Dkhay Posted February 13, 2010 Report Posted February 13, 2010 Bonjours je suis étudiant en philosophie à Sorbonne. J'ai le semestre passé étudié la philosophie politique hobbesienne de façon assez profonde, notament la deuxieme partie du Leviathan consacré à la République. Etant plutot séduit par les idées libertariennes, l'étude de hobbes à cependant provoquer quelques intérrogations en moi. En effet il semble que hobbes tout en considérant les principes de lois naturelles, arrive a justifier l'existance d'un état absolue, voire même totalitaire, dans une vision individualiste et libéral des rapports humains. Pour ceux ne connaissant que peu Hobbes, il s'appuie notament sur l'idée d'une convention à la base de la création d'une république. La convention est à la fois : L'élaboration volontaire d'un lien d'autorité (autorité pensé de maniere théatrale, représentation ect) - le future souverain, acteur -et le peuple qui se reconnait comme auteur de tous les actes du souverain. la convention désigne aussi ce contrat de la multitude dispersé (peuple) remettant sa "liberté" au souverain afin de sotir de l'état de nature. Hobbes semble accepter la nature individualiste et égoiste de l'homme, il pense même l'homme comme animal apolitique et insiste sur le caractere artificielle d'une république. Il admet même que le pouvoir souverain se fonde sur la crainte des forces armées ( et non sur des lois, le peuple où l'état providence) Il y'a bien sur un tas d'autre notions importantes, mais je viens alors à mon questionnement. Un état Hobbesien est il comme on pourait le croire compatible avec des principes Libéraux voir Libertariens? J'aimerai notament savoir ce que vous pensez d'une tel conception de l'état? Est il envisageable? Si oui alors les arguments contraires a un absolutisme sont il alors seulements morales? Desolé si je ne suis pas très clair, merci beaucoup.
Saucer Posted February 13, 2010 Report Posted February 13, 2010 Le contrat de Hobbes est précurseur des droits individuels inaliénables, comme tu le notes. Bien entendu, le transfert de liberté au souverain comme garantissant la paix civile est vu comme non libéral. Pourtant, on peut y voir aussi la représentation, thème qui sera celui des libéraux plus tard. Il faut bien voir que Hobbes est d'abord un des fondateurs de la vision politique moderne, qui est encore la nôtre aujourd'hui, celle qui a remplacé la quête du Bien par celle du Droit. C'est dans ce sens-là qu'on trouve la véritable filiation avec le libéralisme. Puis de libéralisme en libertarianisme…
José Posted February 13, 2010 Report Posted February 13, 2010 …il semble que hobbes tout en considérant les principes de lois naturelles… Justement non. Son hypothèse d'un prétendu état de nature où tous seraient hostiles à tous est une fantaisie intellectuelle aussi creuse que l'état de nature de Rousseau peuplé de bisounours. Aucune de ces deux visions ne se fonde sur la réalité et encore moins sur les lois naturelles et, partant, les théories qui en découlent sont parfaitement stériles - au mieux - ou dangereuses - au pire.
Guest jabial Posted February 13, 2010 Report Posted February 13, 2010 Tu as accepté un contrat social, toi ? Et ben moi non plus. À l'aune de ce que dit Hobbes, on peut justifier le nazisme aussi. Je pense que ça suffit à le disqualifier.
Rincevent Posted February 13, 2010 Report Posted February 13, 2010 Le problème de Hobbes (en dehors d'une conception contractualiste datée, c'est que "Hobbes donne directement à l’autorité sociale une souveraineté absolue. Sauf que l’introduction du mot « absolu » procède d’un non sequitur. Oui, le souverain a le droit de punir, mais non, il ne peut pas tout punir. ". Merci Benjamin Constant.
pierreyves Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 En effet il semble que hobbes tout en considérant les principes de lois naturelles, arrive a justifier l'existance d'un état absolue, voire même totalitaire, dans une vision individualiste et libéral des rapports humains.[…] Hobbes semble accepter la nature individualiste et égoiste de l'homme, il pense même l'homme comme animal apolitique et insiste sur le caractere artificielle d'une république. Il admet même que le pouvoir souverain se fonde sur la crainte des forces armées ( et non sur des lois, le peuple où l'état providence) […] Un état Hobbesien est il comme on pourait le croire compatible avec des principes Libéraux voir Libertariens? J'aimerai notament savoir ce que vous pensez d'une tel conception de l'état? Est il envisageable? Si oui alors les arguments contraires a un absolutisme sont il alors seulements morales? L'état de Hobbes est complètement étranger aux principes libéraux (je suis d'accord avec les remarques concernant le contrat social ci-dessus). Certes Hobbes parle d'individualisme & d'égoïsme mais c'est pour mieux attribuer à l'homme une nature violente. Par suite, il justifie l'institution d'un absolutisme complètement contraire à l'individualisme. L'état de nature de Hobbes est surtout un état de violence, qui n'a rien de réaliste (erreur symmétrique de celle de Rousseau), dans le quel il néglige en particulier l'importance du libre-arbitre (de la volonté). En revanche, les principaux arguments conte l'absolutisme sont en effet éthiques. L'homme doué de libre-arbitre ne saurait être soumis à un despote absolu (ou dit autrement, son état totalitaire ne "fonctionne" pas parce que les gens font usage de libre-arbitre). Ce que nous dit surtout Hobbes, à mon avis, c'est que lui-même n'était pas capable de concevoir autrechose qu'un être humain violent.
Dkhay Posted February 14, 2010 Author Report Posted February 14, 2010 Merci pour ces eclaircissements. Mais certaines choses me troublent encore. Pour répondre à Sauceur : Si Hobbes est en filiation avec le libertarianisme, j'aimerai savoir ou se trouve alors le point de rupture entre les deux pensées, parcequ'il semble évident qu'il y'en ai un. Peut être qu'une conception Lockéenne du contrat ( que je ne connais que peu ) correspond un peu mieux à une idée libéral? Pour répondre à Lucillio: : Le point de rupture serait donc pour toi la conception de l'état de nature ? Cependant pour ce qui est de l'état de nature hobbésien, malgrès qu'il soit "cliché", je le trouve beaucoup plus réaliste que celui de Rousseau, et il serait insultant de dire qu'il sont aussi creux l'un que l'autre! En effet on remarque tout de même dans l'histoire que les lois ou droits naturelles comme hobbes les décrits semblent n'etre parfois que des principes découvrable par la raison mais dont l'application n'est pas toujours confirmé. Pourait tu alors m'orienter sur quelques penseurs d'un état de nature plus réaliste? Enfin pour répondre à jabial et à la question des droits individuels inalienables evoqués par Sauceur : Je doute tout de même de l'universalité des Droits Inalianable. En effet si ces droits sont découvrables pour tous Comment est il possible qu' il y'ai pu avoir autant de dérives liés à l'Etat. Ou même que notre monde actuelle ne soit plus qu'un amas d'administration étatique. Le liberalisme actuelle semble plutot être un communisme débridé se disant liberal seulement parce qu'il légitime le privé (et la protiété). Mais même cette notion de privé renvoie toujours à un état: Uné économie commandé par une pseudo conscience-mondial, marchés boursiers manipulés par les banques fédérales, OMC s'imposant comme déspote, G8 et Grennelle prétendant dicter l'avenir du "monde libre". N'est-ce pas ce qu'on appelle une idéologie? Ceci ressemble étrangement au principe de planification économique communisme ? Comment certains penseur se disant "liberaux" peuvent-ils justifier cela sans faire tort aux droits inalienables? Justification semble peut probable quand on voit comment le privé se prostitue actuellement à l'état sans même demander grâce. Ils osent même parler de propriété quand tous le monde sait que l'état peut librement expulser ou réquisitionner ce qu'il juge "nécessaire". Bref je suppose que je n'ai pas à vous dire toute les raisons démontrant à quel point le monde actuel est loin d'être liberal. Il y'a donc là une Réel faille des droits naturels inalienable! L'homme doué de libre-arbitre ne saurait être soumis à un despote absolu (ou dit autrement, son état totalitaire ne "fonctionne" pas parce que les gens font usage de libre-arbitre). Faut il alors conclure que la majorité de la population mondiale fait effort d'une ethique défaillante? Ou que la population allemande a fait preuve d'une éthique défaillante devant le nazisme? Je n'arrive pas à comprendre pour quel raisons l'homme à préféré transformer un monde par nature individualiste en ce grand bordel reglementé par d'obscures institutions administratives si ce n'est pour les raisons Hobbesiennes ( peur de l'état de nature chaotique ). Je ne justifie pas cette Peur (ni l'état de nature hobbesien) mais constate seulement que qu'elle à pu détruire en certains la conscience des Droits Naturels prétendus Inalienables et Universelles. Que répondre alors a cela? le libéralisme n'est il qu'une belle utopie irréalisable? ou son non-accomplissement n'est il que la conséquence de la lacheté de beaucoup d'entrepreneurs à ne savoir que parler bruyament pour critiquer un état qu'ils légitment par leur passivité. A qui ou à quoi revient la faute?
Guest jabial Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Le fait que les gens puisent découvrir l'histoire du monde en cherchant honnêtement n'empêchera nullement des escrocs de vendre le créationnisme si tel est leur intérêt. Et des gens très intelligents s'il laisseront prendre parce qu'émotionnellement, ils ont envie que ce soit comme ça. Ce n'est pas parce que le nazisme a été la réalité de l'Allemagne pendant une décennie qu'il est légitime d'envoyer les opposants et les boucs-émissaires à la mort de façon industrielle. Enfin bref, les droits inaliénables existent indubitablement en tant que droits, mais certainement pas en tant que lois. Faire de ces droits des lois réelles, c'est le travail des libéraux. Et même en libéralisme, il y aura toujours des gens qui ne les respecteront pas ; ça s'appelle des criminels.
free jazz Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 L'état de Hobbes est complètement étranger aux principes libéraux (je suis d'accord avec les remarques concernant le contrat social ci-dessus). Dkhay a raison, Hobbes commence par une analyse anthropologique qui pose comme axiomes la plupart des principes libéraux modernes. Surtout par son interprétation individualiste du droit naturel, qu'il définit à partir de la propriété de soi et de la légitime défense, les autres droits étant déduits de façon logique et apriori. Au point que Léo Strauss et d'autres spécialistes le considèrent comme le véritable fondateur du libéralisme. Certes Hobbes parle d'individualisme & d'égoïsme mais c'est pour mieux attribuer à l'homme une nature violente. Par suite, il justifie l'institution d'un absolutisme complètement contraire à l'individualisme. Il n'attribue pas à l'homme une nature violente, mais une nature rationnelle c'est-à-dire capable d'anticiper les conséquences de ses actions en partant des causes, qui le distingue des autres animaux par son rapport particulier au futur. Cette capacité de se projeter dans l'avenir lui permet aussi de prévoir les dangers éventuels et de s'en prémunir par la dissuasion. Les actions humaines se divisent en comportements logiques et passionnels. Selon Hobbes, la passion la plus universelle est la peur de la mort violente, puisque chaque individu vise son auto-conservation. Or les hommes sont non seulement égaux en droits, mais aussi assez égaux en force et en intelligence, ou du moins les différences naturelles peuvent être compensées par la possiblité de se coaliser en bandes ou de surprendre les forts par la ruse. La violence n'est pas un point de départ mais une conséquence de la généralisation de la légitime défense, qui pousse les propriétaires à s'armer pour dissuader d'éventuels agresseurs ou criminels de s'emparer de leur propriété, ce qui engendre une situation de défiance réciproque. Si bien qu'il appelle guerre de chacun contre chacun cette condition de défiance générale où les propriétaires, en l'absence de police régalienne, sont poussés vers une course aux armements. L'état de nature de Hobbes est surtout un état de violence, qui n'a rien de réaliste (erreur symmétrique de celle de Rousseau), dans le quel il néglige en particulier l'importance du libre-arbitre (de la volonté). Au contraire il part du libre-arbitre comme dimension fondamentale de l'homme à l'état de nature. Il est d'ailleurs le premier philosophe à donner une définition purement négative de la liberté (absence d'entraves à la liberté de mouvement). C'est en vertu de cette nature rationnelle qu'il décrit le passage à l'état de civilisation ou de pacification, par un contrat avec le souverain. C'est ce libre-arbitre qui conduit à concevoir la République à partir de la Loi naturelle, comme un processus institutionnel de nécessaire pacification par un monopole de la justice. En revanche, les principaux arguments conte l'absolutisme sont en effet éthiques. L'homme doué de libre-arbitre ne saurait être soumis à un despote absolu (ou dit autrement, son état totalitaire ne "fonctionne" pas parce que les gens font usage de libre-arbitre). L'absolutisme du souverain n'est pas justifié par la soumission, mais par la servitude volontaire des citoyens, qui renoncent à l'exercice inconditionnel de leurs droits naturels pour gagner la paix civile. Ce que nous dit surtout Hobbes, à mon avis, c'est que lui-même n'était pas capable de concevoir autrechose qu'un être humain violent. Hobbes, qui fut très marqué par l'expérience de la guerre civile anglaise, ne redoutait rien de plus que la violence, et le Leviathan montre au contraire que les individus sont essentiellement motivés par le renoncement à la violence, au point qu'ils sont prêts à échanger leur liberté contre la sécurité.
Dardanus Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Hobbes, qui fut très marqué par l'expérience de la guerre civile anglaise, ne redoutait rien de plus que la violence, et le Leviathan montre au contraire que les individus sont essentiellement motivés par le renoncement à la violence, au point qu'ils sont prêts à échanger leur liberté contre la sécurité. Tiens, tiens, une "guerre civile" en Angleterre ? Outre-manche n'est ce pas ce que l'on nomme une "révolution" ? Ainsi donc les Anglais auraient fait l'expérience de la violence révolutionnaire ? Et cette violence provoquerait un renoncement de la liberté au profit de la sécurité. Cela fait curieusement penser à la Révolution française s'achevant par le Consulat.
F. mas Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Il existe effectivement plusieurs penseurs libertariens qui se réclament de Hobbes. Dans le domaine philosophique, il y a au moins David Gauthier et sa Morals by agreement (qui a bcp influencé J Narveson par ex), et dans le domaine plus économique, J. Buchanan et G. Tullock. Gauthier reprend le calcul hobbésien (la rationalité instrumentale qui pousse l'agent à maximiser son utilité) pour fonder l'état minimal (comme pour la théorie des jeux) : les agents à l'état de nature sont rationnels (c'est une loi de nature dans Le Citoyen), ils calculent qu'en restant au sein d'un système qui rend leur vie plus courte et plus atroce, tout le monde y perd, alors que s'ils acceptent la coopération pacifique, tout le monde y gagne : c'est donc pour cela qu'ils choisissent de transmettre leurs droits à un souverain en échange de la loi (l'Etat donne le cadre d'une coopération pacifique où tous les agents ont une chance de participer aux échanges). Notons au passage que le positivisme hobbésien ne reconnait aucun droit naturel dans la condition civile : si un citoyen garde de tels droits alors que les autres les abandonnent, le jeu devient au bénéfice exclusif de celui qui a gardé ses droits. Toutefois les néohobbésiens ajoutent une clause dite "lockéenne", celle de la dotation originelle : l'institution de l'état ne faisant que poser les termes de l'échange, et non les biens à échanger, il faut poser une théorie de l'appropriation originelle. Comme pour Locke, l'appropriation originelle se fait par le travail : les premiers individus en travaillant la terre, en cueillant, en chassant, s'approprie une partie de la nature qui devient propriété. Mais l'acquisition de propriété originelle est conditionnelle : elle ne peut se faire qu'à condition d'en laisser suffisamment pour les autres agents. Pour les néohobbésiens, l'institution de l'Etat et celle de la propriété se confondent, contrairement aux autres chapelles libérales ou libertariennes, qui marquent une distinction que Hobbes ne connaissait pas, celle entre société et Etat. Maintenant, plusieurs remarques qui me viennent à l'esprit (qui me viennent sous l'influence de ma lecture du moment, à savoir the state, d'A. de Jasay) : - expliquer qu'il est plus raisonnable de choisir la condition civile (la coopération sociale sous coercition) plutôt que de rester dans l'état de nature semble être un discours idéologique produit par les principaux bénéficiaires de l'Etat, car après tout, les individus asservis par l'Etat n'ont jamais fait l'expérience de l'état de nature : sans point de comparaison, il est toujours plus facile de dire que sans la médiation de l'Etat, les individus n'auraient aucune possibilité d'auto-organisation. C'est d'ailleurs le problème de tous les contractualistes : ils commencent par poser l'existence de la condition civile pour ensuite imaginer l'état de nature qui justifiera son institution (c'est du bon vieux strawman argument des familles). Chez Hobbes, c'est magnifique : à l'état de nature, les agents sont poussées par leurs passions les plus basses (la compétition pour la vaine gloire) et la morale n'existe pas (enfin pas toute, parce que curieusement ils connaissent quand même l'idée d'obligation qui permet de signer un contrat originel). Elle n'apparait qu'au moment de l'institution étatique comme pure contrainte sur les individus (qui refont un calcul par ailleurs : il vaut mieux accepter les contraintes de la morale commune comme fondement de la coopération pacifique que la guerre de tous contre tous). En d'autres termes, Hobbes se construit de petits personnages bien pratiques qui ne demandent qu'une chose, l'institution d'un Etat souverain omnipotent. - Jasay reprend la remarque de Strauss à propos de Hobbes : l'auteur de Léviathan est l'inventeur de l'hédonisme politique. En faisant de la conservation des individus la fin dernière de l'Etat plutôt que la liberté, Hobbes trace le sentier de tout un tradition du libéralisme qui assignera à l'Etat le rôle d'assouvir les désirs de sécurité de ses citoyens. Au 19e siècle, cela prendra la forme chez les utilitaristes de la légitimation de l'Etat providence. Cela me mène à une autre remarque de Jasay sur la faiblesse théorique du capitalisme, qui peut répondre à une partie de vos interrogations sur le triomphe du socialisme et la faiblesse du libéralisme. Pour le philosophe, la tradition théorique libérale souffre d'un handicap, depuis Locke jusqu'à Mill en passant par Hume : tous conditionnent la propriété à autre chose (l'utilité sociale, le bonheur général, l'égal accès de tous à ladite propriété, etc), ce qui revient à donner à ses adversaires des raisons pour en contester le plein développement.
José Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Tiens, tiens, une "guerre civile" en Angleterre ? Outre-manche n'est ce pas ce que l'on nomme une "révolution" ? Ainsi donc les Anglais auraient fait l'expérience de la violence révolutionnaire ? Et cette violence provoquerait un renoncement de la liberté au profit de la sécurité. Cela fait curieusement penser à la Révolution française s'achevant par le Consulat. Ton parallèle n'est pas exact. Certes, les Anglais ont connu la guerre civile. Et ils en sortirent finalement avec la restauration monarchique. La Glorieuse révolution de 1689 n'est pas la conclusion de la guerre civile qui ravagea l'Angleterre sous Charles Ier et Cromwell, mais bien une nouvelle réaction contre l'absolutisme monarchique qui essayait de revenir par la porte arrière.
José Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 …répondre à Sauceur… Excellent ! Cependant pour ce qui est de l'état de nature hobbésien, malgrès qu'il soit "cliché", je le trouve beaucoup plus réaliste que celui de Rousseau, et il serait insultant de dire qu'il sont aussi creux l'un que l'autre! Je ne vois pas en quoi la vision d'une Humanité où chacun serait l'ennemi de tous est plus réaliste que celle de Rousseau où l'homme serait bon par nature. L'anthropologie de Hobbes n'a absolument rien à voir avec la réalité humaine. De tous temps, les hommes ont vécu en vivant les uns avec les autres, en collaborant, en s'aidant mutuellement, comme le font les primates actuellement et comme le faisaient nos lointains ancêtres.
Samahell Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Pour répondre à Sauceur : Si Hobbes est en filiation avec le libertarianisme, j'aimerai savoir ou se trouve alors le point de rupture entre les deux pensées, parcequ'il semble évident qu'il y'en ai un.Peut être qu'une conception Lockéenne du contrat ( que je ne connais que peu ) correspond un peu mieux à une idée libéral? Un peu mieux, mais au final ce qui reste surtout de Locke chez les libéraux actuels, c'est plus sa défense des droits naturels (et notamment sa justification de la propriété avec l'appropriation par le travail) que son contrat social. L'originalité de ce contrat, par rapport à celui de Rousseau et (apparemment) celui de Hobbes, c'est que l'individu ne renonce pas à ses droits (et notamment au droit de propriété, l'ensemble étant désigné comme les propriétés de l'individu) en rejoignant la société civile, mais qu'au contraire il la rejoint sous la condition exclusive de protection de ces droits. On retrouve donc un paquet des cheveux de batailles du libéralisme classique : séparation des pouvoirs, démocratie, propriété, l'idée que le pouvoir ne doit pas sortir de ses attributions qui sont exclusivement la sauvegarde des propriétés des citoyens… Mais il n'est clairement pas libertarien : il accepte l'impôt, justifie la tyrannie de la majorité par l'analogie à un corps où toutes les parties doivent aller dans le sens du plus grand nombre… Grosso modo, d'un point de vue libertarien, il se contredit. Je trouve aussi qu'une autre faiblesse de Locke vient de ce qu'il justifie le lien des individus avec la terre (appropriation par le travail), le lien des individus entre eux (société civile par contrat social tacite), avec les différents pouvoirs souverains (assemblée législative pour faire les lois, pouvoir exécutif pour les faire exécuter, pouvoir fédératif pour défendre la société face à l'extérieur), mais qu'il semble établir un lien entre la société civile (la nation) et la terre qu'il ne justifie pas du tout. Un homme peut voter avec ses pieds, mais pas, sans se départir de sa terre, se déclarer citoyen d'un autre état. D'ailleurs, bien que je n'aie pas cherché outre mesure, je ne suis jamais tombé sur une justification normative (libérale ou pas) de ce droit de la nation sur la terre, de cette justification des frontières. (Quelqu'un en a une à m'indiquer ?) C'est en vertu de cette nature rationnelle qu'il décrit le passage à l'état de civilisation ou de pacification, par un contrat avec le souverain. Juste pour ma culture, n'ayant pas (encore) lu Hobbes, le contrat est-il passé directement par l'individu avec le souverain, ou faut-il, comme pour Rousseau, un acte préalable entre les individus qui fassent du peuple un peuple avant que celui-ci se désigne un souverain ?
F. mas Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Le contrat se fait entre les individus pour instituer le souverain : il est l'objet du contrat, il est donc en dehors des parties au contrat. C'est d'ailleurs pour cette raison que les parties ne peuvent choisir de s'en défaire pour non accomplissement des tâches qui lui sont demandées. Chez Locke, deux contrats l'un entre les sujets entre eux, l'autre avec le souverain (tenu comme tu le dis de protéger la faculté d'acquisition des individus). Hobbes n'est pas libertarien au sens d'élimination totale de l'Etat, mais il est clairement l'un des fondateurs de l'économie libérale, tant il fonde le lien social sur l'échange et le contrat (plutôt que sur la production et la propriété par exemple). Disons que les néohobbésiens sont plutôt minarchistes (ce qu'on peut voir comme une variété de libertarisme).
Saucer Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Pour répondre à Sauceur 'tchulé ! Je sauce rien du tout ! Si Hobbes est en filiation avec le libertarianisme, j'aimerai savoir ou se trouve alors le point de rupture entre les deux pensées, parcequ'il semble évident qu'il y'en ai un. On ne parle pas de forme de gouvernement ou de système politique qui sont bien sûr différents entre le libertarianisme et la doctrine du Léviathan. C'est, comme le rappelle F.Mas, dans l'essence des rapports et des échanges que s'opère la filiation. Enfin, je sais pas si je peux encore ajouter quelquechose tant tout a été dit en si peu de posts.
pierreyves Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 Dkhay a raison, Hobbes commence par une analyse anthropologique qui pose comme axiomes la plupart des principes libéraux modernes. Surtout par son interprétation individualiste du droit naturel, qu'il définit à partir de la propriété de soi et de la légitime défense, les autres droits étant déduits de façon logique et apriori. Au point que Léo Strauss et d'autres spécialistes le considèrent comme le véritable fondateur du libéralisme. Il n'attribue pas à l'homme une nature violente, mais une nature rationnelle c'est-à-dire capable d'anticiper les conséquences de ses actions en partant des causes, qui le distingue des autres animaux par son rapport particulier au futur. Cette capacité de se projeter dans l'avenir lui permet aussi de prévoir les dangers éventuels et de s'en prémunir par la dissuasion. Les actions humaines se divisent en comportements logiques et passionnels. Selon Hobbes, la passion la plus universelle est la peur de la mort violente, puisque chaque individu vise son auto-conservation. Or les hommes sont non seulement égaux en droits, mais aussi assez égaux en force et en intelligence, ou du moins les différences naturelles peuvent être compensées par la possiblité de se coaliser en bandes ou de surprendre les forts par la ruse. La violence n'est pas un point de départ mais une conséquence de la généralisation de la légitime défense, qui pousse les propriétaires à s'armer pour dissuader d'éventuels agresseurs ou criminels de s'emparer de leur propriété, ce qui engendre une situation de défiance réciproque. Si bien qu'il appelle guerre de chacun contre chacun cette condition de défiance générale où les propriétaires, en l'absence de police régalienne, sont poussés vers une course aux armements. Au contraire il part du libre-arbitre comme dimension fondamentale de l'homme à l'état de nature. Il est d'ailleurs le premier philosophe à donner une définition purement négative de la liberté (absence d'entraves à la liberté de mouvement). C'est en vertu de cette nature rationnelle qu'il décrit le passage à l'état de civilisation ou de pacification, par un contrat avec le souverain. C'est ce libre-arbitre qui conduit à concevoir la République à partir de la Loi naturelle, comme un processus institutionnel de nécessaire pacification par un monopole de la justice. L'absolutisme du souverain n'est pas justifié par la soumission, mais par la servitude volontaire des citoyens, qui renoncent à l'exercice inconditionnel de leurs droits naturels pour gagner la paix civile. Hobbes, qui fut très marqué par l'expérience de la guerre civile anglaise, ne redoutait rien de plus que la violence, et le Leviathan montre au contraire que les individus sont essentiellement motivés par le renoncement à la violence, au point qu'ils sont prêts à échanger leur liberté contre la sécurité. Tout ce que tu dis montre que tu n'as pas la même définition de violence et de libre-arbitre que moi. Une petite série d'incompréhension: . la légitime défense n'est pas de la violence . la passion -dans le sens que tu utilises- est opposée au libre-arbitre . le contrat de "servitude volontaire" va à l'encontre d'une application correcte de la raison . renoncer à la liberté contre de la sécurité -cela a été mainte fois expliqué- n'est ni rationnel, ni une attitude faisant usage du libre-arbitre … etc. Je ne dis pas tant cela pour entrer en débat (nos compréhensions personnelles du libre-arbitre, de la violence - et de la raison - ne sont pas au coeur du sujet) que pour confirmer à Dkhay ce que je voulais dire: Hobbes n'a rien compris à la nature humaine et n'est en aucune sorte un précurseur du libéralisme. Presque à la même époque, John Locke voyait pratiquement tout juste. Je ne vois pas en quoi la vision d'une Humanité où chacun serait l'ennemi de tous est plus réaliste que celle de Rousseau où l'homme serait bon par nature.L'anthropologie de Hobbes n'a absolument rien à voir avec la réalité humaine. De tous temps, les hommes ont vécu en vivant les uns avec les autres, en collaborant, en s'aidant mutuellement, comme le font les primates actuellement et comme le faisaient nos lointains ancêtres. (pour une fois qu'on est d'accord ) (au passage Aristote avait déjà reconnu la nature individuelle est égoïste de l'homme… de ce point de vue là Hobbes n'invente rien, et régresse sur bien d'autres plans)
José Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 …pour une fois qu'on est d'accord… C'est le problème des forums du genre de Liborg : on est d'accord sur 95% des points et on se fritte la gueule sur les 5% restant.
pierreyves Posted February 14, 2010 Report Posted February 14, 2010 C'est le problème des forums du genre de Liborg : on est d'accord sur 95% des points et on se fritte la gueule sur les 5% restant. Oui. Avec vincponcet on s'est rendu compte de ça (on échange très souvent sur skype). On s'est plus ou moins mis d'accord sur une méthode: discuter du sujet - présenter notre opinion sur cette "tierce chose" - et tenter de comprendre le point de vue de l'autre plutôt qu'essayer de convaincre.
Guest Posted February 15, 2010 Report Posted February 15, 2010 C'est le problème des forums du genre de Liborg : on est d'accord sur 95% des points et on se fritte la gueule sur les 5% restant. Faut bien se fritter quelque part sinon l'intérêt d'un forum est vite à la poubelle si on était tous d'accord sur 100% des points. Une petite rixe minarchiste vs anarcap ? Qu'en pense le ketchup Saucer ? Ou parlons avortement/découpage d'enfants en rondelle (rayez la mention) !!
Saucer Posted February 16, 2010 Report Posted February 16, 2010 Faut bien se fritter quelque part sinon l'intérêt d'un forum est vite à la poubelle si on était tous d'accord sur 100% des points. Une petite rixe minarchiste vs anarcap ? Qu'en pense le ketchup Saucer ? Il faut se résoudre à ne pouvoir convaincre personne. Avoir le dernier mot ou dominer l'adversaire n'apporte jamais rien. Dès lors, l'important est de saper le moral de l'adversaire et induire le questionnement existentiel, qui se résoudra soit par le déni (mais la blessure restera), soit par le suicide, soit par l'acceptation.
pierreyves Posted February 16, 2010 Report Posted February 16, 2010 Il faut se résoudre à ne pouvoir convaincre personne. Avoir le dernier mot ou dominer l'adversaire n'apporte jamais rien.Dès lors, l'important est de saper le moral de l'adversaire et induire le questionnement existentiel, qui se résoudra soit par le déni (mais la blessure restera), soit par le suicide, soit par l'acceptation. On croirait entendre un guerrier sanguinaire …
Guest Posted February 16, 2010 Report Posted February 16, 2010 Il faut se résoudre à ne pouvoir convaincre personne. Avoir le dernier mot ou dominer l'adversaire n'apporte jamais rien.Dès lors, l'important est de saper le moral de l'adversaire et induire le questionnement existentiel, qui se résoudra soit par le déni (mais la blessure restera), soit par le suicide, soit par l'acceptation. J'adore. Elle vont finir dans mes citations celles ci.
F. mas Posted February 16, 2010 Report Posted February 16, 2010 On peut aussi se dire que la discussion n'est pas un pur rapport de forces, une batailles de mots pour le prestige. Mais il faut dans ce cas accepter la possibilité de se laisser convaincre par le raisonnement de son interlocuteur. C'est là différence entre éristique et dialectique après tout.
Saucer Posted February 16, 2010 Report Posted February 16, 2010 On croirait entendre un guerrier sanguinaire … Pourquoi on croirait ? On peut aussi se dire que la discussion n'est pas un pur rapport de forces, une batailles de mots pour le prestige. Mais il faut dans ce cas accepter la possibilité de se laisser convaincre par le raisonnement de son interlocuteur. C'est là différence entre éristique et dialectique après tout. Tss… Tapette.
Guest Posted February 17, 2010 Report Posted February 17, 2010 On peut aussi se dire que la discussion n'est pas un pur rapport de forces, une batailles de mots pour le prestige. Mais il faut dans ce cas accepter la possibilité de se laisser convaincre par le raisonnement de son interlocuteur. C'est là différence entre éristique et dialectique après tout. No way !
Guest jabial Posted February 17, 2010 Report Posted February 17, 2010 Une petite rixe minarchiste vs anarcap ? Le point de friction est beaucoup plus classiques vs libertariens (minarchistes+anarcaps) que minarchistes vs anarcaps. Quand on va jusqu'au fond ds choses, un vrai minarchiste, c'est presque pareil qu'un anarcap. Je préfère un minarchiste qui considère que son État minimal doit appliquer le système axiomatico-déductif fondé sur la liberté, la propriété et le principe de non-agression, à un anarcap qui pense qu'un juge peut légitimement punir la non-assistance à personne en danger. Ou parlons avortement/découpage d'enfants en rondelle (rayez la mention) !! Le problème de l'avortement c'est deux choses : savoir ce qui fonde la qualité de personne, et ce qui fondé une dette/un "devoir"/une créance. Donc la question est double : l'embryon/le fœtus est-il une personne (pour moi, non) et le fait d'être né crée-t-il une créance sur ses parents (pour moi, encore non). Je dis encore que même le nouveau-né n'est considéré comme une personne que par application du principe de prudence, qui veut que dans le doute on le considère comme une être rationnel. Ce qui est clair, c'est que l'apparition de la pensée rationnelle ne précède pas la naissance.
pierreyves Posted February 17, 2010 Report Posted February 17, 2010 On peut aussi se dire que la discussion n'est pas un pur rapport de forces, une batailles de mots pour le prestige. Mais il faut dans ce cas accepter la possibilité de se laisser convaincre par le raisonnement de son interlocuteur. C'est là différence entre éristique et dialectique après tout. Pourquoi on croirait ? Parce qu'à mon avis considérer son interlocuteur comme un ennemi a priori n'est pas une attitude libérale.
Johnnieboy Posted February 17, 2010 Report Posted February 17, 2010 Le point de friction est beaucoup plus classiques vs libertariens (minarchistes+anarcaps) que minarchistes vs anarcaps. Quand on va jusqu'au fond ds choses, un vrai minarchiste, c'est presque pareil qu'un anarcap. Je préfère un minarchiste qui considère que son État minimal doit appliquer le système axiomatico-déductif fondé sur la liberté, la propriété et le principe de non-agression, à un anarcap qui pense qu'un juge peut légitimement punir la non-assistance à personne en danger. J'aimerais que tu t'expliques un peu plus à ce propos. Pour ma part, on ne devrait pas être forcé d'empêcher quelqu'un de se suicider, tout comme une personne dont le suicide a été empêchée ne devrait pas avoir le droit de porter plainte contre la personne qui l'a "sauvée". Si elle est est pas contente, elle le refait son suicide et elle fait pas chier la justice. Par contre, laisser quelqu'un se noyer alors qu'on est soi-même un excellent nageur, je considère cela comme une infraction.
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