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Julius Evola


Elardag

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J'ai démarré, il y a peu, Métaphysique du sexe de Julius Evola. J'avais déjà pu lire La crise du monde moderne de René Guénon.

Or en lisant ces auteurs traditionalistes, je ressens quelques chose d'immense. L'impression d'une réflexion et d'une vision du monde tellement supérieure à tout les petits penseurs immanentistes de nos jours. Même Hobbes, Rousseau, Hegel, me semblent tous faiblards.

Si certains d'entre vous ont un peu lu ces deux auteurs, qu'en avez-vous retirer ? Plus je les lis, plus j'ai l'impression d'une grande faiblesse théorique du libéralisme.

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J'ai lu les deux livres que tu cites, voici ce que j'en retire. Pour la La métaphysique du sexe: J'ai du mal déjà à prendre au sérieux un livre s'appuyant sur les modèles d'Otto Weininger. Si on y rajoute à cela sa lecture partielle des soi-disants Traditions primordiales, qui résiste très mal à une étude sérieuse du Taoïsme ou de l'Hindouïsme. De même que la pauvreté de son interprétation du Banquet de Platon, si on la compare à celles de Leo Strauss ou d'Allan Bloom, par exemple, franchement ce livre est vraiment très moyen. Libre à toi d'en faire ton modèle, mais une lecture attentive des classiques que tu cites avec un brin de mépris, t'apportera bien plus qu'un plat mal réchauffé amha.

La crise du monde moderne: Deux ou trois idées intéressantes -notamment sur l'absurdité de tout débat d'idée, mais idem que pour Evola, les interprétations de Guénon, me semblent bien viellies. A la rigueur, je lui préfére la lecture de Massignon ou de Corbin.

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J'ai lu les deux livres que tu cites, voici ce que j'en retire. Pour la La métaphysique du sexe: J'ai du mal déjà à prendre au sérieux un livre s'appuyant sur les modèles d'Otto Weininger. Si on y rajoute sa lecture partielle des soi-disants Traditions primordiales, qui résiste très mal à une étude sérieuse du Taoïsme ou de l'Hindouïsme. De même que la pauvreté de son interprétation du Banquet de Platon, si on la compare à celles de Leo Strauss ou d'Allan Bloom,par exemple, franchement ce livre est vraiment très moyen. Libre à toi d'en faire ton modèle, mais une lecture attentive des classiques que tu cites avec un brin de mépris, t'apportera bien plus qu'un plat mal réchauffé amha.

La crise du monde moderne: Deux ou trois idées intéressantes -notamment sur l'absurdité de tout débat d'idée, mais idem que pour Evola, les interprétations de Guénon, me semblent bien viellies. A la rigueur, je lui préfére la lecture de Massignon ou de Corbin.

+1

J'avais bien aimé "chevaucher le tigre", "l'arc et la massue" et "le fascisme vu de droite" à 20 ans. Et puis j'ai lu d'autres choses, et ça m'est passé.

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J'ai démarré, il y a peu, Métaphysique du sexe de Julius Evola. J'avais déjà pu lire La crise du monde moderne de René Guénon.

Oh purée, on laisse encore entrer les mystiques sur lib.org ?

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Or en lisant ces auteurs traditionalistes, je ressens quelques chose d'immense.

Attention à ne pas en mettre partout.

L'impression d'une réflexion et d'une vision du monde tellement supérieure à tout les petits penseurs immanentistes de nos jours. Même Hobbes, Rousseau, Hegel, me semblent tous faiblards.

Si certains d'entre vous ont un peu lu ces deux auteurs, qu'en avez-vous retirer ? Plus je les lis, plus j'ai l'impression d'une grande faiblesse théorique du libéralisme.

:popcorn:

Posté

Pour continuer le propos d'Acéphale sur la lecture évolienne de Platon, je te conseille de faire un truc tout bête : tu prends Révolte contre le monde moderne, tu trouves les passages piochés dans la République, et tu compares avec d'autres traductions (Robin, Canto, etc).

Tu t'aperçois alors assez rapidement que la lecture curieuse que notre kshatriya magnifique donne de l'oeuvre de Platon repose en grande partie sur des erreurs (ou des licences) de traductions concernant la place et le rôle de la partie ardente de l'âme (to thumoides) dans l'organisation de la cité et de l'âme humaine.

A titre personnel, c'est en grande partie ce qui a motivé mon éloignement de Evola. Le retour à la tradition primordiale est une sorte de bricolage mystique, une mise en forme conventionnelle de cultures et spiritualités pré-modernes qui n'a de cohérence (en tout cas chez Evola) qu'au regard de son rejet complet du monde moderne. Comme le monde moderne est sous sa plume matérialiste, progressiste, historiciste, etc., il se fait anti-matérialiste, anti-progressiste, anti-rationaliste, etc.

Le rejet radical de la civilisation contemporaine étant plus important dans sa démarche que l'acceptation positive d'une alternative non moderne, il en est venu à soutenir en pratiques les tendances les plus nihilistes de l'ext droite allemande et italienne pendant et après guerre. Sans entrer dans le détail, je crois qu'il y a quelque chose de cohérent dans son parcours, depuis la fréquentation des groupes dadaistes de l'entre-deux guerres jusqu'à sa "fréquentation" des groupuscules terroristes de l'Italie de l'après guerre. "Chevaucher le tigre" et "Les hommes au milieu des ruines" témoignent de ce décalage entre mysticisme théorique et nihilisme pratique (le convive de pierres).

Tout ça me fait dire qu'au fond, dans cette histoire, c'est peut être Roger Nimier qui a raison : dans le "Grand d'Espagne", il reprochait ironiquement aux surréalistes leur inconséquence. Pour coller au manifeste surréaliste, qui faisait par exemple du meurtre gratuit l'acte surréaliste par excellence, ils auraient du s'engager aux côtés de l'Allemagne nazie, beaucoup plus avancée dans le nihilisme politique et moral que ses adversaires occidentaux et communistes.

En un sens, à l'incohérence des Breton et Aragon répond la cohérence des Evola et Drieu la Rochelle.

Posté

Merci à Acéphale et F.mas pour leurs réponses détaillées et argumentées. Quant à la référence, c'est plus une blague, je ne savais pas trop quoi mettre. Evola m'intéresse, mais je ne suis pas un fanatique non plus.

+1

J'avais bien aimé "chevaucher le tigre", "l'arc et la massue" et "le fascisme vu de droite" à 20 ans. Et puis j'ai lu d'autres choses, et ça m'est passé.

Quels autres auteurs conseilles-tu pour se réconcilier avec le monde moderne ?

Posté

Je serais tenté de dire Leo Strauss, ce qui peut apparaître comme un peu paradoxale, puisqu'il était lui-même un critique assez radical de la Modernité (pour ne pas dire le plus radical, puisqu'après tout, ce qu'ils reprochaient aux anti-modernes comme Martin Heidegger ou Carl Schmitt, c'est de ne pas être allé assez loin dans le rejet de l'épistémologie historiciste moderne).

Il n'y a là qu'une contradiction apparente, quand on sait que pour Strauss, la principale faiblesse de la théorie politique moderne est d'avoir fait disparaître la raison pratique (et donc la vertu de modération qui lui est plus ou moins attachée) au profit de la raison théorique (celle des sciences, de la métaphysique, de la raison abstraite), devenue par la suite seule garantie de connaissance au sein de l'expérience humaine.

La conséquence directe sur la philosophie politique est de l'avoir requalifier en "science" sur le modèle de la physique ou de la biologie : après Machiavel, elle se devait désormais de dégager des lois, des prescriptions exactes et de formuler des théories pour guider l'action plutôt que de chercher à répondre aux questions classiques associées à la vie bonne et au meilleur régime possible.

Cette manière de penser la politique orientée vers l'action plutôt que la contemplation, après Machiavel, a introduit une sorte de manichéisme épistémique en politique qui a popularisé le goût des négations souveraines, des ruptures brutales, des affirmations radicales jusqu'au nihilisme politique. Puisqu'il n'existe pas de savoir véritable entre la connaissance scientifique et l'opinion (nécessairement subjective et même émotive), la science politique se doit de devenir dogmatique pour exister. L'ensemble des politiques et des théoriciens modernes partagent donc ce goût pour l'excès rhétorique, la stylisation de la pensée politique destinée à être plus adaptée à l'activité politique pratique.

Et c'est ce style dogmatique typiquement moderne qu'on retrouve chez ces soi-disant ennemis radicaux de la Modernité : la brutalisation des rapports sociaux vient aussi de la simplification des catégories de la science politique devenue un outil de pouvoir au service des intérêts d'acteurs insondables en raison.

En d'autres termes, Strauss est utile pour nous indiquer en quoi ces anti-modernes (enfin ceux liés à la révolution conservatrice allemande) ont échoué à sortir de la Modernité (savoir si lui-même a réussi à en sortir est une autre histoire). Ils restent prisonnier de son cadre épistémique, des grandes divisions post machiavélienne entre science et opinion, domination de la raison théorique et l'irrationalité des jugements de valeur. Je pense au texte de Strauss sur le nihilisme allemand par exemple, qui est très intéressant sur le sujet.

On peut se demander si la raison pratique a totalement disparu avec la modernité, si elle ne se manifeste pas sous d'autres appellations chez Hume, Montesquieu ou Tocqueville. Sinon, pour se réconcilier avec la modernité, j'aurais tendance à conseiller les commentaires de Michael Oakeshott sur Thomas Hobbes, qui invitent à regarder l'auteur du Léviathan d'un oeil neuf et plus profond que d'hab (et pas spécialement moderne en fait).

Posté
Cette manière de penser la politique orientée vers l'action plutôt que la contemplation

Tu dis ça parce que tu est jaloux :blagounette:

Posté

J'avais essayé de lire Léo Strauss, mais je dois avouer que ça m'était tomber des mains (Schmitt c'était déjà plus lisible). Cependant je veux bien retenter le coup vu que tu sembles le tenir en haute estime.

Posté
J'ai démarré, il y a peu, Métaphysique du sexe de Julius Evola. J'avais déjà pu lire La crise du monde moderne de René Guénon.

Or en lisant ces auteurs traditionalistes, je ressens quelques chose d'immense. L'impression d'une réflexion et d'une vision du monde tellement supérieure à tout les petits penseurs immanentistes de nos jours. Même Hobbes, Rousseau, Hegel, me semblent tous faiblards.

Si certains d'entre vous ont un peu lu ces deux auteurs, qu'en avez-vous retirer ? Plus je les lis, plus j'ai l'impression d'une grande faiblesse théorique du libéralisme.

Le premier livre d'Evola que j'ai lu est Chevaucher le Tigre, mais ça a été une mauvaise idée de commencer par celui-là parce qu'il vient assez tard dans la chronologie de l'oeuvre. En revanche, j'ai trouvé vraiment instructif Révolte contre le Monde Moderne pour son analyse des traditions religieuses. J'y ai appris certaines interprétations de symboles qui sont intéressantes, pas connes du tout, par exemple celle de l'image de la Vierge Marie :

Beaucoup de traditions caractérisent également la nature des rois en disant qu’ils ne sont pas nés d’une naissance mortelle. Cette idée, souvent liée à certaines représentations symboliques (virginité de la mère, divinités qui s’unissent à une femme, etc.), signifie que la véritable vie du roi divin, tout en étant greffée sur la vie personnelle et limitée qui commence avec la naissance terrestre et finit avec la mort de l’organisme, ne se réduit pas à cette vie, mais émane d’une influence supra-individuelle qui ne souffre aucune solution de continuité et à laquelle elle s’identifie essentiellement.
Il est dit, par exemple, dans Lao-Tseu que la famille naquit lors de l’extinction d’un rapport de participation directe, à travers le sang, avec le principe spirituel originel. La même idée se retrouve d’ailleurs, d’une façon résiduelle, dans la priorité, reconnue par plus d’une tradition, de la paternité spirituelle sur la paternité naturelle, à la “seconde naissance” par rapport à la naissance mortelle. Dans le monde romain, on pourrait aussi se référer à l’aspect intérieur de la dignité conférée à l’adoption, comprise en tant que filiation immatérielle et surnaturelle, placée sous le signe de divinités nettement olympiennes, et qui, à partir d’une certaine période, est également choisie comme un moyen d’assurer la continuité de la fonction impériale.

Pour nous en tenir au texte indiqué plus haut, nous citerons ce passage : “Quand un père et une mère, s’unissant par amour, donnent la vie à un fils, on ne doit pas considérer cette naissance comme quelque chose de plus qu’un fait humain, parce que le fils se forme dans la matrice. Mais la vie que lui communique le maître spirituel… est la vraie vie, qui n’est sujette, ni à la vieillesse, ni à la mort”. De cette façon, non seulement les rapports naturels passent au second plan, mais ils peuvent même se renverser : on reconnaît, en effet, que le brâhmana, auteur de la naissance spirituelle, “est, selon la loi, même s’il n’est qu’un enfant, le vrai père de l’homme adulte” et que l’initié peut considérer ses parents comme ses enfants, “parce que sa sagesse lui donne sur eux l’autorité d’un père.

Cela dit, je ne pense pas que l'on doive lire la pensée évolienne en en tirant des conclusions normatives (politiques), du genre "le libéralisme est à rejeter" (parce qu'il serait faible théoriquement). En fait, si l'on suit la pensée même d'Evola et qu'on est convaincu par cette pensée, on ne devrait pas refuser le libéralisme aujourd'hui, puisque la pensée évolienne ne fait pas l'apologie d'un régime autoritaire ; ce n'est pas parce qu'il parle de la royauté par exemple qu'il faut le comprendre comme un voeu de régime tyrannique : après tout, Evola affirme que l'aura spirituelle des "maîtres" (qu'Evola appelle les rois, mais c'est la même chose) dans les sociétés anciennes s'imposait d'elle-même ; or dans notre époque moderne, cette "émanation spirtuelle" directrice n'est plus et, par conséquent, si quelqu'un est vraiment évolien, il devrait logiquement en conclure qu'un régime autoritaire ne changera pas les choses (on ne renoue pas avec la Tradition avec des racines profanes).

Bref, aussi étonnant que ça puisse paraître, la question du choix de régime politique ne se pose pas, d'après moi, chez Evola.

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