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Mort de faim au Japon


Invité Arn0

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Invité Arn0
Posté
Mourir de faim sur l’autel de la réduction de la dette publique

«Mon ventre est vide. Je veux un bol de riz. Je n’ai pas mangé depuis vingt-cinq jours» : ainsi s’achevait, le 5 juin, le journal, révélé mi-octobre, de Hiroki Nishiyama, un homme de 52 ans, mort de faim cet été, à Kokura, une municipalité de Kitakyushu (1,4 million d’habitants), dans le sud-ouest du Japon.

Quotas. Cet ancien chauffeur de taxi sans travail n’aura pas eu le temps, comme il le voulait, de chercher un nouvel emploi. Il est mort deux mois après qu’un des 142 fonctionnaires de la municipalité chargés des régimes de santé et de retraite, a décidé de ne plus lui verser l’aide publique de quelque 100 000 yens (650 euros) qu’il percevait depuis cinq mois. En fait, Hiroki Nishiyama a été la victime d’une politique de quotas : les avancements de ces fonctionnaires dépendent de leur zèle et de leur succès à éliminer des registres de pensions, chaque année, au moins 5 des 73 bénéficiaires dont chacun à la charge.

Réduit à la plus extrême misère et ne pouvant plus se procurer de quoi se nourrir, Hiroki Nishiyama est passé en deux mois de 68 à 54 kilos et en est mort. Dans le journal retrouvé le 10 juillet près de son corps, il avait écrit, le 25 mai : «Il est 3 heures du matin. Cet être humain n’a pas mangé depuis dix jours. Mais est toujours en vie. Je veux manger du riz. Je veux une boule de riz [vendue 60 centimes d’euro dans toute supérette nipponne, ndlr].» Dans un pays où les clochards se cachent dans les parcs pour mourir, et où l’aumône et la charité sont peu acceptées, Hiroki Nishiyama n’était pas non plus un sans-abri. Des clichés publiés par le New York Times ont dévoilé sa baraque exiguë aux murs en partie écroulés, restes de béton et de tôle rouillée, où le gaz et l’électricité avaient été coupés. Les photos montrent un taudis jouxtant des maisons traditionnelles. L’homme s’est éteint dans l’indifférence.

Contacté par téléphone, un responsable des relations publiques de la ville assurait ne pas être au courant de l’affaire. Un fonctionnaire de la division des pensions a fait la même réponse avant de préciser qu’il «ne connaissait pas le cas précis de cet homme mais qu’un appel de la municipalité les a informés de sa mort.» A Kitakyushu, ville où siègent de riches entreprises (comme le géant des toilettes high-tech Toto), c’est la troisième fois qu’un individu meurt de faim en trois ans. Erigée en «modèle»pour sa gestion des comptes publics, la ville ne manque pourtant pas de moyens. Elle a inauguré un aéroport bâti sur la mer en mars 2006.

Cette affaire n’aurait jamais défrayé la chronique si la victime n’avait pas relaté son agonie dans un journal. Symptomatique des lacunes du système nippon de protection sociale, elle n’a pas pour autant suscité de vrai débat. Depuis 2003, des préfectures et collectivités nippones sont prêtes à tout pour rogner sur les systèmes de santé et de retraite d’anciens actifs au chômage, de préretraités et cinquantenaires licenciés sur le tas ou tombés malades, et qui ne furent pas forcément de bons cotisants. En privant ainsi d’une ville à l’autre, des milliers d’individus de l’aide publique, les autorités japonaises espèrent réduire la dette abyssale de leur pays, l’Etat industrialisé le plus endetté du monde (160 % de son PIB selon l’OCDE). Plombée par de lourds déficits budgétaires, sa dette publique atteindra 4 600 milliards d’euros en mars 2008.

Inégalités. C’est un des paradoxes de la deuxième économie mondiale. «Le Japon abrite de nos jours 19,5 millions de pauvres et nouveaux pauvres», rappelle Toshiaki Tachibanaki, un sociologue qui analyse depuis vingt ans la montée des inégalités dans l’archipel. Coïncidence, le 29 novembre, Tokyo s’apprête à accueillir une conférence organisée avec la Banque mondiale, sobrement intitulée : «Réduction de la pauvreté et stratégies de développement dans les pays à faibles revenus».

http://www.liberation.fr/actualite/monde/288837.FR.php

A mon avis ça dit plus de chose sur la société japonaise que sur la "réduction de la dette" mais bon.

Posté

Et la façon dont est tourné l'article en dit long sur ce que pense le pisse-copie qui l'a produit…

Invité Arn0
Posté
3 morts de faim en 3 ans. En France combien de morts de froid / an ?

Je comprends pas l'intérêt de faire toujours des comparaisons douteuses.

Posté
Je comprends pas l'intérêt de faire toujours des comparaisons douteuses.

Chez nous on ne peut pas parler de l'état qui a supprimé quoi que ce soit, au contraire. Avec nos aides pléthoriques on arrive à avoir des morts de froids, eux, ils n'ont aucune aide, et ils ont 3 morts de faim / an.

Tu comprends mieux là ?

Posté

Je suis quand même étonné. Ca n'existe pas les resto du coeur au Japon? :icon_up:

Invité Arn0
Posté
Chez nous on ne peut pas parler de l'état qui a supprimé quoi que ce soit, au contraire. Avec nos aides pléthoriques on arrive à avoir des morts de froids, eux, ils n'ont aucune aide, et ils ont 3 morts de faim / an.

Tu comprends mieux là ?

D'abord la comparaison n'a pas de sens : tu compares une ville et un pays (Kitakyushu d'un coté et la France de l'autre) et ensuite les morts de faim n'exclut pas qu'il y ait aussi des morts de froid !

Ensuite que tu ne vois dans cette histoire qu'un enjeu idéologique est assez triste. De la part de Libé c'est logique mais bon on vaut mieux que ça quand même.

Posté

La solution est évidente. Il n'y a pas assez de fonctionnaires dans le service des pensions et des retraites. 142, ce n'est pas suffisant. Ils sont probablement débordés de travail et font des erreurs. Il faut en embaucher de nouveaux, pour surveiller les premiers et surtout réduire les scandaleuses inégalités du système ultra-libéral.

Posté
D'abord la comparaison n'a pas de sens : tu compares une ville et un pays (Kitakyushu d'un coté et la France de l'autre) et ensuite les morts de faim n'exclut pas qu'il y ait aussi des morts de froid !

Ensuite que tu ne vois dans cette histoire qu'un enjeu idéologique est assez triste. De la part de Libé c'est logique mais bon on vaut mieux que ça quand même.

Pour comparer, il faudrait regarder cette ville japonaise avec une ville de même importance en France si possible. Je ne suis pas sûr que ce soit, en définitive, à l'avantage de la ville française.

Et c'est aussi le sens de ma remarque : l'agenda de Libé est transparent derrière ce genre de nouvelles.

Posté

tient ça me rappel autre chose, une amie assistante sociale, qui me raconte l'histoire d'une mère seule avec 5 enfants qu'on a retrouvée pendue chez elle.

Çà faisait 8 ans que sont cas était signalé comme URGENT et qu'elle devait se voir attribuer un logement HLM.

Mais qui donc occupe les logements HLM supposés aider les pauvres. Vraiment, je me demande…

Une de plus qui paye les interdictions légales de travailler et les avantages acquis des autres.

Posté
Je suis quand même étonné. Ca n'existe pas les resto du coeurs au Japon? :icon_up:

Je crois que c'est surtout le coeur qui leur manque.

Ensuite que tu ne vois dans cette histoire qu'un enjeu idéologique est assez triste. De la part de Libé c'est logique mais bon on vaut mieux que ça quand même.

+ 1

Posté
Dans le journal retrouvé le 10 juillet près de son corps, il avait écrit, le 25 mai : «Il est 3 heures du matin. Cet être humain n’a pas mangé depuis dix jours. Mais est toujours en vie. Je veux manger du riz. Je veux une boule de riz [vendue 60 centimes d’euro dans toute supérette nipponne, ndlr].» Dans un pays où les clochards se cachent dans les parcs pour mourir, et où l’aumône et la charité sont peu acceptées, Hiroki Nishiyama n’était pas non plus un sans-abri. Des clichés publiés par le New York Times ont dévoilé sa baraque exiguë aux murs en partie écroulés, restes de béton et de tôle rouillée, où le gaz et l’électricité avaient été coupés. Les photos montrent un taudis jouxtant des maisons traditionnelles. L’homme s’est éteint dans l’indifférence.

C'est moche. C'est pas mieux qu'ici. C'est vraiment moche.

Invité jabial
Posté

Cette personne a-t-elle tenté d'avoir recours à la charité? Si ça se trouve, il est mort parce qu'il était trop fier pour ça. Au Japon, ça ne m'étonnerait pas.

Posté
La solution est évidente. Il n'y a pas assez de fonctionnaires dans le service des pensions et des retraites. 142, ce n'est pas suffisant. Ils sont probablement débordés de travail et font des erreurs. Il faut en embaucher de nouveaux, pour surveiller les premiers et surtout réduire les scandaleuses inégalités du système ultra-libéral.

Ce n'est pas le manque de moyens, mais l'indifférence qui mène à ces situations. Augmenter l'aide impersonnelle a l'effet pervers de renforcer l'indifférence.

Posté
Ce n'est pas le manque de moyens, mais l'indifférence qui mène à ces situations. Augmenter l'aide impersonnelle a l'effet pervers de renforcer l'indifférence.

Encore que, dans ce cas précis, l'indifférence empêche toute augmentation de l'aide, impersonnelle ou non.

Posté
Ce n'est pas le manque de moyens, mais l'indifférence qui mène à ces situations. Augmenter l'aide impersonnelle a l'effet pervers de renforcer l'indifférence.

Non, laffreuxthomas, pas toi. Ne tombe pas dans le piège pervers tendu par des ultra-libéraux sans coeur qui ne pensent qu'à augmenter la pression de la rentabilité.

Posté
Cette personne a-t-elle tenté d'avoir recours à la charité? Si ça se trouve, il est mort parce qu'il était trop fier pour ça. Au Japon, ça ne m'étonnerait pas.

Moi non plus.

Posté
Quelqu'un saurait-il me dire comment l'économie japonaise est encore "debout" avec une dette pareille ?

Grâce à l'abnégation des Japonais, qui sont capables de mourir de faim plutôt que de mendier.

Posté
:icon_up:

Tu rigoles mais plusieurs SDF m'ont dit préférer être à la rue pour ne pas "inquiéter" ou "peser sur" leur famille. C'est à dire, pour ne pas risquer de leur devenir redevable. L'essentiel de la souffrance est là. Ce comportement autodestructeur n'existe que dans les pays d'idéal individualiste. Voilà pourquoi ceux qui viennent de pays autrement plus pauvres et précaires, hallucinent complètement devant l'extrême misère d'ici.

Je suis certain qu'on peut arrêter l'exclusion sociale. Mais pas par un renforcement des aides associatives ou étatiques ou assurancielles, bien au contraire.

Invité Arn0
Posté
Tu rigoles mais plusieurs SDF m'ont dit préférer être à la rue pour ne pas "inquiéter" ou "peser sur" leur famille. C'est à dire, pour ne pas risquer de leur devenir redevable. L'essentiel de la souffrance est là. Ce comportement autodestructeur n'existe que dans les pays d'idéal individualiste. Voilà pourquoi ceux qui viennent de pays autrement plus pauvres et précaires, hallucinent complètement devant l'extrême misère d'ici.

Je suis certain qu'on peut arrêter l'exclusion sociale. Mais pas par un renforcement des aides associatives ou étatiques, bien au contraire.

Je suis pas sur que l'idéal Japonais soit très individualiste.

Posté

C'est ce que je me demandais à la lecture de ce fil. Jusqu'ici je n'ai travaillé que sur l'idéal occidental. J'ignore tout du Japon.

Cette personne a-t-elle tenté d'avoir recours à la charité? Si ça se trouve, il est mort parce qu'il était trop fier pour ça. Au Japon, ça ne m'étonnerait pas.

D'où vient cette fierté ? Est-ce qu'une femme serait aussi fière, par exemple ? Est-ce que la fierté concerne tous les membres de la population ?

Posté
Je suis pas sur que l'idéal Japonais soit très individualiste.

Au Japon, quand un type semble seul au collège ou à l'université, il est vite assailli de gens amicaux. La solitude y est considérée comme anormale.

Posté
Tu rigoles mais plusieurs SDF m'ont dit préférer être à la rue pour ne pas "inquiéter" ou "peser sur" leur famille. C'est à dire, pour ne pas risquer de leur devenir redevable. L'essentiel de la souffrance est là. Ce comportement autodestructeur n'existe que dans les pays d'idéal individualiste. Voilà pourquoi ceux qui viennent de pays autrement plus pauvres et précaires, hallucinent complètement devant l'extrême misère d'ici.

Ce n'est pas cantonné à des "pays d'idéal individualiste", c'est humain. D'ailleurs, c'est même plus large puisqu'on retrouve les mêmes comportements chez les animaux les plus évolués (primates par exemple).

Posté
Ce n'est pas cantonné à des "pays d'idéal individualiste", c'est humain. D'ailleurs, c'est même plus large puisqu'on retrouve les mêmes comportements chez les animaux les plus évolués (primates par exemple).

Voilà une affirmation qui demande quelques références.

Posté

Oui, ça en demanderait. Mais bon, pour résumer, il a été noté très souvent que les chimpanzées et les gorilles, lorsqu'ils sont malades, tendent à s'ostraciser d'eux-mêmes pour éviter de refiler leurs chtouyes. Un bon praticien hospitalier te dira qu'il est fréquent que les personnes qui ne se sentent pas utiles ou pas insérées dans la société, une fois malades, se battent très peu ou pas, et sont éventuellement aggressives envers le corps médical. Etc, etc…

Posté

Ah d'accord. Intéressant.

Note que la différence entre des pays communautaires d'Afrique et des pays individualistes d'Occident, c'est la position du curseur entre d'une part un refus systématique de tout ce qui rend redevable, et d'autre part une entraide systématique car moralement obligatoire qui rend chacun redevable envers une multitude d'autres. Le résultat est que l'exclusion sociale par désociabilisation est assez massive en France, presque inexistante au Tchad par exemple. Là-bas il y a d'autres formes d'exclusion sociale, mais pas par désociabilisation.

Un bon praticien hospitalier te dira qu'il est fréquent que les personnes qui ne se sentent pas utiles ou pas insérées dans la société, une fois malades, se battent très peu ou pas, et sont éventuellement aggressives envers le corps médical. Etc, etc…

Disons que le problème est en amont : les personnes qui ne se sentent pas insérées sont d'autant plus nombreuses que la société est d'idéal individualiste.

Posté
Un bon praticien hospitalier te dira qu'il est fréquent que les personnes qui ne se sentent pas utiles ou pas insérées dans la société, une fois malades, se battent très peu ou pas, et sont éventuellement aggressives envers le corps médical. Etc, etc…

Il y a une raison évolutive derrière cela. Un gène qui dit à l'individu : si tu deviens inutile et malade, laisse toi mourir se propage efficacement car l'individu qui se laisse mourir absorbe moins de ressources aux membres de sa famille également porteurs du gène.

On observe même des espèces où les nouveaux nés se laissent mourir spontanément quand ils s'apercoivent qu'ils sont le plus faible de la portée.

/!\ J'en colle une au premier qui insinue que je place un discours moral derrière ces affirmations factuelles

Posté
Cette personne a-t-elle tenté d'avoir recours à la charité? Si ça se trouve, il est mort parce qu'il était trop fier pour ça. Au Japon, ça ne m'étonnerait pas.

un excellent bouquin sur le sujet:

(si Mélo est intéressé, qu'il me fasse signe :icon_up:)

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