Calembredaine Posté 2 novembre 2017 Signaler Posté 2 novembre 2017 Citation Un salarié se blesse en dansant en discothèque pendant une mission en Chine : présomption d’accident du travail ou pas ? L’accident survenant durant tout le temps d’une mission accomplie pour l’employeur, que ce soit à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de la vie courante, est présumé être un accident du travail, à moins que l’employeur ou la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) n’apporte la preuve que le salarié a interrompu sa mission pour un motif « purement personnel » (cass. soc. 19 juillet 2001, n° 99-20603, BC V n° 285 ; cass. soc. 19 juillet 2001, n° 99-21536, BC V n° 285 ; cass. civ., 2e ch., 12 mai 2003, n° 01-20968, BC II n° 142). Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 12 octobre 2017 (arrêt publié en FPB), un salarié en mission en Chine s’était blessé à la main après avoir glissé en dansant dans une discothèque. L’employeur avait transmis sa déclaration d’accident du travail à la CPAM, en l’accompagnant toutefois de réserves. Après enquête, la caisse avait décidé de prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle (c. séc. soc. art. L. 411-1), ce qu’a contesté l’employeur. Il soutenait que le fait que l’accident soit survenu à 3 h du matin dans une discothèque suffisait à démontrer que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel. Mais ce n’était pas le bon angle d’attaque, vu la jurisprudence de la Cour de cassation qui considère que le seul argument des horaires de travail est insuffisant (cass. soc. 19 juillet 2001, n° 99-20603, BC V n° 285). Assez logiquement (du moins d’un point de vue juridique), la cour d’appel a donc estimé que si la présence du salarié dans une discothèque et l’action de danser n’est pas un acte professionnel en tant que tel vu sa profession, il n’en reste pas moins qu’il incombe à l’employeur de démontrer qu’il se trouvait dans cet établissement pour un motif personnel. Or, la seule présence dans une discothèque ne pouvait suffire, selon la Cour, à démontrer qu’il n’existe aucun lien entre celle-ci et l’activité professionnelle du salarié. Pour les juges du fond, la présence du salarié en ce lieu aurait en effet pu avoir pour but, par exemple, d’accompagner des clients ou collaborateurs, ou de répondre à une invitation dans le cadre de sa mission. La Cour de cassation approuve ce raisonnement. Selon elle, de tous les éléments soumis à son pouvoir souverain d’appréciation, la cour d’appel en a exactement déduit que l’employeur ne rapportait pas la preuve que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel lors de la survenance de l‘accident litigieux. L’accident bénéficiait donc de la présomption d’imputabilité au travail. Et comme l’employeur n’a pas pu apporter la preuve contraire, il devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle… On notera que dans l’affaire, si l’employeur avait bien indiqué dans ses réserves que le salarié s’était rendu en discothèque « de sa propre initiative », rien ne corroborait son affirmation (ni le salarié, ni le témoin mentionné sur la déclaration d’accident, ni les personnes susceptibles de donner des informations à ce sujet). Cass. civ., 2e ch., 12 octobre 2017, n° 16-22481 FPB J'hallucine en lisant cela. Certes le salarié pouvait être sorti avec des clients et continuer ainsi de "bosser" mais je me demande comment l'employeur peut apporter la preuve du contraire.
Marlenus Posté 2 novembre 2017 Signaler Posté 2 novembre 2017 12 minutes ago, Rocou said: J'hallucine en lisant cela. Certes le salarié pouvait être sorti avec des clients et continuer ainsi de "bosser" mais je me demande comment l'employeur peut apporter la preuve du contraire. Cela ne doit pas être si dur d'expliquer qu'il n'y avait pas dans sa feuille de route pour sa mission en Chine: "Sortir à 3h du matin en discothèque".
Flashy Posté 2 novembre 2017 Signaler Posté 2 novembre 2017 Quand t'es en mission, t'es nécessairement sur le lieu de travail/le temps de travail. La présomption d'accident du travail s'applique de ce fait. La joie des présomptions, un mécanisme juridique délicat à manier qui peut aboutir à des incongruités. Quand je pense que certains veulent des présomptions de viol, cela me fait frémir. 1
Alchimi Posté 2 novembre 2017 Signaler Posté 2 novembre 2017 Vu ce qui j’entends à droite à gauche à propos de la culture chinoise des relations de travail, peut être que le mec avait justement tout intérêt à réussir un parfait Freestyle Penguin Boogaloo devant ses futurs clients chinois... 3
jubal Posté 3 novembre 2017 Signaler Posté 3 novembre 2017 Si il y a présomption d'accident de travail et que l'employeur n'a pas apporte de preuve du contraire, il me semble que les juges ont fait leur boulot. C'est plutôt l'avocat de la boite qui a pas fait le sien qui était d'apporter un dossier avec des preuves (ce qui devait pas être difficile).
Antoninov Posté 3 novembre 2017 Signaler Posté 3 novembre 2017 14 minutes ago, jubal said: Si il y a présomption d'accident de travail et que l'employeur n'a pas apporte de preuve du contraire, il me semble que les juges ont fait leur boulot. C'est plutôt l'avocat de la boite qui a pas fait le sien qui était d'apporter un dossier avec des preuves (ce qui devait pas être difficile). Bah si c'était apres un diner d'affaire, si tous les collègues etaient encore là... Si la note est payée par la boite comme frais de représentation.. Alors ce n'est sans doute pas si facile de prouver qu'il y était pour raison personnelle.
Flashy Posté 3 novembre 2017 Signaler Posté 3 novembre 2017 il y a 1 minute, Antoninov a dit : Bah si c'était apres un diner d'affaire, si tous les collègues etaient encore là... Si la note est payée par la boite comme frais de représentation.. Alors ce n'est sans doute pas si facile de prouver qu'il y était pour raison personnelle. Voilà. Avant, à une époque maintenant lointaine, c'était au salarié de prouver le lien avec le travail en cas d'accident pendant une mission. La raison du revirement de jurisprudence est très prosaïque : cela avait quelque peu scandalisé, à l'époque, que ce soit aux veuves (car l'accident en question peut être mortel) de démontrer ce que faisait exactement leur époux au moment de leur décès. Avec des situations parfois très glauques. Enfin, c'est ce que raconte la légende.
jubal Posté 3 novembre 2017 Signaler Posté 3 novembre 2017 4 minutes ago, Antoninov said: Alors ce n'est sans doute pas si facile de prouver qu'il y était pour raison personnelle. Sa feuille de mission, son job title, un témoignage, ou tout simplement une lettre ou il écrit que c’était pour raison personnelle. Mais sinon oui c'est bizarre qu'il y ait cette présomption d'accident de travail, je disais juste que les juges semblaient avoir fait leur boulot.
Antoninov Posté 3 novembre 2017 Signaler Posté 3 novembre 2017 Peut-être que la boite pourrait se retourner contre le salarié au prétexte qu'il a été imprudent, etc mais bon glisser sur une piste de danse peut arriver...
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