tort d'ignorer, notamment en Sicile et à Rome. On ne souligne pas que de 685 à 752 règne une succession de papes… d'origine grecque et syriaque ! On ignore, ou on oublie qu'en 758-763, Pépin le Bref se fait envoyer par le pape Paul Ier des textes grecs, notamment la Rhétorique d'Aristote. Cet intérêt médiéval pour les sources grecques trouvait sa source dans la culture chrétienne elle-même. Les Evangiles furent rédigés en grec, comme les épîtres de Paul. Nombre de Pères de l'Eglise, formés à la philosophie, citent Platon et bien d'autres auteurs païens, dont ils ont sauvé des pans entiers. L'Europe est donc demeurée constamment consciente de sa filiation à l'égard de la Grèce antique, et se montra continûment désireuse d'en retrouver les textes. Ce qui explique, des Carolingiens jusqu'au XIIIe siècle, la succession des "renaissances" liées à des découvertes partielles. Source
Abominable NH Posted April 22, 2008 Report Posted April 22, 2008 Oui, c'est exactement mon propos (que j'ai déjà développé dans d'autres topics) : le progressisme, au sens de conception du monde propre à la modernité, est un primitivisme. Marrant d'ailleurs ton topic sur le thème "à quelle époque auriez-vous aimé vivre ?".
free jazz Posted April 28, 2008 Report Posted April 28, 2008 Je digresse mais tu aurais des sources à ce sujet ? Il y a de nombreuses sources philologiques sur la transmission des textes anciens par l'influence de la philosophie islamique. D'ailleurs ton article commence par prendre soin de préciser que l'interprétation qu'il propose est pour le moment marginale : "Etonnante rectification des préjugés de l'heure, ce travail de Sylvain Gouguenheim va susciter débats et polémiques. Son thème : la filiation culturelle monde occidental-monde musulman. Sur ce sujet, les enjeux idéologiques et politiques pèsent lourd. Or cet universitaire des plus sérieux, professeur d'histoire médiévale à l'Ecole normale supérieure de Lyon, met à mal une série de convictions devenues dominantes. Ces dernières décennies, en suivant notamment Alain de Libera ou Mohammed Arkoun, Edward Saïd ou le Conseil de l'Europe, on aurait fait fausse route sur la part de l'islam dans l'histoire de la culture européenne." L'auteur a raison de dire que l'oeuvre d'Aristote continua à être étudiée dans l'Empire byzantin, mais à partir du IIIè siècle, elle fut intégrée au néo-platonisme comme propédeutique dans le cadre d'une certaine orthodoxie naissante. Les neo-platoniciens font de la lecture d'Aristote (surtout des oeuvres logiques) le préalable de de la lecture de Platon, dans le cadre d'un programme d'enseignement très structuré. En outre à part les traités de logique, les textes qui circulèrent ensuite en occident étaient surtout constitués de l'enseignement exotérique d'Aristote (les dialogues), alors que ceux qui forment le corpus à partir du moyen-âge correspondent à son enseignement ésotérique (Physique, Métaphysique, Ethique, Politiques). http://www.cosmovisions.com/Peripatetisme.htmAristote est commenté et paraphrasé jusqu'à la fermeture de l'école, en 529, par Justinien. Tous ces commentateurs, de Porphyre à Simplicius et à Boèce, ne sauraient, à coup sûr, être considérés comme de fidèles disciples d'Aristote - ainsi qu'on l'a fait trop souvent depuis le Moyen âge - puisqu'ils l'interprètent avec les théories néo-platoniciennes; mais leur oeuvre témoigne de l'importance qu'on accorde alors au péripatétisme. Et tous ceux qui, par la suite, étudieront directement ou indirectement les néo-platoniciens, relèveront d'Aristote, comme tous ceux qui liront Aristote l'expliqueront en suivant ses commentateurs néo-platoniciens. En ce sens, les chrétiens néo-platoniciens, saint Basile, Grégoire de Nazianze et Grégoire de Nysse, saint Augustin, Synésius, Nemésius, Enée de Gaza relèvent d'Aristote. Quand la rupture est complète entre les deux directions religieuses, les chrétiens continuent à s'occuper d'Aristote et s'efforcent de faire entrer, dans leur philosophie, tout ce que le christianisme peut accepter de ses doctrines. Jean Philopon, David l'Arménien, commentent Aristote et, tout en faisant bon nombre d'emprunts au néo-platonisme, transmettent à leurs successeurs des ouvrages et des doctrines du maître. Boèce - que le Moyen âge a considéré comme chrétien - traduit et commente les ouvrages logiques d'Aristote et l'Isagoge de Porphyre. Avec Cassiodore, Isidore de Séville et Bède le Vénérable, il fournira aux scolastiques occidentaux, du IXe au XIIe siècle, le cadre dans lequel ils feront entrer des théories chrétiennes et néo-platoniciennes. Enfin Jean Damascène, qui vit vers 700, donne, dans la Pègè gnôseôs, une exposition des doctrines chrétiennes où la logique et l'ontologie péripatéticiennes tiennent une place considérable. Son influence n'a jamais cessé dans l'Orient chrétien et elle se fait sentir sur l'Occident à partir du XIIe siècle. On a coutume de faire d'Aristote le maître du Moyen âge. C'est une exagération manifeste. Car, du IXe siècle au XVe, on peut constater que des emprunts ont été faits - directement ou indirectement - à toutes les doctrines antiques, stoïcisme, éclectisme, même épicurisme, platonisme et surtout néo-platonisme. En second lieu, Aristote, quand il est étudié, est presque toujours interprété à l'aide des commentateurs néo-platoniciens. Par contre, les sources néo-platoniciennes, auxquelles on puise, contribuent à répandre certaines doctrines métaphysiques d'Aristote. Le Moyen âge peut se diviser en deux périodes, l'une antérieure, l'autre postérieure au XIIIe siècle. Dans la première, la philosophie compte des représentants chez les Byzantins, les Arabes, les juifs et les chrétiens d'Occident. Sans parler des doctrines aristotéliques, qui se propagent à Byzance par les Pères et les docteurs chrétiens de l'époque antérieure - car en un temps où l'on fait si souvent appel à l'autorité, la question des origines et des influences est d'une complexité infinie - Photius, Psellos, Jean Italus, Michel d'Ephèse, Eustrate, bien d'autres encore, exposent ou commentent les théories logiques, parfois métaphysiques d Aristote. Les Nestoriens(Nestorius) de Syrie font connaître en Perse la philosophie d'Aristote comme celle de Platon. De même les monophysites syriens ou jacobites s'appliquent à l'étude d'Aristote, Sergius de Resaina le traduit en syriaque. Et les médecins syriens le font connaître aux Arabes. Des écoles de traducteurs, au IXe siècle, mettent en arabe les oeuvres d'Aristote, celles de certains péripatéticiens, spécialement d'Alexandre d'Aphrodise et de Théophraste, etc.; celles des néoplatoniciens, qui avaient interprété Aristote, Porphyre, Thémistius, Jean Philopon, etc. Avicenne, en Orient, Averroès, en Espagne, témoignent une vive admiration pour Aristote : ils le paraphrasent, le commentent, le continuent. Mais l'Aristote des philosophes arabes est un Aristote que l'on voit à travers le néo-platonisme et à qui l'on attribue déjà des ouvrages, dont l'essentiel vient des continuateurs de Plotin, de Proclus et de ses disciples. Et à côté de ces péripatéticiens - qui sont bien souvent, en fait, des néoplatoniciens - Al-Kindi, Alfarabi, Avicenne, en Orient, Avempace, Abubacer, Averroès, en Occident - il y a : des atomistes qui combattent le péripatétisme; des mystiques comme Algazel qui combattent toute philosophie; des théologiens qui usent de la logique péripatéticienne contre leurs adversaires; des théologiens qui ne veulent rien avoir de commun avec la philosophie et qui, à la fin du XIIe siècle, deviennent les maîtres dans le monde de l'Islam et font détruire ou brûler les oeuvres des philosophes. Citons également Bréhier, un excellent vulgarisateur sur ces questions, dont je recommande la lecture : II. — L’INFLUENCE D’ARISTOTE ET DU NÉOPLATONISMEL’influence grecque, contraire à cette théologie, se répandit d’abord grâce aux traductions du grec en syriaque par les chrétiens nestoriens, qui, d’abord à l’école d’Edesse (431-489), puis dans les cloîtres de Syrie, enfin, au VIIe siècle, à Kennesre sur l’Euphrate, traduisent, outre l’Organon d’Aristote, le traité pseudo-aristotélicien Du monde et les oeuvres de Galien. Au IXe siècle, après la fondation de Bagdad, on traduit beaucoup en arabe soit du syriaque, soit du grec, et le calife lui-même fonde, en 832, dans sa capitale, une sorte de bureau de traducteurs. Vers la fin du IXe siècle, un Arabe possédait en sa langue l’oeuvre presque entière d’Aristote (sauf la Politique), avec les commentaires d’Alexandre, de Porphyre, de Thémistius, d’Ammomus, de Jean Philopon ; il pouvait connaître en outre quelques dialogues de Platon comme le Timée, la République, le Sophiste ; la doxographie grecque lui était accessible, grâce à la traduction des Opinions des Philosophes de Plutarque sans compter des faux d’Empédocle et de Pythagore ; enfin la médecine, avec Galien, l’astronomie avec l’Almageste de Ptolémée, leur étaient connues. (…) II. — LA DIFFUSION DES OEUVRES D’ARISTOTE DANS L’OCCIDENT Ces conflits sont encore accentués par la connaissance complète des oeuvres d’Aristote qui, traduites en latin, soit de l’arabe soit du grec, ouvrent à la pensée philosophique un champ jusqu’ici presque inconnu et donnent pour la première fois la révélation directe d’une pensée païenne, qui n’a été aucunement modifiée par son contact avec la pensée chrétienne. Dès le milieu du XIIe siècle, à Tolède, un collège de traducteurs, sous l’impulsion de l’évêque Raymond (1126-1151), commence à traduire de l’arabe les Analytiques postérieurs avec le commentaire de Thémistius ainsi que les Topiques et les Réfutations des sophistes ; Gérard de Crémone (mort en 1187) traduit les Météores, Physique, Du ciel, De la génération et de la corruption, sans compter les apocryphes, la Théologie, le traité Des causes, celui Des causes des propriétés des éléments. Puis la connaissance du grec se répand ; on trouve dans des manuscrits du XIIe siècle une traduction de la Métaphysique (moins les livres M et N qui n’étaient point encore traduits en 1270) et même un commentaire sur ce livre ; et Guillaume Le Breton, dans sa chronique de l’année 1210, dit qu’on lisait à Paris la Métaphysique « récemment apportée de Constantinople et traduite du grec en latin ». Au cours du XIIIe siècle, Henri de Brabant, Guillaume de Moerbeke (1215-1286), un ami de saint Thomas d’Aquin, Robert Grosseteste, Bartholomée de Messine sont des hellénistes qui traduisent tout ou partie des oeuvres d’Aristote, et notamment la Politique, ignorée des philosophes arabes. On traduit aussi les oeuvres des commentateurs arabes ou même grecs, et des philosophes juifs ; Al Kindi, Al Farabi, Avicenne, Avicebron sont connus ; et au milieu du XIIIe siècle, on possède à Paris tous les commentaires d’Averroès, sauf celui de l’Organon. On peut concevoir l’effet foudroyant de ces découvertes sur des esprits avides d’instruction livresque, très mal préparés à comprendre et à juger Aristote, parce qu’ils manquaient du sens historique nécessaire pour le replacer dans son cadre, parce qu’ils ne l’abordaient que par des traductions qui, suivant l’usage de l’époque, étaient du mot à mot souvent incompréhensible et enfin, parce qu’ils n’avaient, pour lutter contre cette influence prestigieuse, le secours d’aucune doctrine adverse ni surtout d’aucune méthode à opposer à la solide construction aristotélicienne. De Platon, on n’avait traduit au XIIIe siècle, que le Phédon et le Ménon ; on connut dans la deuxième moitié du même siècle les Hypotyposes de Sextus Empiricus ; rien de tout cela ne faisait équilibre au péripatétisme. Or cette doctrine, si forte de la faiblesse des autres, contenait tout autre chose que ce que les théologiens demandaient à la philosophie ; la philosophie, toujours servante, devait être utilisée comme préliminaire et auxiliaire ; on ne voulait tenir d’elle qu’une méthode de discussion et non pas une affirmation sur la nature des choses. Et voici qu’Aristote apporte une physique qui, avec la théologie qui lui est liée, suggère une image de l’univers complètement incompatible avec celle qu’impliquent la doctrine et même la vie chrétiennes : un monde éternel et incréé, un dieu qui est simplement moteur du ciel des fixes et dont la providence et même la connaissance ne s’étendent point aux choses du monde sublunaire ; une âme qui est la simple forme du corps organisé et qui doit naître et disparaître avec lui, qui n’a par conséquent aucune destinée surnaturelle et supprime par suite toute signification au drame du salut : création, chute, rédemption, vie éternelle, voilà tout ce qu’Aristote ignorait et, implicitement, niait. Il ne s’agissait plus maintenant de ce platonisme éclectique qui, sans doute, offrait un certain danger puisqu’il aboutissait aux solutions erronées de Scot Érigène et d’Abélard, mais qui, du moins, outre qu’il pouvait, grâce à saint Augustin et à l’Aréopagite, s’accommoder assez bien avec le dogme, manifestait la préoccupation de la réalité divine et de la vie surnaturelle de l’âme : l’aristotélisme, lui, se refusait même à poser les problèmes et à leur donner un sens quelconque. En désaccord formel avec la théologie chrétienne, il faut ajouter que le bloc doctrinal, formé par la physique d’Aristote, ne s’accordait pas mieux avec la science expérimentale qui fut la seule au Moyen âge à mériter vraiment ce nom, c’est-à-dire avec l’astronomie ; la connaissance très certaine que l’on avait alors de la variation des distances des planètes par rapport à la terre pendant le cours d’une de leurs révolutions, aurait dû rendre impossible une théorie des cieux qui enchâssait la planète sur une sphère qui avait la terre pour centre et qui était en recul sur la doctrine de Ptolémée (l’Almageste avait été traduit par Gérard de Crémone en 1175) ou la doctrine pythagoricienne du mouvement de la terre, connue dès le haut Moyen âge : circonstance qui, à ce moment, n’arrête pas le progrès de l’aristotélisme mais qui, plus tard, une fois qu’il eût triomphé, fut une des causes les plus importantes de sa ruine. Ce qui importait à ce moment, c’est que l’aristotélisme, loin de servir à la politique universitaire des papes, menaçait d’être un gros obstacle. Albert le Grand lui-même ne dénonçait-il pas l’influence de la physique d’Aristote sur les idées hétérodoxes de David de Dinant ? Aussi, dès 1211, le concile de Paris défend d’enseigner la physique d’Aristote, le légat du pape Robert de Courçon, en donnant, en 1215, ses statuts à l’Université de Paris, tout en permettant les livres logiques et éthiques d’Aristote, défend de lire la Métaphysique et la Philosophie naturelle. Interdiction vaine sans doute, devant l’engouement du public, puisque Grégoire IX se borne à commander de fabriquer des éditions d’Aristote expurgées de toute affirmation contraire au dogme. Il n’en est pas moins vrai que, en 1255, la Physique et la Métaphysique étaient au programme de la Faculté des arts, que, à partir de ce moment, l’autorité condamne non plus Aristote, mais ceux qui tiraient de ses livres des doctrines contraires à l’orthodoxie, enfin qu’Aristote devient peu à peu une autorité indiscutable : c’est l’histoire de cette christianisation d’Aristote que nous allons maintenant raconter. http://classiques.uqac.ca/classiques/brehi…t1/brephi_1.pdf On voit ainsi à quel point la découverte du corpus aristotélicien (distinctement du platonisme) a profondément modifié (révolutionné?) la théologie au moyen-âge.
Polydamas Posted April 28, 2008 Report Posted April 28, 2008 On voit ainsi à quel point la découverte du corpus aristotélicien (distinctement du platonisme) a profondément modifié (révolutionné?) la théologie au moyen-âge. Je suis en train de lire le bouquin de Gougheneim où il montre justement qu'Aristote et les écrits grecs étaient déjà majoritairement connus à la cour de Pépin le Bref et de Charlemagne, via la Sicile et Syracuse, et que par conséquent, l'apport via la civilisation islamique est probablement surestimé. Ensuite, on l'a effectivement redécouvert. Mais est-ce vraiment du à l'apport islamique ? Au fait, on a déjà entamé un fil sur le sujet…
etienne w Posted April 28, 2008 Report Posted April 28, 2008 Je suis en train de lire le bouquin de Gougheneim où il montre justement qu'Aristote et les écrits grecs étaient déjà majoritairement connus à la cour de Pépin le Bref et de Charlemagne, via la Sicile et Syracuse, et que par conséquent, l'apport via la civilisation islamique est probablement surestimé. Ensuite, on l'a effectivement redécouvert. Mais est-ce vraiment du à l'apport islamique ? En fait, beaucoup de "choses" ont été redécouvertes aux XI et XII siècles, non par l'islam, mais par l'intensification des échanges avec Constantinople. Ce qui a permis de redécouvrir tout le droit naturel antique, inscrit dans les codex civilis des codes justiniens et théodosiens. Petronne, Suetone, etc… tous les écrits latins ont été entretenus par des moines chrétiens et réexploités à cette date. Naissance à ce moment des premières Universités sur le Continent (Versailles, Bologne, Aix au XIV) avec la naissance de l'éxegèse, la grande Glose, etc…
Alex67 Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 En France la DC c'est l'UDF ou le Modem ou le Nouveau Centre , ca dépend si on considère la période d'avant le "big crunch" de 2002 ou d'après Je crois que l'UDF ne se réclame plus de la démocratie chrétienne depuis longtemps. Personnellement, je ne vois plus qu'un seul parti démocrate chrétien, c'est le Forum des Républicains Sociaux (1 ministre, 3 députés, 8000 membres). C'est un parti à la fois social et conservateur se basant expréssément sur les valeurs chrétiennes. Voilà le site du FRS : http://www.frs-ladroitehumaine.fr
pankkake Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Chaque mot (à part 'des') du nom de ce parti me fait rire. Bien joué. Le frs s'alarme du taux de production clandestine de cannabis
h16 Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Ne te moque pas. Il s'agit de La Droite Humaine, par opposition à la Gauche Bestiale et à la Droite Animale.
Alex67 Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Le frs s'alarme du taux de production clandestine de cannabis Oui, tu as raison, c'est inquiétant cette emprise des drogues dans la société.
José Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Oui, tu as raison, c'est inquiétant cette emprise des drogues dans la société. Surtout l'addiction à l'État. Putain de drogue dure !
h16 Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Oui, tu as raison, c'est inquiétant cette emprise des drogues dans la société. C'est inquiétant aussi l'emprise des raisonnements trop court dans cette société. Que fait le FRS ?
CMuller Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Oh ne soyez pas si critiques, en fouillant on trouve des propositions cool, comme "un meilleur accompagnement du désir d'enfant des couples", c'est le seul parti de ma connaissance à faire ainsi la promotion de la partouze.
pankkake Posted May 15, 2008 Report Posted May 15, 2008 Notez qu'en cherchant "Internet" sur leur site j'ai vu des discours plutôt pas cons (pour une personnalité politique) de Christine Boutin. Tout n'est pas à jeter !
melodius Posted June 2, 2008 Report Posted June 2, 2008 Je suis en train de lire le bouquin de Gougheneim où il montre justement qu'Aristote et les écrits grecs étaient déjà majoritairement connus à la cour de Pépin le Bref et de Charlemagne, via la Sicile et Syracuse, et que par conséquent, l'apport via la civilisation islamique est probablement surestimé. Ensuite, on l'a effectivement redécouvert. Mais est-ce vraiment du à l'apport islamique ?Au fait, on a déjà entamé un fil sur le sujet… Sans Avicenne et sans Averroës, pas de Saint-Thomas. Ce simple fait me suffit amplement à considérer que la philo islamique a eu un apport déterminant à la philo occidentale. D'ailleurs, tout rationaliste - et je n'entends pas par là les gnostiques modernes, surreprésentés sur ce forum - a une dette de reconnaissance éternelle envers la philo islamique.
alex6 Posted June 2, 2008 Report Posted June 2, 2008 Sans Avicenne et sans Averroës, pas de Saint-Thomas. Interessant. J'aurais plutot dis "sans St Augustin pas de St Thomas" mais les penseurs musulmans ont ete des influences plus que des "declencheurs" de la pensee du docteur angelique. Ne pas oublier, en toute objectivite, que l'entree dans le monde occidental de la pensee grecque est beaucoup du a la fuite des penseurs chretiens (mozarabes notamment) suite a l'invasion de la peninsule hispanique que reellement a un transfert de connaissance. Il est cependant certain que l'oeuvre de traduction des musulmans eu un role majeur en faisant gagner du temps mais ces ecrits seraient parvenus tot ou tard en occident avec l'affaiblissement de l'empire byzantin.
Punu Posted June 2, 2008 Report Posted June 2, 2008 Sans Avicenne et sans Averroës, pas de Saint-Thomas. Ce simple fait me suffit amplement à considérer que la philo islamique a eu un apport déterminant à la philo occidentale. D'ailleurs, tout rationaliste - et je n'entends pas par là les gnostiques modernes, surreprésentés sur ce forum - a une dette de reconnaissance éternelle envers la philo islamique. Allons plus loin : sans Chinois, pas de papier, donc la Chine a eu un apport déterminant à la civilisation occidentale.
roubachov Posted June 2, 2008 Report Posted June 2, 2008 Allons plus loin : sans Chinois, pas de papier, donc la Chine a eu un apport déterminant à la civilisation occidentale.
melodius Posted June 3, 2008 Report Posted June 3, 2008 Allons plus loin : sans Chinois, pas de papier, donc la Chine a eu un apport déterminant à la civilisation occidentale. Je crois que ton dégoût manifeste à accepter certaines vérités mérité une bonne analyse introspective. Tu peux ironiser autant que tu veux, mais la réalité est ce qu'elle est.
melodius Posted June 3, 2008 Report Posted June 3, 2008 Interessant. J'aurais plutot dis "sans St Augustin pas de St Thomas" mais les penseurs musulmans ont ete des influences plus que des "declencheurs" de la pensee du docteur angelique. Ne pas oublier, en toute objectivite, que l'entree dans le monde occidental de la pensee grecque est beaucoup du a la fuite des penseurs chretiens (mozarabes notamment) suite a l'invasion de la peninsule hispanique que reellement a un transfert de connaissance. Il est cependant certain que l'oeuvre de traduction des musulmans eu un role majeur en faisant gagner du temps mais ces ecrits seraient parvenus tot ou tard en occident avec l'affaiblissement de l'empire byzantin. Le débat est faussé parce qu'on tient absolument à retrouver "La Grèce" partout. Or, ce qui a été déterminant pour la naissance de la pensée des scholastiques, ce en quoi précisément elle diffère de la pensée de St-Augustin, c'est l'apport de la philo arabe, commentant elle-même les textes grecs auxquels elle avait accès. Il ne s'agit donc pas tant d'Aristote, mais des commentateurs contemporains d'Aristote (comme toujours du reste, je doute qu'Aristote se reconnaitrait dans ses commentateurs de quelque époque que ce soit) et il se fait qu'ils étaient, à cette époque, musulmans, après avoir été, à l'époque d'Augustin, païens et chrétiens. L'incapacité de certains à reconnaître cet apport démontre tout simplement qu'ils ignorent leurs propres racines et ne comprennent le monde qu'au regard des préjugés du moment - ça vaut d'ailleurs également pour tous les propagandistes de la société multiculturelle. En fait, on en revient toujours au même point; l'esprit des "Lumières". Si on considère, contre toute évidence, que les Lumières ont été un grand pas en avant pour la civilisation occidentale, logiquement, tout ce qui ne relève pas du platonisme vulgaire et de la gnose est étranger à l'Occident. Le génie des Lumières, c'est la table rase et les oeillères XXXL.
alex6 Posted June 3, 2008 Report Posted June 3, 2008 Ce qui m'interesse c'est la nuance entre "sans Avicenne et Averroes pas de St Thomas" et "sans Avicenne et Averroes, St Thomas mais un peu plus tard". Je sais que St Thomas a ete influence par les penseurs arabes mais sans que ces derniers eurent un role indispensable. Albert le Grand etait un grand commentateur d'Aristote et St Thomas a developpe sa philosophie dans des environnements totalement chretiens (confrontation avec les franciscains), meme si parfois sur des supports issus de traductions arabes mais pas uniquement. Reconnaitre les apports musulmans est honnete mais il ne sert a rien d'en exagerer la portee. Ces oeuvres de traductions etaient par ailleurs motives par la perte de puissance theologique de l'islam face a l'empire byzantin et n'avait pour ainsi dire que peu de vocation a l'universalite. C'est a ce titre que j'ai juge utile de rappeler que la pensee arabe est entree en France plus par les fuites des penseurs devant l'invasion arabe de l'Espagne que par de veritables discussions philosophiques entre musulmans/"occidentaux".
Punu Posted June 3, 2008 Report Posted June 3, 2008 Je crois que ton dégoût manifeste à accepter certaines vérités mérité une bonne analyse introspective. Tu peux ironiser autant que tu veux, mais la réalité est ce qu'elle est. Je pensais que les ad hominem n'étaient pas des arguments pertinents dans le cadre d'une discussion rationnelle - concept éminemment musulman comme tu le rappelles -, car à ce jeu-là, je peux facilement te renvoyer le compliment. Ce que tu écris n'est pas, à mon sens, pertinent, parce que "la philo musulmane" n'existe pas plus que la "philo occidentale", notions qui couvrent des époques bien trop longues et des philosophes bien trop nombreux pour être pertinentes, à quoi s'ajoute l'idée - fausse, à mon sens - que huit siècles de philosophie puissent miraculeusement découler de deux personnes. Enfin, que certains individus aient contribué à un domaine de façon exceptionnelle est une réalité, mais réduire tous ceux qui les ont suivis chronologiquement à des continuateurs est aussi erroné - à mon sens toujours - que de dire que les "mathématiques hindoues" ont eu un apport déterminant aux "mathématiques occidentales" en inventant le zéro.
melodius Posted June 4, 2008 Report Posted June 4, 2008 Il faudrait savoir : soit on ne peut utiliser des termes généraux, et alors ta petite saillie chinoise est idiote - ainsi d'ailleurs que l'utilisation du terme "civilisation occidentale", soit on le peut, et alors tu viens de te livrer à un merveilleux exercice en virtuosité verbale sans intérêt sur le fond. Je relève par ailleurs le straw-man selon lequel j'aurais affirmé que huit siècles de philo découleraient de deux personnes. Sinon, alex6, on peut déconstruire tant qu'on veut et imaginer ce qui se serait passé si tel ou tel événement ne s'était pas produit, mais finalement ce qui compte ce sont les événements qui se sont produits. Les scolastiques se référaient à Aristote en l'appelant "le philosophe" et à Averroës (Ibn Rushd) en l'appelant "le commentateur". Ca place bien le débat je trouve, et en examinant ce qu'en pensaient les principaux intéressés plutôt que les seconds couteaux de l'université française. http://www.newadvent.org/cathen/02150c.htm Refuser de reconnaître l'influence de la philo musulmane de cette époque sur la philo occidentale, c'est en fait refuser de reconnaître l'importance de la philo chrétienne, un peu à l'image d'un zozo à la Revel qui traite du MA en quelques pages méprisantes dans un opuscule consacré à "l'histoire de la philosophie" et dans lequel il fait par contre la part belle à toutes les gnoses chères à la gauche.
Punu Posted June 4, 2008 Report Posted June 4, 2008 La "saillie chinoise" servait précisément à montrer où mènent les généralisations abusives.
roubachov Posted June 4, 2008 Report Posted June 4, 2008 Refuser de reconnaître l'influence de la philo musulmane de cette époque sur la philo occidentale, c'est en fait refuser de reconnaître l'importance de la philo chrétienne, un peu à l'image d'un zozo à la Revel qui traite du MA en quelques pages méprisantes dans un opuscule consacré à "l'histoire de la philosophie" et dans lequel il fait par contre la part belle à toutes les gnoses chères à la gauche. Revel "inutile et incertain", en quelque sorte ?
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