LeSanton Posté 28 septembre 2008 Signaler Posté 28 septembre 2008 Un regard éclairant les raisons internes du refus du libéralisme. http://www.causeur.fr/dialogue-de-sourds-a-la-francaise,980
free jazz Posté 28 septembre 2008 Signaler Posté 28 septembre 2008 Deux réflexions assez justes, qui correspondent à des tendances de fond générales et contradictoires dans la société française : "Les Français ne parviennent pas à épouser ce monde de la régulation automatique, car il est contraire à tous les gènes de leur culture. Eux croient dans la volonté rationnelle et dans la capacité des politiques d’infléchir le cours des choses. L’univers libéral de contrat et de compromis les déroute. Ce n’est pas un hasard s’ils ont élu un homme qui se présente comme l’incarnation d’une volonté, même si cette volonté ne sait pas où elle va. Le sarkozysme est le symptôme d’une maladie nationale, la foi dans une volonté, même si elle n’a plus d’objet."… "il n’y a pas d’un côté le vilain “paradigme libéral” et puis nous de l’autre. Nous sommes en plein dedans, et depuis le début, mais nous avons toujours eu un rapport compliqué et conflictuel avec lui. Ses derniers développements ont ranimé en l’intensifiant ce vieux contentieux. Il est d’autant plus aigu que nous ne sommes pas à l’extérieur de ces développements. Ils nous traversent. Nous sommes même à l’avant-garde de certains d’entre eux. La France a fantastiquement changé depuis trente ans et les Français sont à cet égard dans une situation de porte-à-faux : sur beaucoup de points, ils chérissent des causes dont ils vomissent les conséquences. Ils veulent le maximum de droits individuels et toutes les libertés personnelles sans assumer le fait que, dans le monde où nous sommes, les marchés sont la seule façon d’assurer la possibilité d’existence simultanée de ces libertés. Ils n’assument pas plus, dans l’autre sens, ce qu’impliquerait leur refus du modèle du marché. Dans cette situation, la démarche serait de trier entre ce qui correspond à des évolutions fondamentales, qui doivent être intégrées, et ce qui relève d’un dogmatisme idéologique, à rejeter." Je me suis souvent étonné d'observer ces tendance contradictoires, la croyance pathologique en une volonté générale incarnée dans un homme providentiel (dont la contrepartie est un ressentiment national et une haine de soi exacerbés); d'un autre côté la schyzophrénie consistant à revendiquer toujours plus de droits individuels, plus de justice, tout en rejetant le marché qui est l'expression de cette individualisation. Je finis par croire qu'une majorité de français ne sont pas foncièrement anti-libéraux (même si les réflexes pavloviens le sont par idéologie), en tout cas pas autant que les libéraux eux-mêmes le disent habituellement, mais plutôt inconséquents - tiraillés entre leurs aspirations aux droits et la religion républicaine de la bonne volonté générale. Je me demande en revanche si le contrat a si mauvaise presse en France que le dit Gauchet.
Tremendo Posté 28 septembre 2008 Signaler Posté 28 septembre 2008 Des choses bonnes et des choses qui me paraissent moins bonnes: - La croyance en un esprit au-dessus de tout le monde capable d'initier des changements. - L'opinion selon laquelle on peut faire évoluer les choses avec le système tel qu'il existe et malgré la ferme et indécrottable croyance des français en l'Etat, et ce, plus que tout autre peuple. - Le passage sur De gaulle: partisan et peu vraisembable, De Gaulle en 45 a définitivement enterré les français par sa politique de collaboration avec les communistes, et à son retour au pouvoir en 58, il profite du redécollage économique inévitable de l'après-guerre. D'autre part, les français commencent aussi à se relever de la guerre d'Indochine et commence la décolonisation: 2 gouffre-poignon pour les français dans les années 40 et 50. Les performances économiques de la France en cette période ont rammené du baume au coeur des français, ils ont attribué ce nouvel élan à tort à De Gaulle. - L'opposition entre un peuple soi-disant exempt de reproche à qui l'on doit tout expliquer comme des enfants vs élite qui doit faire tout le travail d'explication, alors que tous font partie du système actuel (peuple comme élite) et en profite au détriment des autres…et ça les arrange bien. - La croyance que les français veulent plus de libertés individuelles, les dernières lois votées en matière de sécurité - n'ayant pas trouver de contestation notable -, prouvent bien le contraire. -Le terme "ultra-libéral" qu'il utilise dans le passage sur l'immigration.
LeSanton Posté 28 septembre 2008 Auteur Signaler Posté 28 septembre 2008 Une éclatante illustration de la description de Gauchet sur le volontariat politique de Sarkozy (assurément plébiscité par la majorité des Français, surtout en ces temps de crise économique mondiale), mais pas, comme il le dit "sans objet": la remise à plat du système financier et monétaire mondial par les Etats, la refondation du capitalisme, Bretton Woods II (rien que ça!). Au-delà de la juste description de la psyché française et de l'homme providentiel Sarkozy par Gauchet, il reste que la nouvelle réalité découlera de ces changements. http://www.publicsenat.fr/cms/video-a-la-demande/vod.html Mais le volontariat a ses limites: les moyens de financement.
Rincevent Posté 28 septembre 2008 Signaler Posté 28 septembre 2008 […] Je finis par croire qu'une majorité de français ne sont pas foncièrement anti-libéraux (même si les réflexes pavloviens le sont par idéologie), en tout cas pas autant que les libéraux eux-mêmes le disent habituellement, mais plutôt inconséquents - tiraillés entre leurs aspirations aux droits et la religion républicaine de la bonne volonté générale. […] J'en suis intimement convaincu.
Apollon Posté 29 septembre 2008 Signaler Posté 29 septembre 2008 "Les Français veulent un roi qu’ils veulent guillotiner." Joli
Coldstar Posté 29 septembre 2008 Signaler Posté 29 septembre 2008 Un regard éclairant les raisons internes du refus du libéralisme. http://www.causeur.fr/dialogue-de-sourds-a-la-francaise,980 Quelques réflexions de nature à élever le débat par rapport à la vulgate politico-journalistique; cependant son analyse souffre de holisme aigu (par exemple: La société française est prisonnière d’un passé qui fait qu’elle attend l’essentiel de l’Etat. Les Français ne parviennent pas à épouser ce monde de la régulation automatique, car il est contraire à tous les gènes de leur culture et autres). Trop de références à l'identité nationale, aux "gênes" de la société française perçue comme une entité dotée d'une volonté et d'une raison homogènes, ce qu'elle n'est absolument pas.
Rincevent Posté 29 septembre 2008 Signaler Posté 29 septembre 2008 Quelques réflexions de nature à élever le débat par rapport à la vulgate politico-journalistique; cependant son analyse souffre de holisme aigu (par exemple: […] et autres). Trop de références à l'identité nationale, aux "gênes" de la société française perçue comme une entité dotée d'une volonté et d'une raison homogènes, ce qu'elle n'est absolument pas. Un pur produit des sciences politiques et humaines à la française, en somme.
Etienne Posté 29 septembre 2008 Signaler Posté 29 septembre 2008 Ce n’est pas un hasard s’ils ont élu un homme qui se présente comme l’incarnation d’une volonté, même si cette volonté ne sait pas où elle va. Le sarkozysme est le symptôme d’une maladie nationale, la foi dans une volonté, même si elle n’a plus d’objet. J'adore. Un pur produit des sciences politiques et humaines à la française, en somme. Franchement, Gauchet n'est pas ce qu'il y a de plus représentatif du traitement habituel des sciences humaines dans l'univers académique français.
Apollon Posté 29 septembre 2008 Signaler Posté 29 septembre 2008 Franchement, Gauchet n'est pas ce qu'il y a de plus représentatif du traitement habituel des sciences humaines dans l'univers académique français. Tu aurais pu répondre : on ne parle jamais autant de soi que quand on parle des autres, aussi bien à Coldstar qu'à Rincevent.
Rincevent Posté 30 septembre 2008 Signaler Posté 30 septembre 2008 Franchement, Gauchet n'est pas ce qu'il y a de plus représentatif du traitement habituel des sciences humaines dans l'univers académique français. Comme quoi même avec la meilleure volonté et le plus grand anticonformisme (il a été situ', par exemple), on reste sous l'influence de son milieu.
Etienne Posté 30 septembre 2008 Signaler Posté 30 septembre 2008 Comme quoi même avec la meilleure volonté et le plus grand anticonformisme (il a été situ', par exemple), on reste sous l'influence de son milieu.
F. mas Posté 30 septembre 2008 Signaler Posté 30 septembre 2008 Comme quoi même avec la meilleure volonté et le plus grand anticonformisme (il a été situ', par exemple), on reste sous l'influence de son milieu. Il était plutôt trotskiste tendance libertaire que vraiment situationniste il me semble. Son directeur de thèse, par exemple, est l'un des fondateurs de Socialisme et barbarie (c'est Claude Lefort). M. Gauchet fait partie de ces gens qui n'ont pas fait un parcours si académique que ça, puisqu'avant d'atterrir à l'ehess, il a fait un tas de petits métiers, a eu sa thèse sur le tard, et n'a jamais fait normal sup et tenté l'agreg (ce qui est encore le top du top académique dans ce pays). Je le trouve capable de dire des choses très intelligentes mais aussi d'égrener des lieux communs épouvantables. J'ai aussi l'impression qu'il est le moins talentueux des anciens "satellites" de Socialisme et Barbarie (le plus talentueux, incontestablement, c'est Cornelius Castoriadis).
Rincevent Posté 30 septembre 2008 Signaler Posté 30 septembre 2008 Le smiley à la fin de ma phrase aurait dû te donner un indice quant au sérieux de ma réponse. Il était plutôt trotskiste tendance libertaire que vraiment situationniste il me semble. Son directeur de thèse, par exemple, est l'un des fondateurs de Socialisme et barbarie (c'est Claude Lefort). M. Gauchet fait partie de ces gens qui n'ont pas fait un parcours si académique que ça, puisqu'avant d'atterrir à l'ehess, il a fait un tas de petits métiers, a eu sa thèse sur le tard, et n'a jamais fait normal sup et tenté l'agreg (ce qui est encore le top du top académique dans ce pays). Je le trouve capable de dire des choses très intelligentes mais aussi d'égrener des lieux communs épouvantables. J'ai aussi l'impression qu'il est le moins talentueux des anciens "satellites" de Socialisme et Barbarie (le plus talentueux, incontestablement, c'est Cornelius Castoriadis). Situ, il l'a été aux côtés de Jean-Pierre Le Goff, à Caen (mais il n'a pas été que ça, c'est vrai). Castoriadis n'était pas un satellite de SouB : c'était l'astre central.
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