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Amendement Modifiant La Composition Du Cre


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LA Commission de Régulation de l'Energie verra, puisqu'un amendement a été voté en ce sens en toute discrétion, arriver un certain nombre de parlementaires, lisez le début du document ci-dessous c'est assez marrant.

Mme la Présidente - Nous en venons à l’amendement 137638 qui est mis en discussion avec deux sous-amendements et les amendements à l’article 2 précédemment réservés.

M. le Rapporteur – La commission a adopté, à mon initiative, l’amendement 137638, après un long débat. Les directives imposent la création d’autorités qui soient indépendantes, mais des entreprises du secteur concerné, et non par rapport aux autorités politiques. Il n’est pas question non plus qu’elles soient irresponsables à l’égard de ces dernières. Une note d’interprétation des directives précise même que l’autorité peut ne pas être distincte de structures gouvernementales ou qu’elle peut être confiée à des autorités locales. En France, compte tenu des intérêts de l’État actionnaire, la loi de 2000 a institué une autorité de régulation distincte du ministère. Ayant pris l’habitude de créer des autorités administratives indépendantes pour soustraire au politique certaines activités et assurer une gestion non partisane, par exemple pour la liberté de communication avec le CSA ou pour la protection des données personnelles avec la CNIL, c’est à cette formule qu’on a alors recouru bien que les directives ne l’aient pas exigé, je le répète, pour l’instance de régulation de l’énergie.

M. Alain Gest - Tout à fait.

M. le Rapporteur - Ce choix, naturel, a d’emblée posé le problème des relations de ces instances avec les autorités politiques et celui de leur légitimité. Dans une démocratie, celle-ci doit émaner du peuple et, s’il peut être nécessaire que certaines activités échappent aux autorités élues, rien ne le justifie s’agissant de la régulation d’activités économiques. Comme le président Ollier, qui l’a rappelé vigoureusement en commission, et beaucoup d’autres, je suis très attaché à cette primauté du peuple. En outre, le risque est grand de confondre indépendance et irresponsabilité, et la CRE n’est pas toujours restée strictement dans son rôle. Quand la loi de 2000 a interdit l’activité de négoce, il n’appartenait pas à la CRE de critiquer cette disposition, de même qu’elle n’était pas dans son rôle en préconisant la suppression à terme des tarifs réglementés que nous souhaitons, sur tous les bancs, maintenir.

M. Jean Gaubert - On va vers le consensus !

M. le Rapporteur – Ce point a été déterminant dans notre réflexion. Les représentants du peuple ont pris, de façon assez consensuelle, position pour le maintien de ces tarifs, et cela relève de la loi, non des compétences de la CRE. Reste que nous avons besoin d’un régulateur fort pour garantir la concurrence.

Or, hésitant à priver le pouvoir politique de ses prérogatives, nous nous sommes souvent refusés à ce renforcement. Nous tentons aujourd’hui de sortir de ce dilemme, en vous proposant à la fois un vrai renforcement des pouvoirs du régulateur et une évolution tant de sa mission que de la composition de son collège.

Cette évolution est gouvernée par deux convictions.

La première est que l’ouverture à la concurrence n’est pas un but en soi, mais un moyen au service des consommateurs, dont les intérêts sont notre priorité. Nous souhaitons donc, d’une part, préciser que la mission générale de la CRE est de veiller à un fonctionnement du marché bénéficiant aux consommateurs ; d’autre part, assurer la représentation des consommateurs au sein du collège.

La seconde est que nul n’est mieux à même de défendre l’intérêt général que des parlementaires, dont c’est le mandat. Chacun reconnaît d’ailleurs la dimension politique des questions qui nous occupent ; c’est bien ce qui justifie que les décisions tarifaires appartiennent au ministre et que celui-ci, lorsqu’il veut faire appel à une expertise indépendante, dans le cas de la commission Durieux par exemple, décide de désigner un député – en l’occurrence notre collègue Brochand – parmi ses membres. En assurant la présence de parlementaires au sein de la CRE, nous nous rapprocherons des modèles choisis par nos voisins : en Allemagne, en Italie ou en Espagne, les parlementaires participent même à la désignation des collèges de régulation.

Par ailleurs, il nous semble souhaitable que les fonctions de membre de la CRE ne soient plus, comme c’est le cas aujourd’hui, incompatibles avec toute activité professionnelle – et de ce fait rémunérées à plein temps. Le fait que les membres de la CNIL ou de l’AMF, par exemple, ne soient pas permanents leur permet d’avoir une meilleure connaissance des préoccupations de la société.

L’amendement que je défends au nom de la commission a été sous-amendé par M. Ollier.

M. le Président de la commission – Pour les ultralibéraux, la concurrence est une fin. Pour nous, c’est un moyen au service des consommateurs ; le bon marché est celui qui garantit les prix les plus bas et les prestations les meilleures. C’est dans cet esprit que cet amendement a été rédigé et adopté par la commission.

Nous sommes nombreux à avoir été surpris que la CRE, au nom de la concurrence, conteste le maintien des tarifs. Il nous est loisible de le faire ici, à l'Assemblée nationale, mais ce n’est pas son rôle. En outre, cette prise de position révèle sa conception biaisée de la concurrence. Il nous est apparu que cela résultait largement de la manière dont elle était composée ; c’est un système spécifique à la CRE et à l’ARCEP, et en outre très coûteux.

Nous proposons que seul le président soit permanent. Mon sous-amendement 137646 précise la composition de la CRE – sept membres en tout : outre le président, un député et un sénateur ; deux commissaires désignés en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, l’un par le président de l'Assemblée nationale, et l’autre par le président du Sénat ; un représentant des intérêts économiques et sociaux désigné par le président du Conseil économique et social ; enfin un représentant des consommateurs de gaz et d’électricité, nommé par décret. Mon sous-amendement 137647 prévoit une période transitoire : afin d’assurer la continuité du fonctionnement de la Commission, de nouveaux membres s’ajouteront au collège existant, sans toutefois qu’on dépasse dix personnes.

M. le Rapporteur pour avis – Nous abordons là un sujet très important, l’ouverture des marchés commandant de renforcer le régulateur. La commission des affaires économiques et la commission des finances vont d’ailleurs présenter à ce sujet des amendements communs.

Il peut cependant paraître paradoxal, au moment où l’on s’apprête ainsi à renforcer les pouvoirs de la CRE, de diminuer son degré d’autonomie. Ce qui nous est proposé peut même être compris comme une mesure de rétorsion, M. Ollier ayant bien indiqué que la CRE était sortie de son rôle.

En tout cas, il n’est pas anodin de faire entrer des parlementaires dans une commission indépendante : c’est une manière de la relier au pouvoir législatif. Ce n’est pas sans raison que la loi de 2000 posait le principe de l’incompatibilité de la fonction de membre de la CRE avec tout mandat électif, départemental, national ou européen. De même, les fonctions de conseiller au CSA et à l’ARCEP sont incompatibles avec tout mandat électif ou national. Et ce qui est en cause ici, ce ne sont évidemment pas les compétences des parlementaires…

Ma réserve vaut plus encore pour le représentant des consommateurs, qui va se trouver juge et partie. Cette nomination pourrait d’ailleurs être contraire à la Convention européenne des droits de l’homme, dont l’article 6 dispose : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial ». Il est sûr en tout cas que cet article reçoit une très large interprétation, s’appliquant même aux sanctions administratives et financières.

Certes, le sous-amendement du président Ollier est un progrès par rapport à celui du rapporteur, mais il repose sur les mêmes principes. Nous avons les moyens de contrôler l’action de la CRE. Ne créons donc pas de confusion sur le rôle de cette dernière au moment même où nous nous apprêtons à élargir son pouvoir en vue d’un marché plus transparent. Je suis très réticent à l’égard de l’amendement en discussion, tout en partageant la philosophie des autres visant à améliorer la transparence.

M. François Brottes - On sent une majorité unie !

M. le Rapporteur – Je me réjouis de voir qu’il y a débat. Même si la représentation nationale a pu parfois s’étonner de certaines prises de position de la CRE, il n’y a jamais eu dans mon esprit l’idée de rétorsions contre cette autorité. Mon amendement prévoit que les membres actuels de la CRE vont jusqu’au terme de leur mandat ; nous ne mettons personne dehors ! Et il ne s’agit pas non plus de charges héréditaires !

En ce qui concerne la présence de parlementaires dans le collège, dans la mesure où la loi de 2000 prévoyait que les membres de la CRE étaient rémunérés, il n’était pas concevable à ce moment-là que des députés et sénateurs y siègent, tandis que la situation est différente aujourd’hui. En outre, des parlementaires siègent à la CNIL.

M. le Ministre délégué – Modifier le collège peut laisser penser que l’indépendance de la CRE est mise en cause. D’autre part, si une partie prenante du marché de l’énergie comme un représentant des consommateurs entre à la CRE, il ne peut faire autrement que de défendre le prix le plus bas. Le régulateur doit rester indépendant des parties prenantes. Et je ne souhaite pas donner le sentiment qu’on peut affaiblir son autorité.

M. le Rapporteur – Nous non plus !

M. le Président de la commission – Ce n’est pas parce que la CRE est sortie de son rôle que nous voulons modifier sa composition, mais c’est pour que celle-ci soit conforme aux objectifs que nous poursuivons.

M. Novelli parle d’un risque concernant l’indépendance de l’autorité ; est-ce qu’il pense que les parlementaires ne sont pas indépendants des opérateurs ? Notre amendement 137638 dispose : « Les fonctions de commissaire sont incompatibles avec toute détention, directe ou indirecte, d’intérêts dans une entreprise du secteur de l’énergie ». Il est donc dit clairement que les commissaires doivent être indépendants, mais le fait qu’un parlementaire y siège ne nuit en rien à cette nécessité.

En ce qui concerne la présence de consommateurs, Monsieur le ministre, ceci soit dit en forme de facétie, tous les membres de la CRE, à moins qu’on ne leur coupe l’électricité, sont des consommateurs ! Vous dites qu’un représentant des consommateurs défendrait les prix les plus bas, or tel est bien notre but ! Si nous voulons réguler, c’est pour éviter la concurrence sauvage et défendre l’intérêt général, qui appelle, me semble-t-il, les prix les plus avantageux pour le consommateur. Dès lors, prévoir un représentant des consommateurs dans le collège n’est nullement choquant.

M. le Rapporteur pour avis – Je prends acte de la réponse du ministre, qui ne souhaite pas de représentant des consommateurs. En ce qui concerne les parlementaires, l’article 28 de la loi du 10 février 2000, qui fixe la composition de la CRE, dispose que ses membres sont nommés en raison de leurs qualifications juridiques, économiques et techniques. Le législateur a ainsi voulu assurer à la CRE le concours de personnalités qualifiées, qui puissent donner au président de cette autorité des avis techniques.

Ne créons pas une régulation soumise à l’arbitrage final du pouvoir politique. Une certaine cohérence est nécessaire : si nous mettons en place une autorité indépendante, c’est pour qu’elle régule à la place du pouvoir politique. Autrement, laissons le pouvoir politique réguler lui-même. Étant donné le message contradictoire qu’elles convoient, je suis défavorable à ces propositions de modification.

M. le Rapporteur – Je vais dissiper un malentendu. Hervé Novelli nous dit que l’amendement de la commission est en contradiction avec la loi de 2000. J’appelle son attention sur le fait que cet amendement modifie justement l’article 28 de cette loi.

M. Christian Bataille – Il y a un vrai débat entre la culture jacobine du président de la commission et la culture libérale de M. Novelli et de M. Dionis du Séjour. M. Novelli a invoqué à l’appui de son argumentation la loi de 2000. J’ai été le rapporteur de cette loi, et j’admets volontiers que nous n’avons pas su cantonner la CRE dans son rôle. De fait, elle n’a cessé depuis cinq ans de se substituer au pouvoir politique, s’érigeant finalement en véritable ministère bis. Je salue donc les propositions de Jean-Claude Lenoir et de Patrick Ollier, même si je déplore que les sous-amendements du président de la commission réduisent à la portion congrue la représentation des parlementaires.

Je m’étonne tout de même d’entendre des parlementaires s’interroger sur notre capacité à siéger dans une commission comme la CRE. Certes, nous avons besoin, pour faire la loi, de recueillir l’avis de spécialistes ; mais c’est à nous de décider en dernier ressort. De par nos fonctions et notre connaissance du terrain, nous sommes tout à fait qualifiés pour juger de ces matières. Nous aimerions évidemment que la diversité politique soit représentée.

Le pouvoir politique doit garder le rôle qui est le sien. Je ne suis pas partisan des commissions indépendantes. Qu’elles donnent des avis et éclairent les choix politiques, oui ; mais qu’elles confisquent tous les pouvoirs, non. Quoi qu’il en soit, les propositions de la commission nous paraissent aller dans le bon sens, même si elles restent assez prudentes.

M. Claude Gaillard - Sur le plan de la démocratie, l’idée même de commission des sages a quelque chose d’insupportable, puisqu’elle aboutit à priver les élus d’une responsabilité qui devrait être la leur. Nous avions eu ce débat il y a une dizaine d’années au sujet de l’Autorité de régulation des télécommunications, et quoique rapporteur du texte qui l’a créée, j’étais très réservé. C’est un vrai problème philosophique, et c’est pourquoi ce débat – qui transcende d’ailleurs les clivages politiques – ne me heurte pas. Les deux rapporteurs, le président de la commission et le ministre ont remarquablement posé le problème. Lorsque j’étais administrateur de GDF, il m’est arrivé de penser que la CRE outrepassait franchement ses compétences. Je suis donc partagé : la CRE doit bien sûr détenir un pouvoir important et bénéficier de son autonomie, mais elle gère les grandes orientations – le prix le plus bas, l’investissement à long terme, et aussi la concurrence, qui ne doit cependant pas devenir un objectif en soi. Il ne s’agit pas seulement, en effet, d’ouvrir le secteur à la concurrence, mais aussi de s’assurer que cette concurrence bénéficie au client à court comme à long terme et que l’ensemble du processus ne débouchera pas sur une pénurie. Or, la logique de la CRE était plutôt d’approuver les demandes d’augmentation des tarifs, dans des avis que l’État ne suivait pas.

Je suis assez favorable, à titre personnel, à l’arrivée de parlementaires à la CRE, car on est sûr qu’ils ne seront aux ordres de personne. Ce serait encore mieux, d’ailleurs, si l’on parvenait à assurer la représentation de la majorité et de l’opposition. Les parlementaires sont au fait des grandes priorités nationales – indépendance énergétique, investissement à long terme, prix le plus bas.

N’oublions pas que le choix que nous ferons pour la CRE aura des conséquences, à terme, sur d’autres autorités indépendantes.

Je propose donc de retenir l’idée de deux députés et de deux sénateurs.

M. le Rapporteur – C’est mon amendement !

M. Claude Gaillard – Enfin, il me semble intéressant, compte tenu de mon expérience dans un comité d’agence de bassin, d’avoir également un représentant des consommateurs. Il n’y a pas de raison de ne pas faire confiance à la maturité et à l’honnêteté intellectuelle de nos concitoyens.

M. Daniel Garrigue - Très bien !

M. Jean Dionis du Séjour - Je ne partage pas cette vision. S’il y a un régulateur, c’est parce qu’il existe entre l’État et ses entreprises publiques des liens très forts qui posent problème dans l’optique de la concurrence. L’État-EDF, la consanguinité entre l’État et les entreprises, ce n’est pas un mythe !

M. François Brottes - Et alors ?

M. Jean Dionis du Séjour – Pour asseoir la légitimité de la CRE, on nous propose d’y faire siéger des parlementaires. Mais le modèle européen a sa légitimité, et le système européen est un système de droit. Les parlementaires qui siégeront à la CRE seront-ils vraiment indépendants ? J’en doute. Serons-nous disponibles ? J’en doute aussi. Les missions de la CRE sont avant tout des missions techniques ; or nous sommes des généralistes. Lorsque j’ai été élu, j’ai pensé que je mettrais à profit ma formation d’ingénieur en allant siéger dans des organismes scientifiques – la Commission de surveillance du service public des postes et communications et l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques. Mais je suis loin d’être un modèle d’assiduité.

En ce qui concerne la présence des consommateurs, mon expérience des commissions départementales d’équipement commercial ne me rassure pas du tout. Ce ne sont d’abord pas des consommateurs, mais des représentants des centrales ouvrières. Je ne suis pas contre, mais ce n’est tout de même pas la même chose. Par ailleurs, dans le secteur de l’énergie, il peut y avoir des connexions entre les entreprises et les centrales ouvrières.

M. François Brottes - Elles sont représentatives.

M. Jean Dionis du Séjour - Parfaitement, mais ce ne sont pas des consommateurs. L’association Force ouvrière-consommateurs peut, par exemple, privilégier d’autres buts, comme la défense de l’emploi. En France, le mouvement de consommateurs n’est pas vraiment structuré, à part l’UFC-Que Choisir. Enfin, je suis tout à fait hostile à ce que seul le président soit rémunéré. Si l’on veut que les gens fassent bien un travail très technique et très prenant, on les paye. On peut juste se demander combien et comment régler les problèmes de cumul pour les parlementaires, par exemple.

Toutes ces mesures me semble diminuer la disponibilité et l’indépendance des membres de la commission. C’est un très mauvais signal et c’est l’inverse de ce que demandait la transposition de la directive.

M. Jean Gaubert - Je partage le point de vue de M. Gaillard : administrateur d’EDF pendant dix ans, j’ai parfois eu le sentiment que la CRE se mêlait de ce qui ne la regarde pas.

Sur le fond, j’insiste sur le fait que des administrateurs qui sont tous issus du même creuset, aussi compétents soient-ils, ne peuvent pas assurer l’indépendance d’une structure ni même constituer un bon conseil d’administration. La commission d’enquête sur la gestion des entreprises publiques a montré que la quasi-totalité des administrateurs de France Télécom, par exemple, étaient de la même école de pensée. Ils ne pouvaient absolument pas s’affranchir de l’idée dominante, de leur « politiquement correct ». Les élus, quelle que soit leur sensibilité, et les consommateurs peuvent porter au débat des éléments plus nouveaux. Je pense d’ailleurs que l’indépendance est le produit du débat entre gens différents. Elle ne peut en aucun cas être garantie par le fait qu’aucun n’a fait de politique ou appartenu à une association ! Si l’on ne s’adresse qu’à des spécialistes qui se cooptent, ce n’est pas la peine d’en nommer sept : un seul suffit ! C’est pour cela qu’un certain nombre d’entreprises publiques ont mal fonctionné.

L’amendement précise que les fonctions de commissaire sont incompatibles avec toute détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise du secteur de l'énergie. Je suis tout à fait d’accord. Il faudrait même s’interroger sur la prolongation de cette interdiction quelque temps après la sortie de mandat. On sait que beaucoup de membres valorisent leur appartenance à des structures en se vendant ensuite à l’extérieur. En revanche, la phrase suivante semble incompatible avec la présence de parlementaires : « Les membres de la commission ne prennent, à titre personnel, aucune position publique sur des sujets relevant de la compétence de celle-ci ». Les parlementaires n’auraient plus jamais le droit d’évoquer des questions relatives à l’énergie, dans l’hémicycle ou ailleurs ! C’est une question qui doit absolument être résolue.

M. Jean-Claude Sandrier - Ce débat est particulièrement intéressant, mais il illustre aussi l’impréparation de ce projet de loi. Vous essayez de répondre aux craintes d’une augmentation des tarifs exprimées par une grande majorité de nos concitoyens, mais dans une telle précipitation qu’on est presque en train de demander au Sénat de réfléchir à notre place. Votre tentative de réponse repose sur la composition de la CRE. On y ajoute par exemple des parlementaires – ce n’est pas une mauvaise idée – et un consommateur – un seul. C’est un petit mieux, mais guère plus qu’un cache-sexe.

Cette proposition a été contestée par M. Novelli, au nom de l’indépendance. Il préfère qu’il n’y ait ni élus, ni consommateurs, ni syndicats. Il a tout compris ! En effet, la CRE est censée prendre en compte les conditions d’ouverture du marché. Or ces conditions ont été rappelées par le Commission européenne : les prix réglementés en vigueur étant inférieurs à ceux du marché, ils freinent l’entrée de nouveaux concurrents et empêchent donc la concurrence libre et non faussée, abc du libéralisme… La présence de parlementaires, éventuellement de l’opposition, ne changera rien sur le fond, parce que parler des prix du marché et des tarifs réglementés n’a strictement rien à voir. C’est pourquoi nous proposons plutôt d’élargir les compétences de l’Observatoire national du service public de l’électricité et du gaz. D’aucuns poseront la question de sa compétence, mais il ne faut pas oublier qu’en la matière, la compétence réside pour une grande partie dans l’information. Connaître les coûts réels d’accès à l’énergie serait déjà beaucoup pour avoir une idée de la fixation des prix. Quant à la composition de cet observatoire, elle doit être tout simplement citoyenne : élus représentant toutes les tendances, consommateurs, syndicats et personnes qualifiées. Il faut donc une réflexion qui aille beaucoup plus loin que votre proposition, qui ne garantit pas grand-chose en matière de prix.

M. François Brottes – Sur ces amendements, nous nous abstiendrons. Il est vrai qu’ils proposent une certaine amélioration par rapport aux dysfonctionnements que nous connaissons. Je n’ai d’ailleurs rien à enlever aux propos de M. Gaillard. Il avait été aussi limpide et enthousiaste en commission, pour dire combien il regrettait la privatisation de Gaz de France…

M. Dionis du Séjour, en revanche, a tenu certains propos inacceptables. D’abord, j’en ai tout simplement assez que certains passent leur temps à décrédibiliser la fonction parlementaire. Certains amendements sont débiles, les siens sont intelligents – encore faut-il être là pour les présenter – ; certains députés sont affectés dans des instances auxquelles ils ne vont jamais… Je regrette, lorsque j’appartenais à la commission supérieure du service public de la poste et des télécommunications, j’y passais une demi-journée par semaine et j’étais présent à chaque réunion ! Il ne faut pas laisser croire que les gens – de droite ou de gauche – qui s’engagent et qui acceptent des responsabilités ne les assument pas, sans quoi la petite musique qui cherche toujours à discréditer la représentation nationale devient de plus en plus forte. Ce petit jeu ne sert pas la démocratie.

Quant à comparer le secteur de l’énergie avec les surfaces commerciales de nos villes… Les bras m’en tombent ! Nous sommes tous d’accord sur le fait que l’énergie n’est pas un bien comme les autres, parce que tout le monde en a besoin et que c’est un secteur stratégique. Dans ce contexte, c’est sur l’intérêt supérieur du pays qu’il faut s’interroger, pas sur l’intérêt supérieur du marché ! Il y a confusion des genres. Or, dès l’instant qu’il s’agit de l’intérêt supérieur du pays, la représentation nationale a toute légitimité et toute compétence pour s’y intéresser directement.

Les propositions qui nous sont faites paraissent donc intéressantes. Cependant, il faut considérer qu’elles font encore débat, au sein même de la majorité, que nous sommes en procédure d’urgence et que nous ne savons pas exactement à quoi cela va aboutir. Nous nous abstiendrons donc, d’autant que certaines difficultés ne sont pas résolues. En ce qui concerne le nombre de députés et de sénateurs par exemple, il faut aller au bout de la logique : si l’on trouve normal que des représentants du peuple soient présents, c’est la totalité du peuple qui doit être représentée, majorité et opposition. J’appuie par ailleurs la remarque de Jean Gaubert sur l’interdiction, pour tous les membres, d’agir dans le secteur pendant quelques années après leur passage dans la commission de régulation. Je ne dis pas que des entreprises font du lobbying… mais cela pourrait arriver !

Enfin, j’aurais préféré que soit évoqué le bénéfice des consommateurs finals.

Mme Muguette Jacquaint - J’approuve la déclaration que vient de faire notre collègue François Brottes sur le rôle du Parlement, et je constate que tous les élus qui siègent depuis que le débat s’est engagé sur ce texte ont fait la preuve de leurs compétences et de leur intérêt pour leurs concitoyens et pour le développement économique de la France.

Le fait même que certaines déclarations de la CRE aient été contestées montre l’importance du rôle qu’elle doit jouer dans l’intérêt du pays, de notre économie et du consommateur, mais aussi du service public, question majeure au moment où l’on parle de privatiser GDF. Je ne vois pas donc pas d’objection à ce que l’on modifie la composition de la Commission pour introduire en son sein des représentants des parlementaires, ainsi que des représentants des consommateurs. Mais nos amendements 38096 à 38117, 38074 à 38095, 38052 à 38073, 36842 à 36863 et 36864 à 38051 tendent à renforcer le rôle de l’Observatoire national du service public de l’électricité et du gaz, créé par l’article 3 de la loi relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité. L’approche n’est pas la même que celle qui vise seulement à améliorer la transparence et l’indépendance de la CRE.

M. le Ministre délégué – Je rappelle que le Gouvernement n’est favorable ni à l’amendement 137638 ni aux sous-amendements, car il considère que la réflexion en cours sur la CRE est encore inaboutie.

M. le Président de la commission – Pour donner suite à la proposition de notre collègue Claude Gaillard, je propose de rectifier le sous-amendement 137646, et d’en revenir à deux députés et deux sénateurs. La CRE compterait donc huit commissaires.

Le sous-amendement 137646 rectifié, mis aux voix, est adopté, de même que le sous-amendement 137647.

L'amendement 137638 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

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