Oui c'est vrai mais Schmitt distingue il me semble libéralisme politique et libéralisme économique, qu'il ne blâme pas particulièrement, la sphère économique ne répondant pas au critère fondamental du politique (l'intensité de la lutte à mort entre l'ami et l'ennemi). Donc Schmitt ne se prive nullement de mentionner Hobbes comme référence et de citer Pareto (en particulier dans Le Nomos de la Terre, reprenant la terminologie des "dérivations"). Schmitt est aussi un grand lecteur de Tocqueville (cf. Ex Captivitate Salus), qu'il considérait comme le plus grand historien du XIXe siècle. Il ne faut pas oublier qu'il a vécu comme juriste dans la très libéral-conservatrice république de Weimar, qu'il a défendue. Il existe même un bouquin de Renato Cristi, Le Libéralisme conservateur, trois essais sur Schmitt, Hayek et Hegel (éd. Kimé, 1993, v. https://www.erudit.org/en/journals/ltp/1993-v49-n3-ltp2147/400808ar.pdf) qui pousse le bouchon encore plus loin et sans remporter complètement mon adhésion, je dois dire, en assimilant le combat de Schmitt contre le normativisme juridique à celui de Hayek contre le constructivisme : l'ordre émanant de la communauté elle-même et non d'une rationalité extérieure dont Schmitt fait l'alpha et l'oméga de sa pensée juridique à partir de la Verfassungslehre (Théorie de la constitution) et des Trois types de pensée juridique et qu'il appelle "ordre concret" serait l'équivalent de l'"ordre spontané". À mon avis, la mise en rapport est caduque (bien que Cristi n'omette pas la critique hayékienne de Schmitt dans Droit, législation et liberté) mais elle a le mérite de sortir Schmitt de l'ornière d'un antilibéralisme aveugle et systématique. Qui sont les plus grands lecteurs de Schmitt ? Aron, Freund, Capitant, Perroux… des libéraux en somme. La critique de Schmitt est plutôt salutaire pour le libéralisme politique.