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Lecture, méthode globule & B-A-BA


Adrian

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La première conférence de consensus sur la lecture avait fait date. Organisée en 2003, en plein débat passionnel autour des méthodes – « B-A-BA » contre « globale » –, elle avait permis de conclure à l’inefficacité des approches idéo-visuelles, consistant à « photographier » les mots. À l’inverse, les experts s’étaient entendus sur l’impérieuse nécessité d’apprendre méthodiquement le « code », c’est-à-dire l’ensemble des principes régissant les correspondances entre les lettres (ou groupes de lettres) et les sons.

Depuis, d’innombrables études ont été conduites, en France et dans le monde, avec des conclusions similaires. Aussi, loin de remettre en cause ces acquis, la nouvelle conférence de consensus organisée à la mi-mars à Lyon par le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) et l’Institut français d’éducation (Ifé) aura surtout permis de valider les pratiques pédagogiques qui, à l’intérieur de ce paradigme, marchent le mieux.

 

Parmi les recommandations présentées jeudi 7 avril à Paris, plusieurs portent, sans surprise, sur la maîtrise du code et l’identification des mots. « Dès la grande section de l’école maternelle, il faut enseigner aux élèves le principe alphabétique et leur faire acquérir la capacité d’analyser les mots oraux pour en identifier les composants phonologiques », avance le jury, composé d’experts, d’acteurs mais aussi d’usagers (parents d’élèves).

Décoder et encoder

Puis au CP, il ne faut pas se contenter de faire « décoder » les mots, de les faire lire, y compris – c’est essentiel – à haute voix. Il faut aussi – car cela s’avère plus efficace – les faire « encoder », autrement dit passer des sons à l’écrit. Et ce, paradoxalement, en imposant un rythme relativement soutenu, même aux élèves les moins avancés, comme l’a montré une vaste étude menée par le chercheur Roland Goigoux et présentée dans le cadre de la conférence. Il faut ainsi « introduire une dizaine de correspondances graphèmes/phonèmes dès le début du CP ». Car, souligne Jean-Emile Gombert, professeur émérite de psychologie cognitive et président du jury, « accéder rapidement à une autonomie de lecture est une formidable source de motivation ».

 

Autre point de consensus : on aurait tort de faire porter l’effort uniquement sur les débuts de l’apprentissage de la lecture, fin maternelle-début élémentaire. Alors qu’au fil des ans se creusent les écarts de niveaux, il importe de « poursuivre l’analyse phonologique et l’étude des correspondances graphèmes/phonèmes tant que l’élève éprouve des difficultés à oraliser les mots écrit, ceci tout au long du cycle 2 (NDLR : CP-CE1-CE2) voire du cycle 3 (CM1-CM2-6e) ».

Des efforts sur la compréhension

Il est de même essentiel, insiste le jury, d’inscrire dans la durée les efforts en matière de compréhension, « aussi longtemps que nécessaire pour les élèves moyens ou faibles ». On se rend compte en effet que parmi les mauvais lecteurs, beaucoup n’ont pas trop de mal à déchiffrer les mots mais ne comprennent pas ce qu’ils lisent…

Y remédier suppose de « développer le vocabulaire et la compréhension orale dès l’école maternelle » et de « consacrer un temps conséquent à l’étude de la langue par un travail systématique sur la dimension linguistique (vocabulaire, morphologie, syntaxe, inférences, types de texte) ». Une attention à la langue qui doit s’exercer dans le cadre de tous les apprentissages, et pas seulement en français.

Des programmes qui tiennent compte de la recherche scientifique

Ces pratiques validées, reste à les diffuser dans les salles de classe, alors que le corps enseignant se montre farouchement attaché à sa « liberté pédagogique ». D’où la suggestion de formations, initiales et continues, autour de la façon dont les élèves apprennent à lire.

En attendant, pour mettre en application une bonne part de ces recommandations, on mise surtout sur les nouveaux programmes du primaire et du collège attendus pour septembre prochain. « Des programmes qui, en matière de lecture notamment, n’ont jamais autant tenu compte des acquis de la recherche scientifique », vante Michel Lussault, leur principal artisan, par ailleurs directeur de l’Ifé.

Les vertus d’un enseignement « explicite »

Les recherches conduites depuis une quinzaine d’années ont montré la plus grande efficacité des professeurs recourant à un enseignement « explicite » ou « direct », basé sur les principes suivants :

– révision journalière (5-8 minutes) de notions apprises précédemment ;

– présentation des nouveaux matériaux, en segmentant les notions nouvelles en différentes étapes ;

– pratique guidée (inciter l’élève à expliquer comment il s’y prend pour répondre aux questions) ;

– feed-back, consistant notamment à corriger immédiatement les erreurs des élèves ;

– temps individuel laissé aux élèves pour s’entraîner à utiliser la notion apprise ;

– révisions systématiques, hebdomadaires et mensuelles, de manière à « réactiver ce qui a été appris » et « favoriser l’automatisation ».

http://www.la-croix.com/Famille/Education/Consensus-apprentissage-lecture-2016-04-07-1200751856?utm_medium=Social&utm_source=Twitter&utm_campaign=Echobox&utm_term=Autofeed#/link_time=1460054559

 

  • Yea 1
Posté

C'est .. technique. Mais il semblerait qu'il y ait au moins un domaine en Frace où la raison reprend du terrain. Victoire du jour.

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Attendons que les enfants sachent à nouveau lire à la fin du premier trimestre de CP avant de crier victoire.

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Education et sciences cognitives: le coup de gueule
Stanislas Dehaene | 11 janvier 2014.


“Enseignants, emparez-vous des sciences de l’apprentissage”

C’est le cri d’alarme qu’a lancé Stanislas DEHAENE dans un article publié dans Le Monde du 20 Décembre 2013

Selon lui, beaucoup trop d’enseignants continuent d’ignorer les résultats des sciences cognitives, bien que ceux-ci soient directement pertinents pour l’enseignement, notamment mais pas seulement dans le domaine de la lecture.

Il appelle de ses voeux une éducation fondée sur la preuve: l’évaluation systématique des manuels et des pratiques éducatives, comme on le fait en médecine afin de vérifier si un médicament est efficace.

Voici le texte complet de l’article (dans une version légèrement différente — Le journal Le Monde a la fâcheuse habitude de déformer les textes qu’il reçoit, notamment en leur imposant des titres et sous-titres. Le titre “Enseigner est une science” n’est pas de l’auteur).

* * *

Pour quiconque sait que « l’enfant est l’avenir de l’homme », l’enquête PISA est un véritable électrochoc. Que nous apprend le Programme international pour le suivi des acquis des élèves de l’OCDE ? Plus inégalitaire que jamais, l’éducation nationale française réussit aux élites, mais ne parvient pas à donner aux enfants défavorisés le bagage minimal dont ils ont besoin pour comprendre un article de journal ou un problème d’arithmétique. Jusqu’à la seconde génération, une famille issue de l’immigration affiche des résultats scolaires en très net retard.

Ce résultat est-il inéluctable ? Non. La complexité de la langue française n’est pas en cause car, à difficulté égale, le Québec et la Belgique réussissent nettement mieux que la France. Le sociologue Jérôme Deauvieau, dans un rapport récent, identifie l’un des nœuds du problème : l’enseignement de la lecture au cours préparatoire (CP).

Il est allé enquêter dans les quartiers populaires de la petite couronne parisienne, les zones « Eclairs », anciennement zones d’éducation prioritaires (ZEP) où habitent les enfants les plus pauvres et les plus difficiles à scolariser. Son objectif :recenser les stratégies éducatives des enseignants, répertorier les manuels qu’ils choisissent d’utiliser, et évaluer l’impact de ces manuels sur les capacités de lecture des élèves en fin de CP.
 

Recommander les meilleurs manuels

Premier scandale. Pourquoi le département d’évaluation des programmes de l’éducation nationale n’a-t-il jamais pris la peine de mener lui-même une telle évaluation ? Cela lui serait pourtant facile : il lui suffirait de croiser les chiffres recueillis dans chaque classe lors des évaluations nationales des élèves avec les méthodes qu’elles utilisent. Lorsque l’on dépense un budget annuel de 63,4 milliards d’euros, la moindre des choses est d’optimiser ses pratiques. Pourquoi l’éducation nationale refuse-t-elle encore de recommander à ses enseignants les meilleurs manuels ?

Deuxième scandale dévoilé par l’enquête Deauvieau : nous sommes en 2013, et 77 % des enseignants des zones défavorisées choisissent toujours un manuel de lecture inapproprié, qui fait appel à une méthode mixte, c’est-à-dire où l’enfant passe un temps considérable à des exercices de lecture globale et de devinettes de mots qu’il n’a jamais appris à décoder.

Seuls 4 % adoptent une méthode syllabique, qui propose un enseignement systématique et structuré des correspondances entre les lettres et les sons. Or les résultats montrent que c’est ce système qui réussit le mieux aux enfants, et de très loin : 20 points de réussite supplémentaires sur 100 aux épreuves de lecture et de compréhension !

Ce résultat vient confirmer ce que trois décennies de recherches en psychologie cognitive ont démontré : seul l’enseignement explicite du décodage graphophonologique est vraiment efficace. En 2000, par exemple, une vaste méta-analyse américaine montre que les enfants à qui on enseigne ces principes parviennent plus vite, non seulement à lire à haute voix, mais également à comprendre le sens de ce qu’ils lisent.

Ce n’est guère étonnant : l’invention de l’alphabet a demandé plusieurs siècles, comment imaginer que l’enfant le découvre seul ? Le principe alphabétique ne va pas de soi. Il faut en enseigner explicitement tous les détails : la correspondance de chaque son du langage avec une lettre ou un groupe de lettres ; et la relation entre la position de chaque lettre dans le mot écrit et l’ordre de chacun des phonèmes dans le mot parlé.

Les recherches de mon laboratoire, fondées sur l’imagerie cérébrale, le confirment : tous les enfants apprennent à lire avec le même réseau d’aires cérébrales, qui met en liaison l’analyse visuelle de la chaîne de lettres avec le code phonologique. Entraîner le décodage graphème-phonème est la manière la plus rapide de développer ce réseau, y compris pour les enfants défavorisés ou dyslexiques.

 

L’éducation fondée sur la preuve

Comment expliquer qu’en France les stratégies de lecture qui ont prouvé leur efficacité ne soient pas proposées à tous les enfants ? La réponse est simple : la formation des enseignants ne leur a jamais expliqué qu’il existe une approche scientifique de l’apprentissage. Résultat : bon nombre d’enseignants « bricolent », selon le mot de Jérôme Deauvieau.

Leur enfer scolaire est pavé de bonnes intentions pédagogiques. Ils conçoivent l’enseignement comme un art, où l’intuition et la bonne volonté tiennent lieu d’instruments de mesure. Combien de fois m’a-t-on dit : « La méthode globale ne fait pas de mal, je l’emploie depuis des années, et la plupart de mes élèves savent lire. » Mais 5 ou 6 enfants par classe en échec, c’est précisément ce que crient les statistiques : 20 % des élèves n’apprennent pas à lire, et ce sont ceux de bas niveau socio-économique ; les autres réussissent parce que leur famille compense, tant bien que mal, les déficiences de l’école.

Partout ailleurs dans le monde s’impose pourtant l’idée d’une éducation fondée sur la preuve, c’est-à-dire sur une évaluation rigoureuse des stratégies éducatives, et de vastes études contrôlées, multicentriques et statistiquement validées.

Ces études ont conduit à identifier plusieurs principes fondamentaux qui maximisent la compréhension et la mémoire. Ces principes doivent être mis en œuvre au plus vite dans les classes françaises. Il est urgent que la formation des maîtres inclue un bagage minimal de connaissances sur l’enfant et la science de l’apprentissage.
 

Un bagage minimum de sciences cognitives pour les enseignants

Ces connaissances, quelles sont-elles ? Tout d’abord que, contrairement à ce qu’envisageait Jean Piaget (1896-1980), l’enfant n’est pas dépourvu de compétences logiques abstraites. Bien au contraire, le cerveau de l’enfant est structuré dès la naissance, ce qui lui confère des intuitions profondes.

Il est doté de puissants et rigoureux algorithmes d’inférence statistique. En conséquence, l’école doit fournir à ce « super-ordinateur » un environnement enrichi : un enseignement structuré et exigeant, tout en étant accueillant, généreux, et tolérant à l’erreur.

Les neurosciences cognitives ont identifié quatre facteurs qui déterminent la facilité d’apprentissage. En premier, l’attention : elle fonctionne comme un projecteur, qui amplifie l’apprentissage, mais dont le rayon d’action est limité. Le plus grand talent d’un enseignant consiste donc à attirer, à chaque instant, l’attention de l’enfant sur le bon niveau d’analyse.

Une expérience remarquable montre ainsi que le même alphabet sera appris rapidement ou, au contraire, totalement oublié, selon que l’on s’arrête sur les lettres ou, au contraire, sur la forme globale du mot : l’attention globale canalise l’apprentissage vers une aire cérébrale inappropriée de l’hémisphère droit et entrave le circuit efficace de lecture. On mesure ici combien la méthode mixte, en désorientant l’attention, cause de dégâts.

Deuxième facteur : l’engagement actif. Un organisme passif n’apprend pas. Un organisme passif n’apprend pas. L’apprentissage est optimal lorsque l’enfant génère activement des réponses, et se teste régulièrement. L’auto-évaluation est donc une composante fondamentale de l’apprentissage, déjà identifié par Maria Montessori (1870-1952).

Une classe efficace alterne, chaque jour, des périodes d’enseignement explicite et des périodes de contrôle des connaissances (lecture à haute voix, questions/réponses, quiz…). Ces derniers développent la « méta-cognition », la connaissance objective de ses propres limites et l’envie d’en savoir plus.

Troisième facteur : le retour d’information (ou « feedback »). Notre cerveau n’apprend que s’il reçoit des signaux d’erreur qui lui indiquent que son modèle interne doit être rectifié. L’erreur est donc non seulement normale, mais indispensable à l’apprentissage.

Elle n’implique ni sanction, ni punition, ni mauvaise note (celles-ci ne font qu’augmenter la peur, le stress et le sentiment d’impuissance de l’enfant). Dans une classe efficace, l’enfant essaie souvent, se trompe parfois, et il est gentiment corrigé pour ses erreurs et récompensé pour ses succès.

Quatrième pilier, enfin, l’automatisation. En début d’apprentissage, l’effort mobilise toutes les ressources du cortex frontal. Afin de libérer l’esprit pour d’autres tâches, il est indispensable que la connaissance devienne routinière. En lecture, par exemple, ce n’est que lorsque le décodage des mots devient automatique que l’enfant peut se concentrer sur le sens du texte.

La répétition quotidienne va transférer l’apprentissage vers des circuits cérébraux automatiques et non conscients. Le sommeil fait partie intégrante de cet algorithme : dormir, c’est consolider les apprentissages de la journée. Voilà pourquoi la réforme des rythmes scolaires, en répartissant l’enseignement tout au long de la semaine, va dans le bon sens.
 

Des améliorations rapides

De nombreux exemples démontrent que, déclinés à l’école, ces principes conduisent à des améliorations rapides. Au Royaume-Uni, « l’heure de lecture », un cours quotidien, structuré, axé sur le décodage, la lecture à haute voix, l’écriture manuscrite et l’enrichissement du vocabulaire, a fait bondir les performances des enfants. Dans la ZEP de Gennevilliers, une maternelle, en s’appuyant sur le matériel pédagogique de Maria Montessori et les principes cognitifs que je viens d’esquisser, obtient des résultats exceptionnels : avant même l’entrée en CP, tous les enfants savent lire et faire des calculs à quatre chiffres !

Aucune fatalité, donc, à ce que notre éducation nationale soit abonnée aux mauvaises performances. Reste l’urgence d’une mobilisation de tous, parents, enseignants, inspecteurs, ministres, afin d’exiger de notre école rigueur et efficacité pédagogique.

Posté

Bonne nouvelle mais l'ednat va t elle renoncer à l'égalitarisme de la méthode globale c'est moins sur? 40 ans de perdus, soit deux générations, on va retourner au XIX voir au XVIII en terme de personnes sachant lire.

Posté

J'ai testé, malgré moi, la méthode "semi" globale avec mon plus grand quand il est passé au CP. Une absurdité que j'étais loin de m'imaginer avant d'être réellement confronté au problème.

Juste pour pour illustrer (parce que des absurdités liés à cette méthode il y en a un paquet) :

Un soir, on revoit un mot qu'il a vu la journée à l'école : "Ami". Je lui demande de me le lire. Il me dit "Copain".

Posté
Le journal Le Monde a la fâcheuse habitude de déformer les textes qu’il reçoit,

 

 

Libe fait ca aussi.Je crois que le journaliss est un individu qui pense apporter de la valeur ajoutee en reecrivant des textes deja finis pour leurs faire dire autre chose.

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